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15/02/2023 | FRANCE | N°21/00502

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 15 février 2023, 21/00502


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 FÉVRIER 2023



N° RG 21/00502

N° Portalis DBV3-V-B7F-UKJQ



AFFAIRE :



Monsieur [Z] [F]



C/



Société INFOSANTE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 18/01861



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Claire RICARD



Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE FÉVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versaille...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 FÉVRIER 2023

N° RG 21/00502

N° Portalis DBV3-V-B7F-UKJQ

AFFAIRE :

Monsieur [Z] [F]

C/

Société INFOSANTE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 18/01861

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Claire RICARD

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE FÉVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dont la mise à disposition a été fixée au 8 février 2023 puis prorogée au 15 février 2023, dans l'affaire entre :

Monsieur [Z] [F]

né le 16 décembre 1958 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Christine LUSSAULT de la SELARL CL AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0637 - Représentant : Me Claire RICARD, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622

APPELANT

****************

Société INFOSANTE

N° SIRET : 333 232 700

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 et Me Sandrine LOSI de la SELARL CAPSTAN LMS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020, substitué à l'audience par Me Olivier GIOVENAL, avocat au barreau de Paris

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 7 décembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Aurélie PRACHE, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [F] a été engagé par la société Infosanté par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er avril 1990. Le 1er février 2004, un nouveau contrat de travail à durée indéterminée a été régularisé entre les parties avec reprise d'ancienneté au 1er avril 1990, portant sur les fonctions de directeur délégué. En dernier lieu, il exerçait la fonction de directeur général de la société Infosanté, dont il était également mandataire social.

Cette société est spécialisée dans la conception et la fourniture de solutions logiciel destinées notamment aux centres de santé. L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de moins de 10 salariés. Elle applique la convention collective nationale dite Syntec.

A la suite du rachat de la société Infosanté par la société Infogestion, M. [L] [G] a été désigné en qualité de nouveau président de la société Infosanté, le 22 février 2018.

Par lettre du 21 mars 2018, remise en main propre, le salarié a démissionné de ses fonctions dans les termes suivants :

« Monsieur,

J'ai l'honneur de vous informer de ma décision de démissionner de mes fonctions de Directeur Général exercées au sein de l'entreprise.

J'ai bien noté que les termes de mon contrat de travail prévoient un préavis d'une durée de 3 mois.

Lors de mon dernier jour de travail dans l'entreprise, je vous demanderai de bien vouloir me remettre un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail ainsi qu'une attestation Pôle Emploi.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, mes salutations distinguées. ».

Le 13 juillet 2018, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de requalification de sa démission en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.

Par jugement du 22 février 2021, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section encadrement) a :

- dit que la rupture du contrat de travail de M. [F] avec la société Infosanté est une démission,

- débouté M. [F] de ses demandes d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Infosanté à payer à M. [F] la somme de 24 988,05 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés-payés,

- rappelé que sont exécutoires de plein droit à titre provisoire le paiement des sommes mentionnées au titre des rémunérations de l'article R 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mois de salaires sachant que celui-ci doit être fixé à 5 983,74 euros avec intérêts à compter du 3 septembre 2018,

- ordonné à la société Infosanté de remettre à M. [F] un bulletin de paye, un solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi conformes à la présente décision sans astreinte,

- condamné la société Infosanté à payer à M. [F] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Infosanté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Infosanté aux dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 18 février 2021, M. [F] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 4 octobre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 août 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [F] demande à la cour de :

- le recevoir en ses présentes écritures et y faisant droit,

- le dire bien fondé en son appel,

- dire et juger que compte tenu des manquements de l'employeur, sa démission en date du 21 mars 2018 doit être requalifiée en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- reformer le jugement dont appel en ce que le conseil de prud'hommes a qualifié la rupture du contrat de travail en une démission et l'a débouté de ses demandes d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

et statuant à nouveau,

- condamner la société Info Santé à lui payer :

. une indemnité de licenciement à hauteur de 56 293,27 euros,

. une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 116 682,93 euros bruts,

. avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2018, date de la saisine du conseil de prud'hommes,

statuant sur ses autres demandes,

- condamner la société Infosanté à émettre un bulletin de salaire et une attestation pôle emploi conforme à la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

- confirmer pour le surplus le jugement rendu le 22 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Nanterre,

- débouter la société Infosanté de ses demandes en cause d'appel,

- condamner la société Infosanté à lui verser la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Infosanté en outre aux entiers dépens de la présente instance en ce compris les éventuels frais d'exécution forcée.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 août 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Infosanté demande à la cour de :

- la recevoir en ses conclusions et l'y déclarer bien fondée,

en conséquence,

à titre principal,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 22 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Nanterre,

en tout état de cause,

- condamner M. [F] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [F] aux éventuels dépens de l'instance,

à titre subsidiaire,

si par extraordinaire la cour de céans décidait d'entrer en voie de condamnation,

- limiter les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à l'indemnité minimale fixée par l'article L.1235-3 du code du travail soit 3 mois de salaire, ce qui représente la somme de 17 951,22 euros.

MOTIFS

Sur la démission

Le salarié expose que, dans les jours qui ont suivi la cession qu'il avait lui-même préparée, il s'est vu retirer ses attributions, a été cantonné à des missions subalternes, soumis à des instructions contradictoires, et discrédité par le nouveau président, entraînant une dégradation brutale et visible de ses conditions de travail dans le but manifeste de lui faire quitter l'entreprise.

Il ajoute que le conseil de prud'hommes a refusé d'examiner les manquements allégués à l'appui de la demande de requalification de la démission en prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, tirés de la modification de son contrat de travail, du non respect par l'employeur des obligations inhérentes au contrat de travail et de la violation de l'obligation de sécurité. Il ajoute qu'il n'a jamais été remplacé et que, depuis, il connaît un état dépressif lié à cette situation.

L'employeur rappelle que le salarié n'a invoqué aucun manquement dans la lettre de démission, que les manquements dénoncés par la suite et les accusations sont fantaisistes, le salarié ne produisant pour les étayer que six attestations établies plus d'un an après la démission, que le salarié a fait le libre choix de quitter l'entreprise, sa démission étant claire et non équivoque, qu'il n'a prétendu avoir été contraint à la démission que par une lettre de son conseil du 6 avril 2018. Il ajoute que les manquements invoqués ne sont pas établis, qu'il n'y a eu aucun retrait de ses fonctions, que les attestations produites sont non probantes.

**

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de manière claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission que celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.

En l'espèce, le 21 mars 2018, M. [F] a donné sa démission aux termes de la lettre précitée, qui ne porte aucune mention d'un reproche fait à l'employeur ou manquement de sa part.

Le salarié n'établit pas qu'il existait entre les parties au contrat de travail un litige relatif à l'exécution du contrat de travail contemporain de la rupture. Aucune pièce antérieure ou contemporaine à la démission du salarié n'est versée aux débats.

En effet, la lettre adressée à la société par le conseil du salarié, postérieure de trois semaines à la démission de l'intéressé, se contente d'évoquer un contexte particulièrement difficile et l'existence de manquements, qui ne sont pas explicités. Les attestations produites, toutes établies plus d'un an après la démission et, relatant pour certaines des faits non datés, sont, pour ces raisons, dépourvues de toute force probante de l'antériorité ou de la contemporanéité de manquements de l'employeur à l'origine de la démission du salarié.

Ces éléments relatifs aux conditions de la rupture du contrat de travail étant tous largement postérieurs à celle-ci ne sont pas de nature à remettre en cause la manifestation de la volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner le 21 mars 2018.

Il convient enfin de préciser que la demande d'indemnité compensatrice de congés payés, à laquelle le conseil de prud'hommes a fait droit, fait suite à la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié et ne constitue pas une demande antérieure à celle-ci. Elle n'est d'ailleurs pas invoquée par le salarié au titre des manquements reprochés à l'employeur à l'appui de sa demande de requalification de la démission en prise d'acte.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations que la démission donnée sans réserve par le salarié, par lettre du 21 mars 2018, est par conséquent claire et non équivoque, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, dont la décision sera en conséquence confirmée.

Sur les autres dispositions

Les parties sollicitent l'une et l'autre la confirmation du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 24 988,05 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés-payés, de sorte que la cour d'appel n'étant saisie d'aucun moyen afférent à ce chef de dispositif, il sera confirmé par application de l'article 954 du code de procédure civile.

Le jugement sera, pour les mêmes raisons, confirmé en l'ensemble de ses autres dispositions dont les parties sollicitent la confirmation.

Sur l'article 700 et les dépens

Le jugement sera confirmé en ses chefs de dispositif relatifs aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le salarié, bien que succombant en appel, à ce titre condamné aux dépens d'appel, ne sera toutefois pas condamné à verser une certaine somme au titre des frais exposés par l'intimée qui ne sont pas compris dans les dépens, en raison des situations économiques respectives des parties.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société Infosanté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [F] aux dépens d'appel.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 21/00502
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;21.00502 ?
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