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19/04/2023 | FRANCE | N°21/03586

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 19 avril 2023, 21/03586


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 AVRIL 2023



N° RG 21/03586

N° Portalis DBV3-V-B7F-U4CM



AFFAIRE :



CLINIQUE [3]





C/

[F] [S]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Section : AD

N° RG : 20/00120


r>Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL ACTANCE



la AARPI METIN & ASSOCIES







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a ren...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 AVRIL 2023

N° RG 21/03586

N° Portalis DBV3-V-B7F-U4CM

AFFAIRE :

CLINIQUE [3]

C/

[F] [S]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Section : AD

N° RG : 20/00120

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL ACTANCE

la AARPI METIN & ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CLINIQUE [3] venant aux droits du CENTRE D'HEMODIALYSE DE [Localité 4]

N° SIRET : 410 344 667

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentant : Me Franck BLIN de la SELARL ACTANCE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0168 - N° du dossier 2102-69 substitué par Me Laura GUILLOTIN avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Madame [F] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me David METIN de l'AARPI METIN & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 159 - N° du dossier 22.007

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2023, Madame Isabelle MONTAGNE, présidente, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY

EXPOSE DU LITIGE

[F] [S] a été engagée par la société Centre d'hémodialyse de [Localité 4] (ci-après Chm) suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 juin 2002 en qualité d'infirmière diplômée d'état.

Les relations de travail étaient soumises aux dispositions de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but lucratif.

Contestant le coefficient qui lui a été appliqué lors de son changement de groupe et invoquant une atteinte au principe d'égalité de traitement salarial, [F] [S] a, le 14 septembre 2020, saisi le conseil de prud'hommes de Mantes La Jolie afin d'obtenir la condamnation de la société Chm au paiement de rappels de salaire et congés payés incidents ainsi que de dommages et intérêts pour préjudice financier.

Par jugement mis à disposition le 22 novembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont :

- déclaré bien fondée la créance de [F] [S],

- condamné la société Chm à payer à celle-ci les sommes suivantes :

* 3 024,03 euros bruts à titre de rappel de salaires pour la période de septembre 2017 à août 2020,

* 302,03 euros bruts au titre de congés payés afférents,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020, date de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation par la défenderesse,

- rappelé que l'exécution est de droit à titre provisoire sur les créances salariales,

- condamné la société Chm à payer à [F] [S] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, hormis les cas où elle est de droit,

- condamné la société Chm à verser à [F] [S] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties des autres demandes,

- dit que la société Chm supportera les entiers dépens, qui comprendront les éventuels frais d'exécution.

Le 9 décembre 2021, la société Clinique [3] venant aux droits de la société Chm a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

La salariée a fait valoir son droit à la retraite à compter du 1er janvier 2022.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 13 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société Clinique [3] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ses condamnations à paiement des sommes pour les montants et les chefs retenus, et aux dépens,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- statuant à nouveau, fixer la moyenne de salaire de [F] [S] à la somme brute de 3 858,35 euros et débouter celle-ci de toutes ses demandes,

- en tout état de cause, condamner [F] [S] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 9 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, [F] [S] demande à la cour de :

- confirmer le jugement sauf sur le quantum des dommages et intérêts pour le préjudice financier subi et sur l'indemnisation versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a déboutée de ses autres demandes, infirmer le jugement sur ces chefs,

- statuant à nouveau, condamner la société Clinique [3], après avoir fixé la moyenne mensuelle des salaires à titre principal à 3 986,88 euros, à titre subsidiaire à 3 906,04 euros, à lui verser les sommes de :

* 10 800 euros à titre de rappel de salaires,

* 1 080 euros de congés payés afférents,

* 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier,

* 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

et aux entiers dépens y compris les frais d'exécution de l'arrêt à intervenir.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 14 mars 2023.

MOTIVATION

Sur l'application du coefficient lors du changement de groupe

La société conclut à l'infirmation du jugement sur ce point en faisant valoir qu'elle a appliqué l'article 90-5-3 de la convention collective et l'avis d'interprétation de la convention collective du 13 avril 2011 lors du passage de la salariée du groupe A au groupe B au 1er mars 2016 ; qu'en effet, lors du changement de groupe, celle-ci s'est vue appliquer le coefficient immédiatement supérieur, l'ancienneté retenue étant celle acquise au sein du groupe A ; que la salariée ne présente aucun élément de fait relatif à une situation de discrimination en raison de l'âge ; qu'une partie de la demande est prescrite et que les calculs de la salariée sont erronés.

La salariée conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué le rappel de salaire demandé, en faisant valoir que l'employeur lui a appliqué un coefficient ne correspondant pas à son ancienneté dans le métier lors du passage du groupe A au groupe B en mars 2016 en méconnaissance des dispositions conventionnelles applicables, ce qui la plaçait dans une situation discriminatoire fondée sur l'âge eu égard à une infirmière qui aurait été engagée en catégorie B avec son ancienneté réelle dans le métier et étant relevé qu'elle n'a jamais donné son accord pour la modification de sa rémunération.

L'article 90.5.3 de la convention collective applicable relatif au changement de niveau ou de groupe dispose que :

'(') En cas de changement de niveau ou de groupe, le salarié sera reclassé dans ce nouveau niveau ou groupe, au moins au coefficient immédiatement supérieur à celui qu'il détenait précédemment.

L'ancienneté dans ce nouveau coefficient sera égale à celle qu'il détenait dans le coefficient précédent (')'.

L'article 90.6 relatif au changement de groupe (passage de A à B) indique que :

'A l'intérieur de chaque niveau et hormis promotion correspondant à un changement d'emploi, le passage du groupe A au groupe B pourra s'effectuer pour tenir compte de l'apport personnel de chaque salarié dans l'accomplissement de sa fonction.

(')

Dans cette hypothèse (changement de groupe), la détermination du coefficient dans le groupe B se fera selon les modalités définies à l'article 90.5.3 (...)'.

En l'espèce, à la suite de son passage du groupe A au groupe B, la salariée qui était classée au groupe A au coefficient 332 a été positionnée au groupe B au coefficient 336, correspondant au coefficient immédiatement supérieur au coefficient 332 qu'elle détenait jusqu'alors, conformément aux dispositions conventionnelles sus-citées.

Les dispositions conventionnelles ne se réfèrent pas à l'ancienneté dans le métier mais indiquent seulement que l'ancienneté dans le nouveau coefficient sera égale à celle que le salarié détenait dans le coefficient précédent.

La salariée invoque de manière vague une discrimination fondée sur l'âge par rapport à une infirmière qui aurait été engagée en catégorie B avec son ancienneté réelle dans le métier, sans présenter aucun élément précis, ce qui ne permet pas de retenir une discrimination fondée sur l'âge.

En outre, alors que la salariée a accepté le passage du groupe A au groupe B, l'évolution de sa rémunération découle de l'application conforme par l'employeur des dispositions conventionnelles relatives au coefficient attaché au changement de groupe.

L'employeur ayant fait une exacte application des dispositions conventionnelles, la salariée doit être déboutée de sa demande de rappel de salaire et de congés payés incidents.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur l'atteinte au principe 'à travail égal salaire égal'

La salariée fait valoir qu'à affectation, emploi, niveau et classification identiques à ses collègues des établissements centres d'hémodialyse de [Localité 6] et [Localité 7] situés dans le même bassin d'emploi appartenant au même groupe Vivalto que l'établissement de [Localité 4], elle perçoit un salaire moins élevé. Se comparant à Mme [L], salariée au sein de l'établissement de [Localité 6], elle demande l'infirmation du jugement sur ce point et réclame en conséquence sur le fondement du principe 'à travail égal salaire égal' un rappel de salaire à hauteur de 10 800 euros et les congés payés afférents correspondant à l'écart salarial de 300 euros sur 36 mois.

La société réplique que la salariée est mal fondée en sa demande de rappel de salaire sur le fondement du principe 'à travail égal salaire égal' et doit en être déboutée dans la mesure où les salariés des cliniques de [Localité 6] et de [Localité 7] appartiennent à des entreprises différentes, peu important que les cliniques de [Localité 6] et de [Localité 4] appartiennent au même groupe, celle de [Localité 7] appartenant à un groupe différent, le groupe Ramsès ; que de plus, les cliniques de [Localité 6] et de [Localité 4] n'ont pas la même activité, se situent dans des bassins d'emploi différents et leurs structures globales de rémunération sont différentes.

Si, aux termes de l'article 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

En conséquence, il appartient au salarié de démontrer qu'il se trouve dans une situation identique ou similaire à celle des salariés auxquels il se compare et il incombe à la société de démontrer que la différence de traitement est justifiée par des éléments objectifs et matériellement vérifiables.

Le principe d'égalité de traitement s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Le principe d'égalité de traitement ne s'appliquant pas entre les salariés d'entreprises distinctes appartenant au même groupe, il y a lieu de considérer que la salariée ne soumet pas d'éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement entre des salariés placés dans une situation comparable. Elle sera déboutée de sa demande de rappel de salaire sur ce fondement. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le préjudice financier

La société conclut au débouté de la demande de dommages et intérêts de la salariée au motif que celle-ci ne justifie pas d'un préjudice financier et à l'infirmation du jugement sur ce point.

La salariée conclut à l'infirmation du quantum de dommages et intérêts pour préjudice financier retenus par les premiers juges sans articuler de moyen au soutien de sa demande.

Eu égard à la solution du litige, force est de constater que la salariée n'a pas subi de préjudice financier dans la rémunération qui lui a été appliquée. Elle sera déboutée de sa demande de ce chef. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de fixation de la moyenne des salaires

Cette demande sera rejetée comme étant sans objet dès lors qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire devant la cour et que l'article R. 1454-28 du code du travail imposant au juge de fixer la moyenne des salaires n'est donc pas applicable.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Eu égard à la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

La salariée sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Il n'y a pas lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement en ses condamnations à paiement de rappel de salaire, de congés payés afférents et de dommages et intérêts pour préjudice financier, et en ce qu'il statue sur les intérêts au taux légal, les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DEBOUTE [F] [S] de se demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et de dommages et intérêts pour préjudice financier,

CONDAMNE [F] [S] aux entiers dépens,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03586
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;21.03586 ?
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