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21/04/2023 | FRANCE | N°22/00910

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 3e section, 21 avril 2023, 22/00910


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 48C



1re chambre 3e section



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 21 AVRIL 2023



N° RG 22/00910 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VADW



AFFAIRE :



[R] [P]





C/

Etablissement [6] ...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Janvier 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de ST GERMAIN EN LAYE

N° Chambre :

N° Section :

SUREND

N° RG : 11-20-1332



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Toutes les parties







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La c...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 48C

1re chambre 3e section

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 21 AVRIL 2023

N° RG 22/00910 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VADW

AFFAIRE :

[R] [P]

C/

Etablissement [6] ...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Janvier 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de ST GERMAIN EN LAYE

N° Chambre :

N° Section : SUREND

N° RG : 11-20-1332

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Toutes les parties

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [R] [P]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

assistée de Me Josiane OLEOTTO-GUEY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 267, substituant Me Paul BARROUX de la SARL BACLE BARROUX AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de POITIERS, vestiaire : 41 -

APPELANTE - comparante

****************

Etablissement [6]

Commission de surendettement des Particuliers des [Localité 15]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

Société [11]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[12]

[Adresse 14]

[Adresse 14]

CAF DES [Localité 15]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

S.A. [8]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Mathieu CASTERA, plaidant/postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, substituant Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189

Représentant : Me Emmanuel JOLY de la SCP JOLY ' CUTURI ' WOJAS ' REYNET DYNAMIS AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BORDEAUX, vestiaire : 883

S.A. [9] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

ayant pour avocat Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637

Représentant : Me Alexandre LEMERCIER de la SELARL LEMERCIER AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PERIGUEUX, vestiaire : 46

PAIERIE DEPARTEMENTALE [Localité 10], devenue Pôle de recouvrement spécialisé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Monsieur [J] [K], inspecteur (muni d'un pouvoir)

INTIMEES - non comparantes, non représentées

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Mars 2023, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Lorraine DIGOT, conseillère chargée de l'instruction de l'affaire et du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle CHESNOT, présidente,

Madame Lorraine DIGOT, conseillère,

Madame Michèle LAURET, conseillère,

Greffière, faisant fonction : Madame Virginie DE OLIVEIRA,

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 14 février 2019, Mme [P] a saisi la commission de surendettement des particuliers des [Localité 15], ci-après la commission, d'une demande de traitement de sa situation de surendettement, qui a été déclarée recevable le 25 avril 2019.

La commission lui a notifié, ainsi qu'à ses créanciers, sa décision du 5 novembre 2020 d'imposer des mesures consistant en un rééchelonnement du paiement des créances sur une durée de 84 mois, une réduction à 0% du taux des intérêts des créances rééchelonnées et un effacement des soldes restant dus à l'issue des mesures de désendettement, en retenant une capacité mensuelle de remboursement de 519 euros.

Statuant sur le recours du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 10], le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye, par jugement rendu le 4 janvier 2022, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- déclaré le recours recevable,

- débouté le [9] de sa demande tendant à voir déclarer Mme [P] irrecevable au bénéfice de la procédure de surendettement,

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement les créances :

* du pôle de recouvrement spécialité de [Localité 10] à la somme de 112 684 euros,

* du [9] à la somme de 115 150,70 euros,

* de la SA [12] à la somme de 0 euro,

* de la SA [8] à la somme de 193 662,54 euros,

- fixé la capacité de remboursement mensuelle de Mme [P] à la somme maximale de 1230 euros,

- dit que les remboursements s'effectueront conformément au tableau annexé au jugement.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 18 janvier 2022, Mme [P] a interjeté appel de ce jugement, notifié par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 11 janvier 2022.

Après un renvoi, toutes les parties ont été convoquées par le greffe de la cour à l'audience du17 mars 2023, par lettres recommandées avec demandes d'avis de réception postées le 6 février 2023.

* * *

A l'audience devant la cour,

Mme [P] comparaît assistée de son conseil, qui, développant oralement ses conclusions écrites déposées à l'audience et visées par Mme la greffière, demande à la cour de :

- infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté le [9] et fixé diverses créances pour les besoins de la procédure,

- dire le [8] irrecevable en sa demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a imposé un effacement du solde de sa créance,

- débouter le [9], le [8] et le pôle de recouvrement spécialisé de toutes leurs demandes,

- prononcer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au bénéfice de Mme [P],

- dire que ce rétablissement personnel entraîne l'effacement de toutes les dettes professionnelles et non professionnelles à la date de l'arrêt à intervenir,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La cour renvoie à ces conclusions pour le détail des moyens et arguments. En substance, le conseil de l'appelante expose et fait valoir que Mme [P] a épousé M. [S] le 15 mai 2008, que de leur union sont nés quatre enfants, que le temps de cette union, Mme [P] et ses enfants ont subi des violences physiques et psychologiques, qu'elle a réussi à quitter le domicile conjugal en mars 2017, qu'en avril 2017, le juge aux affaires familiales de Versailles a pris une ordonnance de protection interdisant à M. [S] de recevoir ou rencontrer sa famille, que le divorce a été prononcé par jugement du 29 décembre 2020, que depuis qu'elle a quitté le domicile conjugal, Mme [P] est salariée en contrat à durée déterminée (CDD) dans la fonction publique territoriale et arrive au bout du délai légal maximal de 6 ans pour les renouvellements de CDD dans la fonction publique, que son dernier contrat arrive à son terme en septembre 2023, qu'elle saura fin juin 2023 si on lui propose un contrat à durée indéterminée, qu'étant sous l'emprise de son ex-mari, elle avait signé en 2011 une procuration générale qui a permis à M. [S] de faire des montages financiers qui sont à l'origine de l'endettement, que le couple avait fait l'acquisition en avril 2009 d'un immeuble à Condat-sur-Vezere financé par un prêt souscrit auprès de la SA [12] et garanti par un cautionnement de la société [8], qu'entre août 2010 et novembre 2015, les différentes parcelles ont été apportées ou vendues à des SCI dont M. [S] était le gérant, que la SA [12] a prononcé la déchéance du terme après des défauts de paiement et a été remboursée par la société [8] des sommes restant dues, que Mme [P] et M. [S] ont été condamnés à payer à la société [8] en sa qualité de caution la somme de 192 662,54 euros, que toutefois cette dernière a découvert que les biens financés avaient été apportés à trois SCI la privant ainsi de la possibilité de prendre des garanties hypothécaires, ces SCI n'étant pas débitrices, qu'elle a donc engagé une action paulienne, que la société [8] a été déboutée par ordonnance du juge de la mise en état du 10 janvier 2022 en raison de la prescription de son action hormis pour deux parcelles, que cette ordonnance a été confirmée par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 27 octobre 2022, que toutes les SCI dans lesquelles M. [S] a associé ses enfants mineurs ont été placées en liquidation judiciaire, que le premier juge a imposé des mesures provisoires de 24 mois sans effacement contrairement à ce qu'affirme la société [8], que ces mesures simplement provisoires ne permettent pas de traiter la situation de surendettement, que Mme [P] justifie de ressources de 5 583 euros par mois, que ses charges sont de 5 139 euros, que sa capacité mensuelle de remboursement n'excède donc pas 444 euros, que compte tenu de l'importance du passif, le délai de remboursement serait ainsi de 79 ans, qu'elle ne dispose d'aucun élément d'actif cessible, d'aucun patrimoine immobilier, qu'elle n'est donc pas en capacité d'apurer son passif dans les délais légaux, que les deux parcelles pour lesquelles l'action paulienne n'est pas prescrite n'appartiennent pas à Mme [P], que ce sont de petites parcelles non bâties qui n'ont aucune valeur vénale indépendamment du reste de la propriété qui est bâtie, que leur réintégration et leur vente éventuelle ne pourra modifier la situation de Mme [P].

La SA [8] est représentée par son conseil qui, développant oralement ses conclusions écrites déposées à l'audience et visées par Mme la greffière, demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a imposé l'effacement du solde de sa créance, limité la durée des mesures imposées à 24 mois et retenu que la capacité mensuelle de remboursement de Mme [P] est de 1 230 euros,

- fixer la capacité de remboursement de Mme [P] à la somme de 2 206 euros,

- adopter des mesures sur une durée de 84 mois, sans effacement,

- subsidiairement, confirmer le jugement sur la fixation de la capacité de remboursement et adopter des mesures sur une durée de 84 mois, sans effacement,

- en tout état de cause, confirmer le jugement sur la fixation de la créance de la SA [8] à la somme de 193 662,54 euros, débouter Mme [P] de sa demande de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et laisser les dépens à la charge du Trésor public.

La cour renvoie à ces conclusions pour le détail des moyens et arguments. En substance, le conseil de l'intimée expose et fait valoir que les revenus de Mme [P] s'élèvent à la somme totale de 5 664 euros par mois, qu'il lui appartient de faire les démarches nécessaires pour recouvrer l'intégralité de la pension alimentaire due par M. [S], qu'au regard des charges retenues par le premier juge, la capacité de remboursement est donc de 2 206 euros, qu'une procédure est en cours afin de réintégrer au patrimoine de Mme [P] et M. [S] l'immeuble dont ils se sont dessaisis frauduleusement, qu'en cas de succès, Mme [P] sera de nouveau propriétaire d'un patrimoine immobilier, que dans ces conditions, aucun effacement ne saurait être prévu ce compris dans le cadre d'un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, qu'il convient en revanche d'établir des mesures sur la durée maximale légale, que la situation de Mme [P] ne saurait être qualifiée d'irrémédiablement compromise dès lors qu'elle dispose d'une capacité de remboursement.

Le pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 10], représenté par M. [K] muni d'un pouvoir, conclut à la confirmation du jugement dont appel. Il expose et fait valoir qu'en application de l'article L. 711-4 du code de la consommation sont désormais exclues de toute remise, rééchelonnement et effacement les dettes fiscales dont les droits ont été sanctionnés par des majorations non rémissibles mentionnées au II de l'article 1756 du code général des impôts, qu'en l'espèce, les majorations ont été appliquées à des rappels consécutifs à des revenus d'origine indéterminée au titre des impôts sur les revenus 2014 et 2015 et sont non rémissibles, que par ailleurs, il ressort des bulletins de paie produits aux débats que les revenus de Mme [P] sont en moyenne de 4 343 euros par mois, qu'il convient de s'assurer de l'ensemble des prestations servies par la caisse d'allocations familiales (CAF), qu'il y a lieu d'intégrer l'allocation de rentrée scolaire, que les dépenses importantes de santé font probablement l'objet de remboursements même partiels dont il n'est pas fait état, que Mme [P] n'est pas imposable, qu'elle dispose d'une épargne.

La lettre contenant la convocation destinée à la CAF des [Localité 15] a été retournée au greffe de la cour portant la mention 'destinataire inconnu à l'adresse'.

Aucun des autres intimés, régulièrement touchés par les courriers de convocation, ne comparaît ou n'est représenté.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire, il sera observé que la SA [12] et la société [11] ont envoyé des courriers, et le [9] a déposé un dossier de plaidoirie le 17 mars 2023, dont il ne sera pas tenu compte à défaut de comparution ou d'organisation préalable des échanges par la cour, en application des dispositions combinées des articles R. 713-7 du code de la consommation et 946 du code de procédure civile, celles de l'article R. 713-4 du code de la consommation ne concernant que la procédure devant le premier juge.

Les appels principal et incident portent uniquement sur la fixation, par le premier juge, de la capacité de remboursement de la débitrice et, en conséquence, sur les mesures de redressement qu'il a ordonnées de sorte qu'il n'y a lieu de statuer sur le surplus des dispositions du jugement qui conservent leur plein effet (recevabilité du recours, bonne foi de Mme [P], fixation de créances).

Sur la capacité de remboursement et les mesures de redressement

Selon l'article L. 733-13 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation prévue à l'article L. 733-10, prend tout ou partie des mesures définies aux articles L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7.

Il y a lieu de rappeler que pour faire application des dispositions des articles L. 733-1 et L. 733-7 du code de la consommation, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, aux termes des articles R. 731-1 à R. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur. La part des ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2.

Le budget 'vie courante' est donc déterminé selon trois modalités : le montant réel (sur la base de justificatifs) pour le loyer, les impôts, les frais de garde et de scolarité, la mutuelle santé ainsi que les pensions alimentaires versées, le montant réel dans la limite d'un plafond déterminé par chaque commission pour les frais de transport professionnel, et selon un barème forfaitaire en fonction de la composition de la famille pour les dépenses de la vie courante (alimentation, habillement, chauffage, autres dépenses ménagères, assurances).

Ainsi, il incombe au juge de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au jour où il statue.

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats, que Mme [P] dispose de ressources mensuelles réparties comme suit:

- salaire (net fiscal décembre 2022/12) : 3 776,93 €

- prestations CAF (relevé janvier 2023) : 820,68 €

- pension alimentaire : 550 €

Les rémunérations doivent être pondérées pour tenir compte des cotisations CSG/CRDS non déductibles de sorte que leur montant retenu sera de 3 663,62 €.

Il n'y a pas lieu d'intégrer l'allocation de rentrée scolaire qui n'est pas pérenne.

Ainsi, les ressources de Mme [P] s'établissent à la somme totale de 5 034,30 € par mois.

Avec un tel revenu et quatre enfants à charge, c'est une somme maximale de 1 792,63 € qui pourrait être saisie, suivant le barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail, ce qui certes, respecte le montant forfaitaire à laisser à disposition de la débitrice, mais ne tient pas compte d'un certain nombre de charges incompressibles.

La part de ressources de Mme [P] nécessaires aux dépenses de la vie courante doit être établie à la somme mensuelle de 3 802,40 € décomposée comme suit :

- loyer : 767,03 €

- frais de garde : 180 €

- mutuelle : 233,95 €

- frais médicaux non pris en charge : 305 €

- part des frais réels excédant les forfaits habitation et chauffage : 156,92 €

- frais de scolarité adaptée au handicap de [Z] [S] : 153,50 €

Les autres postes de charges forfaitisés selon le barème appliqué par la commission permettent de couvrir les dépenses réelles justifiées de la famille, au prix d'une gestion budgétaire rigoureuse, à savoir':

- forfait habitation : 276 €

- forfait alimentation, hygiène et habillement : 1 452 €

- forfait chauffage : 278 €

Ainsi, sa capacité réelle de remboursement s'établit à la somme mensuelle maximale de 1231,90€ (5034,30 6 3802,40) et a donc été justement appréciée par le premier juge. Il n'y a pas lieu d'infirmer le jugement sur ce point.

Dans ces conditions, il ne peut être fait droit à la demande de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire laquelle impose de constater, aux termes des dispositions de l'article L. 724-1 du code de la consommation, que le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en 'uvre les mesures de traitement prévues par les articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-7 et L. 733-8. L'existence d'une capacité de remboursement au demeurant significative permet de mettre en oeuvre des mesures de rééchelonnement du paiement des créances.

Sur la durée des mesures

Il convient de rappeler que la durée totale du plan d'apurement ne peut excéder une durée de 84 mois en application de l'article L. 733-3 du code de la consommation.

Or, la capacité de remboursement de Mme [P] ne permet pas d'apurer l'intégralité du passif admis à la procédure dans ce délai.

Par ailleurs, les mesures imposées ne peuvent être mises en 'uvre que dans la mesure où, éventuellement combinées avec une mesure d'effacement, elles sont de nature à apurer entièrement le passif du débiteur.

Un plan 'provisoire' tel qu'imposé par le premier juge qui n'a pas prévu de mesure d'effacement à son issue contrairement à ce qui est allégué par la société [8], ne satisfait à ces dispositions légales que s'il est ordonné dans l'attente d'un événement futur et certain dont il doit résulter une augmentation de la capacité de remboursement du débiteur ou de son patrimoine. Il doit ainsi permettre, d'une part, de rembourser partiellement les dettes, et d'autre part, de dégager un capital supplémentaire qui servira à désintéresser en priorité les créanciers bénéficiant des privilèges ou sûretés sur le bien, et par la suite les autres créanciers selon l'ordre prévu par les mesures.

En l'espèce, le succès de l'action paulienne pour les deux seules parcelles pour lesquelles elle n'a pas été déclarée prescrite est incertain tout comme la date de sa survenue et, le cas échéant, les conditions de la vente desdites parcelles ainsi que le prix qui pourra en être obtenu.

Sous le bénéfice de ces observations, il y a lieu, par infirmation du jugement entrepris, d'imposer des mesures sur une durée de 84 mois et d'ordonner l'effacement du solde restant dû à l'issue, faute pour la débitrice de pouvoir s'en acquitter dans le délai maximal légal.

Il sera simplement rappelé qu'à tout moment, la commission peut être saisie aux fins de nouvelles mesures en conséquence d'un changement dans la situation de la débitrice.

Pour en faciliter l'exécution et afin de ne pas aggraver l'endettement de la débitrice, la réduction à 0,00% du taux des intérêts des créances rééchelonnées sera confirmée.

Sur la demande d'exclusion de la créance fiscale

Le pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 10] demande l'exclusion de sa créance des mesures.

Certes l'article L. 711-4 du code de la consommation qui énumère les dettes qui ne peuvent faire l'objet d'une remise, d'un rééchelonnement ou d'un effacement (sauf si un accord est conclu entre le créancier et le débiteur ) a été modifié par l'article 130 de la loi n°2021-1900 du 30 décembre 2021 qui a ajouté aux dettes exclues les dettes fiscales dont les droits dus ont été sanctionnés par les majorations non rémissibles (alinéa 4). Cependant l'article 1er de cette loi dispose expressément qu'elle s'applique à l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2021 et des années suivantes et à compter du 1er janvier 2022 pour les autres dispositions fiscales.

Or, en l'espèce, les majorations ont été appliquées à des rappels consécutifs à des revenus d'origine indéterminée au titre des impôts sur les revenus 2014 et 2015.

En conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande.

Le tableau des mesures imposées par la cour sera annexé au présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Infirme le jugement rendu le 4 janvier 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de Saint-Germain-en-Laye sauf en ce qu'il a déclaré le recours recevable, débouté le [9] de sa demande tendant à voir déclarer Mme [P] irrecevable au bénéfice de la procédure de surendettement, fixé pour les besoins de la procédure de surendettement les créances du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 10], du [9], de la SA [12] et de la SA [8], fixé la capacité de remboursement mensuelle de Mme [P] à la somme maximale de 1230 euros, réduit à 0,00% le taux des intérêts des créances rééchelonnées et/ou reportées ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Rejette la demande de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au bénéfice de Mme [R] [P],

Dit n'y a voir lieu à exclure des mesures imposées la créance du pôle de recouvrement spécialisé de [Localité 10],

Dit que le nouveau plan de mesures imposées accordé à Mme [R] [P] pour une durée de 84 mois sera annexé au présent arrêt,

Prononce, sous réserve de la parfaite exécution du plan jusqu'à son terme, l'effacement partiel des soldes demeurant débiteurs à l'issue,

Dit que les versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement ou le prononcé du jugement déféré, qui n'ont pas déjà été pris en compte dans le présent arrêt, s'imputeront sur le solde restant dû en fin de plan pour les créances donnant lieu à effacement partiel ou sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces règlements en réduisant d'autant la durée de remboursement,

Dit que, sauf meilleur accord, la première mensualité sera payable au plus tard dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, et les suivantes tous les 10 du mois, étant entendu qu'il appartiendra à Mme [R] [P] de prendre contact avec ses créanciers pour mettre en place des mesures de paiement conformes au présent plan au profit de chacun,

Rappelle que les dispositions du présent arrêt se substituent à tous les accords antérieurs qui ont pu être conclus entre Mme [R] [P] et les créanciers et que ces derniers doivent donc impérativement suspendre tous les prélèvements qui auraient été prévus pour des montants supérieurs à ceux fixés par cet arrêt et ne peuvent exiger le paiement d'aucune autre somme,

Rappelle que les cessions des rémunérations et mesures d'exécution, sont suspendues pendant l'exécution du plan, et que les mesures d'exécution déjà engagées doivent être suspendues,

Dit qu'à défaut de paiement d'un seul acompte à son échéance et quinze jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception demeurée infructueuse, Mme [R] [P] sera déchue des délais accordés, l'intégralité des sommes restant dues aux créanciers concernés deviendra exigible et les intérêts et éventuellement les pénalités reprendront leur cours conformément au titre fondant la créance,

Rappelle que pendant l'exécution des mesures de redressement, Mme [R] [P] ne doit pas contracter de nouvelles dettes, sous peine d'être déchue du bénéfice de la présente décision,

Rappelle qu'en cas de survenance d'un événement nouveau dans la situation personnelle et financière de la débitrice, ce compris un retour significatif à meilleure fortune pendant la durée d'exécution des mesures il lui appartient de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers en vue d'un réexamen de sa situation, à peine d'être déchue du bénéfice de la présente décision,

Laisse les dépens à la charge du Trésor public,

Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe à chacune des parties par lettre recommandée avec avis de réception et que copie en sera adressée à la commission de surendettement des particuliers des [Localité 15].

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle CHESNOT, présidente, et par Madame Virginie DE OLIVEIRA, faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière, faisant fonction, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 3e section
Numéro d'arrêt : 22/00910
Date de la décision : 21/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-21;22.00910 ?
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