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15/03/2023 | FRANCE | N°21/02906

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 15 mars 2023, 21/02906


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 MARS 2023



N° RG 21/02906



N° Portalis DBV3-V-B7F-UYOC



AFFAIRE :



S.A.R.L. JALIRON



C/



[T] [W]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de POISSY

N° Chambre :

N° Section : C

RG : 20/00083



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL WEIZMANN BORZAKIAN



Me Marianne AUBERT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 MARS 2023

N° RG 21/02906

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYOC

AFFAIRE :

S.A.R.L. JALIRON

C/

[T] [W]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de POISSY

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 20/00083

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL WEIZMANN BORZAKIAN

Me Marianne AUBERT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. JALIRON

N° SIRET : 483 70 9 8 79

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Yohanna WEIZMANN de la SELARL WEIZMANN BORZAKIAN, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0242 substitué par Me Geffroy Thibault, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Madame [T] [W]

née le 03 Février 1988 à [Localité 4] (95)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Marianne AUBERT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Janvier 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [T] [W] a été embauchée à compter du 14 septembre 2015 selon contrat de travail à durée indéterminée par la société JALIRON, exploitante d'une lunetterie à [Localité 5] (78) en qualité de monteur-vendeur (coefficient 180), à hauteur de 39 heures hebdomadaires.

Une clause de non-concurrence a été incluse dans le contrat de travail.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale de l'optique lunetterie de détail du 2 juin 1986.

En février 2018, Mme [W] est devenue actionnaire minoritaire de la SAS Optical Advance [Localité 3] (à hauteur de 200 actions sur 1000), exploitante d'une lunetterie à Achères et appartenant aux mêmes actionnaires que la société JALIRON.

Le 23 avril 2019, Mme [W] a cédé ses actions de la société Optimal Advance [Localité 3].

Entre avril et juillet 2019, Mme [W] a été placée en arrêt de travail pour maladie à plusieurs reprises.

Le 12 novembre 2019, Mme [W] a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de la société JALIRON en invoquant notamment le non-paiement d'heures supplémentaires.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la société JALIRON employait habituellement moins de onze salariés.

Le 19 novembre 2019, Mme [W] a été embauchée par une autre société, exploitante d'une lunetterie à [Localité 3].

Le 15 mai 2020, Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy pour demander la requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts de la société JALIRON et la condamnation de cette dernière à lui payer diverses sommes.

La société JALIRON a demandé reconventionnellement la condamnation de Mme [W] à lui payer diverses sommes afférentes notamment à la clause de non-concurrence.

Par jugement du 6 septembre 2021, le juge départiteur du conseil de prud'hommes a :

- déclaré être compétent pour connaître de l'intégralité des demandes de Mme [W] ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de rappel de salaire et d'heures supplémentaires ;

- déclaré nulle la clause de non-concurrence incluse dans le contrat de travail de Mme [W] ;

- condamné la société JALIRON à payer à Mme [W], avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2020 date de réception de la convocation de la partie défenderesse devant le bureau de jugement les sommes suivantes :

* 336,40 euros à titre de rappel de salaire fondé sur la revalorisation du taux horaire pour la période de mars 2017 à février 2018 et 33,64 euros au titre des congés payés afférents ;

* 2 206,10 euros à titre de rappel de salaire pour la période du mois de novembre 2016 au mois de décembre 2017 et 220,61 euros au titre des congés payés afférents ;

* 10 735,81 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du mois de janvier 2018 au 4 mai 2019'et 1 073,58 euros au titre des congés payés afférents ;

* 316,28 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté et 31,62 euros au titre des congés payés afférents ;

* 3 407,23 euros à titre de rappel de congés payés non pris ;

* 696,82 euros à titre de rappel de salaire sur le non-maintien du salaire pendant les arrêts de travail pour maladie et 69,68 euros au titre des congés payés afférents ;

- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail formée par Mme [W] le 12 novembre 2019 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société JALIRON à payer à Mme [W], avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2020, date de réception de la convocation de la partie défenderesse devant le bureau de jugement, les sommes suivantes :

* 5 277,80 euros à titre d'indemnité de préavis et 527,78 euros au titre des congés payés afférents ;

* 2 693,82 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

- condamné la société JALIRON à payer à Mme [W], avec intérêts au taux légal à compter de la décision, les sommes suivantes :

* 7 916,70 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 15 833,40 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 4 975,82 euros à titre de dommages-intérêts pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel pour les années 2017, 2018 et 2019 ;

* 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité ;

* 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives aux durées maximales du travail, des temps de pause et des temps de repos ;

- condamné Mme [W] à rembourser à la société JALIRON une somme de 719 euros à titre du remboursement de la clause de non-concurrence indûment perçue ;

- ordonné à la société JALIRON de remettre à Mme [W] des bulletins de salaire, une attestation pour Pôle emploi et un solde de tout compte conformes à la décision, dans le délai de deux mois suivant sa notification ;

- ordonné la capitalisation des intérêts ;

- condamné la société JALIRON à payer à Mme [W] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure ;

- débouté Mme [W] du surplus de ses demandes ;

- débouté la société JALIRON de ses autres demandes ;

- condamné la société JALIRON aux dépens.

Le 4 octobre 2021, la société JALIRON a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 21 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société JALIRON demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement querellé sur les points suivants :

1. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a rejeté l'exception d'incompétence de la Juridiction prud'homale soulevée par la Société JALIRON ;

2. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de rappels de salaires et heures supplémentaires ;

3. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a déclaré nulle la clause de non-concurrence inscrite dans le contrat de travail signé entre la Société JALIRON et Mme [W] ;

4. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a fixé la moyenne des salaires à la somme de 2 638,90euros ;

5. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a condamné la Société JALIRON à verser à Madame [T] [W] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2020 :

- 336,04 euros au titre de rappel de salaires fondés sur la revalorisation du taux horaire pour la période de mars 2017 à février 2018 outre 33,64 euros de congés payés afférents ;

- 2 206,10 euros au titre de rappel de salaires pour la période du mois de novembre 2016 au mois de décembre 2017 outre 220,61 euros de congés payés afférents ;

- 10 735,81 euros au titre de rappel des heures supplémentaires entre le mois de janvier 2018 et le 4 mai 2019 ;

- 1 073,58 euros au titre des congés payés ;

- 316,28 euros au titre de rappel de la prime d'ancienneté outre 31,62 euros au titre des congés payés afférents ;

- 3 407,23 euros au titre de rappel de congés payés non pris ;

- 696,82 euros au titre de rappel de salaires sur le non maintien de salaire pendant les arrêts maladie outre 69,68 euros au titre des congés payés afférents ;

6. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Mme [W] en date du 12 novembre 2019 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

7. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a condamné la Société JALIRON à verser à Madame [T] [W], avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2020 les sommes de :

- 5 277,80 euros au titre de l'indemnité de préavis outre la somme de 527,78 euros au titre des congés payés afférents ;

- 2 693,82 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

8. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a condamné la Société JALIRON à verser à Madame [T] [W], avec intérêts au taux légal à compter de la décision, les sommes de :

- 7 916,70 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 15 833,40 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé ;

- 4 975,82 euros à titre de dommages et intérêts pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel pour les années 2017, 2018 et 2019 ;

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité ;

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des règles relatives aux durées maximales du travail, des temps de pause et des temps de repos ;

9. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a ordonné à la Société JALIRON d'avoir à remettre à Madame [W] des bulletins de salaire, une attestation pôle emploi et un solde de tout compte conformes aux dispositions du jugement dans le délai de deux mois suivant sa notification ;

10. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a ordonné la capitalisation des intérêts ;

11. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a condamné la Société JALIRON au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

12. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a débouté la Société JALIRON de sa demande tendant à voir juger que la prise d'acte de la rupture de Mme [W] produit les effets d'une démission ;

13. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a débouté la Société JALIRON de sa demande tendant à voir juger qu'aucune heure supplémentaire n'était due ;

14. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a débouté la Société JALIRON de sa demande de voir le salaire moyen être fixé à 1 897,09 euros ;

15. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a débouté la Société JALIRON de sa demande tendant à voir juger que la clause de non concurrence est valide et que Mme [W] a violé celle-ci ;

16. Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a débouté la Société JALIRON de ses demandes reconventionnelles suivantes :

- 7 741,52 euros à titre de compensation entre le salaire lui étant dû par la Société et les sommes relatives au remboursement de l'indemnité de non-concurrence indûment perçue par ses soins durant l'exécution de son contrat de travail ;

- 1 897,09 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis non effectué ;

- 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour réparation du préjudice causé par la violation de la clause de non-concurrence ;

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

17.Que le Conseil de Prud'hommes de Poissy a condamné la Société JALIRON aux dépens.

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté Madame [W] des demandes suivantes :

1. Que le Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [W] de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts concernant la clause de non-concurrence ;

2. Que le Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [W] de sa demande de repositionnement au statut de Responsable du Magasin d'Achères à compter du 26 février 2018 et de ses demandes afférentes concernant les rappels de salaires et les congés payés afférents ;

3. Que le Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [W] de sa demande tendant à intégrer la prime de non-concurrence dans l'assiette de calcul des heures supplémentaires ;

4. Que le Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [W] de sa demande de dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat ;

5. Que le Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [W] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche ;

Et, statuant de nouveau, y faisant droit :

- SE DECLARER INCOMPETENT pour statuer sur les demandes opérées par Madame [W] en lien avec la Société OPTICAL AVANCE ACHERES, s'agissant d'une relation entre associés ne relevant pas de la compétence matérielle de la juridiction prud'homale ;

- CONSTATER la prescription des demandes d'heures supplémentaires et de rappels de salaire antérieures au mois de mai 2017 formulées par la salariée ;

- FIXER le salaire moyen à 1 897,09 euros.

-JUGER que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail opérée par Mme [W] produit les effets d'une démission ;

- JUGER qu'aucune heure supplémentaire n'est due ;

- JUGER que la clause de non-concurrence est valide et que Madame [W] a violé celle-ci ;

- DEBOUTER Madame [W] de l'ensemble de ses demandes ;

A titre reconventionnel :

- CONDAMNER Mme [W] au paiement d'une somme de 7 741,52 euros à titre de compensation entre le salaire lui étant dû par la Société et les sommes relatives au remboursement de l'indemnité de non-concurrence indûment perçue par ses soins durant l'exécution de son contrat de travail ;

- CONDAMNER Madame [T] [W] au paiement d'une somme de 1 897,09 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis non effectué ;

- CONDAMNER Mme [W] au paiement des sommes suivantes :

*1 056,00 Euros à titre de remboursement de l'indemnité de non-concurrence indûment perçue suite à la rupture de son contrat de travail ou, subsidiairement, à la somme de 719 Euros ;

* 50 000 Euros à titre de dommages et intérêts pour réparation du préjudice causé par la violation de la clause de non-concurrence ;

- CONDAMNER Mme [W] au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

- CONDAMNER Madame [T] [W] aux éventuels dépens article 699 du Code de Procédure Civile en ce comprenant l'intégralité des frais d'huissier aux fins de constat.

Aux termes de ses conclusions du 19 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, Mme [W] demande à la cour de :

1) Sur l'exception d'incompétence soulevée par la société JALIRON : confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré compétent le Conseil de prud'hommes pour connaître de l'intégralité des demandes ;

2) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de rappel de salaires et heures supplémentaires, soulevée par la société JALIRON : confirmer le jugement qui a rejeté la fin de non-recevoir ;

3) Sur la clause de non-concurrence

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré que la clause de non-concurrence inscrite dans le contrat de travail est nulle ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Madame [W] à rembourser à la société JALIRON la somme de 719 euros qui viendra en déduction des indemnités de licenciement ;

- infirmer le jugement sur les conséquences de cette nullité : condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] 2 000 euros de dommages-intérêts ;

4) Sur la demande de requalification du poste en responsable du magasin d'[Localité 3] à compter du 26 février 2018

- infirmer le jugement qui a refusé la requalification

- Statuant à nouveau,

Juger que Madame [W] aurait dû bénéficier de la qualification de responsable de magasin

En conséquence,

- A titre principal

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 18 522,34 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 26 février 2018 au 12 novembre 2019

- 1 852,23 euros d'indemnité de congés payés afférents

- A titre subsidiaire

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 9 180,46 euros à titre de rappel de salaire sur la période du 26 février 2018 à décembre 2018

- 918,04 euros d'indemnité de congés payés afférents ;

5) Sur les heures supplémentaires

- Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé les demandes fondées pour les années 2016 à 2019

- Infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la prime de non-concurrence requalifiée en complément de salaire n'entre pourtant pas dans l'assiette de calcul des heures supplémentaires Statuant à nouveau :

a) Sur la période 12 novembre 2016 à décembre 2017

- A titre principal (infirmation du jugement)

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 3 523,80 euros à titre de rappel de salaires

- 352,38 euros d'indemnité de congés payés afférents

- A titre subsidiaire (confirmation du jugement)

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 2 206,10 euros à titre de rappel de salaire

- 220,61 euros d'indemnité de congés payés afférents ;

b) Sur la période 1er janvier 2018 - 4 mai 2019 (infirmation du jugement)

- A titre principal : application du taux horaire contractuel

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 15 955,94 euros à titre de rappel de salaires

- 1 595,59 euros d'indemnité de congés payés afférents

- A titre subsidiaire : application du minimum conventionnel de monteur-vendeur - valorisation d'heures à +25% et d'heures à +50%

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 14 954,49 euros à titre de rappel de salaire

- 1 495,44 euros d'indemnité de congés payés afférents ;

6) Sur le non-respect du contingent annuel :

- A titre principal (infirmation du jugement) : application du taux contractuel pour la valorisation des dommages-intérêts)

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] 6 893,98 de dommages-intérêts pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel pour les années 2017 à 2019

- A titre subsidiaire (confirmation du jugement) : application du minimum conventionnel

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] 4 975,82 de dommages-intérêts pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel pour les années 2017 à 2019 ;

7) Sur les primes d'ancienneté :

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé la demande fondée, infirmation sur le quantum

- A titre principal : application du minimum conventionnel d'un responsable de magasin

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 658,40 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté

- 65,84 euros d'indemnité de congés payés afférents

- A titre subsidiaire : application du minimum conventionnel d'un monteur-vendeur 57

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 376,37 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté

- 37,63 euros d'indemnité de congés payés afférents ;

8) Sur le non-maintien du salaire pendant les arrêts maladie

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé la demande fondée - Infirmation sur le quantum

- A titre principal : application du minimum conventionnel d'un responsable de magasin

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 1 933,16 euros à titre de rappel de salaire

- 193,32 euros d'indemnité de congés payés afférents

- A titre subsidiaire : application du contrat de travail

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 796,70 euros à titre de rappel de rappel de salaire

- 79,67 euros d'indemnité de congés payés afférents ;

9) Fixer le salaire moyen de Madame [W]

A titre principal à 3 407,55 euros, le jugement sera infirmé

A titre subsidiaire à 2 704,68 euros, le jugement sera infirmé ;

10) Sur le travail dissimulé

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé la demande fondée, infirmation sur le quantum

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W]

A titre principal : 20 445,30 euros, représentant six mois de salaire

A titre subsidiaire à 16 228,08 euros, représentant six mois de salaire ;

11) Sur le non-respect des durées maximales de travail, des temps de pause et des temps de repos

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé les demandes fondées, infirmation sur le quantum accordé

tous préjudices confondus

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 2 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale de 10h sur la journée

- 2 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale de 48h sur la semaine

- 2 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect du repos de deux jours, dont un collé au dimanche

- 2 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect des temps de pause et des temps de repas ;

12) Sur le non-respect de l'obligation de sécurité et des visites médicales obligatoires

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé les demandes fondées, infirmation sur le quantum

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 10 000 euros de dommages intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité

- 2 000 euros de dommages intérêts pour ne pas avoir organisé de visite médicale d'embauche

- 2 000 euros de dommages intérêts pour ne pas avoir organisé de visites médicales de suivi ;

13) Sur le rappel de jours de congés

Confirmation du jugement en ce qu'il a jugé les demandes fondées, infirmation sur le quantum

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

A titre principal 8 356, 35 euros de rappel d'indemnité de congés payés

A titre subsidiaire, 6 047,43 euros de rappel d'indemnité de congés payés ;

14) Sur la prise d'acte de rupture du contrat de travail

A titre principal (infirmation du jugement sur le quantum)

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 3 478,54 euros de rappel d'indemnité légale de licenciement

- 10 222,65 euros de rappel d'indemnité de préavis

- 1 022,26 euros d'indemnité de congés payés sur préavis

- 17 037,75 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

A titre subsidiaire (infirmation du jugement sur le quantum) Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] les sommes suivantes :

- 2 761,03 euros de rappel d'indemnité légale de licenciement

- 5 409,36 euros de rappel d'indemnité de préavis

- 540,93 euros d'indemnité de congés payés sur préavis

- 8 114,04 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à trois mois ;

15) Sur la remise tardive des documents de fin de contrat (infirmation du jugement)

Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] 1 000 euros de dommages intérêts ;

14) Sur les autres demandes

- Dire que toutes les sommes produiront intérêts à compter du 20 mai 2020, date de réception de la lettre de convocation à l'audience de jugement,

- Ordonner la remise d'une attestation pôle emploi conforme et de bulletins de paie de novembre 2016 à novembre 2019 conformes sous astreinte de 50 euros par jour et par document à compter du jour de la présente décision plus huit jours calendaires, la Cour se réservant le droit de liquider l'astreinte.

- Prononcer une astreinte de 500 euros par jour de retard de paiement de l'intégralité des condamnations à compter de la notification de la présente décision plus huit jours ouvrés,

- Ordonner la capitalisation des intérêts,

- Débouter la société JALIRON de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société JALIRON à payer 2 500 euros au titre de l'article 700 pour les frais exposés en première instance,

- Condamner la société JALIRON à verser à Madame [W] 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en appel,

- Condamner la société aux entiers dépens, y compris les frais d'exécution forcée.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 10 janvier 2023.

SUR CE :

Sur l'exception d'incompétence partielle de la juridiction prud'homale soulevée par la société JALIRON :

Considérant que la société soutient que Mme [W] a toujours exécuté son contrat de travail à temps plein en son sein, dans le magasin exploité à [Localité 5], et qu'elle lui a toutefois permis de 'se rendre à sa guise au magasin d'Achères' exploité par la société Optical Advance [Localité 3] pour les besoins de son mandat d'associé, 'sans que le temps passé au sein de cette autre société ne lui soit décompté de son salaire' ; qu'elle en conclut que certaines demandes de rappel de salaires, notamment en matière d'heures supplémentaires et afférentes à la période pendant laquelle Mme [W] était associée de la société Optical Advance [Localité 3] se rattachent exclusivement à ce mandat social et aux tâches administratives afférentes et relèvent donc de la compétence de la juridiction commerciale ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code du travail : 'Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient' ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ;

Qu'en l'espèce, il est constant que la société JALIRON a remis des bulletins de salaire à Mme [W] pour la période courant de février 2018 à avril 2019 au cours de laquelle elle avait la qualité d'actionnaire de la société Optical Advance [Localité 3] ; que Mme [W] peut ainsi se prévaloir d'un contrat de travail apparent vis-à-vis de la société JALIRON ; que la société JALIRON n'allègue pas son caractère fictif et reconnaît même avoir été l'employeur de Mme [W] pour cette période ;

Que de plus, il ressort des débats et des pièces versées et notamment de plusieurs attestations de salariés, clients ou voisins du magasin exploité à Achères que la société JALIRON a demandé à Mme [W] d'exercer, sous sa subordination, ses fonctions de salariée au sein du magasin exploité à Achères par la société Optical Advance [Localité 3], appartenant au même groupe de sociétés, pour la période du 26 février au 18 décembre 2018 ;

Que le litige relève donc bien dans sa totalité de la compétence de la juridiction prud'homale ;

Qu'il y a donc lieu de rejeter l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la société appelante et de confirmer le jugement attaqué sur ce point ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de certaines demandes salariales :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail : ' L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat';

Qu'en l'espèce, Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes le 15 mai 2020 ; que les demandes de rappel de salaire antérieures au 15 mai 2017 sont donc irrecevables par l'effet de la prescription triennale prévue par les dispositions mentionnées ci-dessus ;

Que le jugement attaqué, qui a écarté cette fin de non-recevoir, sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel de salaire afférent à la classification de directeur de magasin à compter du 26 février 2018 :

Considérant que Mme [W] soutient qu'elle a occupé à compter du 26 février 2018 et jusqu'au mois de décembre suivant, au sein du magasin d'Achères appartenant à la société Optical Advance [Localité 3], des fonctions d'opticien-directeur de magasin, relevant du coefficient de 280 de la convention collective, et ce à la demande de la société JALIRON ; qu'elle réclame en conséquence un rappel de salaire calculé sur la base de ce coefficient ;

Mais considérant que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a estimé que Mme [W] ne démontre pas qu'elle exerçait des tâches de responsable des achats dans leur intégralité ainsi qu'exigé par l'annexe 1 de la convention collective ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté des demandes de rappel de salaire et de congés payés formées à ce titre ;

Sur le rappel de salaire pour heures supplémentaires :

Considérant qu'en application notamment de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ; qu'après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant ;

Qu'en l'espèce, s'agissant de la période non-prescrite et courant jusqu'à décembre 2017, Mme [W] verse aux débats notamment un décompte journalier mentionnant les horaires de travail revendiqués ; qu'elle permet ainsi à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ;

Que pour sa part, la société n'apporte aucun élément sur les horaires de travail de l'intéressée, alors qu'il lui appartient de contrôler les heures de travail effectuées ;

Que Mme [W] est donc fondée à réclamer l'intégralité des heures supplémentaires revendiquées pour cette période ;

Que sur le taux horaire et le montant de la créance, il y a lieu de prendre en compte les 320 euros brut versés chaque mois à titre d'indemnité de non-concurrence pendant l'exécution du contrat de travail, cette somme ayant acquis une nature salariale à raison de la nullité de la clause de non-concurrence ainsi qu'il est dit ci-dessous et contrairement à ce qu'a estimé le premier juge ; qu'en conséquence, il sera alloué à Mme [W] une somme de 1 545,60 euros à titre de rappel de salaire à ce titre, outre 154,56 euros au titre des congés payés afférents ;

Que s'agissant de la période du 1er janvier 2018 au 4 mai 2019, Mme [W] verse aux débats notamment un décompte journalier et diverses attestations mentionnant les horaires de travail revendiqués tant au sein du magasin d'[Localité 3] que celui de [Localité 5], tandis que la société n'apporte aucun élément sur les horaires de travail de l'intéressée, au mépris de ses obligations de contrôle du temps de travail ;

Qu'il sera ainsi alloué à la salariée, eu égard au même taux horaire, une somme de 15 955,94 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre 1 595,59 euros au titre des congés payés afférents ;

Que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il statue sur les chefs suivants, Mme [W] les ayant désormais agglomérés en appel :

- 336,40 euros à titre de rappel de salaire fondé sur la revalorisation du taux horaire pour la période de mars 2017 à février 2018 et 33,64 euros au titre des congés payés afférents ;

- 2 206,10 euros à titre de rappel de salaire pour la période du mois de novembre 2016 au mois de décembre 2017 et 220,61 euros au titre des congés payés afférents ;

- 10 735,81 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du mois de janvier 2018 au 4 mai 2019'et 1 073,58 euros au titre des congés payés afférents ;

Sur les dommages-intérêts pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires:

Considérant en l'espèce, que ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme [W] a accompli des heures supplémentaires et ce au-delà du contingent annuel de 220 heures ;

Qu'il sera en conséquence alloué à l'appelante, en application de l'article L. 3121-30 du code du travail pour la contrepartie obligatoire en repos non prise, en tenant compte de la période prescrite, une somme de 6 824,35 euros ;

Que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel de prime d'ancienneté depuis septembre 2018 :

Considérant qu'eu égard au rejet de la demande de classification de responsable de magasin et du rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la base d'un taux horaire incluant l'indemnité de non-concurrence, ainsi que mentionné ci-dessus, il ya lieu d'allouer un rappel de prime d'ancienneté d'un montant de 376,37 euros, outre 37,63 au titre des congés payés afférents ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel de maintien de salaire pendant les arrêts de travail pour maladie :

Considérant que c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le premier juge a condamné la société appelante à payer à Mme [W] une somme de 696,82 euros à ce titre, outre les congés payés afférents ;

Sur demandes de dommages-intérêts pour non-respect des durées maximales de travail, des temps de pause et des temps de repos :

Considérant en l'espèce que, alors que la charge de la preuve lui revient, la société JALIRON ne démontre pas qu'elle a respecté au profit de la salariée les règles en matière de :

- repos hebdomadaire,

- durée maximale hebdomadaire du travail,

- durée maximales journalières de travail,

- temps de pause prévu par les dispositions de l'article L. 3121-16 du code du travail ;

Qu'il sera ainsi alloué à Mme [W] une somme de 250 euros à titre de dommages-intérêts pour chacun de ces manquements, en réparation du préjudice nécessairement causé par ces fautes ;

Que le jugement, qui a fait masse de ses demandes et a alloué une somme globale de 1 000 euros à ce titre, sera ainsi infirmé sur ce point ;

Sur les demandes de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et pour défaut d'organisation de la visite médicale d'embauche et des visites médicales de suivi :

Considérant que, contrairement ce que soutient Mme [W], les pièces médicales et autres pièces versées ne font que reprendre ses dires quant à l'existence d'un lien entre la dégradation de son état de santé et ses conditions de travail ; qu'elle ne justifie donc d'aucun lien de causalité entre les manquements invoqués en matière de visite médicale d'embauche et de suivi et la dégradation de son état de santé ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de débouter Mme [W] de ces différentes demandes de dommages-intérêts ;

Que de la sorte, le jugement sera confirmé en ce qu'il déboute Mme [W] de ses demandes de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche et pour absence de visite médicale de suivi et sera infirmé en ce qu'il alloue à la salariée une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité ;

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail et ses conséquences :

Considérant qu'au soutien de sa demande de requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [W] invoque les manquements de l'employeur suivants, rendant, selon elle, impossible la poursuite du contrat de travail :

- le refus de payer les heures supplémentaires ;

- le non-respect de la législation sur les durées maximales du temps de travail et les temps de repos ;

- le non-respect des temps de pause ;

- le non-respect de l'obligation de sécurité ;

- le paiement d'un salaire horaire en-dessous du minimum conventionnel ;

- le non-respect de la législation sur les congés payés ;

- le non-respect du code de la santé publique en matière de présence d'un opticien diplômé dans les lieux de vente ;

- une modification unilatérale du contrat de travail en l'obligeant à travailler pour d'autres sociétés du groupe ;

Qu'elle réclame en conséquence l'allocation d'indemnités de rupture ;

Considérant que la société conclut au débouté des demandes en affirmant que les manquements invoqués ne sont pas établis ou sont anciens ; qu'elle demande donc que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail soit requalifiée en une démission et que Mme [W] soit condamnée à lui payer une somme de 1 897,09 euros à titre de dommages-intérêts pour le préavis non effectué ;

Considérant que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements invoqués sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;

Qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société JALIRON n'a pas payé, en dépit de demandes réitérées de la salariée formulées jusqu'à la rupture, un nombre d'heures supplémentaires important pour un montant significatif de plus de 16 000 euros ;

Que la société JALIRON ne justifie pas non plus du respect des règles en matière de durée maximale du travail, de temps de repos et de temps de pause et ce également jusqu'à la prise d'acte ;

Que ces seuls manquements, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des fautes invoquées, rendaient impossible la poursuite du contrat de travail ;

Que Mme [W] est donc fondée à réclamer la requalification de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Qu'en conséquence, et eu égard à une rémunération moyenne mensuelle s'élevant au vu des débats et des pièces versées à la somme de 2 704,68 euros brut, il y a lieu d'allouer les sommes suivantes à Mme [W] :

- 2 761,03 euros de rappel d'indemnité légale de licenciement ;

- 5 409,36 euros de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et 540,93 euros d'indemnité de congés payés sur préavis ;

Qu'en outre Mme [W] est fondée à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant compris entre 1,5 et 5 mois de salaire, eu égard à son ancienneté et à l'effectif de l'employeur en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ; qu'eu égard à son âge (née en 1988) et à sa reprise d'emploi dès le 19 novembre 2019, il y a lieu d'allouer à Mme [W] une somme de 4 000 euros à ce titre ;

Que le jugement sera infirmé sur ces points ;

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

Considérant qu'aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ' ;

Qu'en l'espèce, il ressort des débats et des pièces versées que Mme [W] a, pendant l'exécution du contrat de travail, demandé à plusieurs reprises à la société JALIRON de lui payer ses heures supplémentaires et qu'elle s'est heurtée à un refus infondé ;

Qu'il est ainsi établi que la société a mentionné intentionnellement sur les bulletins de salaire de Mme [W] un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ;

Qu'il y a donc lieu d'allouer à Mme [W] une indemnité pour travail dissimulé d'un montant de 16 228,08 euros équivalente à six mois de salaire en application des dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel d'indemnité de congés payés :

Considérant en l'espèce que la société JALIRON a mentionné sur les bulletins de salaire de février et mars 2018 la prise par Mme [W] de 36 jours de congés payés et a déduit ces jours du solde de congés payés de l'année en cours ; que toutefois, alors que la charge de la preuve lui revient, l'employeur ne prouve pas la réalité de la prise de tels congés et le bien-fondé de la déduction ainsi opérée ;

Que Mme [W] est donc fondée à réclamer le paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés à hauteur de 6 047,43 euros, eu égard à sa rémunération ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Sur la validité de la clause de non-concurrence et les demandes afférentes formées par les parties :

Considérant que, d'une part, le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence qui a pour objet d'indemniser le salarié tenu, après rupture du contrat de travail, d'une obligation limitant ses possibilités d'exercer un autre emploi, ne peut dépendre uniquement de la durée d'exécution du contrat ni son paiement intervenir avant la rupture, et d'autre part, que le paiement pendant la période d'exécution du contrat de travail de la contrepartie financière prévue par une clause de non-concurrence nulle, qui s'analyse en un complément de salaire, n'est pas dénué de cause ;

Qu'en l'espèce, le contrat de travail de Mme [W] stipule que 'à titre de rémunération, Mme [W] [T] percevra un salaire forfaitaire 2 950 euros brut par mois incluant la prime de clause de non-concurrence' ;

Que cette clause de non-concurrence est donc nulle puisqu'elle prévoit un paiement de la contrepartie financière avant la rupture du contrat de travail, comme le soutient à bon droit Mme [W] ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Qu'en conséquence, et en premier lieu, s'agissant de la demande de dommages-intérêts formée par Mme [W] à raison de cette nullité, il y a lieu de relever qu'elle n'établit pas, contrairement à ce qu'elle allègue, que cette clause de non-concurrence illicite l'a empêchée de quitter la société JALIRON plus tôt qu'elle ne l'a fait et qu'elle a ainsi perdu une chance de trouver un autre emploi plus rapidement ; que par ailleurs, il est constant que Mme [W] a été embauchée quelques jours après sa prise d'acte par une société concurrente et qu'elle n'a donc pas cherché à respecter la clause illicite ; qu'en conséquence, Mme [W] ne justifie d'aucun préjudice à ce titre ; qu'il y a donc lieu de la débouter de sa demande de dommages-intérêts ; que le jugement attaqué sera donc confirmé sur ce point ;

Qu'en deuxième lieu, sur la demande de dommages-intérêts formée par la société JALIRON pour non-respect de la clause de non-concurrence, il y a lieu de confirmer le débouté eu égard à la nullité de cette clause ;

Qu'en troisième lieu, sur la demande formée par la société JALIRON de remboursement des sommes perçues par Mme [W] au titre de la clause de non-concurrence nulle pendant l'exécution du contrat de travail, il y a lieu de confirmer le débouté, puisque ce paiement s'analyse en un complément de salaire et n'est donc pas dénué de cause ;

Qu'en quatrième lieu, sur la demande formée par la société JALIRON de remboursement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence versée après la rupture du contrat de travail, il sera fait droit à cette demande à hauteur de 719 euros correspondant au montant ainsi versé, la société ne fournissant aucun moyen au soutien de sa demande de paiement d'une somme de 1 056 euros ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat :

Considérant qu'en tout état de cause, Mme [W] ne justifie d'aucun préjudice à ce titre ; que le débouté de cette demande sera donc confirmé ;

Sur les intérêts et la capitalisation :

Considérant qu'il y a lieu de rappeler que les sommes allouées à Mme [W] portent intérêts légaux à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes pour ce qui est des créances de nature salariale et à compter du jugement en ce qui concerne les créances de nature indemnitaire ; que la capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions prévues par les de l'article 1343-2 du code civil ; que jugement sera confirmé sur ces points ;

Sur la remise de documents sociaux et l'astreinte :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'ordonner à la société JALIRON de remettre à Mme [W] une attestation pour Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Que le débouté de la demande d'astreinte sera en revanche confirmé, une telle mesure n'étant pas nécessaire ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; qu'en outre, la société sera condamnée à payer à Mme [W] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société JALIRON, statue sur la nullité de la clause de non-concurrence, statue sur le maintien de salaire pendant l'arrêt de travail pour maladie, dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail formée par Mme [T] [W] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et déboute la société JALIRON de sa demande de dommages-intérêts pour le préavis non effectué, condamne Mme [T] [W] à rembourser à la société une somme de 719 euros, déboute Mme [T] [W] de sa demande de rappel de salaire afférent à la classification de directeur de magasin et de ses demandes de dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat et pour défaut de visites médicales, déboute la société JALIRON de ses demandes de dommages-intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence et de remboursement des sommes versées au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pendant l'exécution du contrat de travail, statue sur les intérêts légaux et la capitalisation, l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare irrecevables les demandes salariales formées par Mme [T] [W] pour la période antérieure au 15 mai 2017,

Condamne la société JALIRON à payer à Mme [T] [W] les sommes suivantes :

- 1 545,60 euros à titre de rappel de rappel de salaire pour heures supplémentaires et 154,56 euros au titre des congés payés afférents,

- 15 955,94 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et 1 595,59 euros au titre des congés payés afférents,

- 6 824,35 euros à titre d'indemnité pour le dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,

- 376,37 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté et 37,63 au titre des congés payés afférents,

- 250 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale du travail journalier,

- 250 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale du travail hebdomadaire,

- 250 euros de dommages-intérêts pour non-respect du temps de repos,

- 250 euros de dommages-intérêts pour non-respect des temps de pause,

- 2 761,03 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 5 409,36 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 540,93 euros au titre des congés payés afférents,

- 4 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 16 228,08 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 6 047,43 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

Ordonne à la société JALIRON de remettre à Mme [T] [W] une attestation pour Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société JALIRON à payer à Mme [T] [W] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société JALIRON aux dépens d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/02906
Date de la décision : 15/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-15;21.02906 ?
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