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18/01/2023 | FRANCE | N°21/00840

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 18 janvier 2023, 21/00840


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 JANVIER 2023



N° RG 21/00840



N° Portalis DBV3-V-B7F-UMAY



AFFAIRE :



[R] [X]



C/



S.A.S. TEAMEX





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F 1

6/00925



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Christian LE GALL



la AARPI Cabinet FUSCO OSSIPOFF







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 JANVIER 2023

N° RG 21/00840

N° Portalis DBV3-V-B7F-UMAY

AFFAIRE :

[R] [X]

C/

S.A.S. TEAMEX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F 16/00925

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Christian LE GALL

la AARPI Cabinet FUSCO OSSIPOFF

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [R] [X]

née le 05 Mars 1973 à [Localité 5]

de nationalité Sri Lankaise

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Christian LE GALL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0754

APPELANTE

****************

S.A.S. TEAMEX

N° SIRET : 534 897 293

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Alexis OSSIPOFF de l'AARPI Cabinet FUSCO OSSIPOFF, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B793

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Décembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

[R] [X] a été engagée par la société Arcade suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 février 2004 en qualité d'agent de service.

Le 21 mars 2015, le contrat de travail de la salariée a été repris par la société Teamex.

La salariée était affectée sur le site de l'hôtel Only Suites à [Localité 6] pour 108,33 heures de travail par mois.

Les relations de travail étaient soumises aux dispositions de la convention collective nationale des entreprises de propreté.

Par lettre datée du 12 mai 2015, l'employeur a notifié un avertissement à la salariée que celle-ci a contesté.

Par lettre datée du 28 mai 2015, l'employeur a notifié un second avertissement à la salariée que celle-ci a contesté.

Par lettre datée du 23 juin 2015, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 1er juillet 2015, puis par lettre datée du 16 juillet suivant, l'employeur lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le 4 mai 2016, [R] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin d'obtenir la condamnation de la société Teamex au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement de départage mis à disposition le 29 janvier 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le premier juge a débouté [R] [X] de l'ensemble de ses demandes, a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, ni à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté les parties de toutes leurs autres demandes et a condamné [R] [X] aux dépens de l'instance.

Le 12 mars 2021, [R] [X] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 14 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, [R] [X] demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, de requalifier le licenciement en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société Teamex au paiement des sommes suivantes :

* 20 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, et aux entiers dépens y compris les frais d'exécution.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 2 septembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Teamex demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter [R] [X] de l'intégralité de ses demandes et de condamner celle-ci au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux frais d'exécution de la décision à intervenir.

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 6 décembre 2022.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La salariée soutient que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse au motif qu'il lui est reproché une insuffisance professionnelle qui ne peut être fautive, qu'elle n'a jamais fait l'objet de reproche sur la qualité de son travail alors qu'elle était en poste depuis 2004 ; qu'elle devait seule réaliser le nettoyage de cinq chambres en cinq heures ; qu'elle s'acquittait de ses obligations professionnelles avec application au regard des moyens dont elle disposait.

La société fait valoir que le licenciement est bien fondé au regard des avertissements dont la salariée a fait l'objet sur la mauvaise qualité de son travail et de la persistance de ses manquements fautifs, constatés par un huissier de justice contradictoirement avec elle le 17 juin 2015, témoignant d'un non-respect réitéré des consignes et d'un refus de respecter le pouvoir de direction de l'employeur ; que la salariée doit donc être déboutée de l'ensemble de ses demandes.

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail, un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

L'insuffisance professionnelle qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

L'insuffisance professionnelle, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute.

La lettre de licenciement notifié à la salariée, qui circonscrit le litige est ainsi rédigée :

«(...) Depuis votre embauche du 21 mars 2015 dans notre société, le constat de vos prestations ont été à maintes reprises décevantes.

Aussi, nous vous avons notifié, par courriers recommandés, deux avertissements pour ces mêmes motifs que vous n'avez pas manqué de contester par lettre à deux reprises.

Alors, nous trouvant dans une impasse, nous avons fait intervenir un huissier de justice, le 17 juin dernier, où il a pu constater avec votre accord, vos prestations effectuées ce jour.

A la suite de son action, nos avons reçu un procès-verbal le 22 juin 2015, où un certain nombre de faits relataient et confirmaient votre mauvaise qualité de travail, comme nous vous l'avions notifié précédemment (avec photos comme preuve).

Lors de l'entretien, après les explications fournies, vous n'avez pas nié les reproches, vous vous êtes engagée verbalement, auprès de Monsieur [Z], Directeur Général, de faire le nécessaire sur la qualité de votre travail et à ce jour, vos prestations restent toujours inefficaces.

Ce renouvellement montre que vous n'avez pas tenu compte ni des remarques qui vous ont été faites, ni des sanctions disciplinaires dont vous avez fait l'objet.

Cette attitude désinvolte ne nous a pas permis de modifier notre appréciation de la situation. C'est pourquoi, nous nous voyons donc dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise.

En conséquence, devant cette situation sans issue et sans raisonnement de votre part et pour ces raisons, nous vous notifions, par le présent courrier, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse (...)'.

Il ressort de la lecture de la lettre de licenciement que les faits reprochés à la salariée s'analysent en des difficultés éprouvées par celle-ci à exécuter correctement sa prestation de travail, la lettre mentionnant des prestations 'décevantes', 'la mauvaise qualité de travail', 'vos prestations restent toujours inefficaces', et, partant, en une insuffisance professionnelle.

Aucun des éléments produits aux débats n'établit de mauvaise volonté ou d'abstention volontaire de la salariée à exécuter correctement ses prestations de travail. En effet, la société se contente d'affirmer de manière générale que la salariée n'aurait pas respecté les directives de son employeur et aurait refusé de respecter son pouvoir de direction, sans étayer ses allégations de faits précis, ce dont il s'ensuit que cette allégation n'est pas démontrée.

Il s'ensuit qu'aucune faute ne peut être reprochée à la salariée et que son licenciement disciplinaire est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, la salariée est fondée à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Eu égard à son âge (née en 1973), à sa rémunération des six derniers mois, à son ancienneté (onze années complètes), au fait qu'elle indique avoir retrouvé un emploi lui procurant deux heures de travail par jour pour la société Pcs et un salaire brut mensuel de 206,65 euros et percevoir des indemnités de chômage à hauteur de 300 à 400 euros par mois, sans cependant produire aucune pièce justificative, il y a lieu d'allouer à l'appelante une somme de 8 000 euros à ce titre.

La créance de la salariée, de nature indemnitaire, sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Le jugement sera infirmé sur ces points.

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées à la salariée du jour de son licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il statue sur ces deux points.

La société, partie succombante, sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel et sera condamnée à payer à la salariée une somme de 2 000 euros à ce titre ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Teamex à payer à [R] [X] la somme de 8 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

RAPPELLE que les créances de nature indemnitaire produisent des intérêts à compter du présent arrêt,

ORDONNE le remboursement par la société Teamex aux organismes concernés des indemnités de chômage qu'ils ont versées à [R] [X] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités,

CONDAMNE la société Teamex aux entiers dépens,

CONDAMNE la société Teamex à payer à [R] [X] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/00840
Date de la décision : 18/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-18;21.00840 ?
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