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11/01/2023 | FRANCE | N°21/00419

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 11 janvier 2023, 21/00419


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 11 JANVIER 2023



N° RG 21/00419



N° Portalis DBV3-V-B7F-UJV3



AFFAIRE :



[V] [X] [T]



C/



S.C.P. OLIVIER ZANNI Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « EURL EXPRESS AUTO »

...



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Février 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation

paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F 19/00230



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Stephane ARCHANGE



Me Claude-marc BENOIT



Copies certifiées conformes délivrées à :



...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 11 JANVIER 2023

N° RG 21/00419

N° Portalis DBV3-V-B7F-UJV3

AFFAIRE :

[V] [X] [T]

C/

S.C.P. OLIVIER ZANNI Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « EURL EXPRESS AUTO »

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Février 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : F 19/00230

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Stephane ARCHANGE

Me Claude-marc BENOIT

Copies certifiées conformes délivrées à :

S.C.P. OLIVIER ZANNI Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « EURL EXPRESS AUTO »

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [V] [X] [T]

né le 16 Février 1985 à [Localité 7] (TURQUIE)

de nationalité Turque

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Stephane ARCHANGE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000055

APPELANT

****************

S.C.P. OLIVIER ZANNI Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « EURL EXPRESS AUTO » fonctions auxquelles il a été désigné par jugement du Tribunal de Commerce de CHARTRES du 28 novembre 2019

N° SIRET : 439 439 076

[Adresse 5]

[Localité 2]

Non constitué

AGS CGEA ORLEANS UNEDIC

N° SIRET : 775 671 878

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentant : Me Claude-marc BENOIT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1953

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Novembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE,

M. [V] [X] [T] a conclu un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de mécanicien avec la société EXPRESS AUTO à effet au 22 novembre 2017.

Le 12 juillet 2018, M. [T] et la société EXPRESS AUTO ont conclu une convention de rupture à effet au 3 août 2018.

Au début du mois d'août 2018, M. [T] a été embauché par une autre société EXPRESS AUTO.

Par décision du 13 août 2018, l'autorité administrative a refusé d'homologuer la convention de rupture conclue entre M. [T] et la société EXPRESS AUTO.

Le 18 juillet 2019, M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Chartres pour demander la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu avec la société EXPRESS AUTO et la condamnation de cette dernière à lui payer notamment des rappels de salaire, une indemnité pour travail dissimulé, des indemnités de rupture et des dommages-intérêts.

Par ordonnance du 3 septembre 2019, non frappée d'appel, le président du tribunal de grande instance de Chartres a homologué une peine d'amende à l'encontre du gérant de la société EXPRESS AUTO pour un délit de travail dissimulé à raison de la mention sur les bulletins de salaire de M. [T] d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Par jugement du 28 novembre 2019, le tribunal de commerce de Chartres a prononcé la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO et a désigné la SCP Olivier Zanni en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre du 11 décembre 2019, le liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO a notifié à M. [T] son licenciement pour motif économique.

Par un jugement du 1er février 2021, le conseil de prud'hommes de Chartres (section commerce) a :

- débouté M. [T] de l'ensemble de ses demandes ;

- s'est déclaré incompétent pour ce qui concerne la demande de restitution de la voiture Twingo et a invité M. [T] à saisir la juridiction compétente ;

- condamné M. [T] aux entiers dépens.

Le 8 février 2021, M. [T] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 21 octobre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [T] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué et, statuant à nouveau, de :

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail conclu avec la société EXPRESS AUTO aux torts de cette dernière, à la date du 3 août 2018 ;

- fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO sa créance aux sommes suivantes :

* 621,85 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

* 1 571 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 157,10 euros au titre des congés payés afférents ;

* 9 426 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 8 270 67 euros à titre de rappel de salaire pour les heures normales du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 et 827,07 euros au titre des congés payés afférents ;

* 19 534,49 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 et 1 953,45 euros au titre des congés payés afférents ;

* 25 607,78 euros à titre de rappel de salaire pour la période d'août 2018 au 11 décembre 2019 et 2560,78 euros au titre des congés payés afférents ;

* 500 euros à titre de prime d'habillage ;

* 9 426 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 9 426 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et dégradation des conditions de travail ;

* 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner à la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO de lui adresser les bulletins de salaire rectifiés depuis novembre 2017, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travails rectifiés, sous astreinte de 50 euros par document et jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement à intervenir ;

- condamner l'AGS CGEA d'Orléans à garantir ses créances ;

- ordonner à la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, de lui restituer un véhicule Renault Twingo lui appartenant, avec clé et certificat d'immatriculation du véhicule, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement à intervenir ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner in solidum la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO et l'AGS CGEA d'Orléans aux dépens.

Aux termes de ses conclusions du 8 avril 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'AGS CGEA d'Orléans demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué ;

- déclarer les demandes afférentes à la rupture du contrat de travail irrecevables comme prescrites;

- subsidiairement :

* rendre l'arrêt opposable dans les limites des plafonds de sa garantie, toutes créances brutes confondues ;

* rejeter la demande d'intérêts légaux.

La SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à personne, ne s'est pas constituée.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 8 novembre 2022.

SUR CE :

Sur la compétence pour statuer sur la demande de restitution d'un véhicule :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du contrat de travail : 'Le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient./Il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti' ;

Qu'en l'espèce, M. [T] soutient que 'l'employeur détient toujours un véhicule Renault Twingo' lui appartenant et en demande la restitution ; qu'il n'allègue toutefois pas que ce différend s'élève à l'occasion du contrat de travail ; qu'il y a donc lieu de confirmer l'exception d'incompétence retenue par le conseil de prud'hommes sur ce point ;

Sur le caractère fictif du contrat de travail :

Considérant que l'AGS soutient que le contrat de travail conclu entre M. [T] et la société EXPRESS AUTO est fictif et que l'appelant n'a pas eu d'activité réelle au profit de cette société EXPRESS AUTO ; qu'elle conclut donc au débouté de l'ensemble de ses demandes de M. [T] ;

Mais considérant que les décisions pénales ont, au civil, autorité absolue relativement à ce qui a été jugé quant à l'existence de l'infraction et à la culpabilité de la personne poursuivie ;

Qu'en l'espèce, la réalité d'une activité salariée de M. [T] au profit de la société EXPRESS AUTO a été reconnue par l'ordonnance devenue définitive du président du tribunal de grande instance de Chartres homologuant une peine d'amende à l'encontre du gérant de la société EXPRESS AUTO pour un délit de travail dissimulé à raison de la mention sur les bulletins de salaire de M. [T] d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que M. [T] est donc fondé à se prévaloir d'un contrat de travail à l'encontre de la société EXPRESS AUTO ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes relatives à la rupture du contrat de travail soulevée par l'AGS :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 1471-1 du code du travail : 'Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture' ;

Qu'en l'espèce, l'AGS ne démontre en tout état de cause aucune rupture du contrat de travail intervenue le 12 juillet 2018, contrairement à ce qu'elle prétend ; qu'il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à ce titre ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Considérant qu'un salarié est fondé à poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement, par ce dernier, à ses obligations ; qu'il appartient au juge de rechercher s'il existe à la charge de l'employeur des manquements d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail afin de prononcer cette résiliation, lesquels s'apprécient à la date à laquelle il se prononce ; qu'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date et que le salarié est toujours au service de l'employeur ;

Qu'en l'espèce, M. [T] demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail à effet au 3 août 2018, en faisant valoir qu'il s'agit de la date à laquelle il a commencé à travailler pour un autre employeur et à laquelle il n'était donc plus au service de la société EXPRESS AUTO ;

Mais considérant que cette demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, qui tend au prononcé d'une rupture du contrat de travail avant même la saisine du conseil de prud'hommes, est entachée d'une contradiction interne qui la rend sans objet ;

Qu'il y a donc lieu de débouter M. [T] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes subséquentes d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis de congés payés afférents et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur le rappel de salaire pour les 'heures normales' du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 :

Considérant qu'il appartient à l'employeur d'établir qu'il s'est acquitté de ses obligations salariales;

Qu'en l'espèce, M. [T] réclame à ce titre un rappel de salaire de base, en affirmant qu'il n'a été payé que partiellement pendant la période en cause et en invoquant ses bulletins de salaire ;

Que l'AGS et le liquidateur judiciaire, défaillant, ne démontrent pas que M. [T] a été rempli de ses droits salariaux à ce titre ;

Qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO une créance d'un montant de 8 270,67 euros à ce titre outre 827,07 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel de salaire pour heures supplémentaires pour la période du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 :

Considérant qu'en application notamment de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ; qu'après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant ;

Qu'en l'espèce, M. [T] demande un rappel de salaire pour heures supplémentaires en présentant un décompte hebdomadaire des heures en litige calculé sur la base de l'accomplissement de 70 heures de travail hebdomadaires ;

Que cette durée du travail de M. [T] a été reconnue par l'employeur dans le cadre de l'enquête pénale pour travail dissimulé diligentée à l'encontre de la société EXPRESS AUTO laquelle a abouti à l'ordonnance d'homologation d'une peine pour cette infraction ainsi que mentionné ci-dessus ;

Que la réalité de l'accomplissement d'heures supplémentaires à cette hauteur est donc établie ; qu'au surplus, l'AGS et le liquidateur judiciaire, défaillant, ne produisent aucun élément sur la durée du travail de M. [T] ;

Qu'il y a donc lieu dans ces conditions de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO une créance d'un montant de 19 534,49 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et 1 953,45 euros au titre des congés payés afférents ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

Considérant que, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, les décisions pénales ont, au civil, autorité absolue relativement à ce qui a été jugé quant à l'existence de l'infraction et à la culpabilité de la personne poursuivie ;

Qu'en l'espèce, la réalité d'un travail dissimulé commis par le gérant de la société EXPRESS AUTO par mention sur les bulletins de salaire de M. [T] d'un nombre d'heures inférieur à celui réellement accompli a été établie par l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Chartres du 3 septembre 2019 mentionnée ci-dessus ;

Qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande d'indemnité pour travail dissimulé et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO une créance d'un montant de 9 426 euros à ce titre ;

Sur le rappel de salaire pour la période d'août 2018 au 11 décembre 2019 :

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. [T] reconnaît qu'il ne se tenait plus à la disposition de la société EXPRESS AUTO à compter du 3 août 2018 ; qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de rappel de salaire pour la période postérieure à cette date ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur le rappel de prime d'habillage :

Considérant qu'aux termes de l'article 1.09 de la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile : 'a) Durée du travail

La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Sous réserve des dispositions de l'article 1.09 ter, les temps de trajet à partir du domicile du salarié pour se rendre sur le lieu de travail ou pour y retourner ne sont pas du temps de travail effectif. Il en est de même pour les temps d'habillage et de déshabillage sur le lieu de travail.

Lorsqu'une disposition réglementaire ou conventionnelle ou le règlement intérieur ou le contrat de travail imposent le port d'une tenue de travail justifié par la protection de l'hygiène et de la sécurité du salarié, cette tenue doit être revêtue sur le lieu de travail. Une contrepartie doit alors être donnée au salarié soit sous forme de prime d'habillage, soit en assimilant les temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail. Une contrepartie de même nature doit également être accordée lorsque l'employeur fournit une tenue de travail spécifique qu'il impose de porter sur le lieu de travail' ;

Qu'en l'espèce, M. [T] se borne à demander le paiement de la prime d'habillage prévue par la convention collective sans toutefois alléguer qu'une disposition réglementaire conventionnelle, le règlement intérieur ou le contrat de travail lui imposaient le port d'une tenue de travail justifié par la protection de l'hygiène et de la sécurité ; qu'il n'est ainsi pas fondé au regard de l'alinéa 3 de l'article 1.09 de la convention collective, à réclamer le paiement de cette prime ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur les dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité :

Considérant que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en application de l'article L. 4121-1 du code du travail qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer de manière effective la sécurité et protéger la santé des travailleurs et que ne méconnaît cependant pas son obligation légale l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

Qu'en l'espèce, il ressort des débats et des pièces versées que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. [T] a travaillé jusqu'à 70 heures par semaine au profit de la société EXPRESS AUTO, en méconnaissance des règles relatives aux durées maximales du travail ; que les attestations versées aux débats démontrent que M. [T] a souffert de ces conditions de travail gravement irrégulières jusqu'à en être physiquement amaigri ;

Que le préjudice résultant de ce manquement à l'obligation de sécurité sera réparé par la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO d'une créance d'un montant de 2 000 euros à ce titre ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur les intérêts légaux et la capitalisation :

Considérant qu'il y a lieu de rappeler qu'en application des dispositions de l'article L. 622-28 du code du commerce, le jugement du tribunal de commerce du 28 novembre 2019 qui a prononcé l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de la société EXPRESS AUTO a arrêté le cours des intérêts légaux ;

Que les créances de nature salariale porteront donc intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et jusqu'au 28 novembre 2019 ; que les créances de nature indemnitaire allouées par le présent arrêt ne produiront pas intérêts ;

Que la capitalisation des intérêts sera, au besoin, ordonnée dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Sur la remise de documents sociaux et l'astreinte :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'ordonner au liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO de remettre à M. [T] un bulletin de salaire récapitulatif, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Qu'une astreinte sur ce point n'étant toutefois pas nécessaire, il y a lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur la garantie de l'AGS :

Considérant qu'il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Orléans qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points et de condamner la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, à payer à M. [T] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par l'AGS CGEA d'Orléans,

Infirme le jugement attaqué sauf en ce qu'il statue sur l'exception d'incompétence, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, l'indemnité légale de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le rappel de salaire pour la période d'août 2018 au 11 décembre 2019 et les congés payés afférents, la prime d'habillage, l'astreinte,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société EXPRESS AUTO la créance de M. [V] [X] [T] aux sommes suivantes :

- 8 270 67 euros à titre de rappel de salaire de base du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 et 827,07 euros au titre des congés payés afférents,

- 19 534,49 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 22 novembre 2017 au 3 août 2018 et 1 953,45 euros au titre des congés payés afférents,

- 9 426 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

Rappelle que les créances de nature salariale portent intérêts légaux à compter de la date de réception par la société EXPRESS AUTO de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et jusqu'au 28 novembre 2019 et que les créances de nature indemnitaire allouées par le présent arrêt ne produisent pas intérêts,

Ordonne au besoin la capitalisation des intérêts légaux dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne à la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, de remettre à M. [V] [X] [T] un bulletin de salaire récapitulatif, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Orléans qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et déclare que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

Condamne la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, à payer à M. [V] [X] [T] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SCP Olivier Zanni, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EXPRESS AUTO, aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/00419
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;21.00419 ?
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