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29/03/2023 | FRANCE | N°21/03440

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 29 mars 2023, 21/03440


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 MARS 2023



N° RG 21/03440 - N° Portalis DBV3-V-B7F-U3D5



AFFAIRE :



[I] [X]



C/

S.N.C. OTUS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Section : C

N° RG : 19/00258



Copies exécutoires

et certifiées conformes délivrées à :



Me Ghislain DADI



Me Emmanuelle SAPENE



le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suiva...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 MARS 2023

N° RG 21/03440 - N° Portalis DBV3-V-B7F-U3D5

AFFAIRE :

[I] [X]

C/

S.N.C. OTUS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Section : C

N° RG : 19/00258

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Ghislain DADI

Me Emmanuelle SAPENE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [I] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Ghislain DADI de la SELAS DADI AVOCATS, constitué / plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0257

APPELANT

****************

S.N.C. OTUS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Emmanuelle SAPENE de la SCP PECHENARD & Associés, constitué / plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R047 substitué par Maître Camille FOURNIER, avocat au barreau de PARIS.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Alicia LACROIX,

EXPOSE DU LITIGE

[I] [X] a été engagé par la société Otus suivant un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de 138,67 heures par mois à compter du 1er mars 2016 avec une reprise d'ancienneté au 3 mars 2007 en qualité de conducteur de matériel de collecte, d'enlèvement et de nettoiement, niveau III, position 1, coefficient 114 en référence aux dispositions de la convention collective nationale des activités du déchet.

Par lettre datée du 21 décembre 2018, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement fixé au 11 janvier 2019, puis par lettre datée du 7 février 2019 lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Par lettre datée du 9 février 2019, le salarié a contesté son licenciement.

Le 10 mai 2019, [I] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency afin d'obtenir la condamnation de la société Otus à lui payer diverses indemnités au titre du licenciement qu'il estime dénué de cause réelle et sérieuse.

Par jugement mis à disposition le 24 juin 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont dit que le licenciement est fondé sur une faute grave, ont débouté [I] [X] de l'ensemble de ses demandes et ont condamné celui-ci à verser à la société Otus la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Le 19 novembre 2021, [I] [X] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 17 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, [I] [X] demande à la cour d'infirmer le jugement, statuant à nouveau de fixer son salaire moyen brut à la somme de 2 147,71 euros, de constater que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, subsidiairement qu'il est pour cause réelle et sérieuse, de condamner en conséquence la société Otus à lui payer les sommes suivantes :

* 17 181,68 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre principal après avoir déclaré les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail inconventionnelles aux articles 10 de la convention 158 de l'organisation internationale du travail et 24 de la charte sociale européenne, ou 7 516,98 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,

* 1 566,04 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 4 295,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 429,54 euros au titre des congés payés afférents,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux dépens de l'instance, d'ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés conformément à la décision à venir (attestation Pôle emploi, solde de tout compte, certificat de travail) sous astreinte de 200 euros par jour de retard et par document à compter du lendemain de la notification de la décision dans la limite de 190 jours et se réserver le pouvoir de la liquider, et de dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 13 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Otus demande à la cour de confirmer le jugement en tous points, de dire que le licenciement repose sur une faute grave, de débouter [I] [X] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et à tous les dépens. 

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 14 février 2023.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement pour faute grave notifiée au salarié est ainsi rédigée :

'Suite au courrier que nous a adressé la CPAM le 23/10/2018 au sujet d'un accident du travail survenu au sein d'une autre entreprise, nous vous avons demandé par lettre recommandée du 06/11/2018 de nous fournir une copie de votre autre contrat de travail avant le 14/11/2018 afin que nous puissions être en mesure de vérifier la durée totale de votre travail ainsi que le respect des temps de pause.

Sans réponse de votre part et après vous avoir accordé un délai supplémentaire, nous vous avons adressé un courrier le 21/12/2018 pour une convocation à un entretien préalable à sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement le 11/01/2019.

Au cours de cet entretien où vous étiez assisté par M. [H] [P], nous vous avons une nouvelle fois rappelé que le cumul d'emplois peut être à l'origine de graves manquements à la législation du travail, notamment en matière de durée maximale du travail et que de tels agissements multiplient considérablement les risques d'accident dus à la fatigue.

Vous avez indiqué dans un premier temps ne pas vous souvenir du nom de votre employeur, puis dans un deuxième temps vous avez affirmé avoir plusieurs autres employeurs, enfin vous nous avez dit ne pas avoir signé de contrat de travail autre que celui qui vous lie à notre société.

Vos explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits fautifs qui vous sont reprochés. Votre refus de transmettre les éléments demandés nous empêche donc de remplir notre obligation et rend ainsi impossible votre maintien dans l'entreprise.

C'est pourquoi, nous sommes contraints de vous notifier par la présente et après observation du délai légal de réflexion, votre licenciement pour faute grave à compter du 07/02/2019, date d'envoi de cette lettre, sans indemnité de préavis ni de licenciement (...)'.

Le salarié conclut à titre principal à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement au motif que l'employeur ne l'a pas mis en demeure de choisir entre ses deux emplois, en relevant qu'il ne l'a pas mis à pied à titre conservatoire, et à titre subsidiaire à la cause réelle et sérieuse du licenciement mais pas à la faute grave. Il réclame en conséquence des indemnités au titre du licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ou à tout le moins des indemnités de rupture au titre du licenciement pour cause réelle et sérieuse.

La société conclut au bien-fondé du licenciement pour faute grave dans la mesure où le salarié a été mis en demeure de choisir entre ses emplois, qu'il n'est pas allé chercher la lettre recommandée, que malgré un entretien organisé le 15 novembre, il n'a toujours pas adressé le contrat de travail, que face à son refus de collaborer, elle n'avait d'autre choix que de le licencier, qu'il a de plus manqué à son obligation de loyauté, qu'il doit être débouté de toutes ses demandes et que le jugement doit être confirmé.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque.

L'article L. 8261-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne peut accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale du travail, telle qu'elle ressort des dispositions légales de sa profession.

L'article L. 8261-2 du même code dispose que nul ne peut recourir aux services d'une personne qui méconnaît les dispositions de la présente section.

En l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats que :

- par lettre datée du 23 octobre 2018, reçue par la société Otus le 30 octobre 2018, l'assurance maladie du Val d'Oise a demandé à la société Otus de transmettre une attestation de salaire concernant [I] [X] à la suite d'un arrêt pour accident du travail pour la période du 29 décembre 2017 au 3 janvier 2018, en précisant que le dossier enregistré n'était pas en rapport avec l'établissement Otus ;

- par lettre recommandée avec avis de réception datée du 6 novembre 2018, la société Otus a, se référant à la demande de l'assurance maladie du 23 octobre 2018, demandé à [I] [X] de remettre avant le 14 novembre 2018 une copie de son contrat de travail chez son autre employeur, attestant qu'il n'est pas à temps complet chez celui-ci, en rappelant que si un salarié peut cumuler plusieurs emplois, il se doit de respecter les limites horaires journalières et hebdomadaires de travail et son obligation de loyauté et de permettre à l'employer de vérifier la durée totale de son travail ;

- cette lettre datée du 6 novembre 2018 a été présentée au destinataire le 7 novembre 2018, l'avis de réception ayant été signé ;

- par lettre recommandée avec avis de réception datée du 26 novembre 2018, la société Otus, se référant à sa lettre du 6 novembre 2018 ainsi qu'à un entretien du 15 novembre 2018 avec Mme [G], directrice d'agence et à un délai supplémentaire accordé jusqu'au 19 novembre 2018 laissé sans suite par [I] [X], a mis en demeure ce dernier de choisir entre l'un de ses deux emplois, en lui demandant de fournir une lettre de démission adressée à l'autre employeur s'il choisissait de rester au sein de la société Otus, avec une date fixée au 5 décembre 2018 ;

- s'agissant de cette lettre datée du 26 novembre 2018, la Poste a établi un avis portant la mention 'pli avisé et non réclamé' ;

- la société Otus a engagé une procédure de licenciement par l'envoi d'une lettre de convocation du salarié à entretien préalable, datée du 21 décembre 2018.

Il résulte des constatations qui précèdent que l'employeur, informé d'un cumul d'emploi du salarié et l'ayant mis en demeure de lui transmettre le contrat de travail chez l'autre employeur afin de vérifier le respect des dispositions légales relatives aux durées maximales de travail journalier et hebdomadaire autorisées et au repos, a, face à l'inertie du salarié qui n'a fourni aucun élément sur ce point à l'employeur, assimilable à un refus de répondre aux injonctions de l'employeur et plaçant ce dernier en risque d'infraction, licencié à bon droit, le salarié pour faute grave.

Le jugement qui a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes au titre du licenciement sera par conséquent confirmé en ces dispositions.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Le salarié forme une demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

La société conclut au débouté de cette demande.

Il ressort des constatations qui précèdent qu'aucun manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail n'est établi à l'encontre de la société Otus.

Le jugement qui a débouté le salarié de sa demande de ce chef sera par conséquent confirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

Eu égard à la solution du litige, [I] [X] sera condamné aux dépens exposés en cause d'appel ainsi qu'à payer la somme de 150 euros à la société Otus à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE [I] [X] aux dépens d'appel,

CONDAMNE [I] [X] à payer à la société Otus la somme de 150 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03440
Date de la décision : 29/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-29;21.03440 ?
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