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04/01/2023 | FRANCE | N°21/01105

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 04 janvier 2023, 21/01105


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JANVIER 2023



N° RG 21/01105



N° Portalis DBV3-V-B7F-UOBF



AFFAIRE :



Association ASSOCIATION SPORTIVE FONTENAISIENNE



C/



[X] [P]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Mars 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOULOGNE-BILLANCOURT

N° Section : AD
r>N° RG :



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Sophie GHENASSIA



la SELARL MAUGER MESBAHI ASSOCIES







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TRO...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JANVIER 2023

N° RG 21/01105

N° Portalis DBV3-V-B7F-UOBF

AFFAIRE :

Association ASSOCIATION SPORTIVE FONTENAISIENNE

C/

[X] [P]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Mars 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOULOGNE-BILLANCOURT

N° Section : AD

N° RG :

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Sophie GHENASSIA

la SELARL MAUGER MESBAHI ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association ASSOCIATION SPORTIVE FONTENAISIENNE

Maison des Associations

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Sophie GHENASSIA, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0767

APPELANTE

****************

Monsieur [X] [P]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Emmanuel MAUGER de la SELARL MAUGER MESBAHI ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0706

INTIME

****************

Composition de la cour :

Appelée à l'audience collégiale, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Novembre 2022, devant la cour composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

et que ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi,

Greffier lors des débats : Madame Morgane BACHE

EXPOSE DU LITIGE

[X] [P] a été engagé par l'Association Sportive Fontenaisienne (ci-après l'association) suivant un contrat de travail à durée déterminée à temps partiel à compter du 15 septembre 1998 jusqu'au 30 juin 1999 en qualité de directeur sportif de la section tennis. Les relations de travail se sont poursuivies suivant un contrat de travail à durée indéterminée.

Un premier avenant au contrat de travail a modifié la répartition des heures d'entraînement et des heures administratives. Aux termes d'un deuxième avenant, le salarié a été autorisé à exercer une activité libérale, à savoir organiser des cours de tennis à des personnes licenciées au club moyennant une redevance de 15 francs l'heure pour la saison 98/99. Aux termes d'un troisième avenant du 3 avril 2003, le salarié a été autorisé à organiser des cours collectifs et des stages aux licenciés à compter du 1er octobre 2004.

Par lettre datée du 24 juin 2010, [X] [P] a contesté les conditions d'exercice libéral imposées par l'association, ayant pour conséquence de le soustraire en partie au statut de travailleur salarié.

Par lettre datée du 12 juillet 2010, la mairie de la ville de [Localité 4] a indiqué à l'association qu'elle n'était pas autorisée à sous-louer les cours de tennis mis à sa disposition.

Aux termes d'un quatrième avenant du 1er septembre 2010, la durée mensuelle du travail du salarié a été portée à 107,5 heures et le salaire mensuel brut a été fixé à 3 500 euros.

Par lettre datée du 5 septembre 2016, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 16 septembre suivant, puis, par lettre datée du 30 septembre 2016, lui a notifié son licenciement pour insuffisance professionnelle en le dispensant d'exécution du préavis de trois mois qui lui a été rémunéré. Par lettre datée du 5 décembre 2016, le salarié, par la voie de son conseil, a contesté son licenciement.

Le 26 décembre 2016, [X] [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin de faire juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de l'association au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par jugement de départage mis à disposition le 12 mars 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le premier juge a :

- dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné l'Association Sportive Fontenaisienne à verser à [X] [P] la somme de 45 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- ordonné le remboursement par l'Association Sportive Fontenaisienne aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à [X] [P] du jour de son licenciement au jour du jugement à concurrence de six mois, dans les conditions prévues par l'article L. 1235-4 du code du travail et dit que le secrétariat greffe, en application de l'article R. 1235-2 du code du travail, adressera à la direction générale de Pôle Emploi une copie certifiée conforme du jugement en précisant si celui-ci a fait ou non l'objet d'un appel,

- débouté les parties de toutes les autres demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné l'Association Sportive Fontenaisienne à verser à [X] [P] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le 12 avril 2021, l'Association Sportive Fontenaisienne a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 14 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, l'Association Sportive Fontenaisienne demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement, statuant à nouveau, de déclarer le licenciement pour insuffisance professionnelle fondé, de débouter en conséquence [X] [P] de l'ensemble de ses demandes et de condamner celui-ci à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 20 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, [X] [P] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'infirmer sur le montant des dommages et intérêts alloués, de condamner l'Association Sportive Fontenaisienne à lui payer les sommes suivantes :

* 85 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 22 novembre 2022.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement pour insuffisance professionnelle notifiée au salarié, après avoir indiqué que la section tennis de l'association voit le nombre de ses adhérents diminuer chaque année alors que le nombre de licenciés tennis dans les Hauts de Seine ne cesse d'augmenter, lui reproche un manque d'attitude pro-active, des négligences et des manquements dans l'exercice de ses fonctions en énumérant les faits suivants :

- l'absence de mise en place d'une politique d'enseignement ;

- l'annulation et le report systématique des séances des enseignants absents en l'absence d'un enseignant-éducateur à l'école de tennis ;

- le non-respect du cadre de la réforme des moins de 12 ans initiée par la Fédération française de tennis, en ne mettant pas en place des journées 'jeu, set et match' sanctionnant l'obtention de 'poignets de couleurs' des élèves, des passages de tests à l'entrée de l'école de tennis et d'examen type 'passage de balles' et de tournois défis entre les jeunes qui ont dû être organisés à l'initiative d'autres professeurs ;

- sa non participation ni assistance au tournoi du club ;

- le non-envoi chaque fin de mois au comité directeur d'un rapport d'activité détaillé ;

- une défaillance en sa qualité de tuteur dans l'encadrement et la formation d'un stagiaire, M. [Y] [J].

L'association soutient que les différents griefs reprochés au salarié au titre de l'insuffisance professionnelle sont établis, que le licenciement repose ainsi sur une cause réelle et sérieuse et conclut donc au débouté de la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié fait valoir que l'insuffisance professionnelle qui lui a été reprochée n'est pas fondée en relevant son ancienneté professionnelle de 18 ans au cours de laquelle ses attributions contractuelles ont été substantiellement les mêmes et réclame en conséquence une somme de 85 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

L'insuffisance professionnelle qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

L'insuffisance professionnelle, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute.

La cour relève à titre liminaire qu'aucune des pièces produites ne se rapporte à l'évaluation des compétences professionnelles du salarié et qu'il n'est d'ailleurs dans aucune des conclusions fait de référence à un quelconque dispositif d'évaluation objective du salarié dans l'exercice de ses missions professionnelles.

Pour chaque grief énuméré dans la lettre de licenciement, les parties produisent chacune de nombreuses attestations de responsables de l'association, d'enseignants et d'élèves ainsi que de très nombreux échanges de courriels et écrits professionnels. La lecture de ces pièces met en évidence des appréciations contrastées quant à l'engagement professionnel du salarié au sein de l'association de la part tant de responsables de l'association que d'élèves, ce qui conduit la cour à nuancer les appréciations de nature subjective portées sur les qualités professionnelles du salarié par chaque partie.

S'agissant de l'absence de mise en place d'une politique d'enseignement

Le dernier avenant au contrat de travail du salarié indique qu'en sa qualité de responsable pédagogique de l'école de tennis, celui-ci est chargé de définir en étroite collaboration avec le président et le comité directeur de l'association les objectifs de chacun des cours, les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés et de fixer les modalités de l'évaluation annuelle de chaque élève par niveau, qu'en sa qualité de responsable et conseiller pédagogique des enseignants de l'école de tennis et du mini-tennis, il est chargé de définir les objectifs à atteindre par chacun des enseignants en fonction des cours qui lui sont confiés et de veiller au respect de la politique d'enseignement mise en place et qu'il s'engage à assurer personnellement le suivi de ces enseignants et le respect des directives sportives.

Critiquant la portée probante des pièces produites par le salarié, l'association soutient que celui-ci ne justifie par aucune pièce de la mise en place d'une politique d'enseignement et que cette insuffisance professionnelle s'est avérée d'autant plus préjudiciable que la section tennis a vu le nombre de ses adhérents diminuer alors que le nombre de licenciés dans les Hauts de Seine n'a cessé d'augmenter.

Le salarié produit en pièce 7 e) un ensemble de courriels et de documents illustrant selon lui son action en la matière, en relevant qu'il a formé plusieurs stagiaires qui sont depuis enseignants au sein de l'association, qu'il était à l'écoute des questions de ses stagiaires et organisait notamment des réunions pédagogiques de rentrée avec les enseignants et que les simulations effectuées ont fait l'objet d'un film mis en ligne sur internet. Il produit encore de nombreux courriels professionnels échangés avec les responsables de l'association, intervenus pour la plupart entre 2014 et jusqu'à son licenciement pour illustrer les différentes actions entreprises dans le cadre de la politique d'enseignement qu'il lui revenait de mettre en oeuvre.

En premier lieu, s'il ressort des échanges de courriers entre l'association et la ligue de tennis des Hauts de Seine datés des 30 novembre et 16 décembre 2015, pour la période comprise entre 2006 et 2015 une diminution de 32,8% des licenciés de l'association et une augmentation de 14,9 % des licenciés de la ligue des Hauts de Seine, la cour relève toutefois que le salarié a adressé le 7 juillet 2015 à M. [V] [A], alors vice-président de l'association, un document intitulé 'fonctionnement du club sur les 15 dernières années' mettant en exergue la baisse du nombre des licenciés de l'association passant de 980 en 2011 à 580, alors que l'équipe pédagogique et les infrastructures sont restées inchangées, indiquant notamment qu'entre 1998 et 2011 les dirigeants du club s'étant succédés avaient favorisé la pratique organisée du tennis loisir adultes et jeunes entraînant le doublement de la population de l'association pendant cette période mais qu'à partir de 2011, les créneaux pour la pratique libre avaient diminué au profit de la compétition entraînant la diminution du temps de jeu des adhérents, que le prix des cours adultes avait augmenté entraînant en une saison la diminution de la moitié des élèves adultes de l'école, que le club avait embauché des moniteurs plutôt que des aides moniteurs dont le coût professionnel est plus de deux fois plus cher, qu'il n'avait plus été invité aux réunions du comité, que les stages de 2011 à Noël 2013 avaient été annulés alors qu'il avait demandé à les encadrer et que la démission brutale de l'ensemble du bureau en 2014 avait eu un effet dévastateur sur la fidélisation des adhérents. Ces éléments ne peuvent pas être écartés afin d'expliquer au moins pour partie la chute du nombre des licenciés au sein de l'association.

Aucune des pièces soumises à l'appréciation de la cour n'établit la responsabilité directe et exclusive du salarié dans l'exercice de ses missions professionnelles dans la diminution du nombre de licenciés de l'association pendant la période considérée.

En tous les cas, il n'est pas démontré un lien de causalité entre l'inaction alléguée du salarié dans le cadre de la politique d'enseignement qu'il avait pour mission de définir et le nombre d'inscriptions à l'association.

Par ailleurs, les pièces produites par le salarié détaillent notamment la formation et le suivi pédagogique des enseignants de l'association issus de la formation du centre d'entraînement aux compétitions du club, dont la plupart ont été formés par le salarié, à savoir [S] [F], [G] [E] et [B] [Z].

Ces documents indiquent que pour l'année 2015/2016, les enseignants ont été convoqués à une réunion pédagogique de rentrée à l'initiative du salarié qui souhaitait la mise en place d'un tronc commun qui servirait d'outil pédagogique et qu'un outil pédagogique, constitué par des vidéos mises en ligne sur 'You Tube' à destination de tous les enseignants, a été élaboré consécutivement à cette réunion pédagogique et leur permet d'avoir un bagage technique à transmettre aux élèves.

La réalité de ces actions qui ne sont pas remises en cause par l'association témoigne de ce que le salarié n'est pas resté inactif dans la mise en place d'une politique d'enseignement au sein de l'association.

Dans ces conditions, ce premier grief sera écarté.

S'agissant de l'annulation et du report systématique des séances des enseignants absents en l'absence d'un enseignant-éducateur à l'école de tennis

Le dernier avenant au contrat de travail du salarié indique que : 'si un enseignant est dans l'impossibilité d'assurer son cours, il doit informer M. [P] de son absence au moins 48 heures à l'avance, laissant à M. [P] le temps de trouver un remplaçant ou d'assurer lui-même le cours. Tout manquement à cette obligation devra être signalée au président ou au comité directeur'.

Critiquant la portée probante des pièces produites par le salarié, l'association indique que le salarié n'a jamais signalé un quelconque manquement à ce principe par l'un des professeurs de l'école de tennis, que pour autant, en l'absence d'un professeur, les cours étaient systématiquement annulés et reportés au détriment du maintien des cours et des plannings dans l'intérêt des élèves.

Le salarié explique que le report des cours s'expliquait essentiellement par des raisons climatiques, par temps de pluie, de verglas ou neige, les terrains étant impraticables, qu'il organisait des réunions avec ses enseignants pour déterminer le nombre de cours à rattraper, qu'en cas de nombreuses annulations de cours par un enseignant, une journée de stage était offerte aux jeunes concernés, que les enseignants organisaient entre eux leurs remplacements.

La cour relève en premier lieu que l'association ne fournit pas d'exemples précis et datés d'annulation et de report de cours dans les conditions visées par les stipulations contractuelles, c'est-à-dire en cas d'information au salarié au moins 48 heures à l'avance par un enseignant de l'impossibilité d'assurer son cours, à l'occasion desquels le salarié n'aurait pas trouvé un remplaçant ou assuré lui-même le cours et aurait annulé et reporté le cours.

En outre, il ressort des pièces produites par le salarié que celui-ci organisait avec les enseignants le rattrapage des cours annulés par les enseignants en juin et que les enseignants s'organisaient entre eux pour se remplacer.

L'association ne fait pas état de pièce manifestant son insatisfaction sur cette manière de procéder ni sur un rappel à l'ordre délivré au salarié sur ce point.

Dans ces conditions, ce grief sera écarté.

S'agissant du non-respect du cadre de la réforme des moins de 12 ans initiée par la Fédération française de tennis

Le dernier avenant au contrat de travail du salarié stipule que l'examen 'passage de balles' 'doit être assuré au moins une fois par an' et que le salarié 'doit s'occuper d'organiser et d'animer plusieurs tournois défis entre les jeunes dont il est responsable : fête de Noël et fête de fin d'année sportive'.

Critiquant la portée des pièces produites par le salarié pour justifier avoir organisé des tournois un ou deux ans avant son licenciement, l'association fait valoir que le salarié n'a pas mis en place des journées 'jeu, set et match' sanctionnant l'obtention de 'poignets de couleurs' des élèves, ni de tournois défis entre les jeunes au cours de l'année 2015-2016, ceux-ci ayant dû être organisés par Mme [E], membre du bureau et Mme [C], responsable administrative de la section tennis et les autres professeurs, ni les passages de tests à l'entrée de l'école de tennis et d'examen type 'passage de balles'.

Le salarié fait valoir qu'il a mis en place la fête du tennis et des stages, que deux animations n'ont pu avoir lieu en raison du refus d'un des membres du bureau de réserver les terrains, que la mise en place des journées 'jeu, set et match' a été compromise pour des raisons de budget, qu'il a proposé une nouvelle animation 'amène ton copain' permettant à un jeune joueur licencié de venir en compagnie d'un ami non licencié afin d'accroître le nombre d'inscriptions, pour les licenciés pour la saison 2016/2017.

Alors que la lettre de licenciement ne comporte aucun fait précis et daté se rapportant au grief tenant à l'absence d'organisation de tournois, l'association ne peut sérieusement reprocher au salarié de se justifier de l'organisation de tournois en 2014 et 2015. Il ressort des courriels produits par le salarié devant la cour qu'effectivement, des tournois ont été organisés sous l'égide du salarié.

Par ailleurs, il ressort d'une lettre datée du 7 avril 2014 que l'association a reproché au salarié d'avoir organisé une animation le dimanche 16 mars 2014 sans en référer à ses supérieurs hiérarchiques, ce qui contredit l'allégation selon laquelle celui-ci serait resté inactif.

Il ressort des courriels et pièces produites par le salarié que s'agissant des enfants, il a été mis en place en 2015 la fête du tennis et des stages de tennis, que le salarié a tenté d'organiser les journées 'jeu, set et match' répondant à la réforme des moins de douze ans, mais que les enseignants réclamaient une rémunération symbolique pour cette animation au moins à la hauteur du prix du déplacement alors que l'association indique elle-même que la mise en place de ces journées devait s'organiser aux créneaux habituels de l'école de tennis et ne réclamait aucune rémunération supplémentaire pour les enseignants (attestation de Mme [C]), que s'agissant de la saison 2016/2017, le salarié avait prévu avec les enseignants notamment une nouvelle animation 'amène ton copain '.

Il en résulte qu'il ne peut être déduit de l'absence d'organisation de la journée 'jeu, set et match' une insuffisance professionnelle du salarié au regard des explications qu'il a fournies, que le salarié n'est pas resté inactif quant aux animations à prévoir pour les enfants, que l'association ne produit pas d'élément en faveur d'une insuffisance professionnelle du salarié dans l'absence d'organisation des passages de tests à l'entrée de l'école de tennis et d'examen type 'passage de balles'. La cour relève notamment qu'elle n'a pas adressé de demande d'explication au salarié sur les défaillances qu'elle lui impute avant le licenciement. Dans ces conditions, ce grief ne peut être tenu pour établi.

S'agissant de la non participation ni de l'assistance du salarié au tournoi du club

Alors que l'association indique que la défaillance du salarié dans l'organisation du tournoi et son absence à cet événement majeur pour la vie du club caractérisent une mauvaise volonté de sa part, ce grief ne permet pas de fonder une insuffisance du salarié à ses obligations professionnelles.

S'agissant du non-envoi chaque fin de mois au comité directeur d'un rapport d'activité détaillé

L'association fait valoir que le salarié n'a pas adressé chaque mois au comité directeur un rapport d'activité conforme à la demande qui lui était faite malgré ses rappels.

Le salarié réplique qu'il a toujours rendu les feuilles de présence et informé le président des actions à venir par email mensuel.

Le dernier avenant au contrat de travail du salarié prévoit que celui-ci 'doit remettre impérativement chaque fin de mois au comité directeur un rapport indiquant la présence des enfants aux séances de l'école de tennis, le nom des moniteurs et éducateurs ayant assuré les cours, le planning de travail à venir précisant ses heures de présence, les dates des cours et le nom des enfants (...)'.

Il ressort d'une lettre datée du 7 avril 2014 que l'association a rappelé au salarié son obligation contractuelle de remise de rapports d'activité mensuelle et les informations qu'ils doivent contenir en l'invitant à se conformer à cette demande.

Le salarié produit des exemples de rapports d'activité adressés par courriels à sa hiérarchie entre mai 2014 et septembre 2016 dont il ressort qu'il a adressé des rapports succincts à sa hiérarchie mensuellement, sans toutefois que ne soient produits les feuilles de présence correspondantes et les plannings à venir. Il ressort cependant des courriels produits qu'en 2014, il indique déposer les feuilles de présence dans le bureau du club et le 2 novembre 2014 que les feuilles de présence des élèves et des moniteurs se trouvent 'sur le document Gmail (drive) que nous avons fait parvenir à M. [M]', puis il indique les 4 février, 1er avril, 2 mai, 31 mai, 1er juillet 2015 que les feuilles de présence des élèves et des moniteurs sont présentes sur 'le document Drive dans la boîte gmail créée pour l'Asf en début d'année' et le 10 juin 2016 qu'il n'a pas réussi à rentrer les feuilles de présences de ses élèves sur l'Adsl, ce qui lui est confirmé le même jour par [I] [C] qui lui précise que pour les feuilles de rattrapages, les feuilles de présence ne sont pas accessibles sur l'Adsl. Si les rapports d'activité du salarié ne répondaient pas totalement au degré d'exigence souhaité par l'association, le salarié a cependant adressé des rapports d'activité. Ce grief ne revêt pas un caractère sérieux.

S'agissant de la défaillance du salarié en qualité de tuteur dans l'encadrement et la formation d'un stagiaire

Le dernier avenant au contrat de travail du salarié prévoit : 'en sa qualité de responsable pédagogique, il encadre et assure la formation des stagiaires en sa qualité de tuteur lors de ses heures d'entraînement'.

Il ressort des pièces produites aux débats et des explications des parties que [Y] [J], stagiaire encadré par le salarié, s'est plaint de la qualité de son stage sans cependant produire d'écrit, ainsi qu'il ressort d'une lettre adressée à l'association et produite par celle-ci, datée du 27 juillet 2016 aux termes de laquelle il indique : 'Lorsque je suis venu à l'Asf au mois de mai pour apporter un justificatif de mutuelle, j'ai eu un entretien avec M. [W] [M] au sujet de ma formation BPJEPS tennis où différents points concernant l'accompagnement pédagogique ont été abordés. Compte tenu de certaines difficultés rencontrées dans le suivi du tutorat, il m'a alors été proposé de formuler mes dires par écrit. Au final, je n'ai pas souhaité produire d'écrit'.

Il ressort encore d'échanges de textos entre le salarié et M. [J] intervenus en juin 2016 que les circonstances dans lesquelles l'association aurait demandé à M. [J] de produire un écrit relatant ses difficultés ne sont pas claires et qu'en définitive, M. [J] a fait part au salarié de son interprétation de cette démarche qui aurait été faite selon lui dans le but d'évincer le salarié du club et lui a écrit le 14 juin 2016 : 'Il faut que tu restes'.

Dans ces conditions et alors qu'aucune précision quant à la défaillance du salarié dans l'encadrement et la formation de M. [J] n'est apportée par l'association, ce grief n'est pas établi.

Il résulte de tout ce qui précède que le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse, ainsi que le conseil de prud'hommes l'a retenu.

Le salarié est par conséquent fondé en sa demande d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'association produit des copies d'écran de ses déclarations auprès de l'Urssaf en 2016 et 2017 dont il ressort que l'effectif global de l'entreprise était de neuf salariés.

Dans la mesure où l'entreprise employait habituellement moins de onze salariés, le salarié, en application de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, peut prétendre au vu du licenciement abusif à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Né en février 1965, [X] [P] était âgé de 51 ans au moment du licenciement et présentait une ancienneté de dix-huit années complètes au sein de l'entreprise. Son salaire de référence s'élevait à 3 552,26 euros. Il justifie de son inscription et de son indemnisation par Pôle emploi. Il indique avoir été contraint, à la suite de son licenciement, de déménager en Seine-Maritime où le coût de la vie est moindre et vivre en assurant des heures d'enseignement dans un club de tennis pour 600 euros par mois. Il produit un contrat de travail à durée indéterminée intermittent signé le 11 septembre 2017 stipulant un emploi d'entraîneur de tennis dont l'avenant du 3 septembre 2021 prévoit une durée annuelle minimale de travail de 672 heures.

Au vu de ces éléments, il lui sera alloué une indemnité pour licenciement abusif d'un montant de 45 000 euros à la charge de l'association. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le préjudice moral

Le salarié forme une demande d'indemnisation au titre d'un préjudice moral causé par la rupture.

Il fait valoir que son préjudice a été accentué par la résistance de l'association dans l'exécution du jugement revêtu de l'exécution provisoire, le contraignant à avoir recours à un huissier pour poursuivre l'exécution forcée puis à être assigné par l'association devant le juge de l'exécution

Il ressort du jugement rendu par le juge de l'exécution le 3 mars 2022 que la demande de dommages et intérêts formée par l'association à son encontre a été rejetée.

Le salarié ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui causé par la rupture abusive, déjà indemnisé.

Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées au salarié

En application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans la mesure où l'association justifie employer habituellement moins de onze salariés, il convient de dire qu'il n'y a pas lieu à faire application des dispositions sus-mentionnées et d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné le remboursement aux organismes concernés par l'association des indemnités de chômage versées au salarié à concurrence de six mois.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

L'association qui succombe en ses prétentions d'appel sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer au salarié la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement en ce qu'il a ordonné le remboursement par l'Association Sportive Fontenaisienne aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à [X] [P] du jour de son licenciement au jour du jugement à concurrence de six mois, dans les conditions prévues par l'article L. 1235-4 du code du travail et dit que le secrétariat greffe, en application de l'article R. 1235-2 du code du travail, adressera à la direction générale de Pôle Emploi une copie certifiée conforme du jugement en précisant si celui-ci a fait ou non l'objet d'un appel,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,

CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE l'Association Sportive Fontenaisienne aux dépens d'appel,

CONDAMNE l'Association Sportive Fontenaisienne à payer à [X] [P] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/01105
Date de la décision : 04/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-04;21.01105 ?
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