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20/04/2023 | FRANCE | N°21/05054

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 20 avril 2023, 21/05054


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 30C



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 20 AVRIL 2023



N° RG 21/05054 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UV42





AFFAIRE :



[S] [U] [Y]

...



C/



S.A. SOCIETE GENERALE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Juillet 2021 par la chambre des loyers commerciaux du TJ de VERSAILLES

N° RG : 20/06109



Expéditio

ns exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Chantal DE CARFORT



Me Claire RICARD



TJ VERSAILLES











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30C

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 AVRIL 2023

N° RG 21/05054 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UV42

AFFAIRE :

[S] [U] [Y]

...

C/

S.A. SOCIETE GENERALE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Juillet 2021 par la chambre des loyers commerciaux du TJ de VERSAILLES

N° RG : 20/06109

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Chantal DE CARFORT

Me Claire RICARD

TJ VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [S] [U] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Madame [W] [D] [L] épouse [Y]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentés par Me Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET- ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 et Me Olivier JACQUIN de la SAS JACQUIN MARUANI & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0428

APPELANTS

****************

S.A. SOCIETE GENERALE venant aux droits de la société CREDIT DU NORD à la suite d'une fusion-absorption

RCS Paris n° 552 120 222

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 et Me JUVIN substituant à l'audience Me Anne GARZON de la SELARL AGDC AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Janvier 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François THOMAS, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSÉ DES FAITS

Suivant acte sous seing privé du 2 juillet 2010, M. [S] [Y] et son épouse Mme [D] [L] (Ies époux [Y]) ont donné à bail commercial en renouvellement à la société Crédit du Nord, des Iocaux situés [Adresse 1] pour une durée de neuf années à compter rétroactivement du 1er janvier 2008 pour finir le 31 décembre 2016, moyennant le règlement d'un loyer fixé, par paliers, au 1er janvier 2008 à 53.511,76 € par an en principal, au 1er janvier 2009 à 58.247,64 € par an en principal et, à compter du 1er janvier 2010, à 55.861,05€ en principal.

A l'échéance, le bail s'est poursuivi tacitement.

Par acte extrajudiciaire du 18 juillet 2017, la société Crédit du Nord a sollicité le renouvellement de son bail à compter du 1er octobre 2017, moyennant le règlement d'un loyer annuel en principal de 50.000 €.

Par acte d'huissier du 11 octobre 2017, Ies époux [Y] ont accepté le principe du renouvellement, sollicitant le règlement d'un loyer annuel de 70.000 € en principal.

Par acte du 9 décembre 2019, la société Crédit du Nord a assigné Ies époux [Y] devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Versailles, aux fins notamment de voir fixer le loyer annuel du bail renouvelé à effet du 1er octobre 2017 à 51.300 € en principal.

Par jugement mixte du 12 mars 2020, le juge des loyers commerciaux a notamment :

- déclaré irrecevables devant le juge des loyers commerciaux Ies demandes tendant à :

/ dire que le bail s'est renouvelé à effet du 1er octobre 2017 ;

/ dire que le dépôt de garantie sera ramené à trois mois du nouveau loyer ;

/ dire que le bail doit être renouvelé pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er octobre 2017 ;

/ dire qu'à l'exception du loyer à fixer judiciairement, toutes Ies clauses et conditions du bail expiré demeurent inchangées ;

/ juger que la société Crédit du Nord devra régler les intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1343-2 du code civil à compter du 1er août 2017 ;

- constaté l'accord des parties pour un renouvellement au 1er octobre 2017 du bail consenti à Ia société Crédit du Nord par Ies époux [Y] portant sur Ies Iocaux situés au rez-de-chaussée, premier étage et au sous-sol et correspondant aux lots 2, 3, 4, 43, 44, 52 et 6 de I'immeuble soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 1] ;

- ordonné une expertise confiée à M. [E], avant dire droit sur la fixation du montant du loyer du bail renouvelé ;

- fixé le montant annuel du loyer provisionnel pour la durée de l'instance au montant annuel du loyer contractuel tel que résultant du bail expiré ;

- sursis à statuer sur les autres demandes dans I'attente du dépôt du rapport d'expertise ;

- réservé Ies dépens.

L'expert judiciaire a déposé son rapport du 1er octobre 2020.

Par jugement du 27 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :

- déclaré irrecevables :

/ Ies demandes de la société Crédit du Nord tendant à dire que le bail s'est renouvelé à effet du 1er octobre 2017 et que le dépôt de garantie sera ramené à trois mois du nouveau loyer,

/ Ies demandes des époux [Y] tendant à voir juger que Ie bail doit être renouvelé pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er octobre 2017, aux clauses et conditions du bail expiré et que la société Crédit du Nord devra régler Ies intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1231-6 du code civil à compter du 1er août 2017,

- fixé à la valeur locative de 58.900,40 €, HT, HC, le montant du loyer annuel du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2017, entre la société Crédit du Nord, d'une part, les consorts [Y], d'autre part, au titre des locaux situés [Adresse 1],

- dit que Ies trop versés de loyer porteront intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2021 et pourront être capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes les autres demandes des parties,

- dit que Ies dépens, en ce compris Ies frais d'expertise, seront supportés par moitié entre les parties et Ies y a condamnées en tant que de besoin,

- ordonné l'exécution provisoire.

Les consorts [Y] ont interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions du 13 janvier 2023, les consorts [Y] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Versailles le 27 juillet 2021 (N° RG 20/06109 - N° Portalis DB22-W-B7E-PWLE) en ce qu'il a :

o Déclaré irrecevables les demandes des époux [Y] tendant à voir juger que le bail doit être renouvelé pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er octobre 2017, aux clauses et conditions du bail expiré et que la société Crédit du Nord devra régler les intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1231-6 du code civil à compter du 1er août 2017,

o Fixé à la valeur locative de 58.900,40 €, HT, HC, le montant du loyer annuel du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2017, entre la société Crédit du Nord, d'une part, les époux [Y], d'autre part, au titre des locaux situés [Adresse 1],

o Dit que les trop versés de loyer porteront intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2021 et pourront être capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

o Débouté les époux [Y] de leur demande visant à voir fixer le loyer annuel, hors taxes et hors charges à compter du 1er octobre 2017 à la somme de 100.000 € et subsidiairement à la somme de 71.360 € HT et HC,

o Débouté les époux [Y] de leur demande de condamnation de la société Crédit du Nord au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En statuant à nouveau :

- Dire et juger recevables et bien fondés les époux [Y] en leurs demandes, fins et conclusions;

En conséquence :

- Constater l'accord des parties pour un renouvellement au 1er octobre 2017 du bail consenti à la Société Générale venant aux droits du Crédit du Nord par les époux [Y] portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, premier étage et au sous-sol et correspondant aux lots 2, 3, 4, 43, 44, 52 et 6 de l'immeuble soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 1], pour une période de neuf années entières et consécutives ; en conséquence juger que la date du renouvellement devra être au 1er octobre 2017, pour une période de neuf années entières et consécutives ;

- Dire et juger que la Société Générale venant aux droits du Crédit du Nord devra régler les intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1231-6 du code civil à compter du 1er août 2017 ;

- Dire qu'à compter de cette même date, les intérêts porteront eux-mêmes intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil ;

- Constater que les locaux loués sont de type « bureaux-boutiques » et qu'en conséquence la fixation du loyer en renouvellement devra être calculée selon la valeur locative de marché ;

- Fixer le loyer annuel, hors taxes et hors charges à compter du 1er octobre 2017 à la somme de 100.000 €, toutes les autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées et subsidiairement à la somme annuelle de 71.360 € HT et HC ;

- Débouter la Société Générale venant aux droits du Crédit du Nord de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la Société Générale venant aux droits du Crédit du Nord au paiement de la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant de la procédure de première instance et de la procédure d'appel ;

- Condamner la Société Générale venant aux droits du Crédit du Nord aux entiers dépens d'appel;

- Ordonner l'exécution provisoire concernant le loyer provisionnel.

Par conclusions du 13 décembre 2022, la société Crédit du Nord demande à la cour de :

- Confirmer la décision entreprise sur le chef de jugement relatif à l'autorité de chose jugée et à l'irrecevabilité des demandes des parties touchant à la durée du bail renouvelé, à la détermination du montant du dépôt de garantie, à l'obligation du preneur au paiement des intérêts au taux légal à compter du 1er août 2017,

- Juger que la cour n'est pas saisie de l'appel du jugement du 12 mars 2020 qui a statué sur ces chefs de demandes,

- En conséquence, déclarer l'appel des époux [Y], de ces chefs, irrecevable et subsidiairement mal fondé,

- Sur la fixation du loyer de renouvellement, rejeter l'appel des époux [Y] tendant à voir porter le prix unitaire à 700 €/m²B,

- Juger que le magistrat des loyers a parfaitement appréhendé les qualités de la commercialité de la [Adresse 1], d'une part, et a, à bon droit, rejeté la méthode d'évaluation de l'expert judiciaire, d'autre part, fondée sur une moyenne arithmétique des éléments de comparaison, laquelle moyenne arithmétique est contraire aux dispositions de l'article R.145-7, lesquels éléments de comparaison incluaient en outre des loyers décapitalisés,

- Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a fixé le prix unitaire à 520 € sur la base de la pondération de l'expert judiciaire de 113 m²,

- Confirmer la décision entreprise sur l'application d'une majoration pour la mise en communication des locaux à 5% et sur un abattement pour mises en conformité de 5%,

- Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande d'abattement pour accession différée présentée par le Crédit du Nord,

- Déclarer cet appel incident recevable et fondé,

- Juger que la clause du bail prévoyant tout à la fois l'accession en fin de bail et le nivellement en fin de bail est confuse et justifie que l'accession soit reportée en fin de jouissance conformément à la jurisprudence précitée,

- Ramener en conséquence le loyer à la somme de 56.810 € au 1er octobre 2017,

- Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré que les trop versés de loyers porteraient intérêts au taux légal et seraient capitalisés au fur et à mesure de chaque échéance, la capitalisation intervenant dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- Condamner les époux [Y] au paiement d'une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, qui incluront le coût des frais d'expertise.

Par conclusions du 11 janvier 2023, la Société Générale, venant aux droits de la société Crédit du Nord, demande à la cour de :

- Dire la Société Générale recevable et bien fondée en son intervention volontaire,

- Donner acte à la Société Générale que la fusion-absorption intervenue au 1er janvier 2023 implique qu'elle acquiert, de plein droit, en sa qualité d'ayant-cause universel de la société Crédit du Nord, société absorbée, la qualité de partie à l'instance en qualité d'intimée à titre principal et appelante à titre incident, aux lieu et place de la société Crédit du Nord, dissoute,

- Constater la poursuite de l'instance de plein droit entre la Société Générale et les consorts [Y].

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 janvier 2023.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

La Société Générale, venant aux droits de la société Crédit du Nord, sera déclarée recevable et bien fondée en son intervention volontaire, à la suite de la fusion-absorption intervenue le 1er janvier 2023 de la société Crédit du Nord, société absorbée, partie à l'instance en qualité d'intimée à titre principal et appelante à titre incident.

La poursuite de l'instance sera constatée entre la Société Générale et les consorts [Y], ce dont ces derniers ont tenu compte en modifiant leurs écritures.

Sur la recevabilité de la demande des époux [Y] tendant à voir constater le renouvellement du bail

Les époux [Y] indiquent, au vu des articles L.145-12 et R.145-23 du code de commerce, que le juge des loyers commerciaux fixe la date d'effet du renouvellement du bail, et qu'en l'espèce les parties étaient d'accord pour voir le bail renouvelé à compter du 1er octobre 2017, de sorte que le premier juge aurait dû constater l'accord des parties sur ce point.

Ils ajoutent que le jugement du 12 mars 2020 n'est pas définitif, de sorte qu'il ne pouvait être fait état de l'autorité de la chose jugée, et demandent à la cour de juger que le bail conclu entre les parties doit être renouvelé pour 9 années entières à compter du 1er octobre 2017.

Ils avancent que la cour est compétente pour statuer sur la demande en paiement des intérêts, et que le premier juge s'est contredit en ce qu'il a déclaré cette demande irrecevable tout en y faisant droit. Ils reprochent au jugement d'avoir retenu d'office un moyen d'irrecevabilité tiré de l'autorité de la chose jugée, sans permettre aux parties d'y répondre. Ils affirment que la cour a plénitude de juridiction pour statuer sur leurs demandes.

La Société Générale rappelle que le rejet des demandes accessoires des époux [Y] n'a pas été prononcé par le jugement dont appel, mais par le jugement mixte du 12 mars 2020 dont ils n'ont pas fait appel, de sorte que l'irrecevabilité de leurs demandes ne peut être présentée devant la cour saisie de l'appel du jugement du 27 juillet 2021. Elle ajoute que le jugement dont appel ne peut être critiqué en ce qu'il a rappelé qu'il avait déjà été statué sur les demandes en cause, et que la cour ne peut revenir sur ces chefs de décision dont il n'a pas été fait appel. Elle précise qu'elle-même ne conteste pas le rejet de sa demande tendant à voir fixer le dépôt de garantie à trois mois du nouveau loyer. Elle conteste toute contradiction du jugement.

*****

Par jugement mixte du 12 mars 2020, le juge des loyers commerciaux a notamment déclaré irrecevables devant le juge des loyers commerciaux Ies demandes tendant à :

/ dire que le bail s'est renouvelé à effet du 1er octobre 2017;

/ dire que le dépôt de garantie sera ramené à trois mois du nouveau loyer ;

/ dire que le bail doit être renouvelé pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er octobre 2017 ;

/ dire qu'à l'exception du loyer à fixer judiciairement, toutes Ies clauses et conditions du bail expiré demeurent inchangées ;

/ juger que la société Crédit du Nord devra régler les intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1343-2 du code civil à compter du 1er août 2017.

Par jugement du 27 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a déclaré irrecevables :

/ Ies demandes de la société Crédit du Nord tendant à dire que le bail s'est renouvelé à effet du 1er octobre 2017 et que le dépôt de garantie sera ramené à trois mois du nouveau loyer,

/ Ies demandes des époux [Y] tendant à voir juger que Ie bail doit être renouvelé pour une période de neuf années entières et consécutives à compter du 1er octobre 2017, aux clauses et conditions du bail expiré et que la société Crédit du Nord devra régler Ies intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1231-6 du code civil à compter du 1er août 2017,

en relevant que le juge des loyers commerciaux avait rendu un jugement mixte déclarant irrecevables ces demandes, de sorte qu'elles se heurtaient à l'autorité de la chose jugée.

Ces demandes avaient effectivement été déclarées irrecevables par le jugement mixte du 12 mars 2020, dont il n'est pas contesté qu'aucune des parties n'a fait appel.

Selon l'article 544 du code de procédure civile, les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou une mesure provisoire peuvent être immédiatement frappés d'appel comme les jugements qui tranchent tout le principal.

Les demandes ayant déjà été présentées devant le juge des loyers commerciaux qui les avait déclarées irrecevables par jugement mixte du 12 mars 2020, elles ne pouvaient être présentées à nouveau devant cette juridiction, et c'est à raison que le jugement du 27 juillet 2021 les a déclarés irrecevables.

Il revenait aux parties au jugement du 12 mars 2020 de faire appel de cette décision, dont la présente cour n'est pas saisie.

Le fait que les parties aient été partiellement d'accord est indifférent, et il est rappelé que les demandes de 'constater' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi.

L'absence de caractère définitif du jugement du 12 mars 2020 ne saurait permettre à l'une des parties de présenter devant la même juridiction les mêmes demandes que celles que ce jugement a tranchées, et dont il revenait aux parties de faire appel.

Enfin, le jugement dont appel ne s'est pas contredit en ayant rejeté la demande des époux [Y] tendant à voir la société Crédit du Nord condamnée à régler Ies intérêts de plein droit au taux légal en vertu de l'article 1231-6 du code civil à compter du 1er août 2017, avant de dire que les trop-versés de loyer porteront intérêts au taux légal, cette dernière demande n'ayant pu être tranchée avant que le loyer ne soit fixé.

Par ailleurs, si Ies époux [Y] soutiennent qu'ils n'ont pu argumenter sur la recevabilité de leurs demandes devant le premier juge qui a soulevé d'office le moyen de l'autorité de la chose jugée, c'est dans le cadre d'un appel dirigé à l'encontre du jugement du 12 mars 2020 que la recevabilité de ces demandes pouvait être à nouveau examinée, et non dans le cadre de l'appel de la décision du 27 juillet 2021 qui a constaté que la recevabilité de ces demandes avait été tranchée.

Aussi, Ies époux [Y] seront déboutés de leurs demandes en ce sens.

Sur la fixation du loyer en renouvellement

Le jugement a rappelé les termes de l'expertise judiciaire qui a considéré que les locaux étaient adaptés à l'activité exploitée et bénéficiaient d'une bonne visibilité, avant de retenir une surface locative de 113,27 m²p. Il a ensuite, après prise en compte des conclusions de l'expert sur les locaux, de la communication des locaux avec d'autres locaux objets d'un second bail, et du transfert au preneur des travaux de mise en conformité des règles d'hygiène et de sécurité, fixé le loyer en renouvellement à la valeur locative soit 58.900,40 € HT et HC, correspondant à 520€ x an x m²p.

Les époux [Y] contestent le jugement en ce qu'il a fixé le loyer à la valeur locative de renouvellement alors qu'ils demandaient la fixation du loyer en renouvellement à la valeur locative de marché. Ils font état du caractère particulier des bureaux-boutiques, dont relèvent les locaux à usage d'agence bancaire, pour lesquels le déplafonnement du loyer est encouru. Ils soutiennent que les loyers en renouvellement des locaux à usage de bureaux sont fixés par référence aux seuls prix du marché concernant des loyers équivalents dans le même secteur géographique, que la valeur locative de renouvellement pour les agences bancaires doit s'approcher de la valeur de marché.

La Société Générale soutient que la jurisprudence avancée par Ies époux [Y] affirme seulement que le loyer d'un local à usage exclusif de bureau, auquel est assimilé un local à usage de bureau-boutique, échappe à la règle du plafonnement. Elle indique que l'assimilation des bureaux en nature de banque à des locaux à usage exclusif de bureaux permet d'écarter la règle du plafonnement mais ne permet pas d'aligner la fixation du loyer des banques à la fixation du loyer des bureaux. Elle affirme que pour les bureaux-boutiques et notamment les agences bancaires, leur valeur de renouvellement n'est pas la seule valeur de marché, et ajoute qu'à suivre les appelants il conviendrait de ne rechercher que des valeurs de marché correspondant à des locaux vides.

*****

Le jugement a retenu que les parties s'accordaient pour que le loyer soit fixé à la valeur locative, compte tenu de l'activité autorisée dans les locaux.

L'article L.145-33 du code de commerce prévoit que le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.

A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :

1° Les caractéristiques du local considéré ;

2° La destination des lieux ;

3° Les obligations respectives des parties ;

4° Les facteurs locaux de commercialité ;

5° Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;

Un décret en Conseil d'Etat précise la consistance de ces éléments.

Il résulte de l'article L.145-34 qu'à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L.145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, publiés par l'Insee.

Les articles R.145-4 à R.145-7 apportent respectivement des précisions sur les caractéristiques du local considéré, sur la destination des lieux, sur les facteurs locaux de commercialité, et sur les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Le contrat de bail du 2 juillet 2010 prévoit expressément qu'il porte sur 'un local commercial à usage d'établissement bancaire' au rez-de-chaussée et un sous-sol sous ladite boutique avec accès par un escalier intérieur, et au 1er étage un local comprenant cinq pièces, outre salle de bain, wc et dégagements.

L'article R.145-11 prévoit que 'le prix du bail des locaux à usage exclusif de bureaux est fixé par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence'.

Il institue ainsi un principe dérogatoire à la règle de plafonnement du loyer prévu par l'article L.145-34.

Les activités de banque étant assimilées à celles de bureaux, elles sont exclues du régime du plafonnement posé par l'article L.145-34 précité.

L'expert judiciaire a recherché la valeur locative par comparaison avec les prix couramment pratiqués dans le voisinage (L.145-33) pour des locaux équivalents, et le jugement a fixé le loyer en renouvellement à la valeur locative.

Les époux [Y] soutiennent que pour les bureaux, la valeur locative de renouvellement est sensiblement équivalente à la valeur locative de marché, la Société Générale contestant pour sa part que le loyer de renouvellement soit fixé à partir des seuls loyers de marché.

L'activité d'agence bancaire présente comme particularité de correspondre à une activité de bureaux exercée dans des locaux en nature de boutique, situés en pied d'immeuble et dotés de vitrines de façon à faciliter l'accès de la clientèle et à attirer le chaland, à la différence des locaux de bureaux, habituellement localisés en étage. La valeur locative pour des locaux à usage bancaire n'est dès lors pas comparable à celle de boutiques de commerce de détail et doit être, au regard des dispositions des articles R.145-11 et R.145-7, recherchée d'abord, par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents, c'est à dire pour des locaux en nature de boutique mais dans lesquels est exercée une activité de bureaux.

Les prix couramment pratiqués dans le voisinage sont les prix du marché librement négociés, mais aussi les prix de renouvellement amiables et les prix de loyers de baux renouvelés judiciairement, qui ont une influence certaine sur le prix de la valeur locative du marché.

Aussi il sera tenu compte, pour fixer la valeur locative des locaux en cause, des loyers du marché comme des valeurs de renouvellement amiable et des fixations judiciaires.

Sur la situation des locaux loués

Les époux [Y] contestent le raisonnement suivi par le jugement et les arguments de la Société Générale, en soulignant qu'il s'agit d'un magnifique local d'angle sur la [Adresse 9], parfaitement accessible et bien desservi, avec un parc de stationnement à proximité. Ils font état des nombreux commerces dans ce secteur, la [Adresse 9] se situant dans le triangle d'or de [Localité 10]. Ils soutiennent que la [Adresse 1] est un emplacement privilégié et non une artère secondaire, formant un ensemble cohérent avec les autres rues du quartier. Ils soulignent le très bon état de l'immeuble, de standing, et la très grande visibilité dont il bénéficie.

La Société Générale indique que la [Adresse 1] ne bénéficie pas de la même commercialité que la [Adresse 4] dont émanent la plupart des références de l'expert judiciaire, étant à la marge de l'activité commerciale du secteur [Localité 7] dont les principales artères disposent d'enseignes plus nombreuses. Elle en déduit qu'il s'agit d'une rue secondaire par rapport aux autres, ce qu'illustre l'absence de référence de transaction sur cet axe. Elle en déduit une commercialité stable, de bonne qualité mais sans caractéristique exceptionnelle, hors toute présence d'enseigne porteuse en terme de chalandise.

*****

Dans son rapport d'expertise M. [E] a rappelé que les locaux sont situés sur la commune de [Localité 10], préfecture des [Localité 11], accessibles en transport en commun par le train et de nombreuses lignes de bus, ainsi qu'en voiture avec un stationnement possible dans deux parkings publics à proximité. Il a relevé que la portion de la [Adresse 1] dans laquelle se trouvent les locaux est une des principales rues commerçantes du quartier Notre Dame de [Localité 10], avec des commerces de proximité et un 'Monop'. Les locaux dépendent d'un immeuble d'angle [Adresse 9]/[Adresse 1], immeuble en pierres de taille avec façade peinte en bon état d'entretien. L'expert a noté la bonne visibilité de l'agence, avec un important linéaire, et la localisation d'un passage piéton devant l'agence. Il a précisé qu'une autre partie de l'agence fait l'objet d'un autre bail, les deux lots ayant été réunis, et décrit l'aménagement des rez-de-chaussée, 1er étage et sous-sol constituant les locaux.

Ainsi, se situent au rez-de-chaussée un sas, un bureau éclairé par la vitrine sur la [Adresse 9], un autre bureau bénéficiant d'un éclairage naturel restreint, le passage au dos du local technique d'un DAB permettant l'accès à l'escalier donnant accès au 1er étage et au sous-sol; au 1er étage, un grand bureau d'angle avec fenêtres [Adresse 1] et [Adresse 9], un autre bureau côté [Adresse 1], une passerelle donnant accès à un autre bureau, une salle de réunion, un local d'archives et des sanitaires; au sous-sol, une salle des coffres, un local technique, des sanitaires et un local avec vestiaires.

En réponse aux observations des parties, l'expert a précisé que le quadrilatère formé par les rues [Adresse 4], [Adresse 1], [Adresse 6], [Adresse 9] constitue le secteur commerçant du quartier Notre Dame, et considéré que la [Adresse 1] ne constituait pas une rue commerçante secondaire. Il a conclu que la [Adresse 1] présentait une bonne commercialité, que l'emplacement de l'agence à l'angle de cette rue et de la [Adresse 9] était particulièrement bien adapté à l'activité.

Au vu de l'analyse développée par l'expert judiciaire, et des clichés photographiques qui y sont insérés comme des éléments relatifs à la localisation des locaux à proximité immédiate de la [Adresse 4] et de la [Adresse 8], la cour partage comme le jugement l'analyse faite par l'expert sur la bonne commercialité des locaux, occupant un angle sur la [Adresse 1] et la [Adresse 9], et sur leur adaptation à l'activité de banque développée par le preneur.

Sur la surface pondérée

Les époux [Y] revendiquent une surface pondérée de 123,60 m²p en se fondant sur le rapport dressé par M. [J], et en soutenant que l'expert judiciaire a scindé à tort la zone du 1er étage alors qu'il s'agit d'une zone en plateau. Ils sollicitent que soit retenue la surface pondérée de 123,60 m², et subsidiairement celle proposée par l'expert judiciaire soit 113,27 m²p.

*****

L'expert judiciaire a indiqué dans son rapport avoir effectué les pondérations de surface selon les recommandations pour la pondération des locaux à usage de commerce annexées à la 5ème édition de la Charte de l'Expertise mise en place à compter du 1er juillet 2015.

Si Ies époux [Y] font état d'un rapport d'expertise judiciaire du même local effectué en octobre 2014 par M. [J], il est à retenir que ce rapport est plus ancien que celui de M. [E], donc il a pu ne pas prendre en compte les mêmes règles de pondération appliquées par ce dernier, dont le rapport a seul été dressé au contradictoire du preneur.

La cour observe que les deux rapports ont retenu la même surface pondérée du rez-de-chaussée de 54,49 m²p.

Au sous-sol, les deux rapports ont appliqué à la même surface (46,10 m²) un coefficient de pondération différent, de 0,25 pour le rapport de M. [E], de 0,3 pour celui de M. [J].

Au vu de la grille de la méthode figurant au rapport de M. [E], celui-ci sera suivi en ce qu'il a appliqué un coefficient de 0,25.

Au 1er étage, le rapport de M. [E] a retenu une valeur après pondération de 47,26 m²p, en appliquant un coefficient de pondération différent selon qu'il s'agit des bureaux (coefficient de 0,5) ou des locaux d'archives, WC et dégagements (coefficient de 0,3), application différenciée qui apparaît conforme à la méthode de pondération des locaux insérée dans le rapport de cet expert judiciaire. Il sera suivi sur ce point en son analyse.

Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la surface locative de 113,27 m²p proposée par M. [E].

Sur la valeur locative

Les époux [Y] soutiennent que le premier juge a considéré à tort que la [Adresse 1] se trouvait en retrait par rapport aux rues avoisinantes, alors qu'elle présente une forte commercialité tout autant que ces autres rues, ainsi qu'en avait convenu l'expert judiciaire M. [E]. Ils font état des valeurs retenues par l'expert [J] en 2014, du montant du loyer du local mitoyen et des locations nouvelles, et relèvent que certaines références données par le preneur ne sont pas pertinentes comme portant sur des locaux bénéficiant d'une moindre commercialité ou exerçant une activité bien distincte. Ils proposent de retenir la valeur de 700 €/m²p/an, au vu du caractère privilégié de l'emplacement, de l'activité exercée et de l'adéquation des locaux pour la développer, et des éléments de comparaison versés aux débats.

La Société Générale soutient que la [Adresse 1] ne présente pas la même commercialité que la [Adresse 4], et dispose d'un nombre d'enseignes beaucoup moins important, de sorte qu'elle constitue bien une rue secondaire. Elle souligne l'absence de données de transactions sur cette rue, le fait que plus de la moitié des références invoquées par les époux [Y] a 6 à 7 années d'ancienneté, et ajoute que la demande des appelants en faveur d'une valeur de 700 €/m²p/an est excessive. Elle relève que les appelants font état du rapport de M. [J] sans indiquer quelle suite y a été donnée, et sollicite la confirmation du jugement.

*****

L'expert judiciaire M. [E], se fondant sur une synthèse des loyers sur valeur moyenne de 1.037 €/m²p/an pour les droits au bail, de 585 €/m²p/an pour les baux neufs, de 368 €/m²p/an pour les renouvellements de baux et de 422 €/m²p/an pour les fixations judiciaires, a proposé une valeur unitaire de 600 €/m²p/an.

Le jugement a retenu une valeur, avant abattement et majoration (dont il a considéré qu'ils se compensaient) de 520 €/m²p/an, au vu du caractère adapté des locaux à l'activité, mais en tenant compte aussi de son retrait par rapport à la place du marché et à la [Adresse 4], qui bénéficient d'une chalandise supérieure.

L'article R.145-7 du code de commerce prévoit notamment que les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surfaces, concernent des locaux équivalents eu égard à l'ensemble des éléments mentionnés aux articles R.145-3 à R.145-6.

A défaut d'équivalence, ils peuvent, à titre indicatif, être utilisés pour la détermination des prix de base, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.

En l'espèce, l'expert M. [E] a relevé, s'agissant des nouvelles locations, 14 données présentant une valeur moyenne de 585 €/m²p/an hors droit au bail et 1.037 €/m²p/an avec droit au bail, étant précisé que sur ces données 6 concernent l'[Adresse 6] et [Adresse 4].

De même, sur les 11 références retenues pour le renouvellement amiable (moyenne : 368 €/m²p/an), aucune n'est située [Adresse 1] ; s'agissant des 4 références considérées pour le renouvellement judiciaire (422 €/m²p/an en moyenne), une seule se trouve [Adresse 1].

La faiblesse de ce nombre de transactions [Adresse 1] est de nature à révéler une commercialité inférieure à celle de la [Adresse 4] ou de l'[Adresse 6], qui bénéficient comme l'a relevé le jugement avec la place du marché d'une chalandise supérieure et d'enseignes nationales de nature à attirer les clients, enseignes dont sont dépourvues (hors 'le Monop') la [Adresse 1] et la [Adresse 9].

Pour autant, il convient de tenir compte de la bonne adaptation des locaux à l'activité de banque, au vu notamment de la position en angle avec une vitrine importante et de leur accessibilité importante, ce qui justifie, par réformation du jugement, de retenir une valeur de 550 €/m²p/an avant prise en compte des abattements et majorations.

Sur les majorations et abattements

Les époux [Y] font état de la communication avec un local mitoyen, qui facilite l'exploitation des lieux par le preneur, et sollicite que soit appliquée une majoration de 15% à ce titre. Ils contestent l'abattement retenu par le premier juge au titre du transfert de charges sur le preneur, et soutiennent qu'à l'exception de la taxe foncière Ie bail ne contient pas de clause exorbitante du droit commun. Ils s'opposent à la demande de prise en compte de la clause d'accession.

La Société Générale soutient que c'est à raison que le transfert des mises en conformité a entraîné un abattement de 5% et conteste l'argument des bailleurs sollicitant une majoration de 5% au motif que le foncier ne serait pas transféré au preneur.

Ils forment un appel incident sur l'absence de prise en compte de l'accession, et sollicitent la prise en compte d'un abattement de 5% à ce titre.

*****

L'expert [E] a proposé une majoration de 5% au titre de la liaison avec des locaux contigus.

Le jugement a indiqué qu'une telle majoration était conforme aux usages et l'a retenue.

Elle n'est pas contestée par la Société Générale, Ies époux [Y] sollicitant que cette majoration soit de 15%.

Outre que les décisions dont ils font eux même mention arrêtent ce taux à 10 et non 15%, le jugement a retenu un taux de 5% en prenant en compte le fait que l'augmentation de linéaire de façade est de nature à améliorer la visibilité de l'agence bancaire. Il a également indiqué qu'une telle majoration était conforme aux usages, et il sera suivi sur ce point.

Il sera rappelé que l'article R.145-8 prévoit notamment que du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages.

Le bail prévoit que tous travaux de conformité avec les règles de sécurité ou d'hygiène sont à la charge du preneur, alors que le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée, et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée.

Aussi, c'est à raison que le jugement a retenu un abattement de 5% à ce titre.

Par ailleurs, Ies époux [Y] ne peuvent solliciter, du fait de l'absence de transfert de la taxe foncière au preneur, une majoration du loyer à ce titre, alors que le paiement de cette taxe revient au bailleur.

Enfin, le jugement a écarté la demande du preneur relative à l'accession.

L'article R.145-11 indique notamment que le prix du bail des locaux à usage exclusif de bureaux est fixé par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents, sauf à être corrigés en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.

Si la Société Générale soutient qu'il est à considérer le fait qu'à la date du renouvellement, les locaux ne sont pas aménagés mais se trouvent dans leur état d'origine, une telle clause d'accession est usuelle en matière de baux commerciaux, ne justifiant pas qu'un abattement soit retenu à ce titre.

*****

En conséquence, le loyer de renouvellement sera fixé au montant de 62.298,50 € (550 € x 113,27 m²p). Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé s'agissant de la condamnation des dépens de 1ère instance.

Chaque partie supportera ses dépens d'appel, et il ne sera pas fait droit aux demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Déclare la Société Générale recevable et bien fondée en son intervention volontaire,

Confirme le jugement, sauf s'agissant du montant de la valeur locative,

Statuant à nouveau sur ce point,

Fixe le montant de cette valeur locative à 62.298,50 €,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre
Numéro d'arrêt : 21/05054
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;21.05054 ?
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