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08/02/2023 | FRANCE | N°21/02001

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 08 février 2023, 21/02001


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 FEVRIER 2023



N° RG 21/02001



N° Portalis DBV3-V-B7F-US4I



AFFAIRE :



[G] [I] épouse [H]



C/



S.A. AKWEL







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mai 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de POISSY

N° Chambre :

N° Section : I

N° RG :

19/00312



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL CABINET GERBER



la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE HUIT FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 FEVRIER 2023

N° RG 21/02001

N° Portalis DBV3-V-B7F-US4I

AFFAIRE :

[G] [I] épouse [H]

C/

S.A. AKWEL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mai 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de POISSY

N° Chambre :

N° Section : I

N° RG : 19/00312

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL CABINET GERBER

la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [G] [I] épouse [H]

née le 12 Novembre 1968 à

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me François GERBER de la SELARL CABINET GERBER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0297

APPELANTE

****************

S.A. AKWEL

N° SIRET : 344 844 998

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Nicolas PERRAULT de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 31

Représentant : Me Benjamin GUY de la SELARL LINK ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1748

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Janvier 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [G] [H] a été engagée par la société Manpower en qualité d'intérimaire pour exercer une mission pour la société Mgi Coutier le 1er septembre 2001 en qualité d'ouvrière spécialisée. La mission a été renouvelée à cinq reprises jusqu'au 12 avril 2002.

Elle a ensuite été engagée par la société Mgi Coutier, devenue la société Akwel, suivant un contrat de travail à durée déterminée du 15 avril 2002 jusqu'au 15 octobre 2002 en qualité d'ouvrière spécialisée, niveau I, échelon II. Les relations de travail se sont ensuites poursuivies suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 octobre 2002.

Les relations de travail étaient régies par la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne.

Elle a fait l'objet d'un congé parental du 14 juin 2007 au 31 mars 2011.

En dernier lieu, la salariée occupait un poste d'opératrice, selon une durée du travail à temps partiel de 104 heures par mois.

Elle a été victime d'un accident du travail le 15 juin 2015, après avoir été heurtée par un chariot élévateur suivi d'un arrêt de travail renouvelé jusqu'au 15 août 2015.

Le 22 juillet 2015, le médecin du travail a rendu l'avis suivant concernant la salariée : 'apte avec proposition d'aménagement du poste : apte à la reprise sur un poste de production, sur des tâches n'imposant pas la montée du bras droit au-dessus de 60°, sans travail sur machine de surmoulage, ceci pendant 2 mois. Prévoir une visite médicale à l'issue de cette période pour réévaluation de l'aptitude'.

Dans son avis du 22 septembre 2015, le médecin du travail a rendu l'avis suivant : 'contre indication médicale temporaire au travail, adressée au médecin traitant'.

La salariée a, de nouveau, été arrêtée du 22 septembre 2015 jusqu'au 31 mars 2016.

Le médecin conseil de la CPAM des Yvelines a considéré que son état de santé était consolidé au 31 mars 2016.

La salariée a fait l'objet de nouveaux arrêts de travail jusqu'au 7 novembre 2016.

Dans le cadre de deux visites médicales de reprise les 8 et 22 novembre 2016, le médecin du travail a rendu l'avis suivant : '1. Inapte définitivement au poste d'opératrice dans l'entreprise MGI Coutier de la ville des Mureaux.

2. Contre-indication médicale aux gestes et contraintes suivantes :

Marche plus de 30-40 minutes/jour

Station debout prolongée plus de 30-40 minutes/jour

Station assise plus de 3 heures d'affilée

Travail en flexion ou torsion du tronc

Travail en force (tirer, pousser)

Manutention répétée (pousser, porter, tirer) de charges de masse unitaire supérieure à 1 kilogramme

Travail avec élévation des 2 membres supérieurs au-dessus du niveau de l'horizontale

Gestes répétés sans élévation plus de 10 minutes d'affilée

3. D'après l'étude du poste et des conditions de travail réalisée le 18/11/2016 et compte-tenu de l'état de santé de la salariée, aucune indication en vue d'un aménagement ne peut être faite

4. Indications en vue d'un reclassement dans l'entreprise (ou le groupe). Serait médicalement apte à tout poste respectant les contre-indications médicales'.

Par lettre du 6 décembre 2016, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 16 décembre 2016.

Par lettre du 21 décembre 2016, l'employeur a licencié la salariée pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement.

Le 13 novembre 2017, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy afin d'obtenir la condamnation de la société Akwel au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, et de diverses indemnités et sommes liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement du pôle social du tribunal de grande instance de Versailles du 23 septembre 2019, la faute de la société Mgi Coutier a été jugée inexcusable dans le processus de l'accident du travail.

Par jugement de départage en date du 28 mai 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Poissy a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande initiale et des demandes additionnelles,

- condamné la société Mgi Coutier, nouvellement dénommée Akwel, à verser à Mme [H] avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2017, date de réception de la convocation pour le bureau de conciliation et d'orientation par la partie défenderesse, les sommes suivantes :

* 51,12 euros au titre du rappel de la prime d'ancienneté,

* 5,11 euros au titre des congés payés afférents,

- rappelé que l'exécution est de droit à titre provisoire sur les créances visées à l'article R. l454-14 alinéa 2 du code du travail,

- condamné la société Mgi Coutier, nouvellement dénommée Akwel, à verser à Mme [H] avec intérêts légaux à compter du prononcé du présent jugement la somme de 1 500 euros au titre du préjudice subi pour défaut de formation professionnelle,

- condamné la société Mgi Coutier, nouvellement dénommée Akwel, à verser à Mme [H], la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [H] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Mgi Coutier, nouvellement dénommée Akwel, de sa demande reconventionnelle,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- mis les dépens de l'instance à la charge de la société Mgi Coutier, nouvellement dénommée Akwel, y compris les frais d'exécution éventuels.

Le 23 juin 2021, Mme [H] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 septembre 2021, Mme [H] demande à la cour de :

- déclarer que la société Akwel a commis une faute en retardant la visite médicale de reprise de la salariée suite à son avis de consolidation de mars 2016 et en conséquence, à titre principal, condamner la société Akwel au paiement de :

* 9 121,71 euros brut à titre de paiement des salaires du 31 mars 2016 au 23 novembre 2016,

* 912,17 euros brut au titre des congés payés y afférents,

- à titre subsidiaire, condamner la société Akwel au paiement de la somme de 10 000 euros à titre d'indemnisation du préjudice financier résultant de cette faute,

- déclarer que la moyenne des salaires est 1 188,82 euros brut,

- dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamner la société Akwel au paiement des sommes suivantes avec intérêt légal à compter du prononcé de la décision :

* 28 531 euros à titre de dommages et intérêts,

* 1 418,78 euros à titre d'indemnité de préavis,

* 2 515,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement résiduelle,

* 15 000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice spécifique de perte d'emploi,

- ordonner la remise de l'attestation pôle emploi et du certificat de travail rectifiés sous une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 15ème jour de la signification de la décision à intervenir,

- condamner la société Akwel à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 10 décembre 2021, la société Akwel demande à la cour de :

- infirmer le jugement :

. en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de voir déclarer que toutes les demandes de Mme [H] étaient irrecevables, en application de l'article 58 du code de procédure civile et de l'article R. 1452-2 du code du travail, tels qu'ils étaient applicables à l'époque de sa saisine du conseil de prud'hommes, dès lors qu'elles n'ont pas été mentionnées dans sa requête et que sa requête n'est pas conforme aux prescriptions des textes susvisées,

. l'a condamnée à verser à Mme [H], avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2017, 51,12 euros bruts, à titre de rappel de prime d'ancienneté et 5,12 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférente,

. a rejeté sa demande de voir déclarer irrecevable car prescrite la demande de Mme [H] de la voir condamnée à lui payer 5 000 euros au titre du préjudice pour défaut de formation professionnelle,

. l'a condamnée à verser à Mme [H], avec intérêts légaux à compter du prononcé du jugement, la somme de 1 500 euros au titre du préjudice du défaut de formation professionnelle,

. a rejeté sa demande de voir déclarer irrecevables car prescrites les demandes de Mme [H] de la voir condamnée à lui payer 9 127,71 euros de rappel de salaires, outre 912,17 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente, pour la période du 31 mars au 23 novembre 2016,

. a rejeté sa demande de voir déclarer irrecevable car prescrite la demande de Mme [H] de la voir condamnée à lui payer 9 127,71 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice financier pour la période du 31 mars au 23 novembre 2016,

. a rejeté ses demandes de voir à titre principal déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique perte d'emploi est irrecevable pour être prescrite, en conséquence, l'en débouter,

. à titre subsidiaire, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de perte d'emploi est irrecevable car elle vise à l'indemniser une seconde fois du même préjudice qu'elle invoque au titre de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, l'en débouter,

. à titre trés subsidiaire, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de d'emploi est irrecevable car elle ne peut pas être présentée sur le fondement de la faute inexcusable de l'employeur dans le cadre de la présente procédure,

. l'a déboutée de sa demande de voir condamner Mme [H] à lui payer la somme de 4 729,13 euros nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement doublée non fondée,

. l'a déboutée de voir condamner Mme [H] à lui payer 2 147,68 euros bruts à titre de rappel d'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis non fondée,

. l'a déboutée de sa demande de voir condamner Mme [H] à lui payer 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. l'a déboutée de sa demande de voir condamner Mme [H] aux entiers dépens,

. l'a condamnée à verser à Mme [H] 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. l'a condamnée aux dépens,

- le confirmer pour le surplus et statuant à nouveau : à titre principal, déclarer que toutes les demandes de Mme [H] sont irrecevables en application de l'article 58 du code de procédure civile et de l'article R. 1452-2 du code du travail,

- à titre subsidiaire, débouter Mme [H] de sa demande de condamnation à lui payer 51,12 euros bruts à titre de rappel de prime d'ancienneté et 5,12 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- à titre principal, déclarer que les demandes de Mme [H] de voir déclarer qu'elle a commis une faute en retardant sa visite médicale de reprise suite à son avis de consolidation de mars 2016 et de condamnations à lui payer 9 127, 71 euros bruts à titre de paiement de salaires, outre 912,17 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente, pour la période du 31 mars au 23 novembre 2016, sont irrecevables car prescrites,

- à titre subsidiaire, déclarer que les demandes de Mme [H] de voir déclarer qu'elle a commis une faute en retardant sa visite médicale de reprise suite à son avis de consolidation de mars 2016 et de condamnations à lui payer 9 127,71 euros bruts à titre de paiement de salaires, outre 912, 17 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente, pour la période du 31 mars au 23 novembre 2016, sont irrecevables dés lors que qu'elles ne pouvaient consister qu'en des dommages et intérêts, en conséquence, l'en débouter,

- à titre plus subsidiaire, débouter Mme [H] de ses demandes de voir déclarer qu'elle a commis une faute en retardant sa visite médicale de reprise suite à son avis de consolidation de mars 2016 et de condamnation à lui payer 9 127,71 euros bruts à titre de paiement de salaires, outre 912,17 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente, pour la période du 31 mars au 23 novembre 2016,

- à titre principal, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 10 000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice financier est irrecevable car prescrite en application de l'article L. 1471-1 du code du travail,

- à titre subsidiaire, débouter Mme [H] de sa demande de condamnation à lui payer 10 000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice financier,

- à titre principal, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de formation professionnelle est irrecevable car prescrite en application de l'article L. 1471-1 du code du travail,

- à titre subsidiaire, débouter Mme [H] de sa demande de condamnation à lui payer 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de formation professionnelle,

- condamner Mme [H] à lui payer la somme de 4 729,13 euros nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement doublée non fondée,

- condamner Mme [H] à lui payer la somme de 2 147,68 euros bruts à titre de rappel d'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis non fondée,

- à titre principal, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de perte d'emploi est irrecevable pour être prescrite,

- à titre subsidiaire, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de perte d'emploi est irrecevable car elle vise à l'indemniser une seconde fois du même préjudice qu'elle invoque au titre de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, l'en débouter,

- à titre plus subsidiaire, déclarer que la demande de Mme [H] de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de perte d'emploi est irrecevable car elle ne peut pas être présentée sur le fondement de la faute inexcusable de l'employeur dans le cadre de la présente procédure, en conséquence, l'en débouter,

- à titre encore plus subsidiaire, débouter Mme [H] de sa demande de condamnation à lui payer 15 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice spécifique de perte d'emploi,

- en tout état de cause, débouter Mme [H] de toutes ses demandes,

- condamner Mme [H] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

- condamner Mme [H] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 13 décembre 2022.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de la requête initiale

Aux termes de l'article R. 1452-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, la requête est faite, remise ou adressée au greffe du conseil de prud'hommes.

Elle comporte les mentions prescrites à peine de nullité à l'article 58 du code de procédure civile. En outre, elle contient un exposé sommaire des motifs de la demande et mentionne chacun des chefs de celle-ci. Elle est accompagnée des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.

La requête et le bordereau sont établis en autant d'exemplaires qu'il existe de défendeurs, outre l'exemplaire destiné à la juridiction.

Aux termes de l'article 58 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige, la requête ou la déclaration est l'acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.

Elle contient à peine de nullité :

1° Pour les personnes physiques : l'indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;

Pour les personnes morales : l'indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l'organe qui les représente légalement ;

2° L'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, ou, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social;

3° L'objet de la demande.

Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.

Elle est datée et signée.

En l'espèce, les premiers juges ont justement relevé que la requête initiale était conforme aux dispositions de l'article 58 du code de procédure civile et que si l'exposé sommaire des motifs prévu à l'article R. 1452-2 n'apparaissait pas dans la requête, cette absence n'était pas sanctionnée à peine de nullité de la requête. Le moyen d'irrecevabilité sur ce fondement sera donc rejeté. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la recevabilité des demandes additionnelles

Aux termes de l'article 70 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l'absence d'un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l'excès le jugement sur le tout.

En l'espèce, le conseil de prud'hommes a rappelé que la demande initiale de la salariée portait sur la contestation de son licenciement et qu'elle a ensuite formé des demandes additionnelles de rappels de salaire, de rappel de prime d'ancienneté, de dommages et intérêts pour défaut de formation professionnelle.

Cependant, les demandes additionnelles de rappels de salaire et congés payés afférents de novembre 2014 à décembre 2017 ainsi que du 31 mars 2016 au 23 novembre 2016, de rappel de prime d'ancienneté et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour défaut de formation subsidiairement, de dommages et intérêts au titre du préjudice financier résultant d'une faute, étant liées à l'exécution du contrat de travail et n'étant pas rattachées aux prétentions originaires par un lien suffisant, elles doivent être déclarées irrecevables. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

La demande additionnelle formulée au titre d'un préjudice spécifique de perte d'emploi est rattachée aux prétentions originaires en contestation du licenciement par un lien suffisant. Elle doit être déclarée recevable. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande au titre du préjudice spécifique de perte d'emploi

En application des dispositions de l'article L. 1471-1 alinéa 2 du code du travail, dans sa version applicable au litige, l'action est prescrite dans un délai de un an à compter de la notification de la rupture.

Si le principe est que la prescription n'est interrompue que relativement au droit invoqué dans la citation en contestation du licenciement, dès lors que des demandes additionnelles tendent à obtenir l'indemnisation des conséquences du licenciement qu'un salarié estime injustifié, la prescription est interrompue.

En l'espèce, dans sa requête initiale la salariée a contesté son licenciement pour inaptitude professionnelle.

Elle a ensuite formé une demande additionnelle au titre du préjudice spécifique de perte d'emploi par conclusions communiquées le 17 décembre 2019.

Cependant, cette demande tendant à obtenir l'indemnisation des conséquences du licenciement qu'elle estime injustifiée, il y a lieu de considérer que la prescription a été interrompue par la requête initiale. La fin de non recevoir doit donc être rejetée, l'action au titre du préjudice spécifique de perte d'emploi n'étant pas prescrite.

Sur le bien fondé du licenciement et ses conséquences

La cour constate que la salariée a abandonné sa demande au titre de la nullité du licenciement.

Sur le caractère professionnel de l'inaptitude

L'employeur indique que la décision de consolidation de l'état de santé de la salariée n'a pas été portée à sa connaissance par la salariée, qu'elle aurait dû être licenciée pour inaptitude non professionnelle.

La salariée fait valoir que l'employeur aurait dû déclencher la visite de reprise et le constat de l'aptitude ou de l'inaptitude à la reprise de son poste dès la consolidation de son état de santé par la caisse primaire maladie, qu'il ne pouvait ignorer. Elle précise que des certificats ont été établis en même temps pour maladie conformément à la position de la caisse et pour accident du travail conformément à la position du centre hospitalier de [Localité 5], lequel a contesté les conclusions de la caisse. Elle conclut qu'elle a été licenciée pour inaptitude professionnelle.

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

L'application des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance-maladie du lien de causalité entre l'accident du travail ou la maladie professionnelle et l'inaptitude.

En l'espèce, la salariée a subi un accident du travail le 15 juin 2015 connu de l'employeur.

Par jugement du 23 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Versailles a retenu la faute inexcusable de l'employeur dans la réalisation de l'accident du travail, précisant que la salariée 'qui allait rejoindre son poste de travail en revenant de la cafétéria, a été heurtée par un chariot élévateur de type Fenwick qui reculait'.

Le certificat médical du 22 juin 2015 pour accident du travail mentionne les constatations suivantes: 'contusion épaule/pouce droit +coude droit+poitrine droite + dos'.

La salariée a ensuite fait l'objet d'arrêts de travail pour accident du travail jusqu'au 31 mars 2016.

La caisse primaire d'assurance maladie a retenu une date de consolidation au 31 mars 2016.

Cependant, la consolidation de l'état de santé de la salariée est contredite par les constatations suivantes :

-du docteur [J], médecin traitant de la salariée du 20 mai 2016 : 'Mme [H] souffre manifestement de douleurs allégées à son dos et épaule dont elle ne peut faire usage pour travailler malgré les divers traitements à ce jour bien conduits et assidus.

Par conséquent, la requête de demande de soins en accident du travail a été fermée à tort puisque la patiente n'est toujours à ce jour pas guérie comme le prouve le centre anti douleur de l'hôpital de [Localité 5]',

- de l'hôpital [Localité 5] [Localité 6] dans le cadre d'une consultation pour des douleurs scapulaire et brachiale droite du 5 juillet 2016 : 'nous avons trouvé une limitation de la rotation interne et externe de l'épaule droite, évoquant une tendinite secondaire post-traumatique' et la pratique d'un acte médical afin de soigner cette pathologie qui était donc encore évolutive et non stabilisée.

L'employeur est malvenu à reprocher à la salariée de ne pas lui avoir communiqué la décision du médecin conseil de la caisse de consolidation de son état de santé, alors que cet état de consolidation faisait l'objet d'une discussion entre les différents intervenants de santé et que l'employeur n'était pas tenu par la reconnaissance ou non du lien de causalité entre l'inaptitude et l'accident du travail par la caisse.

Il se déduit de ces éléments, que l'avis d'inaptitude du médecin du travail a été rendu peu après le constat d'une tendinite de l'épaule droite secondaire post-traumatique à l'accident du travail qui lui avait notamment causé un traumatisme de l'épaule droite.

Par conséquent, l'inaptitude de la salariée, a au moins partiellement pour origine l'accident du travail et l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment de l'accident, puisqu'il a mentionné lors de sa consultation des délégués du personnel du 28 novembre 2016 que 'l'accident [était] d'origine professionnelle'.

L'employeur devait donc appliquer les règles relatives aux victimes d'accident du travail.

L'employeur est d'ailleurs tenu par sa lettre de licenciement qui fixe les termes du litige et qui a licencié la salariée pour inaptitude d'origine professionnelle.

Les demandes subséquentes de l'employeur fondées sur un licenciement qui aurait dû être prononcé pour inaptitude non professionnelle doivent donc être rejetées : rappel d'indemnité de licenciement doublée, rappel d'indemnité compensatrice de préavis.

Sur la demande de doublement de l'indemnité compensatrice de préavis

L'article L. 5213-9 du code du travail, qui a pour but de doubler la durée du délai-congé en faveur des salariés handicapés n'est pas applicable à l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail.

Par conséquent, la salariée sera déboutée de sa demande à ce titre. Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de complément d'indemnité de licenciement

En l'absence de doublement de l'indemnité compensatrice de préavis, il n'y a pas lieu d'allouer à la salariée un complément d'indemnité de licenciement comme sollicité. Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur l'obligation de reclassement

La salariée indique que les postes proposés ne pouvaient lui convenir puisqu'ils ne correspondaient ni à sa catégorie, ni à sa compétence, ni à son aptitude. Elle ajoute que l'employeur ne lui a jamais proposé de formation sérieuse. Elle conclut que l'employeur n'a pas exécuté son obligation de reclassement de bonne foi et de manière sérieuse en menant la procédure trop rapidement.

L'employeur fait valoir qu'il a convoqué la salariée à un entretien pour traiter de son reclassement en lui demandant de renseigner un questionnaire, que la salariée a répondu qu'elle n'était pas mobile sur un autre site, qu'elle n'avait pas de connaissance en bureautique et qu'elle refusait d'effectuer une courte formation. L'employeur conclut qu'il n'existait pas de postes disponibles qui auraient pu être proposés à la salariée, qu'il a mené ses recherches dans le délai légal.

L'employeur doit mener ses recherches de reclassement avec sérieux et bonne foi. Il doit prouver la réalité de ses recherches. Il doit aussi apporter la preuve de l'absence de poste disponible de reclassement.

Le salarié doit être reclassé ou licencié dans le délai d'un mois à l'issue du second examen médical.

Par conséquent, il ne peut être tenu rigueur à l'employeur d'avoir effectué ses recherches avec diligence, dans le délai légal.

L'employeur verse aux débats des recherches de reclassement adressées par courriel le 22 novembre 2016 aux responsables ressources humaines du groupe ainsi que leurs réponses.

L'employeur justifie avoir tenu un entretien en vue de la recherche d'un reclassement le 28 novembre 2016 et produit le questionnaire de recherche de reclassement renseigné pendant cet entretien, la salariée ayant refusé toute mobilité géographique sur un autre site, ayant refusé de suivre une courte formation, ayant refusé un travail de type administratif faisant valoir qu'elle n'avait pas de diplôme, ni d'expérience dans ce domaine.

L'employeur verse également aux débats un procès-verbal de réunion des délégués du personnel du 28 novembre 2016 comprenant les résultats de la recherche de reclassement avec une liste de postes ouverts sur plusieurs sites et l'absence de propositions de reclassement à émettre compte-tenu des restrictions médicales, du niveau de qualification et de l'expérience de la salariée.

Il en résulte que l'entreprise a mené des recherches de reclassement avec sérieux et bonne foi. La demande de dommages et intérêts formée par la salariée sur ce fondement doit donc être rejetée. Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnisation complémentaire de perte d'emploi

Lorsque l'inaptitude du salarié, à l'origine de son licenciement, trouve sa cause dans un accident du travail ou une maladie professionnelle consécutifs à une faute inexcusable, la réparation du préjudice de perte d'emploi due à cette faute de l'employeur relève de la compétence de la juridiction de la sécurité sociale et non de celle du conseil de prud'hommes.

En l'espèce, l'inaptitude de la salariée à l'origine de son licenciement, trouve sa cause dans un accident du travail consécutif à une faute inexcusable de l'employeur. Par conséquent, Mme [I] sera déboutée de sa demande de réparation du préjudice de perte d'emploi due à cette faute, celle-ci relevant de la compétence de la juridiction de la sécurité sociale.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [I] succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- Rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande initiale et des demandes additionnelles,

- Débouté Mme [G] [I] de sa demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ses demandes subséquentes : dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis, indemnité légale de licenciement résiduelle,

- Débouté Mme [G] [I] de sa demande au titre du préjudice spécifique de perte d'emploi,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Déclare irrecevables les demandes additionnelles de rappels de salaire et congés payés afférents de novembre 2014 à décembre 2017 ainsi que du 31 mars 2016 au 23 novembre 2016, de rappel de prime d'ancienneté et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour défaut de formation subsidiairement, de dommages et intérêts au titre du préjudice financier résultant d'une faute,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action au titre du préjudice spécifique de perte d'emploi,

Dit que l'inaptitude de Mme [G] [I] est d'origine professionnelle,

Rejette les demandes formées par la société Akwel en rappel d'indemnité de licenciement doublée et d'indemnité compensatrice de préavis,

Condamne Mme [G] [I] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/02001
Date de la décision : 08/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-08;21.02001 ?
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