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23/03/2023 | FRANCE | N°22/02797

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 23 mars 2023, 22/02797


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53E



16e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 MARS 2023



N° RG 22/02797 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VEYA



AFFAIRE :



S.E.L.A.R.L. MMJ



C/



S.A. NORBAIL-IMMOBILIER



S.A. BCPE LEASE IMMO



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Mars 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG : 20/03978



Expéditions ex

écutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 23.03.2023

à :



Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53E

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MARS 2023

N° RG 22/02797 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VEYA

AFFAIRE :

S.E.L.A.R.L. MMJ

C/

S.A. NORBAIL-IMMOBILIER

S.A. BCPE LEASE IMMO

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Mars 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG : 20/03978

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 23.03.2023

à :

Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.E.L.A.R.L. MMJ

Prise en la personne de Me [T], es qualité de liquidateur judicaire de la Société SCI DU [Adresse 8], désigné à cette fonction selon jugement du Trbunal Judiciaire de Pontoise en date du 15 juin 2021

[Adresse 2]

[Localité 9]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SCI DU [Adresse 8]

N° Siret : 487 639 973 (RCS Pontoise)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20220334 - Représentant : Me Yann-Charles CORRE, Plaidant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 4

APPELANTES

****************

S.A. NORBAIL-IMMOBILIER

N° Siret : 352 109 656 (RCS Paris)

[Adresse 4]

[Localité 5]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

S.A. BCPE LEASE IMMO

Anciennement denommée NATIXIS LEA IMMO et plus anciennement dénommée FRUCTICOMI

N° Siret : 333 384 311 (RCS Paris)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2268657 - Représentant : Me Jacques TORIEL de la SCP TORIEL & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R118, substitué par Me Erika SABATHIE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MICHON, Conseiller et Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles entendu en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

Aux termes d'un acte notarié reçu le 11 septembre 2006, modifié et complété par avenants notariés des 30 janvier 2008, 18 décembre 2009, 23 octobre 2013 et 29 juin 2017, les sociétés Norbail Immobilier et Fructicomi ont consenti à la société SCI du [Adresse 8] (créée en 2005), un contrat de crédit-bail immobilier portant sur un ensemble immobilier à usage d'activités, d'entrepôts, de bureaux et de show-room situé à [Localité 10] (95) d'une surface approximative de 5.473 m2, ceci pour une durée de quinze ans à compter de l'achèvement ou de la livraison des constructions.

Le financement mis à la disposition de cette SCI s'est élevé, à la suite du troisième avenant, à la somme de 7.194.000 euros HT (soit 8.632.800 euros TTC) et la SCI s'engageait à verser des loyers trimestriels à terme échu durant toute la durée du contrat, outre les charges de l'immeuble.

Le 02 mars 2017, en raison de difficultés financières et sous l'égide d'un administrateur judiciaire, les parties ont signé un protocole de conciliation (objet du quatrième avenant précité) qui réaménageait les termes et conditions du contrat.

Trois mises en demeure des 05 avril, 20 mai puis 09 juillet 2019 adressées à la SCI pour avoir paiement des échéances impayées des 4ème trimestre 2018, 1er trimestre 2019 (à hauteur de 385.886,60 euros) puis incluant le 2ème trimestre 2019 (à hauteur de 560.905,62 euros TTC) sont restées lettres mortes.

La dernière, réceptionnée le 13 juillet 2019, visait la clause résolutoire prenant effet passé le délai d'un mois.

Par jugement rendu le 19 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Pontoise a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de cette SCI et les deux crédit-bailleresses ont déclaré leurs créances à titre privilégié entre les mains du mandataire judiciaire désigné, monsieur [T], pour une somme totale de 4.783.354,21 euros TTC.

Aux fins d'expulsion de la SCI et de condamnation à diverses sommes, les crédit-bailleresses ont d'abord saisi la juridiction des référés de Pontoise qui a dit n'avoir lieu à statuer en raison d'une contestation sérieuse, puis, par acte des 09 et 11 septembre 2020, la juridiction de fond aux mêmes fins.

Parallèlement, la SCI contestait la créance déclarée, ne reconnaissant être débitrice que de la somme de 866.512,30 euros et, par ordonnance rendue le 07 janvier 2021, le juge-commissaire a sursis à statuer dans l'attente du prononcé du jugement par la juridiction de fond précédemment saisie.

Enfin, selon jugement rendu le 15 juin 2021, le tribunal judiciaire de Pontoise a prononcé la liquidation judiciaire de la SCI en désignant maître [T] en qualité de liquidateur.

Suivant deux courriers du 21 juillet 2021 les crédit-bailleresses ont déclaré une créance complémentaire, à titre privilégié, correspondant aux indemnités d'occupation postérieures au 15 juin 2021 d'un montant (estimé à 6 mois) de 430.031,76 euros TTC et adressé au liquidateur un récapitulatif des indemnités d'occupation, taxes, charges impayés (article L 622-17 du code de commerce) pour un total de 1.144.840,25 euros TTC.

Maître [T] a pris acte, ce même jour, de la résiliation du contrat dont il n'entendait pas contester les termes et l'immeuble a été restitué le 22 juillet 2021.

Par jugement contradictoire rendu le 07 mars 2022 le tribunal judiciaire de Pontoise, rappelant que cette décision est de droit exécutoire par provision, a :

constaté la résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail du 11 septembre 2006 et de ses différents avenants à la date du 13 août 2019,

fixé le montant de la créance des sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo au passif de la SCI du [Adresse 8] à la somme totale de 1.878.335,22 euros à titre privilégié pour la période antérieure au 19 novembre 2019,

fixé le montant de la créance des sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo au passif de la SCI du [Adresse 8] à la somme totale de 79.153,79 euros pour la période du 15 juin 2021 au 22 juillet 2021,

condamné la Selarlu MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès qualités de liquidateur de la SCI du [Adresse 8], à payer à la société Norbail Immobilier et à la société BPCE Lease Immo, à concurrence de 50 % pour chacune d'elles, la somme de 1.142.504,45 euros pour la période du 19 novembre 2019 au14 juin 2021, outre les intérêts au taux contractuel, à hauteur des fonds disponibles de la liquidation et en application de l'ordre prévu par les paragraphes II et III de l'article L 622-17 du code de commerce,

ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an sur les sommes dues à compter du 19 novembre 2019,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective.

Par dernières conclusions (n° 2) notifiées le 03 janvier 2023, la société civile immobilière SCI du [Adresse 8] et la Selarl MMJ, prise en la personne de son représentant légal et en la personne de maître [T], es-qualités de liquidateur de cette SCI, appelants de ce jugement selon déclaration reçue au greffe le 21 avril 2022, demandent à la cour, au visa des articles 1103 (ancien article 1134), des dispositions d'ordre public de l'article 1104 (ancien article 1134) du code civil, 1231-5 (ancien article 1152) du code civil et du protocole de conciliation daté du 2 mars 2017 et son article 16 :

de déclarer recevables et bien fondées la société SCI du [Adresse 8] et la Selarl MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société SCI du [Adresse 8] en leur appel, en leurs demandes et moyens de défense, y faisant droit,

d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a : fixé le montant de la créance des sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo au passif de la SCI du [Adresse 8] à la somme totale de 1.878.335,22 euros à titre privilégié pour la période antérieure au 19 novembre 2019 // condamné la Selarlu MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur de la SCI du [Adresse 8], à payer à la société Norbail Immobilier et à la société BPCE Lease Immo, à concurrence de 50 % pour chacune d'elles, la somme de 1.142.504,45 euros pour la période du 19 novembre 2019 au14 juin 2021, outre les intérêts au taux contractuel, à hauteur des fonds disponibles de la liquidation et en application de l'ordre prévu par les paragraphes II et III de l'article L 622-17 du code de commerce // ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an sur les sommes dues à compter du 19 novembre 2019 // débouté la SCI du [Adresse 8] et la Selarlu MMJ, prise en la personne de maître [G] [T] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SCI du [Adresse 8] de leurs demandes plus amples ou contraires, et plus précisément en ce qu'il (les) a déboutées de leurs demandes :

tendant à faire réduire à un euro le quantum de l'indemnité de résiliation qualifiée de clause pénale,

tendant à ce que la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo et plus anciennement dénommée Fructicomi) soient déboutées de leur demande de fixation du quantum de l'indemnité de résiliation contractuelle à la somme de 3.900.018,99 euros et plus généralement de leur créance d'un montant de 4.783.354,21 euros TTC,

tendant à ce que le quantum de la créance déclarée de la société Norbail Immobilier et de la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) soit limité à la somme de 866.512,30 euros,

tendant à ce que la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée...) soient déboutées de leur demande de condamnation de la SCI du [Adresse 8] et de la Selarlu MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités, à payer à compter du 19 novembre 2019 et jusqu'au 14 juin 2021 une indemnité d'occupation mensuelle fixée à 58.343,75 euros TTC majorée des charges, soit la somme totale de 1.142.504,45 euros TTC,

tendant à ce que la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) soient déboutées de leurs demandes de condamnation au titre des intérêts de retard au taux contractuel et de capitalisation des intérêts échus,

tendant, à titre reconventionnel, à ce que la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) soient condamnées solidairement à payer à la SCI du Moulin et à la Selarlu MMJ, prise en la personne de maître [G] [T] ès-qualités de mandataire liquidateur, la somme de 5.500.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance,

tendant à ce que la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) soient condamnées solidairement à payer à la SCI du [Adresse 8] et à la Selarl MMJ, prise en la personne de maître [G] [T] ès-qualités de mandataire liquidateur, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens //

rappelé que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire //ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective,

et statuant à nouveau,

de débouter la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) de leur demande de fixation du quantum de l'indemnité de résiliation contractuelle à la somme de 3.900.018,99 euros et plus généralement de leur créance antérieure d'un montant de 4.783.354,21 euros TTC,

de prononcer que (sic) l'indemnité conventionnelle de résiliation doit être qualifiée de clause pénale dont le quantum doit être réduit à 1 euro (un euro),

de prononcer la fixation du quantum de la créance antérieure des sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective à la somme de 866.512,30 euros et de débouter les crédit-bailleurs pour le surplus,

de débouter la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) de leur demande de condamnation de la société SCI du [Adresse 8] et de la Selarl MMJ, prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société SCI du [Adresse 8], à payer à compter du 19 novembre 2019 jusqu'au 14 juin 2021 une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 58.343,75 euros TTC majorée des charges, pour un montant total de 1.142.504,45 euros TTC,

de débouter la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) de leurs demandes de condamnation au titre des intérêts de retard au taux contractuel et de capitalisation des intérêts échus,

de débouter la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires,

à titre reconventionnel

de condamner solidairement la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée...) à payer à la société SCI du [Adresse 8] et à la Selarl MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société SCI du [Adresse 8], la somme de 5.500.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance,

et y ajoutant

de condamner solidairement la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée...) à payer à la société SCI du [Adresse 8] et à la Selarl MMJ prise en la personne de maître [G] [T] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société SCI du [Adresse 8], à chacune, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

de débouter la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

de condamner solidairement la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux la concernant au profit de maître Oriane Dontot, JRF & associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 11 octobre 2022 la société Norbail Immobilier et la société BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo et plus anciennement dénommée Fructicomi), visant la clause résolutoire contenue dans le contrat de crédit-bail immobilier du 11 septembre 2006 tel que modifié et complété par les avenants notariés des 30 janvier 2008, 18 décembre 2009, 23 octobre 2013 et 29 juin 2017, le courrier recommandé avec accusé de réception du 09 juillet 2019 de mise en demeure visant la clause résolutoire, dûment réceptionnée le 13 juillet 2019, l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société SCI du [Adresse 8] selon jugement du tribunal de grande instance de Pontoise du 19 novembre 2019, le jugement de conversion en liquidation judiciaire de la SCI du [Adresse 8] rendu par le tribunal judiciaire de Pontoise le 15 juin 2021, l'ordonnance du 07 janvier 2021 rendue par le juge commissaire à la procédure collective de la SCI du [Adresse 8] ainsi que les articles 1134 et suivants (anciens), 1103, 1104 (nouveaux), et 1343-2 (ancien 1154) du code civil, prient la cour :

de déclarer la SCI du [Adresse 8] et la Selarlu MMJ, prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SCI du [Adresse 8], mal fondées en leur appel, en conséquence,

de confirmer le jugement dont appel (...),

en toute hypothèse

de débouter la Selarlu MMJ, prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SCI du [Adresse 8], et la SCI du [Adresse 8] de toutes leurs demandes, fins et prétentions,

de condamner la Selarlu MMJ, prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SCI du [Adresse 8] à payer aux sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo (anciennement dénommée ...) la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Liminairement et ainsi qu'observé par les sociétés intimées, le jugement qui fait l'objet d'un appel limité n'est pas contesté en ce qu'il a constaté la résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail conclu le 11 septembre 2006 et de ses différents avenants à la date du 13 août 2019 (soit dans le délai d'un mois du courrier recommandé du 13 juillet 2019 visant la clause résolutoire qui mettait la SCI en demeure de régler les loyers, intérêts, taxes, primes d'assurance impayés à cette date).

Bien que les appelantes jugent utile d'y consacrer des développements (p 12 à 14/43 de leurs dernières conclusions), elles ne sollicitent pas l'infirmation du jugement en cette disposition dans le dispositif desdites écritures qui seul saisit la cour.

De la même façon et en dépit d'autres développements sans que n'en soient tirées de conséquences juridiques (p 14 et 15/43), le jugement n'est point critiqué en ce qu'il a fixé le montant de la créance des sociétés Norbail Immobilier et BPCE Lease Immo au passif de la SCI du [Adresse 8] à la somme totale de 79.153,79 euros pour la période du 15 juin 2021 (date du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la SCI du [Adresse 8]) au 22 juillet 2021 (date de libération des lieux).

Sur la créance des crédit-bailleresses antérieure à l'ouverture de la procédure collective

Il convient de rappeler que pour fixer cette créance (à titre privilégié conformément à l'article 2355 du code civil) à la somme de 1.878.335,22 euros alors que la créance déclarée, le 07 janvier 2020, des deux crédit-bailleresses s'élevait à celle de 4.783.354,21 euros incluant l'indemnité de résiliation conventionnelle évaluée à 3.900.018,99 euros (pièce n° 9-1 des intimées) le tribunal a retenu les loyers et indemnités d'occupation successivement échus du 1er octobre 2018 au 18 novembre 2019 outre le montant de diverses taxes (sur les surfaces de stationnement, sur les bureaux, foncière de 2019), les intérêts de retard sur la période du 31 juillet au 06 décembre 2018 (soit la somme de 11.702,93 euros), la prime d'assurance et des frais facturés pour la période du 1er janvier au 18 novembre 2019.

Il a néanmoins ramené à la somme de 1.000.000 euros l'indemnité contractuelle de résiliation au 13 août 2019 que les crédit-bailleresses ont déclarée, au visa de la stipulation figurant au chapitre II, titre III du contrat, pour un montant de 3.900.018,99 euros non assujetti à la TVA et, par ailleurs, rejeté la créance déclarée de 5.000 euros présentée comme la somme susceptible d'être reversée au titre du solde non amorti de la subvention du Conseil général du Val d'Oise à la date de résiliation du contrat.

Sur la fixation de cette créance, hors indemnité de résiliation

Alors que les sociétés intimées poursuivent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu à ce titre une créance au montant de 878.335,22 euros, la SCI et la Selarl MMJ ès-qualités demandent que cette créance antérieure soit fixée à la somme de 866.512,30 euros ainsi décomposée :

Loyer de crédit-bail 4è trimestre 2018 : 174.992,73 €

Loyer de crédit-bail 1er trimestre 2019 : 175.006,99 €

Taxe annuelle sur surface de stationnement 2019 : 1.404,92 € (prorata)

Taxe sur les bureaux 2019 : 14.618,36 € (prorata)

Assurance locaux : 5.377,86 €

Loyer de crédit-bail 2è trimestre 2019 : 175.019,02 €

Loyer de crédit-bail 3è trimestre 2019 : 175.031,26 €

Taxe foncière 2019 : 51.831,15 € (prorata)

Loyer de crédit-bail 4è trimestre 2019

(arrêté au 19/11/2019) : 93.230,01 € (prorata)

Pour affirmer qu'à tort le tribunal a, en sus, retenu la somme de 11.702,93 euros, les appelantes qui reconnaissent comme 'valable' le montant de la 'créance antérieure', font valoir que celui de ces intérêts n'en est pas justifié.

Elles omettent, ce faisant, de débattre du moyen de leurs adversaires qui leur opposent à juste titre la stricte application de l'article 4, titre II chapitre III (page 34) du contrat qui prévoit que toute somme non réglée à son échéance est productive d'intérêts majorés de 5 points et justifient d'une facture n° 1901/000798 du 08 janvier 2008 payable le 29 janvier 2019 les comptabilisant sur la période du 31 juillet 2018 au 06 décembre 2018 (pièce n° 9-2).

La demande des appelantes de ce chef ne peut donc prospérer.

Sur la contestation de l'indemnité de résiliation convenue

Au titre III du contrat et en son chapitre II intitulé 'résiliation à la demande du bailleur' (page 36), les parties sont ainsi convenues :

'A défaut de paiement à son échéance de l'une quelconque des charges financières dues par le preneur, comme aussi en cas d'inexécution de l'une quelconque des obligations mises à sa charge, le contrat de crédit-bail immobilier sera résilié de plein droit, si bon semble au bailleur, un mois après une simple lettre recommandée avec accusé de réception restée infructueuse, le point de départ de ce délai d'un mois étant la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception, et sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire.

Par voie de conséquence, le preneur perdra tous droits, dans ce cas, à demander la réalisation de la promesse de vente qui deviendra nulle et non avenue.

En outre, le preneur sera tenu des mêmes indemnités que celles prévues ci-dessus ,Chapitre I. " faculté de résiliation pour le locataire" , et, en sus d'une indemnité complémentaire égale hors taxe, à deux annuités de loyers toutes taxes comprises (...)'

la clause du chapitre I du contrat à laquelle il était renvoyé stipulant :

( (...) Elle entraînera, en outre, de plein droit et sans formalité quelconque le paiement par le locataire d'une indemnité spéciale de résiliation qui aura le caractère de dommages-intérêts égale à 50% du montant cumulé des versements à échoir entre la date effective de la résiliation et la date d'échéance du contrat'.

C'est sur ces bases que les crédit-bailleresses ont déclaré une créance à hauteur de 3.900.018,99 euros qui cumulait 50% des échéances à échoir HT du 31/12/2017 au 01/04/2027 (soit : 4.976.921,48 euros HT / 2) et deux annuités de loyers (soit : 1.411.558,25 euros TTC).

Qualifiant cette indemnité de clause pénale et usant de son pouvoir modérateur, le tribunal en a ramené le montant à 1.000.000 euros en jugeant que l'application en son intégralité de la clause contractuelle était manifestement excessive.

Pour ce faire, il a retenu l' 'incontestable préjudice financier' causé par la résiliation anticipée du contrat mais aussi la contribution des sociétés crédit-bailleresses à leur propre dommage en refusant diverses offres de reprise de l'ensemble immobilier (notamment celle, ferme, définitive et sans condition suspensive, du Consulat d'Algérie à [Localité 9] du 08 avril 2021 pour un montant de 4.900.000 euros HT) conformes, en leur montant, à une évaluation du 14 mars 2018 émanant de la société Crédit Foncier Immobilier mandatée par l'une des crédit-bailleresses ; il a, en outre, retenu le fait que la SCI affirmait sans être contredite avoir versé une somme de plus de 5.500.000 euros entre 2010 et 2018 en exécution du contrat.

En cause d'appel, aucune des parties ne conteste la qualification de clause pénale de cette stipulation justement retenue par le tribunal dès lors qu'outre son caractère comminatoire elle évalue forfaitairement et par avance l'indemnité due en cas d'inexécution de l'obligation contractée.

Mais, tandis que les sociétés intimées poursuivent la confirmation du jugement au montant retenu - observant que la minoration opérée, qu'elles évaluent à 74,36% du montant de la clause convenue, est 'd'ores et déjà considérable' - la SCI et son liquidateur, à qui il appartient de rapporter la preuve du caractère manifestement excessif de la sanction au regard du préjudice subi par leurs adversaires, en poursuivent la minoration à la somme de un euro.

Citant diverses jurisprudences de cours d'appel et se prévalant de leur bonne foi, les appelantes approuvent le tribunal en ce qu'il a jugé que, sans légitimité, 'par leur attitude, les crédit-bailleresses ont occasionné une perte de chance d'atténuer leur propre préjudice, qui pénalise d'autant le crédit-preneur par ricochet' et, par ailleurs, en ce qu'il a tenu compte des échéances du contrat de crédit-bail par elle versées durant plus de huit années.

Eu égard, estiment-elles, aux données factuelles prises en considération par les premiers juges mais aussi aux éléments nouveaux apparus en cause d'appel, elles affirment que les crédit-bailleresses n'ont subi aucun préjudice.

Elles tirent tout particulièrement argument du prix de revente de l'immeuble en septembre 2022, pour une somme de 4.200.000 euros, que les sociétés intimées ont perçue grâce aux efforts considérables gracieusement déployés par le gérant de la SCI du [Adresse 8] qui avait reçu un mandat simple de négociation en décembre 2021 (avant que, de mauvaise foi, celui-ci ne lui soit dénié) ou aux frais de conservation de l'immeuble que la SCI a exclusivement engagés durant la période d'observation (frais de surveillance, de gardiennage, d'entretien des lieux, de location de bennes pour les sécuriser, tous attestés par des factures).

Elles en concluent qu'est justifiée leur demande de minoration de cette clause pénale à un euro sur le fondement de l'article 1231-5 (ancien article 1152) du code civil.

Ceci étant rappelé, il est constant que pour apprécier le caractère manifestement excessif du montant de la clause pénale, le comportement de son débiteur est indifférent si bien qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération la bonne foi de la SCI ou les diligences personnelles qu'elle a pu accomplir.

Il convient, en revanche, de rechercher s'il existe une disproportion manifeste entre l'importance du préjudice effectivement subi et le montant conventionnellement fixé.

En sollicitant la confirmation du jugement, les sociétés intimées admettent que cette clause pénale peut être modérée, ce qui requiert une appréciation de la proportionnalité, et elles ne peuvent être suivies lorsqu'elles invitent la cour à user de son pouvoir discrétionnaire, sans motivation, dès lors qu'il ne lui est pas demandé de faire application pure et simple de la convention en retenant la peine forfaitairement prévue.

Pour apprécier le caractère excessif de la clause pénale, les juges doivent se placer à la date de leur décision, comme cela résulte de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 1ère, 19 mars 1980, pourvoi n° 78-13151, publié au bulletin), si bien qu'à tort les sociétés intimées font valoir qu'elles n'avaient pas vocation, aux termes du contrat, à se voir restituer l'immeuble choisi par la SCI pour la satisfaction des seuls besoins personnels de cette dernière afin d'en déduire que la revente de l'immeuble n'a pas à être prise en compte dans le cadre de la fixation du montant de l'indemnité de résiliation.

S'agissant de l'appréciation du préjudice effectivement subi, est dénuée de portée l'argumentation des appelantes tenant au comportement passé des crédits-bailleresses qu'elles incriminent encore devant la cour en se prévalant de leur refus de donner suite à des propositions de reprise dans le courant de l'année 2021, en particulier l'offre du Consulat d'Algérie (renouvelée le 08 mai 2021 et valable jusqu'au 30 juin 2021, pièce n° 17 des intimées).

Il est, en effet, établi que les lieux n'ont été libérés que postérieurement à cette offre, le 22 juillet 2021, et que ce n'est que tardivement que les appelantes ont renoncé à demander au tribunal de juger que la convention de crédit-bail n'avait pas été résiliée (pièce n° 27 des intimées : conclusions adverses du 1er décembre 2021). Ces propositions et cette offre intervenaient par conséquent dans un contexte incertain quant au sort du contrat en cause.

Plus généralement, outre le fait que les crédit-bailleresses, en vertu du principe de la liberté contractuelle, ont pu juger que les propositions et l'offre invoquées n'étaient ni sérieuses ni exploitables, le droit français ne fait pas obligation à la victime, à l'inverse d'autres droits ( duty to mitigate the damage en droit anglo-saxon, à titre exemplatif) de modérer son dommage.

En revanche et en se plaçant, comme il a été dit, au jour où la cour statue, il est constant que l'ensemble immobilier a été cédé à la société Crédit Mutuel Real Estate Lease le 15 septembre 2022 au prix, payé comptant, de 4.200.000 euros HT (pièce n° 30 des intimées).

Par ailleurs, s'il est vrai que la SCI s'est, dans un premier temps, partiellement acquittée des loyers convenus, il n'en est pas moins établi qu'elle s'en est abstenue à compter de la trimestrialité d'octobre 2018 alors qu'aux termes du dernier avenant régularisé, elle bénéficiait d'un différé d'amortissement en capital d'une année et d'un allongement de la convention de 24 mois jusqu'au 31 mars 2027, éléments de nature à consolider l'opération de crédit bail, comme le font valoir les crédit-bailleresses arguant de leurs efforts pour en assurer la bonne exécution.

Les crédit-bailleresses sont, par suite, fondées à réclamer la mise en oeuvre de cette clause qui avait notamment pour objet d'assurer l'efficacité du contrat et les versements partiels allégués ne permettent pas aux appelantes d'en tirer avantage pour réclamer la réduction de son montant à la somme symbolique d'un euro.

La cession effective de l'ensemble immobilier ayant vocation à être prise en considération pour apprécier la proportionnalité de la clause au préjudice effectivement subi, même si la valeur résiduelle fixée à un euro aux termes du titre IV, chapitre II du contrat peut être regardée comme négligeable, il ressort des décomptes auxquels se sont livrées les intimées que si le contrat en cause s'était poursuivi jusqu'au terme de l'opération, elles auraient perçu l'ensemble des échéances de loyer convenues entre le 31 décembre 2019 au 31 mars 2027, soit la somme totale de 4.976.921,48 euros HT, étant ajouté qu'il peut être tenu compte des impayés à la date de résiliation, le 13 août 2019 (à savoir une somme globale évaluée à 622.013,17 euros TTC cumulant le montant des échéances non honorées, les taxes et la prime d'assurance acquittées).

Ainsi, l'indemnité de résiliation visée au contrat, liquidée à la somme de 3.900.018,99 euros ne peut être qualifiée de manifestement excessive et elle le peut d'autant moins, au cas particulier, que les crédit-bailleresses ne poursuivent le paiement que de la somme retenue à ce titre par le tribunal, à savoir celle de 1.000.000 euros.

Il suit de là que la SCI et son liquidateur ne sont pas fondés en leur demande de réformation du jugement querellé sur ce point.

Sur la créance née postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire jusqu'à la conversion en liquidation judiciaire

Les appelantes font également grief au tribunal d'avoir fait droit à la demande des requérantes qui réclamaient paiement, pour la période s'étendant du 19 novembre 2019 au 14 juin 2021, d'une somme totale de 1.142.504,45 euros TTC au titre de cette créance, sur la base d'une indemnité d'occupation mensuelle de 58.343,75 euros TTC majorée des charges, en considérant que leur décompte 'n'apparaissait pas contestable' sans toutefois répondre à leur argumentation en défense.

Pour demander à la cour d'infirmer le jugement et de débouter les sociétés intimées de leur entière demande de ce chef, elles font état de l'intitulé des factures émises qui, jusqu'au 30 juin 2021, évoquent des 'loyers' et non point des indemnités d'occupation ou de l'incohérence de la réclamation puisque par lettre du 29 mars 2021, elles adressaient au gérant de la SCI, pris en sa qualité de caution, une lettre d'information en précisant que l'encours du crédit bail au 30 décembre 2020 s'établissait à 3.651.871,31 euros HT, 'démontrant ainsi le suivi de l'échéancier de crédit-bail' (pièces n° 46 à 48 des appelantes).

Elles reprochent, en outre, aux sociétés intimées de ne pas détailler les charges réclamées en se bornant à écrire qu'il s'agit de charges incombant contractuellement au crédit-preneur en vertu du contrat, d'autant qu'elles y incluent des primes d'assurance, des frais de gestion et de dossier, des taxes sur les bureaux, une taxe annuelle sur les surfaces de stationnement postérieure à la restitution des locaux, en juillet 2021 et que certaines sont arrêtées au 31 décembre 2021.

Ceci étant exposé, il y a d'abord lieu d'observer que les appelantes ne contestent pas la situation d'occupante sans droit ni titre de la SCI postérieurement à l'acquisition de la clause résolutoire stipulée durant la période considérée pas plus le fait que les sommes réclamées au titre de ces indemnités relèvent des dispositions de l'article L 622-17 du code de commerce selon lequel 'Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance'.

Le quantum mensuel de ces créances est clairement exposé par les sociétés intimées. Elles explicitent les paramètres pris en considération, à savoir le montant de la dernière échéance trimestrielle payée dans le cadre du contrat à exécution successive en cause et excipent du fait qu'elles n'ont pas tenu compte des prévisions contractuelles, à savoir un doublement du loyer, pour fixer l'indemnité d'occupation mais ont, simplement et plus favorablement, repris le dernier loyer contractuel payé en le ramenant à une périodicité mensuelle.

Si les factures émises ont pu ponctuellement mentionner, par mégarde, le terme 'loyer' plutôt qu'indemnité d'occupation ceci ne saurait avoir quelque effet sur la situation juridique considérée ; à cet égard, les sociétés intimées rappellent pertinemment que la renonciation à un droit, ici : celui de se prévaloir de la résiliation, doit ressortir d'une volonté non équivoque et opposent, de plus, aux appelantes nombre de documents mentionnant que les sommes réclamées jusqu'à la libération des lieux sont désignées sous le terme d'indemnités d'occupation.

En outre, nul argument utile ne peut être tiré par les appelantes du fait que le gérant de la SCI, personne physique qui s'est portée caution, ait reçu une lettre annuelle d'information relative au solde de l'encours du contrat dans la mesure où il ressort d'une jurisprudence constante que cette information doit être fournie jusqu'à l'extinction de la dette (Cass com, 02 novembre 1993, pourvoi n° 91-17256, publié au bulletin - Ch mixte, 17 novembre 2006, pourvoi n° 04-12863, publié au bulletin - Cass com 13 décembre 2017, pourvoi n° 16-14404).

Toujours sur la contestation de l'indemnité d'occupation et de la même façon limpide, les appelantes démontrent que les trois règlements au montant unitaire de 30.000 euros opérés par l'administrateur judiciaire ont été imputés sur les indemnités dues pour les mois de décembre 2019, janvier et février 2020.

Seul apparaît en effet, avec l'ajout de la mention 'solde', un reliquat de 28.343,75 euros TTC. dans le décompte récapitulant les impayés durant la période considérée, lequel figure dans leur courrier d'actualisation daté du 21 juillet 2021 adressé au liquidateur judiciaire par lequel elles sollicitaient le règlement de la somme totale de 1.144.840,25 euros (pièce n° 19).

S'agissant, ensuite, des diverses primes d'assurance et taxes portées dans ce même récapitulatif des impayés, les appelantes ne peuvent valablement les contester comme elles le font dès lors qu'elles ne démontrent pas que ces charges ne leur sont pas imputables et dans la mesure où elles sont décomptées prorata temporis pour les périodes d'occupation sans droit ni titre des locaux de 2019 et 2021.

Les sociétés intimées s'expliquent, par ailleurs, sur la minoration de la somme judiciairement réclamée (soit : 1.142.504,45 euros TTC) en exposant qu'elles ont été conduites à modifier le montant de la taxe foncière de 2021 qui ne leur était pas connue à la date d'envoi de ce courrier et ne faisait l'objet que d'une évaluation en regard de la taxe de l'année précédente.

Enfin, c'est à bon droit que le tribunal a assorti d'intérêts cette créance postérieure privilégiée, au sens de l'article L 622-17 précité, qui échappe à la règle de l'arrêt du cours des intérêts et jugé que rien ne s'oppose à la demande d'anatocisme.

Il suit de là que le jugement mérite confirmation sur cet autre point.

Sur la demande indemnitaire des appelantes

Sollicitant la condamnation des crédit-bailleresses au paiement de la somme de 5.500.000 euros venant réparer la perte de chance 'évidente' résultant de leur refus persistant de vendre l'ensemble immobilier malgré les 'propositions' et offres de vente amiable qu'elles leur ont soumises et qui auraient permis de les désintéresser sans délai et en totalité - demande dont elles ont été déboutées par le tribunal au motif qu'elle faisait 'double emploi' avec la demande de minoration de la clause pénale prise en considération - elles énumèrent ces diverses propositions ou offres présentées de septembre 2019 à avril 2021, parmi lesquelles celle du Consulat d'Algérie sus-évoquée, en faisant état des efforts déployés par l'administrateur judiciaire, dans le contexte de la crise sanitaire, pour qu'elles soient suivies d'effet et de la fin de non-recevoir sans la moindre explication cohérente qui leur a été opposée en retour.

Elles tirent argument de la vente effectivement réalisée pour se prévaloir du sérieux de la chance perdue, incriminant le manque de bon sens et de loyauté des crédit-bailleresses, voire leur intention de nuire ou la recherche d'un profit, et rappelant les décisions judiciaires rendues dans le cadre de la procédure collectives qui ont pu se montrer favorables à cette issue

Mais, outre le fait que la demande de réparation de la chance perdue dont il est question ne satisfait pas aux exigences requises pour qu'il y soit fait droit - les appelantes l'évaluant, sans plus d'explications, à une somme de 5.500.000 euros sans débattre de son caractère direct et certain ni ne justifiant de la probabilité de survenance de cette chance qui conduit à moduler le préjudice à l'aune d'un pourcentage - il convient de considérer qu'elle ne peut s'en prévaloir comme énoncé ci-avant dans l'appréciation de l'indemnité de résiliation et par mêmes motifs.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il les déboute de leur demande en paiement de dommages-intérêts.

Sur les frais de procédure et les dépens

L'équité commande de condamner les appelantes à verser aux crédit-bailleresses intimées une somme globale de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboutées de ce dernier chef de demande, les appelantes qui succombent supporteront les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement entrepris et y ajoutant ;

Condamne la Selarl MMJ prise en la personne de maître [G] [T], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SCI du [Adresse 8], à payer aux sociétés Norbail-Immobilier et BPCE Lease Immo (anciennement dénommée Natixis Lease Immo et plus anciennement Fructimo) la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens d'appel.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 22/02797
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;22.02797 ?
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