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04/05/2023 | FRANCE | N°22/06247

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 04 mai 2023, 22/06247


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78I



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 MAI 2023



N° RG 22/06247 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VOX3



AFFAIRE :



CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 6] CATHEDRALE



C/



S.A.R.L. GF CAPITAL FINANCE ET STRATEGIES



S.C.I. [D]



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Septembre 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG

: 21/01486



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.05.2023

à :



Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Pascal LANGLET de la SELARL CABINET LANGLET ET ASSO...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78I

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 MAI 2023

N° RG 22/06247 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VOX3

AFFAIRE :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 6] CATHEDRALE

C/

S.A.R.L. GF CAPITAL FINANCE ET STRATEGIES

S.C.I. [D]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Septembre 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG : 21/01486

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.05.2023

à :

Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Pascal LANGLET de la SELARL CABINET LANGLET ET ASSOCIES, avocat au barreau de VAL D'OISE

Me Ophélia FONTAINE, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 6] CATHEDRALE

Association coopérative à responsabilité limitée auprès du Tribunal d'instance de Strasbourg, sous le n°VII/002

[Adresse 2]

[Localité 6]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20220767 - Représentant : Me Serge PAULUS de la SELARL ORION AVOCATS & CONSEILS, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 44, substitué par Me Marion de RAVEL, avocat au barreau de STRASBOURG

APPELANTE

****************

S.A.R.L. GF CAPITAL FINANCE ET STRATEGIES

N° Siret : 504 351 206 (RCS Strasbourg)

[Adresse 1]

[Localité 7]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Pascal LANGLET de la SELARL CABINET LANGLET ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 54 - Représentant : Me Philippe-Didier DIETRICH de la SELARL DIETRICH & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 30

S.C.I. [D]

N° Siret : 849 230 974 (RCS Pontoise)

[Adresse 5]

[Localité 8]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Anthony BEM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2584 - Représentant : Me Ophélia FONTAINE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 672 - N° du dossier 2022.526

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne PAGES, Président entendu en son rapport et Madame Florence MICHON, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCI [D] a été constituée par Mme [D] [G] et M [I] [G].

Par l'intermédiaire de la SARL GF Capital Finance et Stratégies en sa qualité d'apporteur d'affaires, par acte notarié reçu par Me [B] [U], notaire à [Localité 6], en date du 23 avril 2019, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg consentait à la SCI [D] un prêt immobilier de 420.000 euros, remboursable au taux de 1,61% en 245 mensualités de 2.010,64 euros, garanti par un privilège de prêteur de deniers, une hypothèque conventionnelle sur le bien financé ainsi que les cautionnements solidaires de M et Mme [G] à hauteur de 180.000 euros.

Ce prêt était destiné à l'acquisition d'un bien immobilier situé au [Adresse 5].

En 2020, la SCI SCI [D] sollicitait à nouveau la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg en vue de l'obtention d'un second prêt de 410.000 euros pour l'achat d'un bien immobilier à Clermont Ferrant.

Faisant valoir que la SCI [D] avait fourni de faux documents et des informations inexactes à l'occasion de cette seconde demande de financement, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg prononçait la déchéance du terme du prêt du 23 avril 2019 par lettre recommandée en date du 12 janvier 2021, visant l'article 18 du contrat de prêt et l'article L313-12 alinéa 2 du code monétaire et financier.

La mise en demeure en date du 2 février 2021 étant restée infructueuse, par acte d'huissier en date du 22 février 2021, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg a fait signifier à la SCI [D] un acte intitulé 'commandement de payer' la somme totale de 385.919,94 euros en principal et frais de procédure, en vertu de l'acte notarié exécutoire susvisé du 23 janvier 2019 contenant le prêt immobilier consenti par elle.

Par exploit d'huissier du 19 mars 2021, la SCI [D] a fait citer devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg aux fins de contester le commandement ainsi délivré.

Par assignation du 5 janvier 2022, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg a appelé en intervention forcée la SARL GF Capital Finance et Stratégies pour :

concourir au débouté de la SCI [D] dans la procédure introduite contre la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg

en tout état de cause, déclarer commun à cette défenderesse le jugement à intervenir dans la procédure qui l'oppose à la SCI [D]

si le juge de l'exécution venait à écarter toute responsabilité de la SCI [D] et déclarait la déchéance du terme infondée au motif que la SARL GF Capit Al Finance et Stratégies est l'auteur de l'attestation litigieuse

réserver les droits de la CCM à saisir le juge compétent pour rechercher la responsabilité de la société requise

en tout état de cause, condamner les succombants, après jonction, à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens.

Le jugement contradictoire du juge de l'exécution de Pontoise en date du 30 septembre 2022 a :

Rejeté l'exception d'incompétence et dit que le juge de l'exécution est compétent pour connaître de l'action en contestation du commandement de payer aux fins de saisie vente délivré à la SCI Andrea le 22 février 2021

Dit que la déchéance du terme du prêt octroyé le 23 avril 2019 par la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg à la SCI [D] a été irrégulièrement prononcée et que la créance du solde du prêt n'était pas exigible

Déclaré nul et de nul effet le commandement de payer aux fins de saisie vente délivré le 22 février 2021 par la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg à la SCI [D]

Déclaré irrecevables les demandes en restitution de la somme de 28.127,90 euros et en réintégration dans le prêt dont s'agit

Déclaré irrecevables les demandes de dommages-intérêts en réparation de divers préjudices économiques

Rejeté la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral

Rejeté le surplus des demandes des parties

Condamné la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg aux dépens

Condamné la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 1.000 euros à la SARL Gf Capital Finance Stratégies et 1.500 euros à la SCI [D]

Rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit.

La Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 13 octobre 2022.

Dans ses dernières conclusions n°2 transmises le 22 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg, appelante, demande à la cour de :

Infirmer ou réformer le jugement du 30 septembre 2022 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise en ce qu'il :

Rejette l'exception d'incompétence et dit que le juge de l'exécution est compétent pour connaître de l'action en contestation du commandement de payer aux fins de saisie vente délivré à la SCI [D] le 22 février 2021 ;

Dit que la déchéance du terme du prêt octroyé le 23 avril 2019 par la Caisse de Crédit Mutuel [Localité 6] Gutenberg à la SCI [D] a été irrégulièrement prononcée et que la créance du solde du prêt n'était pas exigible

Déclare nul et de nul effet le commandement de payer aux fins de saisie vente délivré le 22 février 2021 par la Caisse de Crédit Mutuel [Localité 6] Gutenberg à la SCI [D]

Rejette le surplus des demandes des parties

Condamne la Caisse de Crédit Mutuel [Localité 6] Gutenberg aux dépens

Condamne la Caisse de Crédit Mutuel [Localité 6] Gutenberg à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 1000 euros à la SARL Gf Capital Finance Stratégies et 1500 euros à la SCI [D]

Rappelle que la présente décision est exécutoire de plein droit

Statuant à nouveau,

In limine litis,

se déclarer incompétent

Renvoyer l'affaire devant la juridiction compétente, à savoir la chambre civile du tribunal judiciaire de Strasbourg

Sur le fond,

Juger que la déchéance du terme du prêt souscrit par la SCI [D], reçu par acte notarié le 23 avril 2019, était bien fondée et valable

En conséquence,

Débouter la SCI [D] de sa demande tendant à juger que la déchéance du prêt reçu par acte notarié du 23 avril 2019 a été prononcée de manière abusive

Débouter la SCI [D] de sa demande tendant à juger que le commandement de payer signifié le 22 février 2021 est contraire au principe de la présomption d'innocence

Débouter en conséquence la SCI [D] de sa demande tendant à juger que le commandement de payer signifié le 22 février 2021 lui est inopposable

A titre subsidiaire, si par extraordinaire le juge de l'exécution venait à écarter toute responsabilité de la SCI [D] et déclarait la déchéance du terme infondée, au motif que la société GF Capital Finance et Stratégies est l'auteur de l'attestation litigieuse

Réserver les droits de la CCM à saisir le juge compétent pour rechercher la responsabilité de la requise,

En tout état de cause,

Débouter la SCI [D] de ses demandes tendant à voir la CCM condamnée à lui verser des dommages et intérêts

Débouter la SCI [D] et la société GF Capital & Stratégies de leur demande de condamnation au titre des frais irrépétibles et de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouter la SCI Andrea et la société GF Capital & Stratégies de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions

Condamner la SCI [D] et la société GF Capital & Stratégies à payer à la CCM [Localité 6] Europe une somme de 6. 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamner la SCI [D] et la société GF Capital & Stratégies aux entiers dépens de l'instance dont le recouvrement sera effectué, pour ceux la concernant, par la SELARL JRF & associés, représentée par Me Oriane Dontot, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions transmises le 25 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SCI [D], intimée, demande à la cour de :

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

A titre liminaire,

Jugé irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par le Crédit Mutuel

Jugé que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise est compétent pour connaître du présent litige

A titre principal,

Jugé que le Crédit Mutuel a irrégulièrement prononcé la déchéance du prêt accordé à la SCI

[D] le [Date naissance 4] 2019

Jugé que le Crédit Mutuel a brutalement et abusivement rompu la relation bancaire qu'il entretenait avec la SCI [D]

En conséquence,

Jugé nul et de nul effet, et par conséquent inopposable à la SCI [D] le commandement de payer du 22 février 2021

En y ajoutant ,

Juger illégale la compensation que le Crédit Mutuel a effectué en prélevant le solde créditeur du compte n°[XXXXXXXXXX03] de la SCI [D]

En conséquence,

Ordonner la restitution de la somme de 28.127,90 euros au profit de la SCI [D], avec intérêts au taux légal, à compter du 11 janvier 2021

Ordonner la réintégration de la SCI [D] dans les termes du contrat de prêt consenti le 23 avril 2019

Condamner le Crédit Mutuel à verser à la SCI [D] la somme de 30.000 euros au titre de

l'indemnisation des divers préjudices subis décomptés comme suit :

Au titre du préjudice économique du fait de la rupture abusive des pourparlers ainsi que du retrait abusif de l'octroi du crédit dont l'offre a été transmise au notaire le 12 décembre 2020, la somme de 15.000 euros

Au titre du préjudice moral, la somme de 15.000 euros

A titre subsidiaire : Si par extraordinaire la cour de céans n'ordonnait pas la réintégration de la SCI [D] dans les termes du contrat de prêt consenti le 23 avril 2019, il lui est demandé à nouveau de :

Condamner le Crédit Mutuel à verser à la SCI [D] la somme de 100.000 euros au titre de l'indemnisation des divers préjudices subis décomptés comme suit :

Au titre du préjudice économique du fait de la rupture abusive du crédit consenti le 23 avril 2019, la somme de 70.000 euros

Au titre du préjudice économique du fait de la rupture abusive des pourparlers ainsi que du retrait abusif de l'octroi du crédit dont l'offre a été transmise au notaire le 12 décembre 2020, la somme de 15.000 euros

Au titre du préjudice moral, la somme de 15.000 euros

En tout état de cause,

Débouter le Crédit Mutuel de toutes ses demandes, fins et conclusions

Condamner le Crédit Mutuel à verser à la SCI [D] la somme de 10.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance.

Dans ses dernières conclusions transmises le 25 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société GF Capital & Stratégies, intimée, demande à la cour de :

Déclarer l'appel du Crédit Mutuel mal fondé

Débouter le Crédit Mutuel de l'intégralité de ses fins, conclusions et moyens

Confirmer le jugement rendu le 30 septembre 2022 sous le RG 21/1486 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise en toutes ses dispositions

Condamner le Crédit Mutuel à payer à la société GF Capital & Stratégies la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 7 février 2023, fixée à l'audience du 22 mars 2023 et mise en délibéré au 4 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la compétence du juge de l'exécution

Pour retenir sa compétence pour statuer sur la régularité du commandement susvisé, le premier juge a considéré que l'acte du 22 février 2021 était un commandement aux fins de saisie vente dont la contestation de la régularité relevait des attributions du juge de l'exécution.

Aux termes des dispositions de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Au soutien de son appel, le Crédit Mutuel fait valoir qu'à supposer que l'acte du 22 février 2021 soit un commandement de payer aux fins de saisie vente , il ne constitue pas pour autant un acte d'exécution forcée, de telle sorte que la contestation de sa régularité échappe à la compétence du juge de l'exécution.

L'acte d'huissier du 22 février 2021 litigieux intitulé 'commandement de payer', qui à la demande du Crédit Mutuel fait commandement à la SCI [D] de payer la somme de 385.919,94 euros et précise qu' à défaut dans le délai de 8 jours, elle sera contrainte par la saisie vente de ses biens meubles et qu'elle peut dès à présent faire l'objet de toute mesure conservatoire ou voie d'exécution, constitue le commandement de payer préalable à la saisie vente prévu par l'article L 221-1 du code des procédures civiles d'exécution.

Il sera rappelé, que si le commandement de saisie-vente n'est pas un acte d'exécution forcée, il constitue un acte de la procédure d'exécution de saisie-vente puisque la signification d'un commandement aux fins de saisie-vente engage cette procédure d'exécution.

Il s'en déduit que dès sa délivrance, le juge de l'exécution est compétent pour trancher les contestations qui s'élèvent à l'occasion de ce commandement.

Le jugement contesté sera confirmé en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître de l'action en contestation du commandement de payer aux fins de saisie vente délivré à la SCI Andrea le 22 février 2021.

Sur la déchéance du terme prononcée par le Crédit Mutuel par lettre du 12 janvier 2021

Pour retenir l'irrégularité de la déchéance du terme, le premier juge a relevé que le document argué de faux n'a pas fait partie de ceux sur lesquels la banque s'est appuyée ou qui ont été en sa possession au moment de l'octroi du prêt du 23 avril 219 ne permettant dès lors pas à la banque de faire application de l'article 18 de ce contrat de prêt et qu'il n'est pas non plus démontré un comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit au sens de l'article L313-12 al2 du code monétaire et financier.

Au soutien de son appel, le Crédit Mutuel fait valoir que la déchéance du terme du prêt en cause a été valablement prononcée le 12 janvier 2021 tant sur le fondement de l'article L313-12 al2 du code monétaire et financier au motif d'un comportement gravement répréhensible de la SCI [D] résultant de la remise d'un faux document par M [G] lors de la demande d'un second prêt, que sur l'article 18 du contrat de prêt du 23 janvier 2019, cette clause n'étant pas abusive et ses conditions d'application étant remplies au motif de la remise de ce faux document.

Aux termes de l'article L 313-12 al2 du code monétaire et financier, l'établissement de crédit ou la société de financement n'est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l'ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s'avérerait irrémédiablement compromise.

La banque peut en application de ces dispositions rompre ses concours sans préavis dès lors que le comportement gravement répréhensible de l'emprunteur est caractérisé.

Il peut survenir non pas lors de l'octroi du prêt, mais ultérieurement dès lors que le concours est toujours en cours.

Le comportement gravement répréhensible est celui qui est de nature à dégrader la confiance que la banque prêteuse doit avoir à l'égard de l'emprunteur quand bien même le prêt serait régulièrement remboursé aux échéances convenues.

La lettre du 12 janvier 2021 du Crédit Mutuel adressée à la SCI [D] l'informant du prononcé de la déchéance du terme du prêt alloué le 23 avril 2019 sur le fondement de l'article L 313-12 al2 du code monétaire et financier mentionne qu'il est apparu à l'analyse de la demande de financement (de 2020) que certains documents remis afin d'attester de la réalité et du montant des revenus d'une des cautions solidaires se sont avérés être faux.

Dans le cadre de la présente procédure, pour justifier du comportement gravement répréhensible reproché, et du bien fondé de cette résiliation, la banque fait valoir la remise d'une fausse attestation de revenus lors de la demande du second prêt.

L'attestation de revenus de M [G] du 19 octobre 2020 versée aux débats en pièce n° 10 par la banque mentionne, 'je soussigné, [R] [T], expert comptable de la société Jean Claude Armand atteste que la rémunération annuelle de M [G] a été fixée pour l'année 2020-2021 à 45.000 euros dans la société SASU CM Automobile'.

M [R] [T], expert comptable de la société Jean Claude Armand a fait savoir qu'il n'a jamais établi l'attestation de revenus susvisée, que ce document est par conséquent un faux et précise que ni M [G] ni la SCI [D] ne sont clients de sa société d'expertise comptable.

Il est par conséquent démontré que cette attestation de revenus de M [G] est un faux et ce même en l'absence d'une quelconque condamnation pénale.

Les parties s'accordent quant au fait que lors de la constitution du dossier tant lors de la demande de prêt de 2019 que celui de 2020, les documents nécessaires ont été remis à la banque par la société GF Capital.

Il n'en demeure pas moins que les documents remis à la banque par cette dernière en sa qualité d'intermédiaire ont été fournis pour le compte de la SCI [D] emprunteur en vue de l'obtention du prêt, cette dernière étant seule bénéficiaire du concours, et dès lors sous la responsabilité de ses représentants légaux qui devaient en assurer la sincérité.

La fiche patrimoniale remplie par M [G] lors de l'octroi du concours de 2019 en sa qualité de caution solidaire mentionne qu'il perçoit 42.000 euros de revenus annuels ayant une activité dans la vente de véhicules.

L'attestation de revenus de ce dernier susvisée mentionnant des éléments similaires et dont il est démontré qu'elle constitue un faux remet en cause la véracité des informations données par la caution dans cette fiche de renseignements lors de l'octroi du prêt d'avril 2019.

Il sera relevé que dans le cadre de la présente procédure, M [G] pour contester le bien fondé de la résiliation du prêt se contente de préciser qu'il n'a pas, tout comme la SCI [D] remis les documents à la banque tant en vue de l'obtention du premier ou du second prêt ou qu'il n'est pas démontré que cette attestation ait été remise à la banque à l'occasion d'une ou l'autre demande de prêt.

Il n'en demeure pas moins, qu'il résulte de cette fausse attestation , que la véracité des éléments de revenus similaires de M [G] donnés à l'occasion de son engagement de caution solidaire du prêt d'avril 2019 sont remis en cause.

Il sera ajouté que dans le cadre de la présente procédure, M [G] n'offre pas de démontrer la véracité des éléments d'information relatifs à ses revenus tels que mentionnés sur sa fiche de renseignements, en justifiant par exemple de ses revenus à cette date ou de son emploi.

Il est par conséquent établi que la banque a été destinataire lors de la demande du second prêt d'une attestation dont il a été établi que les informations relatives aux revenus de l'une des deux cautions solidaires du prêt accordé en avril 2019 par ailleurs dirigeant de la SCI [D] emprunteur était fausses.

Il s'en déduit que ces fausses informations quand bien même, elles auraient été données en sa qualité de caution et par l'intermédiaire de la GF Capital Finance Stratégies, sont de nature à dégrader la confiance que la banque prêteuse doit avoir à l'égard de l'emprunteur, caractérisant le comportement répréhensible de l'emprunteur au sens de l'article susvisé.

La résiliation du prêt a par conséquent été régulièrement prononcée par le courrier du 12 janvier 2021 sur le fondement de l'article L313-12 al2 du code monétaire et financier au motif d'un comportement gravement répréhensible de la SCI [D] résultant de la remise de la fausse attestation susvisées lors de la demande du second prêt.

Le jugement contesté sera infirmé en ce qu'il a dit que la déchéance du terme du prêt octroyé le 23 avril 2019 par la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg à la SCI [D] a été irrégulièrement prononcée et que la créance du solde du prêt n'était pas exigible.

Sur la régularité du commandement de payer en date du 22 février 2022

En application de l'article L221-1 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier muni d'un titre exécutoire, constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.

Il convient de rappeler que le commandement de payer du 22 février 2022 contesté a été délivré en vertu d'un acte notarié exécutoire en date du 23 avril 2019 contenant un prêt consenti par le Crédit Mutuel, prêt dont la déchéance du terme a été prononcée le 12 janvier 2021par la banque.

Le solde de la totalité du prêt est devenu exigible à cette date de telle sorte que l'exigibilité de la créance visée par le commandement de payer litigieux ne peut être contestée.

La SCI Andrea ne peut par conséquent contester la validité du commandement susvisé au motif du défaut d'exigibilité du prêt en exécution duquel il a été délivré.

Le jugement contesté sera infirmé en ce qu'il a déclaré nul et de nul effet le commandement de payer en date du 22 février 2021.

Sur la demande de restitution de la SCI [D]

Le juge de l'exécution a retenu pour déclarer cette demande irrecevable, que la demande de restitution de la SCI [D] au titre d'une compensation opérée illégalement par la banque en prélevant le solde créditeur de son compte pour se rembourser une partie de sa créance ne relevait pas de son pouvoir au motif que ce prélèvement n'avait pas été effectué à l'occasion du commandement de payer contesté.

Au soutien de la recevabilité de cette demande, la SCI [D] fait valoir que le juge de l'exécution est compétent pour connaître de toutes les demandes formées au titre de l'opposition du commandement de payer.

Comme relevé à juste titre par le juge de l'exécution, il résulte des pièces versées aux débats que le prélèvement contesté de 28.127,90 euros au profit de le banque est antérieur au commandement de payer contesté, ce qui est confirmé par les parties.

Il s'en déduit de cette compensation n'a pas été réalisée à l'occasion d'une exécution forcée et que la contestation de son bien fondé ne peut s'analyser en une difficulté relative à un titre exécutoire ou une contestation qui s'élève à l'occasion de l'exécution forcée au sens de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire préalablement rappelé, de telle sorte que cette demande ne relève pas de la compétence du juge de l'exécution.

Le jugement litigieux sera confirmé en ce qu'il a déclaré cette demande irrecevable.

Sur les demandes d'indemnisation de la SCI [D]

La SCI [D] demande l'indemnisation

du préjudice économique consécutif à la rupture abusive du concours bancaire du 23 avril 2019 et la clôture du compte courant

du préjudice économique subi du fait du retrait abusif du second concours bancaire

du préjudice moral du fait du comportement abusif du Crédit Mutuel.

Le premier juge a retenu que les deux premières demandes d'indemnisation ne relevaient pas de la compétence du juge de l'exécution et les a déclarées irrecevables et a rejeté la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral.

La SCI [D] sollicite à nouveau en cause d'appel l'indemnisation de ces différents préjudices sans démontrer la compétence du juge de l'exécution et la recevabilité de ses demandes.

Il convient de rappeler, que le juge de l'exécution, qui n'a pas le pouvoir de délivrer des titres exécutoires ou de prononcer des condamnations en dehors des cas où la loi l'y autorise expressément, n'a pas celui de trancher les demandes fondées sur la recherche de la responsabilité de la banque liée à un comportement abusif dans le retrait, le refus ou à l'occasion des divers concours bancaires accordés ou projetés, de la compétence du juge du fond.

Le jugement contesté sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les deux premières demandes d'indemnisation.

Le juge de l'exécution qui a seulement le pouvoir d'accorder des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice né d'un abus dans l'exercice des voies d'exécution ou d'un comportement du créancier à l'occasion de la mise en oeuvre des voies d'exécution, n'a pas davantage celui de statuer sur une demande d'indemnisation d'un préjudice moral né du comportement abusif de la banque faisant la production d'un faux document.

Le jugement contesté sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande d'indemnisation du préjudice moral et elle sera également déclarée irrecevable.

Sur les autres demandes

L'équité commande d'allouer la somme de 2.000 euros à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Gutenberg à la charge de la SCI [D] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI [D] et la SARL GF Capital Finance et stratégies seront déboutées de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par décision contradictoire et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement contesté en ce qu'il a :

Rejeté l'exception d'incompétence et dit que le juge de l'exécution est compétent pour connaître de l'action en contestation du commandement de payer aux fins de saisie vente délivré à la SCI Andrea le 22 février 2021,

Déclaré irrecevable la demande de compensation de la SCI [D],

Déclaré irrecevables les demandes d'indemnisation de la SCI [D] au titre du préjudice économique consécutif à la rupture abusive du concours bancaire du 23 avril 2019 et la clôture du compte courant et du préjudice économique subi du fait du retrait abusif du second concours bancaire ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que la déchéance du terme du prêt octroyé le 23 avril 2019 par la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Cathedrale, anciennement Gutenberg à la SCI [D] a été régulièrement prononcée ;

Déboute la SCI [D] de sa demande tendant à déclarer le commandement de payer en date du 22 février 2021 nul er de nul effet ;

Déclare la SCI [D] irrecevable en sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral du fait du comportement abusif du Crédit Mutuel ;

Condamne la SCI [D] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Cathedrale, anciennement Gutenberg la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SCI [D] et la Sarl GF Capital Finance et stratégies des autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI [D] aux entiers dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 22/06247
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;22.06247 ?
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