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29/03/2023 | FRANCE | N°21/03235

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 29 mars 2023, 21/03235


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 MARS 2023



N° RG 21/03235



N° Portalis DBV3-V-B7F-U2BU



AFFAIRE :



[F] [Z]



C/



Association 3IS SUP





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 18/00092





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SCP PEREZ SITBON



Me Ugo LE COEUR







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versaill...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 MARS 2023

N° RG 21/03235

N° Portalis DBV3-V-B7F-U2BU

AFFAIRE :

[F] [Z]

C/

Association 3IS SUP

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 18/00092

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SCP PEREZ SITBON

Me Ugo LE COEUR

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [F] [Z]

né le 29 Septembre 1971 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Georges SITBON de la SCP PEREZ SITBON, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0198

APPELANT

****************

Association 3IS SUP

N° SIRET : 428 798 573

[Adresse 2]

[Localité 4] / France

Représentant : Me Ugo LE COEUR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1186

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue en chambre du conseil le 01 Février 2023, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er septembre 2014, l'association 3IS SUP, ayant une activité d'enseignement supérieur, a conclu un contrat de prestations de services avec la société SLB Limited, dirigée par M. [F] [Z].

M. [Z] a été embauché, à compter du 24 août 2015, selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de 'directeur international/référent filière journalisme' par l'association 3IS SUP.

Par avenant à effet au 1er juillet 2016, les fonctions de M. [Z] ont été limitées à celles de directeur international et ont été exercées à partir de la Chine, pour un salaire mensuel de 4 400 euros brut.

Par lettre du 6 novembre 2017, l'association 3IS SUP a convoqué M. [Z] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 5 décembre 2017, l'association 3IS SUP a notifié à M. [Z] son licenciement pour faute grave.

Au moment de la rupture du contrat de travail, l'association 3IS SUP employait habituellement au moins onze salariés.

Le 19 février 2018, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles pour notamment contester le bien-fondé de son licenciement et demander la condamnation de l'association 3IS SUP à lui payer des indemnités de rupture et diverses sommes, outre la requalification du contrat de prestations de services en contrat de travail.

Par un jugement du 22 septembre 2021, le conseil de prud'hommes (section encadrement) a :

- débouté M. [Z] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné M. [Z] à rembourser à l'association 3IS SUP une somme de 5 576,68 euros au titre d'avances sur frais professionnels ;

- condamné M. [Z] à payer à l'association 3IS SUP une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- mis les dépens à la charge de M. [Z].

Le 29 octobre 2021, M. [Z] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 27 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [Z] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et statuant à nouveau sur les chefs infirmés de :

- dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner l'association 3IS SUP à lui payer les sommes suivantes :

* 52 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 13 200 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 320 euros au titre des congés payés afférents ;

* 4 400 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

* 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'article L. 3132-1 du code du travail ;

* 26 400 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 10 000 euros à titre de préjudice moral ;

- requalifier le contrat de prestation de services conclu pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2015 en contrat de travail et en conséquence ordonner la remise des bulletins de salaires afférents, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et ordonner à l'employeur de régler les charges sociales sur ces sommes ;

- ordonner à l'association 3IS SUP de lui remettre une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes, prenant en compte son ancienneté depuis le 1er septembre 2014, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de huit jours de la signification de la décision à intervenir ;

- condamner l'association 3IS SUP à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions du 9 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'association 3IS SUP demande à la cour de :

1°) à titre principal :

- confirmer le jugement attaqué,

- débouter M. [Z] de ses demandes ;

- condamner M. [Z] à lui payer une somme de 4 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

2°) à titre subsidiaire :

- limiter à la somme de 586,66 euros la condamnation sur le fondement de l'article L. 3132-1 du code du travail ;

- limiter à la somme de 2 523,20 euros la condamnation au titre de l'indemnité de licenciement ;

- limiter à la somme de 13 200 euros la condamnation sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 24 janvier 2023.

SUR CE :

Sur la requalification du contrat de prestation de services conclu le 1er septembre 2014 en contrat de travail, l'indemnité pour travail dissimulée afférente, la remise de bulletins de salaire pour cette période sous astreinte et le paiement de charges sociales par l'employeur sur ces sommes :

Considérant que l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans laquelle s'est exercée l'activité ; que le contrat de travail se caractérise par l'existence d'un lien de subordination dont il résulte que l'activité est exercée sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] allègue que le contrat de prestation de services conclu le 1er septembre 2014 est fictif et qu'il a alors travaillé dans le cadre d'un lien de subordination avec l'association 3IS SUP pour réaliser le même travail que celui effectué par la suite dans le cadre du contrat de travail ;

Que toutefois, il ne verse toutefois aucun élément démontrant ses dires ; qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de requalification et de ses demandes subséquentes ;

Que le jugement sera confirmé sur ces points ;

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

Considérant que la lettre de licenciement pour faute grave notifiée à M. [Z], qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée : '(...) Comme le rappelle votre contrat de travail, vous avez notamment pour mission de :

- Développer les partenariats pédagogiques :

- mettre en place et suivre les partenariats pédagogiques pour permettre les échanges bilatéraux d'étudiants

- Recruter des étudiants étrangers

- Participer à des salons à l'international

- Collaborer avec le réseau CampusFrance

- Promouvoir 3iS sur la scène internationale

- Participer à la mise en place de programmes dédiés aux étudiants internationaux

- Participer à l'implantation de 3iS à l'étranger.

Depuis le 27 février 2016, nous vous avons confié avec votre accord une mission de développement des relations avec la Chine et de recrutement d'étudiants chinois.

Votre contrat précise en outre que vous vous engagez à observer toutes les instructions et consignes particulières qui vous seront données, à les transmettre à vos subordonnés et être responsable de leur bonne application.

En tant que Directeur International, vous êtes un acteur-clé du développement de notre entreprise à l'international, de son soutien et de son relais auprès de la direction.

Vous disposez d'une grande autonomie, ainsi que de la confiance de l'entreprise.

Or, nous avons relevé de graves manquements à vos obligations.

1. En tant que relais auprès de la Direction, vous avez la responsabilité d'informer régulièrement la société, en particulier concernant les salons auxquels vous participez et les recrutements internationaux.

Bien que cette obligation soit inhérente à vos fonctions, le Directeur Général a été contraint de vous demander formellement de lui faire parvenir des reportings suite à chaque salon et de le tenir informé des recrutements internationaux.

Le Directeur Général vous l'a rappelé en dernier lieu le 10 octobre 2017, tout en vous rappelant que vous pouviez vous faire aider par Madame [R].

Après plusieurs échanges et relances de la part du Directeur Général, ce dernier a consenti à ce que vous lui remettiez ces informations le 6 novembre 2017, alors que certaines d'entre elles étaient attendues depuis le mois d'août.

En parallèle, par email du 15 septembre 2017, Madame [C], Directrice des Ressources Humaines, vous a indiqué que la société souhaitait effectuer avec vous un rendez-vous de bilan par rapport à la rentrée 2017, aux alentours des 25-27 septembre. En effet, l'avancée de divers dossiers était fortement problématique et, là encore, les informations que vous communiquiez, après relances, étaient insuffisantes et imprécises, voire erronées.

Vous lui avez répondu que vous deviez assister à divers salons jusqu'au 31 octobre et que, avant de vous rendre au siège, vous souhaitiez repasser par Pékin pour des raisons personnelles et pour préparer vos dossiers.

Or, contrairement à ce que vous aviez promis, vous n'aviez rien préparé pour le 6 novembre 2017, et vous n'avez pas remis les informations sollicitées.

Le bilan de rentrée a donc été catastrophique.

Cette absence de communication et de reportings, outre qu'elle constitue une insubordination, nous place dans l'impossibilité de recueillir le fruit de votre participation aux salons.

A titre d'exemple, nous ignorons la façon dont les étudiants accueillent l'offre de 3iS ou la qualité des salons. Nous ne disposons pas non plus des coordonnées qui doivent être recueillies (adresse, adresse email), qui nous permettraient de prendre contact avec les étudiants ou de les inscrire à notre newsletter.

Par ailleurs, l'absence de communication et de reporting nous place dans l'impossibilité de suivre et de contrôler votre activité et rend totalement opaques vos agissements pour le compte de 3IS SUP.

Ainsi, nous ne sommes jamais informés de vos rendez-vous ou de vos démarches de prospection ou alors de façon extrêmement imprécise.

Cette opacité constitue un obstacle à la circulation de l'information au sein de la société, ce qui est d'autant plus grave que le résultat de votre activité est extrêmement préoccupant et nous porte à croire que vous travaillez de façon nettement insuffisante.

En effet, le nombre des recrutements internationaux est catastrophique et de nombreuses erreurs et contradictions ont été relevées dans le cadre de vos missions.

2. Vous êtes en charge de la négociation, du suivi et de la mise en place d'un partenariat avec l'Université Chinoise de Shangai, le Shangai Publising and Printing College (SPPC).

Comme vous en avez été informé, l'équilibre financier de ce partenariat repose sur un recrutement de 60 étudiants par filière, sachant que, pour la rentrée 2017, deux filières seraient ouvertes.

Dans le cadre des négociations, SPPC et 3iS SUP se sont accordées sur une fourchette de 35 à 50 étudiants par filière pour la rentrée 2017, ladite fourchette devant augmenter, pour chaque filière, les années suivantes.

En tant que Directeur International et relais auprès de SPPC avec laquelle vous travaillez directement, il vous appartenait de faire respecter cet objectif.

Or, nous avons découvert, après bien des hésitations de votre part, que vous aviez travaillé sur la base d'un nombre total d'étudiants compris entre 35 et 50, toutes filières confondues, et ce au mépris du Business Plan qui vous avait été transmis et dont vous aviez parfaitement connaissance.

Au cours de nos échanges à ce sujet, nous nous sommes d'ailleurs rendu compte que vous négligiez totalement les informations chiffrées.

Lorsque le Directeur Général vous a interrogé sur le point de savoir si vous vendiez ce partenariat et les possibilités d'hébergement au sein de la résidence 3iS, vous n'avez même pas daigné lui répondre.

A ce jour et selon les dernières informations que vous nous avez communiquées, le nombre d'étudiants recrutés est de 33 seulement pour l'ensemble de filières, ce qui rend impossible l'équilibre financier du partenariat, voire son existence.

L'échec de ce partenariat compromet en outre nos relations avec SPPC, en dépit des investissements effectués.

Compte tenu de votre poste, ces faits constituent autant de fautes graves, lesquelles portent préjudice à la société.

Nous soulignons que ce n'est pas la première fois que nous devons faire face à l'exécution fautive de votre contrat de travail.

A titre d'exemple, au cours du mois de mai 2017, vous aviez vendu des inscriptions pour un semestre pour la somme de 2.000 euros, c'est-à-dire pour la moitié de leur coût réel, tout en entretenant la confusion sur les taux de change pour cacher votre faute.

Chaque inscription générait ainsi mathématiquement une perte de 2.000 euros et ne générait bien entendu aucun bénéfice pour la société.

Nous vous rappelons que, suite à cet incident, vous avez eu une réunion avec les membres de la direction qui vous ont rappelé les chiffres attendus.

La Direction vous a également fait part de son mécontentement.

Pour pallier à votre négligence, le Directeur Général, M. [O], a donc été contraint de se déplacer lui-même en Chine pour régler la situation.

Malgré cet incident, ses suites et nos mises en garde, qui auraient dû vous alerter, les faits rappelés ci-avant démontrent vous n'avez pas modifié votre comportement.

D'une façon générale, les négociations que vous avez portées avec SPPC ont systématiquement abouti à des solutions défavorables à 3iS et favorables à SPPC.

Ces faits démontrent votre désintérêt total pour l'intérêt de l'entreprise et posent clairement la question de votre loyauté.

3. Vous avez la responsabilité du Recrutement des étudiants étrangers.

Or, le recrutement de la classe préparatoire FLE (Français Langue Etrangère) a été catastrophique.

Nous sommes en effet passés de 20 étudiants étrangers recrutés en 2016 à 9 étudiants chinois, alors que l'objectif de recrutement que nous avions fixé conjointement pour la classe préparatoire FLE était de 30 étudiants.

Vous avez passé votre temps à nous communiquer des chiffres inexacts et à entretenir la confusion concernant les obtentions de visas des étudiants chinois. De la sorte, ce résultat catastrophique a été découvert à la rentrée. Ces chiffres sont totalement inacceptables et non conformes aux objectifs qui vous ont été fixés et nous déplorons une totale inaction de votre part, ainsi que de graves négligences.

En effet, vous n'avez jamais mis à jour les données présentes sur le site Campus France, alors qu'il s'agit d'un des premiers outils permettant de recruter les étudiants étrangers.

Ainsi, plusieurs données essentielles sont manquantes telles que :

- l'existence du campus de 3iS [Localité 5],

- la filière Animation Jeux Vidéo, la classe préparatoire Français Langue Etrangère (FLE),

- la reconnaissance par l'Etat de 3iS, alors qu'il s'agit d'un atout indéniable pour le recrutement des étudiants étrangers, qui y sont très sensibles.

Ni les formations, ni les frais de scolarité ne sont à jour.

Plus grave encore, il y est indiqué que pour apprendre le français il est possible d'aller s'inscrire chez Planète Langues, qui était notre partenaire il y a quelques années, mais qui est devenu notre concurrent depuis la mise en place de la classe préparatoire FLE au sein de 3iS.

Votre négligence porte un préjudice important à 3iS elle a pour conséquence un niveau de recrutement très bas des étudiants étrangers.

Nous avons décidé de maintenir l'ouverture de la classe de FLE, alors qu'elle est lourdement déficitaire, afin de préserver l'avenir, mais il en résulte un préjudice financier important.

4. Vous vous êtes totalement désintéressé du programme Erasmus, qui suscite pourtant un grand intérêt de la part de nos étudiants.

Votre inaction est telle que nous n'avons à ce jour qu'un seul étudiant inscrit. Nous avons donc été contraints de confier le suivi de ce programme, qui pourtant relève de vos fonctions, à un autre salarié.

Erasmus est un atout indéniable et un élément d'attractivité manifeste et nous sommes la seule école de cinéma à en bénéficier.

De par votre négligence, nous sommes en train de perdre l'agrément délivré par Erasmus, ce qui est encore une fois catastrophique pour notre école.

5. Vous apportez la même négligence dans l'envoi des justificatifs relatifs à vos frais professionnels.

A ce jour, nous sommes toujours dans l'attente de justificatifs pour un montant total d'avances sur frais professionnels de 5.578,68 euros (avances du 2 avril 2015, 13 février 2017 et 2 octobre 2017).

Cette situation fait courir à la société un risque de redressement de la part des organismes sociaux.

En conclusion, ces faits constituent des fautes graves. Leur accumulation et votre absence de volonté d'y remédier, voire tout simplement votre refus de suivre les instructions reçues, rendent impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise.(...)' ;

Considérant que M. [Z] soutient que son licenciement pour faute grave est dépourvu de cause réelle et sérieuse et réclame l'allocation d'indemnités de rupture aux motifs que :

- la décision de le licencier a été prise plusieurs mois auparavant ;

- les fautes reprochées ne sont pas établies ou ne lui sont pas imputables ;

Que l'association 3IS SUP soutient que les faits reprochés à M. [Z] sont établis et constitutifs d'une faute grave et qu'aucune décision de licenciement n'a été prise avant sa notification ; qu'elle conclut au débouté des demandes de M. [Z] ;

Considérant que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; que la charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Qu'en l'espèce, s'agissant du grief tiré d'une absence de transmission d'information et de rapports d'activités à sa hiérarchie, l'association 3IS SUP verse aux débats un échange de courriels intervenu entre M. [Z] et le directeur général de l'association 3IS SUP (M. [O]) dans le courant du mois d'octobre 2017, alors que le salarié effectuait un déplacement professionnel dans plusieurs pays d'Asie, dans lequel le directeur général lui demande un compte-rendu hebdomadaire des salons professionnels ainsi visités et accepte finalement, eu égard à l'emploi du temps chargé du salarié, un compte-rendu global à faire pour le 6 novembre 2017 lors du retour de M. [Z] en France ; que M. [Z] verse aux débats un courriel de compte-rendu accompagné de pièces jointes envoyé le 5 novembre 2017 à sa hiérarchie ainsi qu'un tableau comportant les coordonnées d'étudiants étrangers intéressés par une inscription à la scolarité recueillies lors de ce déplacement, ce qui correspond aux demandes de sa hiérarchie ; que M. [Z] fait de plus justement valoir qu'il a été mis à pied dès le 6 novembre 2017, ce qui a rendu impossible tout complément de compte-rendu ; que l'insubordination reprochée à l'occasion de cet épisode précédant immédiatement l'engagement de la procédure de licenciement n'est donc pas établie ;

Que pour la période antérieure à cet épisode, l'association 3IS SUP verse un courriel d'une ligne, envoyé par M. [O] à M. [Z] le 29 août 2017, relatif à la mise à jour de tableaux d'inscription et ainsi rédigé : 'peux-tu m'envoyer ce matin (en France) le tableau de tes inscriptions internationales mise à jour'' ; qu'aucun autre élément sur les tenants et aboutissants de cette demande n'est produit ; que ce courriel ne fait pas donc pas ressortir une insubordination de la part de M. [Z] ; que l'attestation de M.[O] également versée aux débats par l'association 3IS SUP pour étayer ce grief est insuffisamment probante, les dires du supérieur hiérarchique n'étant pas confirmés par des éléments objectifs ;

Qu'en outre, les deux parties versent aux débats de multiples échanges de courriers démontrant que M. [Z] rendait compte régulièrement de son activité à sa hiérarchie ;

Qu'enfin, l'association 3IS SUP reproche au salarié à ce titre, dans ses écritures, d'avoir dissimulé le fait qu'il avait en parallèle de nombreuses autres activités professionnelles, alors qu'un tel grief ne figure pas dans la lettre de licenciement ;

Que dans ces conditions, le premier grief n'est pas établi ;

Que s'agissant du grief afférent à la négociation du contrat de partenariat avec une université de Shangai (SPPC), l'échange de courriels entre M. [Z] et sa hiérarchie intervenu entre le 28 août et le 7 septembre 2017, versé aux débats, fait seulement ressortir que l'appelant fait état de la décision de ses interlocuteurs chinois d'inscrire au sein de la formation mise en place par l'association 3IS SUP un nombre d'étudiants inférieur à celui prévu par la convention de partenariat en cours de négociation ; qu'aucun élément ne démontre que ce fait est imputable à un non-respect par M. [Z] des directives de son employeur, ni par ailleurs que M. [Z] a tenté de le dissimuler ; qu'en outre, le grief relatif à la 'vente' par l'appelant d'inscriptions à la scolarité pour la moitié de leur coût en mai 2017 n'est étayé par aucun élément ; qu'aucune faute ne ressort donc des débats sur ce point ;

Que s'agissant du grief relatif au recrutement d'étudiants étrangers, le contrat de travail mentionne à ce titre que M. [Z] a la tâche de 'collaborer avec le Réseau Campus France', qui est un établissement public ; qu'aucun élément ne démontre que M. [Z] avait, ce faisant, la tâche de mettre à jour les informations relatives à l'association 3IS SUP sur le site Internet de cet établissement, laquelle relève de fonctions de secrétariat ; qu'en toutes hypothèses, aucun grief n'a été fait par l'association 3IS SUP à ce titre à M. [Z] pendant la relation de travail ; qu'aucune abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié à ce titre n'est donc établie ; qu'en outre, M. [Z] fait valoir à juste titre qu'aucun objectif de recrutement d'étudiants étrangers pour l'année 2017 ne lui a été fixé, ni d'ailleurs le moindre objectif pour cette année là, et qu'aucun élément ne démontre que la baisse du nombre d'inscriptions résulte d'une faute de sa part ;

Que s'agissant du grief tiré d'un désintérêt dans le suivi du programme 'Erasmus', l'échange de courriels intervenu entre le directeur général de l'association 3IS SUP et une autre cadre en juin 2017, qui est versé aux débats, démontre seulement l'existence d'une désorganisation interne de l'association, le directeur général ne savant pas lui-même qui était en charge de ce programme et ne se préoccupant pas alors d'y remédier à quelque moment que ce soit, notamment par des instructions données à M. [Z] ; qu'aucune abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée de M. [Z] n'est donc établi dans ce domaine ; qu'en outre aucun élément relatif à une perte d'agrément relatif à ce programme Erasmus n'est versé aux débats ; que la réalité de ce grief n'est donc pas établie ;

Que s'agissant du grief tiré d'une négligence dans l'envoi des justificatifs de frais professionnels, il ressort des débats qu'aucune demande ou rappel à l'ordre sur ce point n'ont été faits par l'employeur avant le licenciement ; qu'en conséquence, là encore, aucune abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée de la part du salarié n'est ainsi établie ;

Qu'il résulte de ce qui précède que les fautes reprochées à M. [Z] ne sont pas établies ; que le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; que le jugement sera ainsi infirmé à ce titre ;

Qu'en conséquence, M. [Z] est fondé à réclamer une indemnité légale de licenciement, dont le montant, eu égard à son ancienneté remontant au 24 août 2015 et à sa rémunération moyenne mensuelle de 4 400 euros brut, sera fixée à la somme de 2 523, 20 euros ;

Qu'il est également fondé à réclamer une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 13 200 euros, outre 1 320 euros au titre des congés payés afférents ;

Qu'il y a lieu enfin de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant compris, eu égard à son ancienneté de deux années complètes, entre 3 et 3,5 mois de salaire brut en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ; qu'eu égard à son âge (1971), à sa rémunération, à l'absence d'éléments sur sa situation professionnelle postérieure au licenciement, il y a lieu de lui allouer une somme de 13 500 euros à ce titre ;

Que le jugement sera infirmé sur ces différents chefs ;

Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :

Considérant que M. [Z] se prévaut à ce titre, selon ses dires, de 'conditions inadmissibles' de son licenciement et d'une 'plainte pénale particulièrement abusive' déposée par l'employeur à son encontre ; que toutefois et en tout état de cause, il ne verse aucun élément venant établir la réalité du préjudice invoqué ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur les dommages-intérêts pour non-respect de l'article L. 3132-1 du code du travail :

Considérant que M. [Z] soutient à ce titre que l'employeur 'l'a contraint à travailler plus de six jours par semaine' en violation des dispositions de l'article L. 3132-1 du code du travail ;

Que toutefois, il n'explique pas à quel moment et dans quelles conditions serait intervenu ce dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail ; qu'il n'allègue donc pas de faits suffisamment précis au soutien de sa prétention ;

Qu'il convient donc de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur la remise de documents sociaux de fin de contrat sous astreinte :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'ordonner à l'association 3IS SUP de remettre à M. [Z] une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Qu'en revanche, il y a lieu de confirmer le débouté de la demande d'astreinte à ce titre, une telle mesure n'étant pas nécessaire ;

Sur le remboursement par M. [Z] à l'association 3IS SUP d'avances de frais professionnels :

Considérant en l'espèce qu'il ressort des justificatifs de frais professionnels versés aux débats par M. [Z] que ce dernier justifie des frais professionnels engagés à hauteur de 4 127,36 euros ; que l'association 3IS SUP est donc seulement fondée à réclamer la somme de 5 576,88-4 127,36=1 449,52 euros à titre de remboursement par M. [Z] d'avances de frais professionnels ; que le jugement sera infirmé sur ce chef ;

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail :

Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par l'association 3IS SUP, aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [Z] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; que l'association 3IS SUP sera condamnée à payer à M. [Z] une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il statue sur la demande de requalification du contrat de prestations de service en contrat de travail, l'indemnité pour travail dissimulé et les demandes subséquentes, les dommages-intérêts pour préjudice moral, les dommages-intérêts pour non-respect de l'article L. 3132-1 du code du travail,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que le licenciement de M. [F] [Z] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l'association 3IS SUP à payer à M. [F] [Z] les somme suivantes :

- 2 523,20 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 13 200 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 320 euros au titre des congés payés afférents,

- 13 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Ordonne à l'association 3IS SUP de remettre à M. [F] [Z] une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Condamne M. [F] [Z] à payer à l'association 3IS SUP une somme de 1 449,52 euros à titre de remboursement d'avances de frais professionnels,

Ordonne le remboursement par l'association 3IS SUP aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [F] [Z] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne l'association 3IS SUP aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03235
Date de la décision : 29/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-29;21.03235 ?
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