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05/04/2023 | FRANCE | N°21/00876

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 05 avril 2023, 21/00876


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 05 AVRIL 2023



N° RG 21/00876

N° Portalis DBV3-V-B7F-UMIC



AFFAIRE :



Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX



C/



[H] [J]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 février 2021 par le Conseil de Prud'hommes

de RAMBOUILLET

Section : AD

N° RG : F 20/00114>


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Nicolas CAPILLON



Me Philippe MERY



Copie numérique adressée à :



Pôle Emploi







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 AVRIL 2023

N° RG 21/00876

N° Portalis DBV3-V-B7F-UMIC

AFFAIRE :

Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX

C/

[H] [J]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 février 2021 par le Conseil de Prud'hommes

de RAMBOUILLET

Section : AD

N° RG : F 20/00114

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Nicolas CAPILLON

Me Philippe MERY

Copie numérique adressée à :

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association SOCIETE PROTECTRICE DES ANIMAUX

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Nicolas CAPILLON de la SELARL CAPILLON ASSOCIES, Plaidant/ Constitué , avocat au barreau de PARIS, vestiaire: E1308

APPELANTE

****************

Madame [H] [J]

née le 3 février 1976 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentant : Me Philippe MERY de la SCP MERY - RENDA - KARM - GENIQUE, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000035

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 2 février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [J] a été engagée par l'association Société protectrice des animaux (SPA) d'[Localité 5], en qualité d'agent animalier, par contrat de travail à durée déterminée de remplacement, à compter du 19 août 2002 jusqu'au 30 septembre 2002, puis par un contrat à durée indéterminée suivant avenant du 20 mars 2003.

Cette association assure la gestion du refuge situé à [Localité 5]. L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 50 salariés. Elle applique la convention collective des fleuristes, vente et services des animaux familiers.

La salariée a été nommée chef d'équipe animalier le 1er juin 2010 et promue au poste de chef d'équipe animalier qualifié relevant du statut de cadre par avenant du 1er janvier 2016.

La salariée a été en congé maternité à compter du 1er juillet 2016.

Par avenant du 17 octobre 2016, la salariée a bénéficié d'un congé parental d'éducation à temps partiel, à 80%, pour la période du 3 novembre 2016 au 02 novembre 2017, renouvelé pour une année, jusqu'au 7 novembre 2018.

Par lettre du 3 août 2017, la salariée a fait l'objet d'un avertissement en raison d'un ' manque de professionnalisme et un comportement inapproprié'.

Par lettre du 4 avril 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 12 avril 2018.

Elle a été licenciée par lettre du 2 mai 2018 pour cause réelle et sérieuse dans les termes suivants:

« Nous constatons des faits qui portent atteinte au bon fonctionnement du refuge d'[Localité 5] et de notre association en général.

En effet, votre responsable, [P] [N], soulève des difficultés récurrentes, voire insolubles avec l'équipe que vous encadrez, celles-ci perdurant malgré ses multiples mises en garde et recadrages lors d'entretiens individuels entre vous ou réunions de service.

Votre responsable a alors été contrainte de saisir son responsable régional, [C] [G] et moi-même, afin que nous puissions intervenir.

C'est dans ce contexte que nous nous sommes rendus sur le site le vendredi 30 mars 2018 et avons entendu individuellement chaque salarié sur ses conditions de travail et les difficultés rencontrées dans l'exercice de ses missions.

Les témoignages recueillis ont confirmé, voire aggravé, la situation déjà décrite par votre responsable, [P] [N].

Il vous est principalement reproché une incapacité à assurer votre rôle de chef d'équipe, notamment par l'attitude totalement inadaptée que vous avez choisie d'adopter à l'égard des membres de l'équipe.

Il apparaît clairement, au travers des témoignages recueillis auprès des salariés et des comptes rendus de votre responsable, que vous n'avez pas compris le rôle capital qu'il vous appartient d'assumer en votre qualité de manager de proximité, notamment celui d'interface entre votre responsable et l'équipe et celui de garant de la communication au sein du refuge.

Nous vous rappelons, qu'un chef d'équipe doit :

- former, accompagner, stimuler et motiver une équipe,

- soutenir, accompagner, travailler avec l'équipe, ce qui sous-entend d'échanger régulièrement avec votre équipe,

- créer une véritable cohésion au sein de l'équipe,

Au contraire, nous constatons :

- des rapports conflictuels ou inexistants avec l'équipe,

- un désintérêt total pour l'équipe chats,

- une absence de formation et d'accompagnement de l'équipe (aucune montée en compétence, absence de polyvalence, non-encadrement des stagiaires),

- des carences dans la gestion des plannings de travail et de tâches conduisant à une inégalité entre les salariés et une surcharge de travail pour certains.

Ces éléments témoignent à eux-mêmes d'un désintérêt pour votre poste et ses missions que votre comportement ne fait qu'aggraver.

En effet, nous déplorons des agissements malveillants et intolérables envers certains membres de votre équipe, à l'origine d'un climat de travail délétère au sein du refuge.

Nous relevons principalement un comportement agressif et des propos déplacés à l'encontre de l'équipe.

Plusieurs salariés nous ont indiqué que :

- vous manifestez régulièrement votre agacement allant jusqu'à claquer les portes, lever les yeux au ciel et souffler à la moindre contrariété,

- vous mettez les agents animaliers en porte à faux, leur faisant des remarques devant le public,

- vous employez un ton sec, voire menaçant, en permanence,

- notamment, il est constant que vous interpellez les agents de la sorte : « va falloir accélérer, moi je ne suis pas sensée travailler mais juste donner des ordres.

La communication, lorsqu'elle existe, se limite ainsi à des menaces ou à des simples affichages.

Bien plus, certains se sont plaints de l'acharnement dont vous faites preuve à l'égard de deux agents en particulier, Monsieur [E] [O] et Madame [B] [X], le premier s'interrogeant sur les raisons profondes de votre mépris qui selon lui seraient liées à ses orientations sexuelles, ce qui serait intolérable.

De façon générale, vos critiques se focalisent principalement sur les nouveaux arrivants et/ou les personnes les plus vulnérables qui font d'attaques ciblées, dans l'unique but de les déstabiliser.

Par ailleurs, nous constatons une réelle volonté de diviser l'équipe, créant un climat de travail conflictuel sur le refuge.

En effet, vous cherchez constamment :

- à monter les agents animaliers les uns contre les autres,

- à déformer les propos tenus par les salariés,

- à alimenter le conflit et non le désamorcer.

Il est ainsi constant que vous colportez de fausses informations au sein de l'équipe.

Les salariés déclarent notamment que vous cherchez volontairement à diviser l'équipe, certains affirmant que « vous créez des histoires pour tout et rien », « vous faites preuve d'une hypocrisie permanente » et même que vous êtes « vicieuse » !

Enfin, nous constatons que vous pénalisez certains membres de l'équipe sur les plannings des tâches en leur attribuant uniquement les tâches ingrates et en ne favorisant pas une alternance des tâches.

Face à un tel comportement, votre responsable, [P] [N], se trouve dans l'obligation d'intervenir et de vous suppléer, l'équipe se plaignant régulièrement de votre attitude.

Celle-ci vous a alerté régulièrement, notamment lors de votre entretien annuel du 26 janvier 2018, sur la nécessité d'améliorer « le relationnel avec l'équipe » et d'adopter un comportement professionnel et équitable, en vain, tout comme l'avertissement du 3 août 2017 resté sans effet.

Malheureusement, même lors de l'entretien du 12 avril dernier, vous ne semblez pas prendre conscience de la gravité de la situation, ni vous remettre en question.

Au contraire, vous rejetez la faute sur les membres de l'équipe et sur votre responsable.

Ainsi, lors de l'entretien les éléments transmis ne nous ont pas permis de modifier notre analyse de la situation et de justifier un tel comportement.

Vos agissements répétés rendent les conditions de travail très difficiles, font régner une ambiance pesante sur le refuge et sont génératrices de stress et de mal être au travail.

Compte tenu de ce qui précède, vos agissements rendent impossibles en elle-même la poursuite de la relation de travail.

Pour l'ensemble de ces faits, nous vous licencions pour une cause réelle et sérieuse, votre licenciement prenant effet au jour de la première présentation de la présente lettre, marquant également le point de départ de votre préavis d'une durée de 4 mois.

Nous vous dispensons de toute activité au cours de cette période, qui vous sera rémunérée dans les conditions normales. »

Le 1er mars 2019, Mme [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Rambouillet afin de requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement en paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.

Par jugement du 19 février 2021, le conseil de prud'hommes de Rambouillet (section activités diverses) a :

- dit et jugé le licenciement de Mme [J] sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamné l'association Société protectrice des animaux à payer à Mme [J] les sommes suivantes :

. 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- dit que les dépens seront à la charge de chacune des parties.

Par déclaration adressée au greffe le 17 mars 2021, l'association Société protectrice des animaux a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 3 janvier 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 16 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles l'association Société protectrice des animaux (SPA) demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Rambouillet le 19 février 2021 en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Mme [J] dénué de cause réelle et sérieuse et a condamné l'association à verser à Mme [J] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 30 000 euros outre 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

en conséquence,

- débouter Mme [J] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [J] à lui verser la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [J] demande à la cour de :

- déclarer l'association SPA irrecevable et en tous cas mal fondée en son appel,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

- condamner l'association SPA à lui payer la somme de 3 000 euros par applicable des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'association SPA en tous dépens.

MOTIFS

Sur la rupture

La salariée fait valoir que le motif de son licenciement n'est pas ' réel' et qu'en la 'mettant sous pression' par la mise en place d'une pseudo enquête et par l'engagement de la procédure de licenciement, l'employeur a pu obtenir de sa part des informations qui lui ont permis de licencier Mme [N], la directrice du refuge.

Elle ajoute que le motif n'est également pas sérieux et qu'elle a pu, sans difficulté, rassembler des témoignages établissant la qualité de ses relations avec ses collègues et son engagement au service des animaux.

La salariée précise enfin qu'elle a retrouvé dès le 7 janvier 2019 un emploi d'agent animalier et que son actuel employeur témoigne de la qualité de son travail.

L'employeur réplique que la salariée se contente de verser aux débats divers documents qu'elle désigne complaisamment par le terme d'attestation qui ne sont pas conformes aux dispositions réglementaires ou sans valeur probante, et qui n'éclairent en rien les termes précis de la lettre de licenciement de sorte que faute de contestation étayée par des moyens de preuve, la salariée doit être déboutée de ses demandes alors que la SPA rapporte la preuve des griefs.

**

Selon l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Les faits invoqués comme constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de licenciement doivent non seulement être objectivement établis mais encore imputables au salarié, à titre personnel et à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat de travail.

Il résulte de l'article L. 1235-1 du code du travail que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement n'incombe pas spécialement à aucune des parties mais que le doute doit profiter au salarié.

Au cas présent, il est reproché à la salariée dans la lettre de licenciement une incapacité à assurer son rôle de chef d'équipe en adoptant notamment une attitude déplacée et un comportement agressif, outre un acharnement à l'égard de deux agents qui s'en sont plaints, ses critiques se focalisant sur les personnes nouvellement arrivées ou vulnérables, dans le but de les déstabiliser et une volonté de diviser l'équipe, notamment en pénalisant certains membres de l'équipe sur les plannings de tâches et en ne leur attribuant que des tâches ingrates, ainsi qu' un désintérêt pour son poste et ses missions.

Au préalable, l'employeur ne produit aucun témoignage ou pièce de Mme [N], directrice du refuge, alors que la lettre de licenciement indique que cette dernière soulève 'des difficultés récurrentes voire insolubles' avec l'équipe que la salariée encadre.

Pas davantage, l'employeur n'établit que Mme [N] a saisi sa hiérarchie de ces faits.

Le 30 mars 2018, la directrice des ressources humaines de l'association SPA s'est rendue au refuge SPA d'[Localité 5] avec le responsable régional où ils ont rencontré des personnels du site, à l'exception de la salariée et de Mme [N], la directrice du refuge SPA d'[Localité 5].

S'il n'est pas contesté que la directrice des ressources humaines de la SPA s'est rendue au refuge le 30 mars 2018, aucune pièce n'est communiquée pour établir le motif de sa venue.

L'employeur ne produit pas davantage les comptes rendus des salariés entendus ni d'ailleurs ne communique leurs noms et il ne conteste pas que la salariée n'a pas été auditionnée par la directrice des ressources humaines ce jour-là, ni Mme [N].

Dès lors, l'employeur affirme dans la lettre de licenciement sans offre de preuve que les 'témoignages recueillis auprès des salariés ont confirmé, voire aggravé , la situation déjà décrite' par Mme [N].

Pour justifier des griefs qu'il impute à la salariée, l'employeur produit :

- la fiche indivuelle de formation de la salariée, qui n'a bénéficié depuis son recrutement en 2002 que de quelques formations en 2015, 2016 et 2017, une formation au management, à la formation animalin et formation animalin PERF, ainsi qu'une formation de secourisme.

- des feuilles de tâches établies entre le '30 janvier et le 29 mars', non signées comprenant uniquement des prénoms. L'employeur ne vise pas cette pièce dans ses conclusions et ne l'analyse donc pas. Il ne résulte pas de ce document que les tâches sont confiées toujours à la même personne et notamment les tâches les plus dégradantes.

Ainsi, la personne prénommée [R], dont le nom est souligné à plusieurs reprises sur ce document par l'employeur, effectue des tâches, certes fréquentes mais toutefois diverses sur la période, étant précisé que l'employeur ne communique pas la qualification professionnelle ni sa fiche de tâches, à l'instar des autrespersonnes mentionnées sur ce planning et cette salariée n'a pas attesté au dossier.

- l'entretien professionnel de la salarié de l'année 2017 dont il ressort qu'elle doit améliorer sa performance et son comportement n'ayant ' pas été à la hauteur de ses fonctions' et il lui est fixé l'objectif pour l'année 2018 de ' reconquérir l'ensemble de l'équipe',

- six témoignages de salariées en des termes très généraux reprochant le comportement négatif de leur responsable d'équipe, ses tentatives pour crééer un climat conflictuel, sa démotivation, ses erreurs sur les plannings et son refus de se remettre en question, l'absence de formation des nouveaux salariés.

Mme [U], précise que la salariée 'a laissé des gamelles vides ou pleines dans un box' sans davantage de précision et ' persécute [B] et les nouvelles recrues en difficultés', sans qu'aucune de ces personnes directement concernées n'atteste au dossier et sans qu'elle ne précise, de facon circonstanciée, quels élèments de fait l'amenaient à conclure à ladite persécution.

Mme [M] précise que la salariée est incapable de répondre aux mails, ne sait pas formuler ses phrases et effectue des fautes, ce qui n'est pas justifié par l'employeur. Le témoin indique que la salariée 'n'apprécie pas M. [O]', ce que ne confirme pas ce dernier dans son témoignage.

Mme [Y] précise que la salariée ' depuis quelques années, n'assume pas son rôle de chef d'équipe', ce qui ne ressort pas des éléments communiqués par l'employeur puisque Mme [J], chef d'équipe depuis 2010, a été promue en 2016 et a perçu une prime en reconnaissance de la qualité de son travail. Le témoin indique également que Mme [J] a tenu des 'propos malveillants', sans donner des exemples et dates précises.

M.[O], facteur et ancien agent animalier, relate qu'une grande partie de l'équipe rencontrait des problèmes avec Mme [J], qui était ' manipulatrice et ne cessait de monter les agents animaliers les uns contre les autres' et indique que la salariée était ' néfaste et c'est la raison pour laquelle nous avions tous été interrogés par la DRH', sans davantage d'explication.

Seule Mme [S] relate des faits plus précis. Elle explique que Mme [J] l'a 'prise à partie en décembre 2017 et ( ...) s'est permise un recadrage' et que le 2 mars 2018, n'ayant pas reçu son salaire, elle a interrogé Mme [J] qui lui a répondu ' c'est dommage, en me rigolant au nez', ces affirmations n'étant toutefois confirmées par aucunes pièce.

Le planning communiqué par l'employeur compte 12 prénoms de de salariés, qui n'ont donc pas tous témoigné au dossier.

Enfin, l'employeur ne communique aucun élément pour confirmer que la salariée s'est désintéressée de son poste et de ses missions.

Pour sa part, la salariée produit sa lettre du 10 avril 2018 adressée à la présidente de l'association SPA, la salariée a indiqué ne pas avoir pas été auditionnée lors des entretiens menés par la directrice des ressources humaines et a dénoncé les pratiques d'euthanasie de Mme [N] 'de complaisance' sur plusieurs chiens du refuge. La salariée a également fait part de propos vexatoires tenus devant les membres de son équipes, de la part de Mme [N] notamment, sur son aspect physique, et des difficultés rencontrées depuis son retour de congé maternité.

La salariée produit en outre des lettres et courriels établissant qu'elle entretient d'excellentes relations avec son actuel employeur, et d'anciens salariés de la SPA vantent ses qualités humaines et professionnelles.

Si ces pièces ne revêtent pas la forme prévue par les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, elles donnent un éclairage complémentaire.

Il ressort également de l'entretien d'évaluation de l'année 2017 que s'il est reproché à la salariée d'avoir perdu ' toute sa crédibilité' en qualité de chef d'équipe, elle y explique que certains salariés de son équipe ' n'en font qu'à leur tête', n'acceptent ni ses consignes ni qu'elle travaille à temps partiel depuis son retour de congé maternité.

En définitive, si les témoignages produits par l'employeur invoquent des difficultés rencontrées avec la salariée, celles-ci ne sont pas corroborées par des éléments matériellement vérifiables permettant d'apprécier leur réalité et le sérieux des griefs.

Dans ces conditions, l'employeur ne rapporte pas la preuve de faits fautifs précis imputables à la salariée justifiant la sanction ultime qu'est le licenciement, intervenu brutalement dans un contexte professionnel conflictuel, concomittant à l'engagement du licenciement de la directrice du refuge.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l'article L. 1235-3, dans sa rédaction applicable au litige, issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié, Mme [J] ayant acquis une ancienneté de quinze années au moment de la rupture dans la société employant habituellement au moins onze salariés, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre trois et treize mois de salaire.

L'employeur ne conteste pas le salarié de référence retenu par les premiers juges pour la somme de 2 474,04 euros bruts.

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée, de son âge ( 42 ans), de son ancienneté, de son expérience professionnelle, de ce que la salariée a retrouvé un emploi d'agent animalier en janvier 2019, il y a lieu de condamner l'association Société protectrice des animaux à lui payer la somme de 30 000 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est donc confirmé de ce chef.

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.

L'employeur, qui succombe, sera également condamné aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit que les dépens seront à la charge de chacune des parties,

Statuant à nouveau du seul chef infirmé et y ajoutant,

ORDONNE d'office le remboursement par l'association Société protectrice des animaux à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies à Mme [J] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités.

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE l'association Société protectrice des animaux à verser Mme [J] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE l'association Société protectrice des animaux aux dépens de première instance et d'appel.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 21/00876
Date de la décision : 05/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-05;21.00876 ?
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