COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 AVRIL 2023
N° RG 20/00393 -
N° Portalis DBV3-V-B7E-TX3T
AFFAIRE :
[A] [V]
C/
S.A.S. ARTELIA venant aux droits de la S.A.S. PREVENTION CONTRÔLE SECURITE INCENDIE (PCSI)
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Janvier 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
N° Section : E
N° RG : 17/01851
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Marie-emily VAUCANSON
Me Cécile FLECHEUX
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TREIZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [A] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Marie-Emily VAUCANSON, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 554
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 78646/002/2020/010980 du 12/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANT
****************
S.A.S. ARTELIA venant aux droits de la S.A.S. PREVENTION CONTRÔLE SECURITE INCENDIE (PCSI)
N° SIRET : 401 954 193
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Cécile FLECHEUX de la SCP BILLON & BUSSY-RENAULD & ASSOCIES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 241et Me Emmanuel NOIROT de la SELEURL CALIX SOCIETE D'AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B531
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,
Greffier en pré-affectation lors des débats : [S] [E],
Rappel des faits constants
La SAS Prévention Contrôle Sécurité Incendie (PCSI), dont le siège social est situé à [Localité 4] en Seine-Saint-Denis, est un bureau d'études expert en sécurité incendie. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d'études techniques du 15 décembre 1987, dite Syntec.
Le 18 janvier 2022, la société PCSI a fait l'objet d'une radiation par apport de patrimoine au profit de la société Artelia, laquelle vient donc aux droits de la société PCSI.
M. [A] [V], né le 3 novembre 1959, a été engagé par la société PCSI, selon contrat de travail à durée indéterminée du 14 novembre 2007 à effet au 19 novembre 2007, en qualité de préventionniste sécurité incendie, niveau cadre 2.1, moyennant un salaire initial mensuel brut de 2 770 euros ainsi qu'un 13ème mois.
En dernier lieu, M. [V] occupait le poste de préventionniste sécurité incendie, niveau cadre 2.2, moyennant une rémunération mensuelle moyenne de 3 856,60 euros brut, calculée sur la base des douze derniers mois.
Suite à un accident du travail survenu le 16 mars 2016 et après deux visites médicales les 18 et 31 janvier 2017, M. [V] a été déclaré inapte à son poste dans les termes suivants :
« A la suite de l'étude de poste et des conditions de travail réalisée le 26 janvier 2017, des avis spécialisés et de l'échange avec l'employeur le 26 janvier 2017, M. [V] est inapte au poste de préventionniste (article R. 4624-42 du code du travail). Le salarié pourrait effectuer un poste administratif sans station debout prolongée et avec des déplacements restreints. Le salarié peut bénéficier d'une formation compatible avec ses capacités restantes susmentionnées. »
Après un entretien préalable qui s'est déroulé le 4 mai 2017, M. [V] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude, par courrier du 11 mai 2017, dans les termes suivants :
« Par lettre recommandée avec accusé réception en date du 21 avril 2017, vous avez été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé le jeudi 4 mai suivant. Lors de cet entretien tenu en présence de Mme [T] [K], responsable ressources humaines, et de votre responsable hiérarchique, M. [C] [X], président de la société PCSI, vous avez souhaité être assisté par Mme [L] [M], membre et représentante du personnel.
Au cours de cet entretien, nous vous avons exposé les motifs nous ayant conduit à envisager l'éventuelle rupture de votre contrat et avons recueilli vos observations. Nous n'avons aujourd'hui d'autre solution que de prononcer votre licenciement et vous en rappelons les motifs :
Vous avez été engagé le 19 novembre 2007 par la société PCSI, filiale de la société Coteba devenue Artelia Bâtiment & Industrie depuis, par contrat à durée indéterminée, en qualité de Préventionniste Sécurité incendie. Votre position actuelle au statut cadre est celle du coefficient 2.2 130 de la convention collective dite Syntec.
Vous avez été reçu en visite de reprise par le médecin du travail, le docteur [B], le 3 janvier 2017, lequel préconisait alors de vous positionner sur « un poste d'ordre administratif pour éviter la station debout et les efforts physiques ». Devant ces préconisations, nous avons échangé avec vous pour réfléchir à un possible repositionnement au sein de notre groupe, puisque les métiers de la société PCSI nous semblaient incompatibles avec les premières préconisations du médecin du travail. Cette réflexion a d'ailleurs été menée lors d'un entretien tenu le 12 janvier 2017, en présence de Mme [T] [K], responsable ressources humaines, de votre responsable hiérarchique, M. [C] [X], et de M. [I] [Y], délégué du personnel qui vous accompagnait.
Vous avez alors sollicité une nouvelle visite le 18 janvier 2017 auprès du médecin du travail, lequel une fois de plus confirmait la nécessité de vous trouver « un poste administratif, d'éviter la station debout prolongée et les déplacements importants ainsi que les efforts physiques ». Le médecin du travail demandait par ailleurs la possibilité d'une étude de votre poste et des conditions de travail, ainsi que des éléments médicaux complémentaires.
Le 30 janvier 2017, « à la suite de l'étude de poste et des conditions de travail réalisée le 26 janvier 2017, des avis spécialisés et de l'échange avec l'employeur », le docteur [B] vous déclare inapte au poste de préventionniste, en un seul examen. Elle confirme alors les préconisations médicales citées dans le paragraphe précédent, ajoutant la possibilité d'une « formation compatible avec vos capacités restantes » susmentionnées.
Votre inaptitude professionnelle est prononcée en lien avec l'accident du travail survenu en date du 16 mars 2016, contesté par nos soins mais reconnu par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Yvelines dès le 25 mars 2016.
Vous avez été mis en arrêt de travail dès le 30 janvier 2017, à la suite de la visite avec le médecin du travail, et ce jusqu'au 28 février 2017 inclus. Le paiement de votre salaire n'a pas été suspendu, sur proposition de votre hiérarchie, pendant ce premier mois d'inaptitude. A compter du 1er mars 2017, et pour tenir compte de votre impossibilité de reprendre vos fonctions chez PCSI, nous vous avons mis en autorisation d'absence rémunérée pendant toute la durée de l'instruction de la procédure d'inaptitude.
Nous vous avons transmis le 3 février 2017 un courrier vous demandant de nous mettre à jour et de nous faire parvenir le questionnaire dit de compétences ainsi que votre curriculum vitae afin de nous apporter des informations complémentaires pour faciliter votre reclassement. Vous aviez d'ailleurs déjà transmis une première version de ces documents à notre demande, avant même la déclaration d'inaptitude par le médecin du travail, compte tenu des préconisations du 3 janvier 2017.
A réception de votre questionnaire dit de compétences et de votre CV le 23 février 2017, nous avons lancé au sein de notre groupe un audit de reclassement afin de vous présenter le(s) poste(s) susceptible(s) de répondre aux contraintes médicales et à vos capacités professionnelles résiduelles.
Vous aviez dans l'intervalle proposé de vous positionner sur le poste d'ingénieur services généraux, ouvert au sein de la direction immobilière et logistique de notre groupe, basée à [Localité 5], ce que vous avez confirmé par mail le 16 février 2017 puis par courrier du 23 février 2017, précisant que seul ce poste pouvait vous convenir dans l'intégralité des postes ouverts dans notre groupe.
Par anticipation, vous aviez rencontré le 9 février 2017 Mme [O] [Z], DRH en charge des directions fonctionnelles de notre groupe, pour étudier avec elle le contenu du poste et ses contraintes.
Le 16 mars 2017, M. [W] [R], secrétaire du CHSCT [Adresse 7] Réunion, demandait à rencontrer M. [X] et Mme [K] pour discuter de votre situation et imaginer des mesures compensatoires financières en cas de licenciement.
Monsieur [R], dans les jours qui ont suivi, s'est retiré du suivi de votre dossier.
Par courrier du 5 avril 2017, nous avons formalisé auprès de vous les motifs qui ne nous ont pas permis de considérer devoir donner suite à votre candidature sur le poste d'ingénieur services généraux, à savoir :
- ingénieur diplômé permettant une évolution à moyen terme sur un poste de responsable des services généraux,
- déplacements réguliers sur tous les sites situés en Île-de-France et en province, inadéquats au regard des restrictions médicales formulées par le médecin du travail en date du 30 janvier 2017,
- maîtrise des outils bureautiques,
- inadéquation avec les compétences requises pour le poste d'ingénieur services généraux notamment sur les aspects gestion administrative et financière.
Par ailleurs, après consultation de nos différentes sociétés du groupe Artelia, il est ressorti que nous n'avons pas été en mesure de vous proposer un autre poste répondant aux principales préconisations du médecin du travail telles que mentionnées ci-avant.
Ont été alors convoquées en réunion extraordinaire tenue le 20 avril 2017 les deux instances représentatives du personnel de votre périmètre, à savoir le CHSCT [Adresse 7] Réunion et la délégation du personnel Nord qui ont rendu un avis consultatif conjoint défavorable à votre potentiel licenciement, avis qui vous a été transmis par Mme [L] [M].
Cependant, face à ce constat d'impossibilité de vous proposer un autre poste au sein de notre groupe, nous n'avons eu d'autre choix que de vous convoquer à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
Cet entretien n'a pas permis de changer l'appréciation de la situation tant de votre point de vue que du nôtre.
Compte tenu de ces éléments, nous sommes dans l'obligation de vous notifier par la présente la rupture de votre contrat de travail en raison de l'impossibilité de reclassement au sein de notre groupe consécutivement à votre inaptitude émise par le médecin du travail, conformément aux articles L. 1226-10 et suivants du code du travail.
Nous souhaitons malgré tout vous rappeler que lors de l'entretien, craignant de devoir aboutir à cette mesure, M. [X] vous a proposé de vous mettre en relation avec quelques sociétés de son réseau professionnel afin de vous accompagner dans le cadre d'éventuelles recherches de reclassement extérieures, ce que vous avez refusé expressément.
Par conséquent, cette mesure de licenciement prendra effet à compter de la première présentation de la présente, le préavis ne pouvant être exécuté. A réception de ce courrier, nous vous demandons de bien vouloir nous restituer les documents et matériels (carte d'accès aux locaux de la société, etc.) mis à votre disposition par la société dans le cadre de vos fonctions. Vous percevrez une indemnité de licenciement calculée sur la base de votre présence dans l'entreprise à temps plein, malgré vos périodes d'activité à temps partiel. ».
M. [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre en contestation de son licenciement par requête reçue au greffe le 7 juillet 2017.
La décision contestée
Par jugement contradictoire rendu le 23 janvier 2020, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Nanterre a :
- débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné M. [V] aux entiers dépens.
M. [V] avait formulé les demandes suivantes :
- dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et de protection de la santé du salarié : 11 569,80 euros,
- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en vertu des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail : 57 849 euros,
- indemnité complémentaire de préavis : 3 856,60 euros,
- congés payés afférents : 1 156,98 euros,
- intérêts au taux légal à compter de la réception de la lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 juin 2017 valant mise en demeure,
- article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros,
- entiers dépens de la procédure et les éventuels frais d'huissier de justice en cas d'exécution forcée de la décision,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir en vertu de l'article 515 du code de procédure civile.
La société Prévention Contrôle Sécurité Incendie avait, quant à elle, conclu au débouté du salarié et avait sollicité sa condamnation à lui verser une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La procédure d'appel
M. [V] a interjeté appel du jugement par déclaration du 11 février 2020 enregistrée sous le numéro de procédure 20/00393.
Par ordonnance du 14 décembre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a :
- ordonné la révocation de l'ordonnance du 2 novembre 2022,
- déclaré recevables les conclusions de la société Artelia venant aux droits de la société PCSI du 13 décembre 2022,
- dit que l'ordonnance de clôture à intervenir sera rendue le 1er février 2023,
- dit que toutes nouvelles écritures devront être notifiées au plus tard le 27 janvier 2023,
- rappelé que l'audience de plaidoiries est fixée au 16 février 2023.
Conformément à cette décision, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 16 février 2023 par ordonnance rendue le 1er février 2023.
Prétentions de M. [V], appelant
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 14 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [V] demande à la cour d'appel de :
- le dire et juger recevable et bien-fondé en ses demandes, fins et conclusions,
- ordonner la révocation de la clôture intervenue le 2 novembre 2022,
- fixer la clôture à une date ultérieure,
- conserver la date de plaidoirie fixée au 16 février 2023,
- constater que la société Artelia venant aux droits de la société PCSI n'a pas respecté son obligation de sécurité,
- condamner la société Artelia à lui verser la somme de 11 569,80 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité,
- condamner la société Artelia à lui verser la somme de 57 849 euros (15 mois) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- subsidiairement, en application de l'article L. 1226-15 du code du travail, condamner la société Artelia à lui verser la somme de 46 279,20 euros (12 mois) à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de reclassement,
- condamner la société Artelia à lui verser la somme de 3 856,60 euros (1 mois) au titre de l'indemnité compensatrice de l'article L. 1226-14 du code du travail outre 1 156,98 euros au titre des congés payés afférents aux trois mois de préavis.
L'appelant sollicite en outre les intérêts de retard au taux légal depuis la réception de la lettre recommandée avec accusé réception valant mise en demeure en date du 6 juin 2017 et une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Prétentions de la société Artelia, intimée
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 13 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Artelia demande à la cour d'appel de :
- déclarer que le licenciement de M. [V] repose sur une cause réelle et sérieuse,
- déclarer qu'elle a respecté ses obligations en matière de sécurité et de protection de la santé du salarié,
en conséquence,
- confirmer le jugement dont appel,
- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes.
Elle sollicite une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la distraction au profit de la SCP Billon en application de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur le rabat de l'ordonnance de clôture
M. [V] sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture. Il expose que la société PCSI a été absorbée par la société Artelia en cours de procédure, que la clôture a été prononcée le 2 novembre 2022 alors que la société Artelia est intervenue volontairement par voie de conclusions notifiées le 13 décembre 2022, qu'il convient donc de révoquer l'ordonnance de clôture pour permettre la régularisation de la procédure à l'égard de la société Artelia.
La consultation du dossier de la procédure permet de constater que la clôture, certes initialement prononcée le 2 novembre 2022, a fait l'objet d'une ordonnance de révocation le 14 décembre 2022, puis a de nouveau été prononcée le 1er février 2023, de sorte que la société Artelia est valablement intervenue à la procédure.
La demande est, dans ces conditions, sans objet.
Sur l'obligation de sécurité
M. [V] reproche à la société Artelia d'avoir manqué à son obligation de sécurité à plusieurs titres, à savoir l'absence de visite médicale de reprise obligatoire, le non-respect des préconisations du médecin du travail, les pressions de l'employeur et la gestion de l'accident du travail du 16 mars 2016.
La société Artelia conteste avoir manqué à son obligation de sécurité à l'égard de M. [V]. Elle souligne au contraire sa loyauté à l'égard du salarié, au titre de la formation professionnelle qu'elle a assurée au-delà de ce qui pouvait être attendu et compte tenu de la rupture conventionnelle qu'elle lui a proposée. Elle fait par ailleurs état d'actes de concurrence déloyale de la part de M. [V] et des fautes professionnelles commises par celui-ci.
Il est rappelé que l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige, dispose : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d'information et de formation ;
3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ».
L'employeur ne peut s'exonérer de sa responsabilité que s'il démontre qu'il a bien pris toutes les mesures des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Concernant l'absence de visite médicale de reprise obligatoire
L'article R. 4624-31 du code du travail énonce que le travailleur bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel.
M. [V], justifie par la production de son arrêt de travail (sa pièce 8) et ses bulletins de salaire (sa pièce 7) qu'il a été en arrêt maladie du 1er février au 6 mars 2016 du fait, selon ses déclarations, d'une hernie discale aggravée.
La société Artelia ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, d'avoir organisé une visite de reprise, alors que M. [V] avait été arrêté plus de 30 jours.
Le salarié souligne que cette absence de visite de reprise n'a pas été sans conséquence sur sa santé, puisque le 16 mars 2016, à peine une dizaine de jours après avoir repris son poste, il a été victime d'un accident de trajet en se rendant chez un client et qu'il a été placé en arrêt maladie jusqu'au 4 avril 2016, cet arrêt étant prouvé par les arrêts de travail produits (pièce 8-1 du salarié) et n'étant pas remis en cause par l'employeur ainsi que tous les autres arrêts.
M. [V] indique de façon pertinente que le fait que l'employeur n'a pas organisé de visite médicale de reprise, à la suite de ce nouvel arrêt de travail, même si celle-ci n'était pas obligatoire, constitue également un manquement à son obligation de sécurité dès lors que le salarié avait été en arrêt de travail à de nombreuses reprises, ce qui aurait dû alerter l'employeur sur sa fragilité et donc la nécessité d'une visite médicale pour confirmer qu'il qu'il pouvait reprendre le travail sans difficultés.
Concernant le non-respect des préconisations du médecin du travail
M. [V] reproche à son employeur de ne pas avoir respecté les préconisations du médecin du travail.
En effet, suivant avis du 27 avril 2015, le médecin du travail a énoncé l'avis suivant : « Aptitude confirmée. Il serait souhaitable qu'il puisse exercer une partie de son activité en télétravail ».
M. [V] reproche à la société Artelia de ne pas avoir donné suite à ces recommandations, sans explication et malgré un courriel de relance du 21 mai 2015.
La société Artelia oppose que M. [V] s'est entretenu plusieurs fois avec M. [X], président de la société, à ce propos, que son poste, par nature mobile, ne permettait pas le recours au télétravail et qu'il était parfaitement conscient de l'impossibilité d'exercer ses missions en recourant au télétravail.
La société Artelia explique qu'en pratique, un prévisionniste a pour principale mission l'analyse concrète des risques en présence et la préconisation, par des avis et conseils techniques, des mesures les plus adaptées pour limiter les effets d'un sinistre. Il peut être appelé n'importe quand sur site et dispose d'une heure pour se rendre sur site en cas d'appel. Il doit être mobile et disponible. Chaque prévisionniste employé au sein de la société est en charge d'au moins treize sites et doit se rendre un jour par mois sur chaque site.
Même si la mise en place d'un télétravail pouvait, au regard de ce profil de poste, s'avérer difficile, il appartenait en tout état de cause à la société Artelia d'échanger sur ce point avec le salarié et le médecin du travail, ce dont elle ne justifie pas, manquant de ce fait à son obligation de sécurité.
Concernant les pressions de l'employeur
M. [V] accuse son employeur de lui avoir reproché de prendre des rendez-vous chez le kinésithérapeute pendant son temps de travail sur l'horaire collectif et que face à la pression constante de son employeur, il a été contraint d'arrêter ses séances.
Il produit un courrier de M. [X] du 22 août 2016, dans lequel le président de la société indique reprendre les remarques qu'il a été amené à faire au salarié pour les officialiser et dans ce cadre, lui a écrit : « Concernant vos horaires de travail, là aussi, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec vous sur ce sujet vous rappelant les horaires prévus dans le règlement intérieur et affiché sur le tableau ad'hoc. Pratiquement tous les jours, vous partez vers 16h30. Je vous en ai fait la remarque à plusieurs reprises et vous me donnez les explications suivantes :
- j'ai rendez-vous chez mon kiné,
- j'arrive à 7h30 le matin.
Ces deux motifs, comme je vous l'ai déjà dit, ne sont pas recevables pour les raisons suivantes :
- vos rendez-vous personnels peuvent être pris en dehors des horaires de travail surtout qu'en règle générale, ils sont réguliers (plusieurs fois par semaine).
- votre travail ne vous oblige en aucun cas à être présent au bureau à 7h30. Je ne peux d'ailleurs pas vous autoriser sachant, qu'en cas d'incident sur votre personne et compte tenu de vos problèmes physiques, la responsabilité de PCSI pourrait être engagée.
En réalité, vous arrivez tôt le matin pour convenance personnelle. D'ailleurs, il n'est pas rare de vous voir plusieurs fois par jour quitter le bureau pour aller boire « votre petit crème » au bar du CNIT alors qu'il existe un distributeur de café au sein de PCSI » (pièce 12 du salarié).
M. [V] produit par ailleurs une attestation de sa kinésithérapeute, laquelle indique que les rendez-vous étaient modifiés de manière incessante en raison du travail du salarié et qu'entre le 11 juillet 2016 et le 10 octobre 2016, il a même dû arrêter ses séances.
M. [V] prétend que cette absence de soins a entraîné sa rechute, celui-ci ayant de nouveau été arrêté par son médecin traitant du 26 septembre 2016 au 25 décembre 2016.
Il produit un certificat médical de son médecin traitant du 24 mai 2017, en ces termes : « l'arrêt de travail a été justifié par une aggravation de son état de santé nécessitant impérativement des soins plusieurs fois par semaine. » (pièce 43 du salarié).
Toutefois, contrairement à ce que soutient M. [V], il ne se déduit pas de ces éléments que l'employeur a fait pression sur lui pour l'empêcher de prendre rendez-vous chez son kinésithérapeute. Il n'est pas précisé les conditions d'organisation de ces séances, leur fréquence, la période de référence. L'employeur porte des critiques générales sur le travail de M. [V], lesquelles englobent le fait que le salarié disposait de son emploi du temps à sa guise. Enfin, ni le médecin, ni la kinésithérapeute n'attestent que M. [V] aurait été empêché de suivre des séances de soins du fait de l'attitude de son employeur, ni d'un lien avec la dégradation de son état de santé. Aucun manquement de la société Artelia ne peut dans ces conditions être retenu.
Concernant la gestion de l'accident du travail du 16 mars 2016
Il sera constaté que M. [V] allègue uniquement à ce titre que la société a tenté de jeter le discrédit sur lui en doutant de la réalité de l'accident du travail et en remettant en cause les démarches entreprises. Il admet que les formalités de déclaration de l'accident du travail ont bien été effectuées.
En revanche, M. [V] allègue que la société a gravement méconnu ses obligations en matière de santé et de sécurité, durant la période consécutive à son accident en permettant ouvertement qu'il soit sollicité durant son arrêt.
A l'appui de cette allégation, il se prévaut d'un courriel du 17 mars 2016 émanant de Mme [P], assistante de direction de la société PCSI, qui a écrit à M. [X] et à M. [H] (dont le poste au sein de la société n'est pas précisé) : « Pour info. [A] [V] est en arrêt maladie jusqu'au 25 mars 2016. Il doit faire un IRM. Il est en attente d'un rendez-vous, il nous recontacte pour la suite. Il a son PC avec lui et continuera à traiter tous ses dossiers clients. Il est joignable sur son mobile pro, ou à son domicile. » (pièce 77 du salarié).
Il ne peut être déduit de ce seul courriel, qui se limite à informer la direction de l'entreprise de l'arrêt maladie du salarié et qui donne quelques informations sur les suites prévisibles de cet arrêt, indiquant par ailleurs la disponibilité de celui-ci, que l'entreprise a invité différents interlocuteurs professionnels à le solliciter pendant son arrêt.
En définitive, l'absence de visite médicale de reprise et le non-respect des préconisations du médecin du travail conduisent à retenir que la société Artelia n'a pas respecté son obligation de sécurité, ce qui a causé un préjudice à M. [V], en relation avec la dégradation de son état de santé, que les circonstances de la cause permettent de réparer par l'allocation d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, par infirmation du jugement entrepris.
Sur l'obligation de reclassement
M. [V] soutient que la société Artelia a manqué à son obligation de reclassement tandis que cette dernière allègue l'avoir parfaitement respectée.
En application de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa version issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, en cas d'inaptitude du salarié, il pèse sur l'employeur une obligation de reclassement ainsi déterminée : « Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. »
L'article L. 1226-12 du même code énonce : « Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.
L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III. »
Aux termes de la lettre de licenciement, la société Artelia indique ne pas avoir trouvé de solutions de reclassement.
Dans la mesure où elle était tenue à une obligation de moyens, il convient de rechercher si elle a rempli son obligation de recherche de reclassement de façon loyale et sérieuse.
Concernant la communication de la liste des postes ouverts au sein du groupe
La société Artelia a débuté la procédure de reclassement en communiquant à M. [V] le 3 février 2017 la liste de postes ouverts dans le groupe au 25 janvier 2017.
M. [V] reproche à la société de lui avoir communiqué une liste incompréhensible, sans aucun détail des postes qui ne lui a pas permis de se projeter sur les postes vacants puisqu'il ne savait même pas à quoi ils correspondaient.
Cette liste, qu'il verse aux débats en pièce 26, contient les informations suivantes : le secteur d'activité, la branche et la région, le lieu et la qualification du poste, avec rarement des acronymes manifestement connus de tous, qui n'a donné lieu à aucune réclamation immédiate du salarié et s'avère tout à fait compréhensible, à charge pour le salarié de demander des précisions si nécessaire.
M. [V] a d'ailleurs répondu à cette communication par courrier du 21 février 2017, sans émettre de réserves, en indiquant : « Vous m'avez adressé une liste des postes à pourvoir. Actuellement le seul poste correspondant à mon profil est celui d'ingénieur des services généraux » (pièce 31 de l'employeur), ce dont il se déduit que cette communication n'encourrait pas le reproche formulé par le salarié.
Concernant la rencontre du salarié avec la DRH du groupe
Il est établi que, dans le cadre de l'instruction de la recherche de reclassement, M. [V] a rencontré le 10 février 2017, Mme [Z], DRH d'Artelia Holding, pour échanger sur le poste d'ingénieur des services généraux choisi par le salarié.
Concernant la sollicitation des autres sociétés du groupe en France
M. [V] rappelle que Mme [K] a envoyé, le 24 février 2017, un courriel à d'autres sociétés du groupe et que l'ensemble des sociétés sollicitées a répondu qu'aucun poste correspondant à son profil n'était disponible.
Il reproche à la société d'avoir simplement demandé si un poste de reclassement était disponible sans donner plus de précisions sur la recherche.
L'analyse du courriel que Mme [F], DRH, a adressé à six personnes du groupe montre toutefois que ce reproche n'est pas fondé. En effet, il est fait état de l'avis d'inaptitude, du questionnaire de compétence complété par M. [V], de son CV, de la transmission déjà faite de la liste des postes ouverts en CDI dans le groupe, de son choix d'être positionné sur un poste d'ingénieur des services généraux mais de la nécessité d'élargir le champ des recherches (pièce 31 du salarié).
Concernant le poste d'ingénieur des services généraux
M. [V] explique qu'il était intéressé par le poste d'ingénieur services généraux, dont la compatibilité avec son état de santé avait été validée par le médecin du travail, qu'il avait rencontré la DRH du groupe Artelia le 10 février 2017 à ce sujet, que le poste avait même été validé par les représentants du personnel, mais que contre toute attente, la société lui a finalement refusé ce poste par courrier du 5 avril 2017.
La société Artelia explique de son côté qu'après avoir étudié sérieusement la candidature de M. [V], elle a notifié à celui-ci, ainsi qu'à la médecine du travail, son impossibilité de le positionner sur ce poste, par courrier du 5 avril 2017.
Aux termes de ce courrier et de ses écritures, la société Artelia fonde sa décision sur différentes considérations. D'abord, elle souligne que le candidat recherché devait être un ingénieur diplômé, ce qui permettait une évolution à moyen terme sur un poste de responsable des services généraux. Ensuite, elle fait valoir que les restrictions médicales émises par le médecin du travail n'étaient pas compatibles avec les déplacements réguliers sur tous les sites situés en Île-de-France et en province inhérents au poste. Elle ajoute que le poste requérait une maîtrise des outils informatiques que n'avait pas M. [V] et plus généralement, elle notait une inadéquation avec les compétences requises sur les aspects gestion administrative et financière. La société Artelia souligne également que le poste était basé dans le Val-de-Marne à [Localité 5] alors que M. [V] habite à [Localité 6] dans les Yvelines, soit à 45 km du lieu de travail. Elle souligne enfin que le poste constituait une véritable promotion par rapport à un poste de préventionniste.
M. [V] fait valoir de son côté qu'il avait l'expérience et les compétences pour exercer les missions proposées, qu'il a notamment occupé le poste de directeur technique et commercial pendant deux ans, le poste de directeur d'exploitation pendant trois ans et celui de directeur commercial et technique pendant un an, que son bilan de compétences approfondi, réalisé en 2005 faisait déjà apparaître différentes qualités, comme le sens du challenge, la compétence pour les activités organisationnelles les activités d'aide à autrui, l'éthique et le sens des responsabilités, la fermeté et la rigueur, des capacités d'analyse supérieures à la moyenne et un profil de leader.
Il indique que le seul point sur lequel il aurait eu besoin d'une formation, c'était sur l'utilisation du logiciel Excel pour la réalisation de tableaux de gestion, qu'il aurait pu réaliser dans la mesure où il bénéficiait d'un compte personnel de formation crédité de 179 heures.
La fiche de poste d'ingénieur des services techniques mentionne que :
- la fonction consiste à assurer la gestion humaine en coordonnant les interventions des prestataires extérieurs intervenant sur site, la gestion des locaux en assurant le suivi des programmes de travaux et de maintenance, d'être garant de la conformité des installations aux normes, d'assurer la veille technologique, de mettre en 'uvre les politiques du groupe en matière d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de participer aux transferts et aménagements en interne, d'assurer la gestion administrative et financière en gérant les budgets et les plannings et en négociant les contrats,
- le profil recherché suppose une formation initiale supérieure spécialité maintenance, services généraux, facilities management, et une expérience d'au moins 6 à 8 ans sur un poste équivalent, des qualités d'organisation, de rigueur, d'autonomie, d'une forte capacité d'analyse et de synthèse et une bonne maîtrise des outils informatiques et bureautiques usuels.
Au regard de cette fiche de poste et par comparaison avec les fonctions de prévisionniste, il apparaît que M. [V] ne pouvait prétendre occuper ce poste sans une solide formation complémentaire pour acquérir les compétences requises telles que rappelées précédemment, à laquelle l'employeur n'était pas tenu dans le cadre de son obligation de reclassement.
C'est donc de façon légitime que la société Artelia a pu refuser de proposer ce poste à M. [V].
Concernant la consultation des instances représentatives du personnel
Le 21 avril 2017, les délégués du personnel et le CHSCT ont émis un avis négatif au licenciement pour inaptitude de M. [V] dans les termes suivants : « Les représentants du personnel présents à cette réunion, regrettent que leur avis ne soit que consultatif. Néanmoins, ils déplorent qu'une entreprise de la taille du groupe Artelia (environ 2 500 salariés en France) possédant autant de secteurs d'activité que de métiers attachés à ceux-ci, soit incapable de proposer un poste adapté à un salarié ayant des compétences pouvant évoluer. De plus et en référence à la charte éthique du groupe, laisser un collaborateur de 57 ans à 7 ans de la retraite retourner sur le marché du travail dont on connaît l'appétence pour ce genre de profil, relève d'un certain mépris pour la personne humaine. Dans le cadre de l'accord dur la diversité et l'accord pour l'emploi et le maintien des personnes en situation de handicap au sien des sociétés du groupe Artelia, signés par les partenaires sociaux, les représentants du personnel souhaitent qu'un travail sérieux soit mené afin de définir des règles humaines et déontologiques de traitement de ce genre de sujets, gestion de la fin de carrière des collaborateurs et gestion des situations d'invalidité ou d'incapacité professionnelle. » (pièce 36 de l'employeur).
L'ensemble de ces éléments conduit à retenir que la société Artelia, même si en définitive elle n'a pas été en mesure de proposer un poste de reclassement à M. [V], a rempli avec sérieux et loyauté son obligation de recherche d'un reclassement.
M. [V] sera débouté de sa demande tendant à dire mal fondé son licenciement, ainsi que des demandes subséquentes, par confirmation du jugement entrepris.
Sur le complément d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents
M. [V] expose que la société ne lui a payé que deux mois d'indemnité compensatrice de préavis alors qu'il pouvait prétendre à trois mois en vertu de la convention collective Syntec et qu'il n'a pas reçu les congés payés afférents. Il réclame en conséquence un mois supplémentaire à ce titre et les congés payés sur l'intégralité des sommes dues.
La société Artelia objecte qu'il est de jurisprudence constante que l'indemnité est celle prévue à l'article L. 1234-1 du code du travail et non celle prévue par la convention collective. Elle ajoute que cette indemnité qui a une nature indemnitaire et non salariale n'ouvre pas droit à congés payés.
L'alinéa 1er de l'article L. 1226-14 du code du travail dispose : « La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9. »
L'article L. 1234-5 du même code dispose : « Lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.
L'indemnité compensatrice de préavis se cumule avec l'indemnité de licenciement et avec l'indemnité prévue à l'article L. 1235-2. »
Ainsi que le soutient à juste titre l'employeur, le salarié licencié pour inaptitude à la suite d'une maladie professionnelle bénéficie d'un régime d'indemnisation spécifique prévu à l'article L. 1226-14 rappelé ci-dessus, dans le cadre duquel il peut prétendre à une indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis calculé sur la base du préavis légal, qui n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et qui ne doit pas être prise en compte pour le calcul des droits à congés payés.
M. [V] qui reconnaît avoir reçu une indemnité sur la base de la durée du préavis légal, devra en conséquence être débouté de sa demande, par confirmation du jugement entrepris.
Sur les intérêts moratoires
Le créancier peut prétendre aux intérêts de retard calculés au taux légal, en réparation du préjudice subi en raison du retard de paiement de sa créance par le débiteur. L'unique condamnation, prononcée à titre indemnitaire, produira intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, qui en fixe le principe et le montant.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
La société Artelia, tenue à indemnisation, supportera les dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
Elle sera en outre condamnée à payer à M. [V] une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 1 500 euros et sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.
Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant les frais irrépétibles mais infirmé en ce qui concerne les dépens.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,
CONSTATE que la demande de rabat de clôture est sans objet,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 23 janvier 2020, excepté en ce que M. [A] [V] a été débouté de sa demande au titre du non-respect de l'obligation de sécurité et en ce qu'il a été condamné aux dépens,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE la SAS Artelia venant aux droits de la SAS Prévention Contrôle Sécurité Incendie à payer à M. [A] [V] une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité, outre intérêts de retard au taux légal à compter du présent arrêt,
CONDAMNE la SAS Artelia venant aux droits de la SAS Prévention Contrôle Sécurité Incendie au paiement des entiers dépens,
CONDAMNE la SAS Artelia venant aux droits de la SAS Prévention Contrôle Sécurité Incendie à payer à M. [A] [V] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE la SAS Artelia venant aux droits de la SAS Prévention Contrôle Sécurité Incendie de sa demande présentée sur le même fondement.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme [S] [E], greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,