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22/03/2023 | FRANCE | N°21/02357

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 22 mars 2023, 21/02357


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 22 MARS 2023



N° RG 21/02357



N° Portalis DBV3-V-B7F-UU3H



AFFAIRE :



[F] [N]



C/



S.A.R.L. LOUIS ARMAND COIFFURE



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Juin 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F20/00067
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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SCP SCP BACHELET - GUERARD- OBERTI



la AARPI SKDB Associés







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT DEUX MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

L...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 MARS 2023

N° RG 21/02357

N° Portalis DBV3-V-B7F-UU3H

AFFAIRE :

[F] [N]

C/

S.A.R.L. LOUIS ARMAND COIFFURE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Juin 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F20/00067

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SCP SCP BACHELET - GUERARD- OBERTI

la AARPI SKDB Associés

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT DEUX MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [F] [N]

née le 09 Avril 1977 à [Localité 3] (87)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Christine BACHELET de la SCP SCP BACHELET - GUERARD- OBERTI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 151

APPELANTE

****************

S.A.R.L. LOUIS ARMAND COIFFURE

N° SIRET : 739 802 171

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Stéphanie KALOFF de l'AARPI SKDB Associés, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0168

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

[F] [N] a été engagée par la société Louis Armand Coiffure suivant un contrat de travail à durée déterminée à compter du 1er décembre 1997 pour une durée de trois mois en qualité d'assistante, coefficient hiérarchique 105 en référence aux dispositions de la convention collective nationale de la coiffure et des professions connexes, puis suivant un contrat de travail à durée déterminée en qualité de coiffeuse pour la période du 3 mars 1998 jusqu'au 2 septembre 1998. Par avenant du 3 septembre 1998, le contrat s'est poursuivi sous une durée indéterminée.

En dernier lieu, la salariée percevait une rémunération mensuelle moyenne brute de 2 031,80 euros.

A compter du 14 mai 2019, la salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie professionnelle.

Le 5 décembre 2019, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude au poste de travail de la salariée.

Par lettre datée du 13 décembre 2019, l'employeur a proposé un poste de reclassement d'hôtesse d'accueil / conseillère à la salariée que celle-ci a refusé.

Par lettre datée du 20 décembre 2019, l'employeur lui a proposé un poste de technicienne coloriste que la salariée a refusé.

Par lettre datée du 7 janvier 2020, l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 17 janvier 2020 suivant, puis par lettre datée du 21 janvier 2020, lui a notifié son licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement, en lui indiquant qu'elle ne bénéficierait pas des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail en raison du caractère jugé abusif des refus de propositions de reclassement.

Par lettre datée du 29 janvier 2020, la salariée a contesté le caractère abusif de ses refus de postes.

Par lettre de son conseil du 13 mars 2020, la salariée a invoqué auprès de l'employeur une discrimination et un harcèlement.

Le 6 mai 2020, [F] [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy afin d'obtenir la condamnation de la société Louis Armand Coiffure à lui payer diverses indemnités au titre du licenciement, un rappel de salaire et des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Par jugement mis à disposition le 24 juin 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont, après avoir rappelé l'exécution provisoire sur les créances visées à l'article R. 1454-14 alinéa 2 du code du travail, et fixé la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail à la somme de 2 031,80 euros bruts, condamné la société Louis Armand Coiffure à verser à [F] [N] les sommes suivantes : 

* 225,45 euros au titre de complément de l'indemnité de licenciement,
* 733,22 euros à titre de rappel de salaire de la prime d'ancienneté du 14 mai 2019 au 21 janvier 2020, 

* 73,32 euros au titre des congés payés afférents, 

avec intérêts légaux à compter du 8 juin 2020, date de réception de la convocation pour le bureau de conciliation et d'orientation par la partie défenderesse,

* 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,

ont débouté les parties du surplus des demandes et ont ordonné à la société Louis Armand Coiffure de remettre à [F] [N] un certificat de travail conforme à son ancienneté de 22 ans et 4 mois et ce, sans astreinte.

Le 20 juillet 2021, [F] [N] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par ordonnance du 14 novembre 2022, le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour se prononcer sur la demande de la société Louis Armand Coiffure tendant à voir dire l'appel de [F] [N] dépourvu de tout effet dévolutif, a condamné ladite société aux dépens de l'incident et a dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 5 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, [F] [N] demande à la cour de la déclarer recevable en son appel, de confirmer le jugement en ses condamnations à paiement de sommes pour les montants et les chefs retenus, de l'infirmer en ses déboutés des autres demandes, statuant à nouveau, de condamner la société Louis Armand Coiffure à lui payer les sommes suivantes :

* 13 432,45 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement,

* 4 063,60 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 12 000 euros à titre de dommages et intérêts,

* 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 13 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Louis Armand Coiffure demande à la cour de :

- in limine litis et à titre principal, juger l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel en raison de l'absence d'objet mentionné au terme de la déclaration d'appel du 20 juillet 2021,

- à titre subsidiaire, confirmer le jugement en ses déboutés des demandes de [F] [N], l'infirmer en ses condamnations à paiement de sommes pour les montants et les chefs retenus et remise de document, statuant à nouveau, fixer le salaire de référence de [F] [N] à la somme de 2 031,80 euros et le montant de l'indemnité de licenciement à la somme de 13 207 euros, en conséquence, débouter [F] [N] de l'ensemble de ses demandes et condamner celle-ci à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens. 

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 31 janvier 2023.

MOTIVATION

Sur l'absence d'effet dévolutif de l'appel

La société conclut à l'absence d'effet dévolutif de l'appel au motif que la déclaration d'appel ne porte pas mention de l'objet de l'appel.

La salariée fait valoir que sa déclaration d'appel comporte toutes les mentions obligatoires de l'article 901 du code de procédure civile et qu'il convient de débouter la société de sa demande.

En application de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent et la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

Lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

En l'espèce, la déclaration d'appel formée par [F] [N] mentionne qu'elle interjette appel du jugement du conseil de prud'hommes de Poissy rendu le 24 juin 2021 et que :

'L'appel est limité aux chefs suivants de la décision :

En ce que le conseil de prud'hommes de Poissy a :

- débouté Madame [F] [N] de sa demande de paiement de l'indemnité spéciale de licenciement d'un montant de 13 432,45 euros ;

- débouté Madame [F] [N] de sa demande de paiement de l'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 4 063,30 euros ;

- dit que les éléments produits par Madame [N] ne peuvent laisser supposer une situation de harcèlement moral et débouté cette dernière de sa demande de paiement d'une somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts'.

Cet acte mentionne ainsi les chefs du dispositif du jugement critiqué et opère donc la dévolution sur ces points.

La déclaration d'appel est donc régulière.

Il y a lieu ainsi de rejeter la demande de la société intimée tendant à faire juger l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail

La salariée fait valoir que l'employeur n'établit pas le caractère abusif de ses refus des deux postes de reclassement proposés alors que cette preuve lui incombe, qu'elle a par conséquent droit à une indemnité spéciale de licenciement et à une indemnité compensatrice de préavis et que le jugement doit donc être infirmé sur ces points.

La société fait valoir que les refus par la salariée des deux postes de reclassement proposés qui respectaient les restrictions émises par le médecin du travail étaient abusifs, de sorte que celle-ci ne peut prétendre aux indemnités qu'elle revendique et que le jugement doit être confirmé en ses déboutés des demandes de ces chefs.

L'article L. 1226-14 du code du travail dispose que :

'La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle'.

En l'espèce, l'avis d'inaptitude établi par le médecin du travail le 5 décembre 2019 mentionne au titre des conclusions et indications relatives au reclassement :

'1. Contre-indication médicale aux gestes et contraintes suivantes : aux gestes répétitifs et travail en force avec la main gauche, et travail bras en élévation avec le membre supérieur gauche

2. Pourrait occuper tout poste respectant les contre-indications mentionnées au point 1
3. Serait en capacité de bénéficier d'une formation la préparant à occuper un poste adapté'.

Le 13 décembre 2019, l'employeur a proposé à la salariée un premier poste de reclassement d'hôtesse d'accueil / conseillère, statut employée, niveau 2, échelon 1, de 38 heures hebdomadaires, payées 39 heures dont 4 heures supplémentaires majorées selon les jours et horaires non modifiés par rapport à sa précédente activité : lundi et mardi de 9 heures à 19 heures, vendredi de 9 heures à 19 heures 30 et samedi de 8 h 30 à 18 heures, avec une coupure de 30 minutes selon le régime de la journée continue moyennant une rémunération mensuelle inchangée de 2 031,80 euros bruts, prime d'ancienneté incluse, avec les missions principales suivantes :

- accueil de la clientèle,

- mise de vêtements au vestiaire,

- habillage peignoir,

- proposition de boissons et de magazines à la clientèle,

- redirection de la clientèle vers le coiffeur en charge,

- standard téléphonique,

- prise des rendez-vous,

- restitution du vestiaire au client,

- aide à la mise des manteaux,

- mise de peignoirs dans le sac à linge sale,

- encaissement, si besoin uniquement,

- conseillère en produits capillaires,

- vente de produits capillaires,

l'employeur indiquant s'engager à la faire bénéficier des stages et formations utiles pour les tâches pour lesquelles elle ne dispose pas de la formation de base.

La salariée a refusé la proposition de poste sus-mentionné en ne le considérant pas adapté à ses compétences ni à ses aspirations professionnelles.

A défaut de caractérisation du caractère injustifié du refus de cette proposition d'un nouveau poste différent de celui jusqu'alors occupé par la salariée et de l'absence de toute démonstration d'un comportement abusif de sa part, il ne peut être considéré que le refus de la salariée présente un caractère abusif.

Le 20 décembre 2019, l'employeur a proposé à la salariée un second poste de reclassement de technicienne coloriste, statut employée, niveau 2, échelon 1, de 38 heures hebdomadaires, payées 39 heures dont 4 heures supplémentaires majorées selon les jours et horaires non modifiés par rapport à sa précédente activité : lundi et mardi de 9 heures à 19 heures, vendredi de 9 heures à 19 heures 30 et samedi de 8 h 30 à 18 heures, avec une coupure de 30 minutes selon le régime de la journée continue moyennant une rémunération mensuelle inchangée de 2 031,80 euros bruts, prime d'ancienneté incluse, avec les missions principales suivantes :

- accueillir la clientèle,

- conseiller la clientèle,

- préparation des couleurs / mèches,

- application des couleurs / mèches,

- vérifier les temps de pose,

- rincer (proposer des soins si besoin),

- rediriger la clientèle vers le coiffeur en charge,

- nettoyage du matériel utilisé,

l'employeur indiquant s'engager à la faire bénéficier des stages et formations utiles pour les tâches pour lesquelles elle ne dispose pas de la formation de base.

La salariée a refusé cette seconde proposition de poste en ne le considérant pas adapté à ses compétences ni à ses aspirations professionnelles et étant dans l'incapacité de prendre ce poste vu son inaptitude.

Si cette proposition de poste de reclassement est précise et est comparable à l'emploi précédemment occupé par la salariée, elle ne satisfait cependant pas aux restrictions d'ordre médical contenues dans l'avis d'inaptitude dans la mesure où l'application des couleurs et mèches peut nécessiter des gestes répétitifs de la main gauche et un travail avec le membre supérieur gauche en élévation, étant précisé qu'il ressort des indications contenues dans le dossier de la médecine du travail que la salariée se déclare gauchère. Il s'ensuit que le refus de cette proposition de poste ne revêt pas de caractère abusif.

Il résulte de tout ce qui précède que les refus des deux postes de reclassement par la salariée ne sont pas abusifs, de sorte que la salariée a droit aux indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail.

Dans ces conditions, la société sera condamnée à payer à la salariée :

- une indemnité compensatrice d'un montant égal à l'indemnité compensatrice de préavis, d'un montant de 4 063,60 euros, dont le montant n'est pas discuté,

- une indemnité spéciale de licenciement, d'un montant de 13 432,45 euros, dont le montant n'est pas discuté.

Le jugement sera infirmé sur ces points.

Sur le harcèlement moral

La salariée fait valoir qu'elle a subi un harcèlement moral en invoquant le fait qu'elle n'était pas traitée comme les autres salariés par l'employeur, ce qui a été à l'origine d'une dégradation de son état de santé, se trouvant dans un grande état d'anxiété sur son lieu de travail ; que le jugement qui l'a déboutée de sa demande de ce chef doit être infirmé.

Critiquant la portée probante des éléments produits par la salariée et produisant des attestations de salariés et de clients, la société conclut au débouté de cette demande et à la confirmation du jugement sur ce point en faisant valoir que la salariée ne présente pas d'éléments laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1 du même code, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au soutien du harcèlement moral, la salariée n'allègue pas de faits précis, se bornant à alléguer qu'elle 'n'était pas traitée comme ses collègues par son employeur' ainsi qu'il résulte selon elle d'une attestation rédigée par un ancien collègue, [J] [M] ayant travaillé avec elle de 1997 à 2018. Cette attestation est rédigée en des termes généraux et non circonstanciés et ne rapporte aucun fait précis et daté dont le rédacteur aurait été directement témoin. La salariée produit en outre une attestation rédigée par [Y] [Z], qui n'était pas présente sur le lieu de travail de la salariée et n'a pas été témoin d'agissements de l'employeur à l'encontre de la salariée ainsi qu'une attestation rédigée par [L] [I], sophrologue, praticienne en hypnose, indiquant avoir pris en charge la salariée durant sept séances d'octobre 2018 à mars 2019 relatant les dires de celle-ci sans avoir constaté ses conditions de travail. Le dossier médical de la médecine du travail contient des dires de la salariée se rapportant à une 'souffrance au travail', mentionnant : 'horaires de travail difficiles', 'rythme de travail pénible', 'difficultés liées à un désaccord avec le supérieur et les collègues', 'pas de reconnaissance', 'pas de prime de 20 ans', 'sentiment de favoritisme', sans plus de précision, étant relevé que ce praticien ne fait que transcrire les doléances de la salariée sans avoir constaté personnellement ses conditions de travail.

Il résulte de ce qui précède que la salariée ne présente pas des éléments de fait qui pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Il convient de débouter la salariée de sa demande de dommages et intérêts et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur le rappel d'indemnité de licenciement

La société conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a, pour accorder un complément d'indemnité de licenciement, pris en compte l'ancienneté au jour du premier contrat de travail à durée déterminée le 1er décembre 1997, alors que l'ancienneté doit être fixée selon elle au jour du contrat à durée déterminée précédent le contrat à durée indéterminée soit le 3 mars 1998.

La salariée conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

En application des articles L. 1234-9, R. 1234-1, R. 1234-2 et L. 1243-11 du code du travail, la salariée qui présente une période de services ininterrompus au service de la société Louis Armand Coiffure entre le 1er décembre 1997 et le 21 janvier 2020, a droit à un solde d'indemnité de licenciement suivant son calcul qui est exact, alors que l'employeur a calculé l'indemnité de lienciement au regard d'une ancienneté débutant le 3 mars 1998 et jusqu'au 21 janvier 2020.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société au paiement de la somme de 225,45 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement.

Sur le rappel de prime d'ancienneté du 14 mai 2019 au 21 janvier 2020 et de congés payés afférents

La société conclut à l'infirmation du jugement sur ce point en faisant valoir que la prime d'ancienneté a été incluse dans le salaire déclaré servant de base aux indemnités journalières de sécurité sociale et de prévoyance.

La salariée conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

L'employeur justifie par la production de l'attestation de salaire établie suite à la maladie professionnelle de la salariée à compter du 14 mai 2019 à destination de la sécurité sociale que le salaire de référence pris en compte est de 2 031,80 euros, cette somme incluant la prime d'ancienneté de 89 euros et par la production de la déclaration d'incapacité temporaire de travail établie pour l'institution de prévoyance que le salaire brut mensuel déclaré est de 2 031,80 euros, incluant la prime d'ancienneté.

Il s'ensuit que la prime d'ancienneté a été incluse dans le salaire déclaré servant de base aux indemnités journalières de sécurité sociale et de prévoyance pendant la période de suspension du contrat de travail en raison de la maladie professionnelle de la salariée du 14 mai 2019 au 21 janvier 2020.

Dans ces conditions, la salariée sera déboutée de ses demandes de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté et de congés payés afférents. Le jugement sera infirmé sur ces points.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

Eu égard à la solution du litige, la société sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la salariée la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

REJETTE la demande de la société Louis Armand Coiffure tendant à faire juger l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel,

INFIRME le jugement en son débouté des demandes d'indemnité spéciale de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis et en sa condamnation de la société Louis Armand Coiffure au paiement des sommes de 733,22 euros à titre de rappel de salaire de la prime d'ancienneté du 14 mai 2019 au 21 janvier 2020 et de 73,32 euros au titre des congés payés afférents,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

CONDAMNE la société Louis Armand Coiffure à payer à [F] [N] les sommes suivantes :

* 13 432,45 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement,

* 4 063,60 euros au titre del'indemnité compensatrice de préavis,

DEBOUTE [F] [N] de ses demandes au titre du rappel de salaire de la prime d'ancienneté du 14 mai 2019 au 21 janvier 2020 et de congés payés afférents,

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Louis Armand Coiffure aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société Louis Armand Coiffure à payer à [F] [N] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/02357
Date de la décision : 22/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-22;21.02357 ?
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