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15/02/2023 | FRANCE | N°21/02944

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 15 février 2023, 21/02944


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 FEVRIER 2023



N° RG 21/02944



N° Portalis DBV3-V-B7F-UYUL



AFFAIRE :



[D] [V]



C/



S.A.R.L. INNOV EXPO SERVICES





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG

: 20/00203



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SCP SCP SOUCHON - CATTE - LOUIS et ASSOCIES



Me Coline GRUAT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE FEVRIER DEUX MILLE VING...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 FEVRIER 2023

N° RG 21/02944

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYUL

AFFAIRE :

[D] [V]

C/

S.A.R.L. INNOV EXPO SERVICES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG : 20/00203

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SCP SCP SOUCHON - CATTE - LOUIS et ASSOCIES

Me Coline GRUAT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [D] [V]

née le 09 Mai 1968 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me François SOUCHON de la SCP SCP SOUCHON - CATTE - LOUIS et ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000061

APPELANTE

****************

S.A.R.L. INNOV EXPO SERVICES

N° SIRET : 803 05 1 5 80

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Coline GRUAT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A438 substitué par Me François-Xavier PENIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Janvier 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [D] [V] était dirigeante avec son compagnon M. [G] [J], de la société Reactime qui exerçait une activité commerciale d'agencement événementiel.

Suivant facture du 31 décembre 2019, la société Innov Expo Services a fait l'acquisition de matériel auprès de la société Reactime pour un montant de 140 000 euros hors taxes.

Mme [V] a été engagée par la société Innov Expo Services suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 8 janvier 2020 en qualité d'assistante administrative, avec le statut d'employée.

A compter du 17 mars 2020, Mme [V] a été placée en chômage partiel en raison de la crise sanitaire comme l'ensemble des salariés.

Par acte notarié du 29 mai 2020, la SCI Bens, ayant pour gérant notamment M.[Z] [T], gérant également de la société Innov Expo Services, a fait l'acquisition du bâtiment professionnel situé [Adresse 1] à [Localité 6] (Eure-Et-Loir) pour un montant de 120 000 euros.

Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseil, dite Syntec.

Par lettre du 13 juillet 2020, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 23 juillet 2020.

Par lettre du 7 août 2020, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 24 août 2020.

Par lettre du 31 août 2020, l'employeur a licencié la salariée pour faute grave.

La société employait moins de onze salariés à la date de la rupture.

Le 9 octobre 2020, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Chartres afin d'obtenir la condamnation de la société Innov Expo Services au paiement de dommages et intérêts pour défaut de mutuelle, pour exécution déloyale de l'obligation de versement du salaire, pour travail dissimulé, pour licenciement abusif et de diverses indemnités et sommes liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 8 septembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- reçu Mme [V] en ses demandes,

- reçu la société Innov Expo Services en ses demandes,

- au fond, dit que le licenciement de Mme [V] est sans cause réelle et sérieuse par forclusion,

- en conséquence, condamné la société Innov Expo Services à verser à Mme [V] les sommes suivantes :

* 1 150 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 150 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 115 euros à titre de congés payés y afférents,

* 216 euros à titre d'indemnité de licenciement,

avec sur les sommes relatives aux salaires et accessoires de salaires, les intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande,

- ordonné à la société Innov Expo Services de remettre à Mme [V] l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail, le solde de tout compte et le bulletin de paie rectifiés, conformes au jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard pour l'ensemble des documents dans un délai de 30 jours suivant la notification du présent jugement,

- dit que le conseil de prud'hommes se réserve le droit de liquider l'astreinte,

- condamné la société Innov Expo Services à payer à Mme [V] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [V] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Innov Expo Services de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire de droit,

- condamné la société Innov Expo Services aux entiers dépens qui comprendront les frais éventuels d'exécution.

Le 7 octobre 2021, Mme [V] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 21 décembre 2021, Mme [V] demande à la cour de :

- infirmer partiellement les dispositions du jugement en ce qu'il a limité les dommages et intérêts pour licenciement abusif et les indemnités de rupture et l'a déboutée du surplus de ses demandes,

- statuant à nouveau : condamner la société Innov Expo Services à lui verser les sommes de :

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de mutuelle,

* 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de l'obligation de versement du salaire,

* 8 242,05 euros à titre de rappel de salaires,

* 824,20 euros au titre des congés payés afférents,

* 14 389,62 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 2 180,25 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

* 2 180,25 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 218,02 euros au titre des congés payés afférents,

* 356,77 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* les intérêts de droit relatifs aux salaires et accessoires de salaires à compter de l'introduction de la demande,

* 2 500 euros à titre d'indemnité relative aux frais irrépétibles de première instance,

- ordonner la remise des documents sociaux :certificat de travail, reçu pour solde de tout compte et attestation Pôle emploi et bulletins de paie rectifiés et conformes à la décision à intervenir, ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document à compter de la décision à intervenir,

- dire que le conseil de prud'hommes sera compétent pour liquider l'astreinte,

- débouter la société Innov Expo Services de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société Innov Expo Services aux entiers dépens de première instance,

- y ajoutant, condamner la société Innov Expo Services à lui verser la somme de 2 500 euros à titre d'indemnité relative aux frais irrépétibles d'appel et aux dépens d'appel.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 7 décembre 2022, la société Innov Expo Services demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [V] est sans cause réelle et sérieuse par forclusion, en conséquence, l'a condamnée à verser à Mme [V] les sommes suivantes :

* 1 150 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 150 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 115 euros à titre de congés payés y afférents,

* 216 euros à titre d'indemnité de licenciement, avec sur les sommes relatives aux salaires et accessoires de salaires, les intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande,

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,

- l'a condamnée aux dépens de première instance,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame [V] du reste de ses demandes,

- statuant à nouveau : débouter Mme [V] de l'intégralité de ses demandes et la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et la somme 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 3 janvier 2023.

MOTIVATION

Sur le défaut de mutuelle

La salariée indique que l'employeur s'est soustrait à ses obligations et ne l'a pas affiliée à une mutuelle contrairement aux dispositions des articles L. 911-7 et suivants du code de la sécurité sociale, de l'accord du 7 octobre 2015 et des avenants des 16 mars 2016, 25 septembre 2019 et 28 novembre 2019 annexés à la convention collective. Elle précise qu'elle a subi un préjudice pour défaut de mutuelle suite à ses démarches.

L'employeur fait valoir qu'il a souscrit un contrat d'assurance complémentaire santé pour son personnel et qu'il a effectué les démarches d'affiliation individuelle de la salariée dès son embauche. Il reproche à la salariée de ne pas avoir fait parvenir certains éléments à la mutuelle ce qui a empêché son affiliation. Il relève que la salariée ne rapporte pas la preuve d'un préjudice.

En application de l'accord du 7 octobre 2015 et des avenants des 16 mars 2016, 25 septembre 2019 et 28 novembre 2019 annexés à la convention collective, l'employeur avait l'obligation de souscrire une assurance santé complémentaire pour les salariés et leurs enfants à charge au sens de la sécurité sociale.

En l'espèce, l'employeur justifie d'un contrat collectif d'assurance santé complémentaire auprès de Viasanté à effet du 1er juillet 2019 au bénéfice de ses salariés.

L'employeur produit un bulletin d'affiliation de la salariée rempli par ses soins et daté du 14 janvier 2020. Cependant, il ne justifie de l'accomplissement de la démarche d'affiliation de la salariée, cette dernière produisant un courriel du 26 avril 2021 de Viasanté indiquant que la première demande d'affiliation date du 19 mars 2021 et a été faite par la salariée.

Par conséquent, l'employeur a manqué à son obligation d'affiliation de la salariée à une mutuelle en temps utile.

La salariée a subi un préjudice résultant de ce défaut de mutuelle en raison des démarches qu'elle a dû engager qui doit être indemnisé par l'allocation de la somme de 500 euros. La société Innov Expo Service sera condamnée à payer à Mme [V] cette somme de 500 euros pour défaut de mutuelle.

Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur l'exécution déloyale de l'obligation de versement du salaire

La salariée déplore des versements de salaire avec un retard systématique et la délivrance en avril des bulletins de paie des mois de janvier, février et mars, et au 30 septembre pour les mois de juillet et août. Elle conclut à l'allocation de dommages et intérêts pour exécution déloyale de l'obligation de versement du salaire.

L'employeur soutient que la salariée fait preuve de mauvaise foi et ne tient pas compte de la situation exceptionnelle vécue à partir de mars 2020. Il note que les salaires des deux premiers mois ont été versés le 5 du mois, de façon conforme, que des retards de paiement sont intervenus à partir du mois d'avril 2020, alors que toutes les démarches liées à l'activité partielle devaient être mises en oeuvre, l'administration ayant mis du temps à verser les indemnités d'activité partielle. Il relève que la salariée ne prouve pas la mauvaise foi de la société.

Le retard dans le paiement du salaire ne peut donner lieu qu'au paiement des intérêts moratoires, à partir de la mise en demeure, à moins que le salarié ne justifie d'un préjudice distinct découlant de la mauvaise foi de l'employeur.

Le contrat de travail de la salariée ne prévoit pas de date de versement du salaire, qui peut donc intervenir jusqu'au 5 du mois suivant, dans le respect de la périodicité d'un mois.

En l'espèce, la salariée justifie de retards de paiement du salaire pour les mois de mars, avril, juin, juillet et août 2020 de plusieurs jours.

Cependant, la salariée ne justifiant pas d'un préjudice distinct découlant de la mauvaise foi de l'employeur, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur le rappel de salaire

La salariée indique que le contrat de travail n'a pas été signé et qu'il mentionne une durée de travail de 80 heures inférieure au minimum légal, qu'en réalité elle occupait son poste à temps plein. Elle conteste les attestations de complaisance versées aux débats, l'employeur ne renversant pas la présomption de temps plein par ces attestations de membres de la famille.

L'employeur fait valoir que la salariée a souhaité être embauchée à temps partiel. Il indique que la salariée organisait son temps de travail par demi-journée du lundi au vendredi, que les attestations produites sont probantes et n'émanent pas de membres de la famille. Il précise que la salariée gérait en parallèle deux autres sociétés et travaillait dans des locaux lui appartenant.

En application des articles L. 3123-14 et L. 3123-21 du code du travail, le contrat de travail à temps partiel mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

La non-conformité du contrat de travail à temps partiel fait présumer que ce dernier a été conclu pour un horaire à temps complet. Il n'est pas requalifié automatiquement en temps plein si l'employeur peut prouver que le salarié n'est pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et qu'il n'est pas tenu de se tenir constamment à sa disposition.

Aux termes de l'article L. 3123-27 du code du travail, à défaut d'accord prévu à l'article L. 3123-19, la durée minimale de travail du salarié à temps partiel est fixée à vingt-quatre heures par semaine ou, le cas échéant, à l'équivalent mensuel de cette durée ou à l'équivalent calculé sur la période prévue par un accord collectif conclu en application de l'article L. 3121-44.

En cas de dérogation à la durée minimale du travail sur demande individuelle, la loi exige le regroupement des horaires de travail sur des journées ou des demi-journées régulières ou complètes.

En l'espèce, le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de quatre-vingt heures par mois versé aux débats par l'employeur n'est pas signé par la salariée qui conteste avoir été engagée à temps partiel. Il ne prévoit pas de répartition du temps de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

La durée de travail est inférieure au minimum légal correspondant à cent quatre heures par mois.

Cependant, l'employeur fait état d'une dérogation sur demande individuelle de la salariée pour travailler à temps partiel lors de son embauche, afin de pouvoir organiser librement la répartition de ses heures de travail à raison de 3h40 par jour du lundi au vendredi, soit une présence par demi-journée. Il vise un courriel du 13 avril 2020 produit par la salariée, faisant état d'un accord de cette dernière pour un mi-temps à hauteur de 75,84 heures par mois. Il s'en déduit que la salariée a fait la demande d'un travail à temps partiel sur cette durée.

La répartition des horaires n'ayant pas été prévue par écrit, le contrat de travail est présumé à temps plein.

Afin de renverser cette présomption, l'employeur verse aux débats trois attestations précises et concordantes de M. [H], M. [N], M. [Y], monteurs de stand, indiquant que la salariée était présente à mi-temps ou en demi-journée pour l'entreprise, une quatrième attestation de M. [W], également monteur de stand, disant avoir constaté qu'elle était présente 'rarement'.

L'employeur indique également que la salariée était encore propriétaire des lieux, qu'elle travaillait donc chez elle et qu'elle gérait en parallèle avec son compagnon deux sociétés qui leur appartenaient, la société Reactime et la société Atmosphère.

La salariée n'était donc dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et n'était pas tenue de se tenir constamment à sa disposition de son employeur. Elle travaillait également par demi-journées regroupées. Il s'en déduit que le contrat de travail de la salariée était à temps partiel pour une durée de quatre-vingt heures par mois. Par conséquent, Mme [V] sera déboutée de sa demande de rappel de salaire pour travail à temps plein et congés payés afférents. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

A défaut de mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, aucun travail dissimulé n'est caractérisé. Mme [V] sera déboutée de sa demande de ce chef. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la notification du licenciement et ses conséquences

La salariée indique que la lettre de licenciement lui a été notifiée plus d'un mois après l'entretien préalable fixé le 23 juillet 2020 dans une première lettre de convocation, la deuxième convocation n'ayant pas pour effet de reporter le délai.

L'employeur fait valoir que la première procédure qui n'avait pas pour fondement un motif disciplinaire était une procédure distincte et qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de cette première convocation. Il indique que des faits graves de concurrence déloyale ont été découverts postérieurement par l'employeur et qu'il a donc convoqué la salariée une nouvelle fois afin qu'elle s'explique sur ces faits, que la lettre a bien été notifiée dans le délai d'un mois suivant la date fixée pour l'entretien préalable.

Aux termes de l'article L. 1332-2 du code du travail, lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.

Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.

La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé.

Est sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave notifié plus d'un mois après l'entretien préalable.

En l'espèce, l'employeur a convoqué le 13 juillet 2020 la salariée à un entretien préalable à licenciement fixé le 23 juillet 2020, visant l'ancien article L. 122-14 du code du travail relatif au licenciement pour motif personnel, incluant le motif disciplinaire.

L'employeur indique qu'il a eu connaissance de faits fautifs nouveaux postérieurement à l'entretien préalable, sans apporter de preuve sur ce point et sans indiquer si l'entretien du 23 juillet 2020 a eu lieu et quelle décision a été prise à l'issue.

L'employeur a, de nouveau, convoqué la salariée le 7 août 2020 à un entretien préalable à licenciement fixé le 24 août 2020, visant le nouvel article L. 1232-2 du code du travail relatif au licenciement pour motif personnel.

Cette deuxième convocation n'a pas pour effet de reporter le point de départ du délai de notification du licenciement d'un mois, faute pour l'employeur de justifier de la connaissance de faits fautifs nouveaux postérieurement à l'entretien du 23 juillet 2020.

Le licenciement notifié le 31 août 2020 a donc été notifié plus d'un mois après l'entretien préalable fixé initialement le 23 juillet 2020.

Par conséquent, le licenciement pour faute grave notifié plus d'un mois après l'entretien préalable est dénué de cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, la salariée qui compte une ancienneté de moins de un an lors de la rupture du contrat de travail a droit à des dommages et intérêts d'un montant maximal d'un mois de salaire.

Il sera alloué à Mme [V] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 1 150 euros.

La société Innov Expo Service sera condamnée à payer à Mme [V] une indemnité compensatrice de préavis de 1 150 euros, les congés payés afférents de 115 euros, une indemnité de licenciement de 216 euros.

Il y a lieu d'ordonner la remise des documents : certificats de travail, solde de tout compte, attestation Pôle emploi, bulletins de paie, rectifiés et conformes à la décision. Il n'y a pas lieu d'ordonner d'astreinte, celle-ci n'étant pas nécessaire.

Le jugement sera donc confirmé sur ces points sauf en ce qu'il a ordonné une astreinte.

Sur la concurrence déloyale

La société intimée fait valoir que la salariée a porté assistance à M. [J] dans l'activité concurrente construisant des stands pour le compte de la société Atmosphère, ce qui lui a porté un réel préjudice. Elle indique s'être trouvée dans l'obligation de faire une remise à un de ses clients.

La salariée expose que la société ne rapporte pas la preuve d'une quelconque assistance de sa part à une société concurrente.

En l'espèce, la société Innov Expo Services ne caractérise pas le préjudice invoqué à l'appui de sa demande de réparation du préjudice suite à la concurrence déloyale alléguée, elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes. Il n'y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme sollicité.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Les créances indemnitaires produisent intérêts à compter du présent arrêt.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Innov Expo Service succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. Elle devra également régler à Mme [V] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [D] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mutuelle, en ce qu'il a dit que sur les sommes relatives aux salaires et accessoires de salaires, les intérêts au taux légal couraient à compter de l'introduction de la demande et en ce qu'il a ordonné une astreinte,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Condamne la société Innov Expo Service à payer à Mme [D] [V] la somme de 500 euros pour défaut de mutuelle, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Dit que sur les salaires et accessoires de salaires, les sommes portent intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes,

Condamne la société Innov Expo Service aux dépens d'appel,

Condamne la société Innov Expo Service à payer à Mme [D] [V] la somme de

2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/02944
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;21.02944 ?
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