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12/04/2023 | FRANCE | N°22/00056

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 12 avril 2023, 22/00056


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 12 AVRIL 2023



N° RG 22/00056 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U5ZE



AFFAIRE :



[O] [H]





C/

S.A.R.L. IDF LASER









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : I

N° RG : F 20/001

16



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la AARPI BEZARD GALY COUZINET



Me Mathilde PUYENCHET







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appe...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 AVRIL 2023

N° RG 22/00056 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U5ZE

AFFAIRE :

[O] [H]

C/

S.A.R.L. IDF LASER

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : I

N° RG : F 20/00116

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la AARPI BEZARD GALY COUZINET

Me Mathilde PUYENCHET

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [O] [H]

né le 13 Avril 1982 à [Localité 6] (37)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Sandrine BEZARD-JOUANNEAU de l'AARPI BEZARD GALY COUZINET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000002 - N° du dossier 20190

APPELANT

****************

S.A.R.L. IDF LASER

N° SIRET : 523 75 1 9 07

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Mathilde PUYENCHET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000034 - N° du dossier 1640

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

[O] [H] a été engagé par la société Idf Laser qui emploie habituellement moins de onze salariés, suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2019 en qualité d'assistant de production, statut ouvrier, coefficient 145, en référence aux dispositions de la convention collective régionale de la métallurgie d'Eure-et-Loir.

Par lettre datée du 23 décembre 2019, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 9 janvier 2020 et à l'a mis à pied à titre conservatoire puis par lettre datée du 14 janvier 2020, lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Le 9 juin 2020, [O] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Chartres afin d'obtenir la condamnation de la société Idf Laser au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement mis à disposition le 7 décembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes statuant en formation de départage a débouté [O] [H] de l'ensemble de ses demandes, a débouté la société Idf Laser de sa demande reconventionnelle et a condamné [O] [H] aux entiers dépens.

Le 5 janvier 2022, [O] [H] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 30 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, [O] [H] demande à la cour d'infirmer le jugement, statuant à nouveau, de déclarer dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement, de condamner la société Idf Laser à lui verser en conséquence les sommes suivantes :

* 964,51 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 96,45 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 556,91 euros à titre de rappel de salaire durant la mise à pied à titre conservatoire,

* 155,69 euros au titre des congés payés afférents,

* 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

d'ordonner la remise des bulletins de salaire afférents à l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ainsi que les documents afférents à la rupture du contrat de travail rectifiés, sous astreinte de 75 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, la cour se réservant expressément le droit de liquider l'astreinte, de dire que l'intégralité des sommes sera augmentée des intérêts au taux légal et ce à compter du jour de l'introduction de la demande en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents et le rappel de salaire durant la mise à pied titre conservatoire et congés payés afférents et de condamner la société Idf Laser aux entiers dépens.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 29 avril 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Idf Laser demande à la cour de débouter l'appelant de l'intégralité de ses demandes, de confirmer le jugement et de condamner l'appelant à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 7 mars 2023.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement pour faute grave notifiée au salarié lui reproche d'avoir fait preuve d'insubordination en refusant d'effectuer une tâche de livraison, en spécifiant au chef d'atelier que le refus de ses demandes d'absence engendrerait un arrêt maladie de sa part et d'avoir quitté l'entreprise sans autorisation le 23 décembre 2019.

Le salarié conclut au caractère dénué de cause réelle et sérieuse du licenciement au motif que ses fonctions ne comportaient pas la livraison, qu'il lui était impossible de partir en livraison le 23 décembre 2019 alors qu'il attendait un appel de l'hôpital pour que soit effectué un transfert d'embryon sur son épouse, que l'employeur était informé du parcours de procréation médicalement assisté (Pma) dans lequel il était engagé et avait autorisé à plusieurs reprises son absence dans ce cadre, qu'il a quitté son entreprise en informant son chef d'équipe à 9h41 après un appel de l'hôpital à son épouse pour la rejoindre.

La société conclut au débouté des demandes du salarié en faisant valoir que le licenciement est fondé sur une faute grave en ce que le salarié avait déjà bénéficié de ses trois autorisations d'absence légales dans le cadre de la procédure de Pma, que le salarié a fait preuve d'insubordination en refusant d'effectuer la livraison demandée qui entrait dans ses attributions, qu'il était le seul salarié pouvant effectuer cette tâche ce jour-là, que cette tâche a dû être réalisée dans l'urgence en ayant recours à un prestataire extérieur, qu'il a quitté son poste de travail sans autorisation.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque.

Au soutien de la faute grave, l'employeur produit trois attestations rédigées par [V] [E], responsable d'atelier, [R] [N], responsable bureau d'études, [P] [K], cisailleur, qui témoignent du refus du salarié d'exécuter une livraison au sein de l'entreprise Rassinoux distante d'environ trente minutes de route, confiée le 23 décembre 2019 à 8 heures par M. [E], à défaut d'autre salarié disponible pour effectuer ce travail, du fait que le salarié a quitté son poste le même jour à 9h40 sans prévenir la direction et ne s'est pas représenté à son poste de la journée et que cette tâche a dû être confiée à M. [Y], prestataire de la société.

Il résulte des dispositions du contrat de travail du salarié que celui-ci est amené à réaliser toutes tâches nécessaires au bon fonctionnement de la société en termes de délai et de satisfaction client, ce dont il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à opposer que la tâche qui lui a été confiée le 23 décembre 2019 n'entrait pas dans ses obligations contractuelles.

Le salarié s'est absenté pour les besoins du parcours de Pma les 19 novembre, 28 novembre, 6 décembre et 18 décembre 2019, avec l'autorisation de l'employeur, informé de ce parcours de Pma.

Si le salarié ne justifie pas avoir préalablement informé la direction d'un risque de départ de son poste de travail le 23 décembre 2019 en raison du possible transfert d'embryon ce même jour, celui-ci justifie par la production d'un certificat médical du centre hospitalier de [Localité 5] avoir été présent avec son épouse au service gynécologique pour un transfert d'embryologie le 23 décembre 2019.

Eu égard au parcours de Pma dans lequel le salarié se trouvait engagé avec son épouse, dont était informé l'employeur et des circonstances particulières du déroulement des faits du 23 décembre 2019 reprochés au salarié, qui était exempt de tout passé disciplinaire, il convient de retenir que le licenciement, initié dès le 23 décembre 2019 par l'employeur, revêt un caractère disproportionné par rapport aux faits retenus.

Les faits, outre qu'il ne rendaient pas impossibles le maintien du salarié dans l'entreprise, ne constituaient pas un motif réel et sérieux de licenciement.

Il s'ensuit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.

Le salarié a par conséquent droit au paiement par la société d'une indemnité compensatrice de préavis, qui sera fixée, eu égard à son ancienneté, à la somme de 964,51 euros ainsi que d'une indemnité compensatrice de congés payés incidents de 96,45 euros, ces montants n'étant pas discutés.

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, le salarié a en outre droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant maximal d'un mois de salaire eu égard à son ancienneté de moins d'une année et de l'effectif de moins de onze salariés de l'entreprise.

Il sera alloué au salarié une somme de 965 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au paiement de laquelle sera condamnée la société.

La société sera en outre condamnée au paiement des sommes de 1 556,91 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied à titre conservatoire qui n'était pas justifiée et de 155,69 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés incidents.

Le jugement sera infirmé sur tous ces points.

Sur le préjudice moral

Le salarié forme une demande de réparation de son préjudice moral au motif qu'il a été convoqué à l'entretien préalable au licenciement à la date du transfert d'embryon le 23 décembre 2019.

La société conclut au débouté de cette demande.

A défaut de justifier d'un préjudice moral distinct non réparé par l'indemnité allouée au titre de la rupture du contrat de travail, il convient de débouter le salarié de sa demande de ce chef. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les intérêts au taux légal

Il est rappelé que les créances de nature salariale produisent des intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation de la société devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes de Chartres et les créances de nature indemnitaire produisent des intérêts à compter du présent arrêt.

Sur la remise de documents

Eu égard à la solution du litige, il sera ordonné à la société de remettre au salarié un bulletin de salaire et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt. Le jugement sera infirmé en son débouté de cette demande.

Le salarié sera débouté de sa demande d'astreinte qui n'est pas nécessaire. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Eu égard à la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer au salarié la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement en ce qu'il déboute [O] [H] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés incidents, de rappel de salaire sur mise à pied à titre conservatoire et de congés payés incidents, de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de remise de documents et en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

DIT que le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Idf Laser à payer à [O] [H] les sommes suivantes :

* 964,51 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 96,45 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés incidents,

* 1 556,91 euros à titre de rappel de salaire durant la mise à pied à titre conservatoire,

* 155,69 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés incidents,

* 965 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

RAPPELLE que les créances de nature salariale produisent des intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation de la société devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes de Chartres et les créances de nature indemnitaire produisent des intérêts à compter du présent arrêt,

ORDONNE à la société Idf Lasez de remettre à [O] [H] un bulletin de salaire et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt,

CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Idf Laser aux entiers dépens de l'instance,

CONDAMNE la société Idf Laser à payer à [O] [H] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 22/00056
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;22.00056 ?
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