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12/04/2023 | FRANCE | N°21/03123

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 12 avril 2023, 21/03123


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 12 AVRIL 2023



N° RG 21/03123



N° Portalis DBV3-V-B7F-UZRU



AFFAIRE :



[M] [H]



C/



S.A.S. MCAFEE Prise





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 18/02663



Copi

es exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Lalia MIR



l'AARPI JRF AVOCATS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt su...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 AVRIL 2023

N° RG 21/03123

N° Portalis DBV3-V-B7F-UZRU

AFFAIRE :

[M] [H]

C/

S.A.S. MCAFEE Prise

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 18/02663

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Lalia MIR

l'AARPI JRF AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [M] [H]

née le 16 Décembre 1969 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Lalia MIR, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 551

Représentant : Me Stéphane LILTI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E2129

APPELANTE

****************

La SAS Trellix Security France, venant au droit de la S.A.S. MCAFEE

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20210987

Représentant : Me Jennifer CARREL de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0261

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [M] [H] a été embauchée à compter du 6 juillet 2015 selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'ingénieur commercial (statut de cadre) par la société Intel Corporation SAS, pour une rémunération comportant une partie fixe et une prime sur objectifs.

En avril 2017, le contrat de travail de Mme [H] a été transféré à la société McAfee SAS.

À compter du 29 mars 2018, Mme [H] a été placée en arrêt de travail pour maladie sur la base de formulaires mentionnant un accident du travail.

Par lettre du 25 juillet 2018, Mme [H] a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de la société McAfee SAS.

Par décision du 28 septembre 2018, la Caisse primaire d'assurance-maladie a reconnu que Mme [H] avait été victime d'un accident du travail le 28 mars précédent.

Le 11 octobre 2018, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre pour demander la requalification de sa prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur en un licenciement nul et la condamnation de la société McAfee SAS à lui payer notamment des indemnités de rupture et des dommages-intérêts.

Par jugement de départage du 13 octobre 2021, le juge départiteur du conseil de prud'hommes a :

- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail formée par Mme [H] s'analyse en une démission ;

- débouté Mme [H] de toutes ses demandes ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles ;

- condamné Mme [H] aux dépens.

Le 21 octobre 2021, Mme [H] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 28 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré irrecevables les demandes de rappel de commission pour les années 2016, 2017 et 2018 et de congés payés afférents ainsi que la demande de rappel d'une somme de 70 000 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents formées par Mme [H] en appel ;

- réservé l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens afférents à l'incident.

Aux termes de ses conclusions du 23 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, Mme [H] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de son employeur s'analyse en un licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société McAfee SAS à lui payer les sommes suivantes :

* 24 488,06 euros à titre de rappel de commissions pour l'année 2016, outre les congés payés afférents ;

* 47 927,25 euros à titre de rappel de commissions pour l'année 2017, outre les congés payés afférents ;

* 5 557,94 euros à titre de rappel de commissions pour l'année 2018, outre les congés payés afférents ;

* 5 999,67 euros à titre de rappel de maintien de salaire pendant la période d'arrêt de travail pour maladie ;

* 9 924,88 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

* 28 969,92 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2 896,99 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

* 115 879,68 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, ou subsidiairement, 39 699,52 euros au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité ;

* 70 000 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre les congés payés afférents ;

* 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire que les intérêts légaux courront à compter de l'introduction de la demande et ordonner la capitalisation ;

- condamner la société McAfee SAS aux dépens.

Aux termes de ses conclusions du 19 octobre 2022, la société Trellix Security France, venant aux droits de la société McAfee SAS, demande à la cour de :

- déclarer irrecevables les demandes de rappel de commissions et de rappel d'heures supplémentaires ainsi que de congés payés afférents formées par Mme [H] ;

- confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

- y ajoutant, condamner Mme [H] à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Dontot, JRF & Associés.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 31 janvier 2023.

SUR CE :

Sur les demandes de rappel de commissions, d'heures supplémentaires et de congés payés afférents :

Considérant que ces demandes formées par Mme [H] dans ses conclusions au fond du 23 juin 2022 ont été déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 septembre 2022 ; qu'elles sont donc sans objet devant la cour ;

Sur la requalification de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement nul et des dommages-intérêts pour licenciement nul :

Considérant qu'au soutien de sa demande de requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement nul Mme [H] invoque les manquements suivants à l'encontre de son employeur :

- un retrait de ses comptes de clients les plus importants et les plus rémunérateurs durant les années 2016, 2017 et 2018 rendant les objectifs annuels afférents à la rémunération variable irréalisables et ayant entraîné une diminution de cette rémunération, constitutif par ailleurs d'une discrimination et d'une inégalité puisque ce retrait a profité à des salariés concentrant entre les mêmes mains les comptes les plus rémunérateurs à son détriment ;

- un harcèlement moral infligé par sa hiérarchie, constitué par le retrait des comptes clients les plus rémunérateurs, un isolement et une mise à l'écart, des moqueries et humiliations devant d'autres salariés, des pressions et des colères de son supérieur hiérarchique direct culminant dans un épisode de violence le 28 septembre 2018 reconnu comme accident du travail, et ayant entraîné une dégradation de son état de santé ;

Qu'elle réclame en conséquence la condamnation de la société à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement nul ;

Que la société conclut au débouté des demandes ;

Considérant que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou le cas échéant nul, si les manquements invoqués sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;

Qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Qu'aux termes de l'article L. 1154-1 du code du travail : 'Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. / Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. / Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles' ; qu'en application de l'article L. 1152-3 toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;

Qu'en l'espèce, s'agissant de la modification de la composition du portefeuille des comptes clients, Mme [H] n'établit ni même n'allègue que ses comptes étaient contractualisés ; que de plus, elle ne démontre en rien que la baisse de la rémunération variable sur les années litigieuses résulte d'une modification de son portefeuille de clients ; qu'elle ne présente non plus aucun élément de fait susceptible de caractériser une inégalité de traitement par rapport à d'autres salariés de l'entreprise et n'invoque de plus aucun critère de discrimination illicite sur ce point ;

Que s'agissant des autres faits invoqués, à savoir un isolement et une mise à l'écart, des moqueries et humiliations devant d'autres salariés, des pressions et colères de son supérieur hiérarchique direct, Mme [H] se borne à procéder par allégation, à l'exception de l'altercation survenue le 28 mars 2018 avec son supérieur dont la matérialité est établie et qui a été reconnue comme accident du travail ; qu'il s'agit là toutefois d'un fait unique impropre à caractériser l'existence d'un harcèlement moral, lequel exige l'accomplissement d'agissements répétés ;

Que s'agissant de la dégradation de l'état de santé, les pièces médicales versées aux débats ne font pas ressortir d'élément afférent à un harcèlement moral ;

Qu'il résulte de ce qui précède, que Mme [H] ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral ou d'une discrimination directe ou indirecte ;

Que Mme [H] n'établit donc pas l'existence de manquements de l'employeur suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail ;

Qu'il y a donc lieu de débouter Mme [H] de sa demande de requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement nul et de sa demande de dommages-intérêts afférente ; que le jugement sera confirmé sur ces points ;

Sur la demande subsidiaire de requalification de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Considérant que Mme [H] n'invoque aucun moyen au soutien de ces demandes ; qu'il y a donc lieu de la débouter de sa demande de requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande d'indemnité afférente ; que le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission ;

Sur les demandes d'indemnité de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le débouté de ces demandes ; que le jugement sera confirmé sur ces points ;

Sur les dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité :

Considérant que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en application de l'article L. 4121-1 du code du travail qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer de manière effective la sécurité et protéger la santé des travailleurs et que ne méconnaît cependant pas son obligation légale l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les article L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

Qu'en l'espèce, Mme [H] soutient que son état de santé s'est dégradé de manière très importante tout au long de la relation contractuelle et qu'à aucun moment, l'employeur n'a tenté de mettre fin à cette situation malgré ses remarques répétées ;

Que toutefois, elle ne verse aucun élément démontrant qu'elle a fait des 'remarques répétées' relatives à la dégradation de son état de santé ;

Qu'en outre, Mme [H] n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre ;

Qu'il convient en conséquence de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire ;

Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

Considérant en l'espèce que Mme [H] n'explique pas en quoi l'employeur aurait manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail ; qu'en outre et en tout état de cause, elle n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre ; qu'il convient donc de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur le maintien de salaire pendant l'arrêt de travail pour maladie :

Considérant en l'espèce que la société Trellix Security France justifie par le reçu pour solde de tout compte que Mme [H] a reçu paiement des sommes litigieuses ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur les intérêts légaux et la capitalisation :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le débouté de ses demandes ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige et aux demandes des parties, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces points ; qu'en outre, Mme [H], qui succombe en appel, sera condamnée à payer à la société Trellix Security France une somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Dontot, JRF & Associés ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Mme [M] [H] à payer à la société Trellix Security France une somme de 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne Mme [M] [H] aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Dontot, JRF & Associés.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03123
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;21.03123 ?
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