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14/12/2022 | FRANCE | N°20/02514

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 14 décembre 2022, 20/02514


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 DÉCEMBRE 2022



N° RG 20/02514

N° Portalis DBV3-V-B7E-UESU



AFFAIRE :



SCM CABINET DE CARDIOLOGIE [6]

...



C/



[Z] [F] épouse [E]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 9 octobre 2020 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de CERGY PONTOISE

Section : ADr>
N° RG : F 18/00480



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Bruno COURTINE



Me Véronique PELISSIER



Copie numérique adressée à :



Pôle Emploi







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 DÉCEMBRE 2022

N° RG 20/02514

N° Portalis DBV3-V-B7E-UESU

AFFAIRE :

SCM CABINET DE CARDIOLOGIE [6]

...

C/

[Z] [F] épouse [E]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 9 octobre 2020 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de CERGY PONTOISE

Section : AD

N° RG : F 18/00480

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Bruno COURTINE

Me Véronique PELISSIER

Copie numérique adressée à :

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE DÉCEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCM CABINET DE CARDIOLOGIE [6]

N° SIRET : 810 427 906

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Bruno COURTINE de la SELEURL Société d'Exercice libéral d'Avocat ALLOULU, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J094,

SARL CARDILEC

N° SIRET : 324 769 678

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Bruno COURTINE de la SELEURL Société d'Exercice libéral d'Avocat ALLOULU, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J094

APPELANTES

****************

Madame [Z] [F] épouse [E]

née le 19 octobre 1960 à [Localité 8] (60)

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Véronique PELISSIER de la SELARL CABINET PELISSIER, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 93

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [E] a été engagée par la société Cardilec, en qualité de standardiste et hôtesse d'accueil, par contrat de travail verbal à durée indéterminée à temps partiel, à compter du 27 juillet 2011, puis à temps plein à partir du mois de novembre 2015.

La société Cardilec est un cabinet médical et centre d'explorations cardio-vasculaires réservé aux examens de cardiologie. Elle emploie moins de 10 salariés et applique la convention collective nationale des cabinets médicaux.

Par lettre du 10 novembre 2017, la salariée a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 20 novembre 2017, avec mise à pied à titre conservatoire.

Elle a été licenciée par lettre du 5 décembre 2017 pour faute grave dans les termes suivants :

« Pour mémoire, vous avez été engagée par la société Cardilec ' centre dédié aux examens de cardiologie ' le 25 juillet 2011 pour exercer les fonctions de standardiste et d'accueil.

Comme vous le savez, les trois assistantes de Cardilec ' Mesdames [G] et [M] [Y] et Madame [V] ' sont en charge de recevoir les règlements des patients et, lorsque ces règlements interviennent en espèces, de les placer dans une enveloppe fermée en y indiquant le nom du médecin concerné, le montant ainsi que la mention « espèces » puis de ranger l'enveloppe dans une boite fermée à clef, dans une armoire également fermée à clef, située derrière votre poste de travail. Seuls les médecins et les salariés de Cardilec ont accès aux clefs de cette boite et de cette armoire, lesquelles se trouvent dans un tiroir de votre bureau.

A plusieurs reprises au cours des derniers mois, les autres médecins et moi-même avons constaté que des enveloppes contenant des espèces qui avaient été placées dans la boite destinée à cet effet, avaient disparu, ce qui a accru notre vigilance.

Le 31 octobre 2017, juste avant 18 heures, vous êtes venue dans le bureau de Madame [V] récupérer les règlements du jour (à savoir des chèques ainsi qu'une enveloppe fermée déposée par Monsieur [O] contenant 110 euros en espèces pour le Docteur [P]). Or, peu de temps après votre départ, Mesdames [G] [Y] et [V] ont constaté que l'enveloppe d'espèces destinées au Docteur [P] avait disparu alors même que ce médecin était en congés.

Le 2 novembre 2017 à midi, en présence de Mesdames [G] et [M] [Y], Madame [V] a placé, dans la boite destinée à cet effet une enveloppe en espèces de Madame [A], à l'attention du Docteur [P], d'un montant de 110 euros. Elles sont ensuite toutes parties déjeuner. Au retour de Mesdames [Y], à 14 heures, alors que vous étiez déjà à votre poste de travail, celles-ci ont constaté que cette enveloppe avait disparu. Elles ont interrogé le Docteur [P] qui a confirmé ne pas avoir récupéré d'enveloppe à son attention. Elles ont alors constaté que cette enveloppe se trouvait dans votre sac. Elles ont préféré ne rien faire en mon absence et m'ont alerté à mon retour de congés le 6 novembre 2017.

Le 9 novembre 2017 à 11h30, Madame [V] a placé dans la boite destinée à cet effet une enveloppe contenant 77 euros pour le Docteur [N], en règlement d'un examen réalisé sur M. [T], dont j'ai moi-même constaté la présence vers 12h45. En début d'après-midi, alors que vous étiez la seule présente au sein de l'entreprise avec moi-même, j'ai constaté que cette enveloppe avait disparu.

Le jour même, je vous ai convoquée en réunion, ainsi que Mesdames [Y] [G] et [M], en présence du Docteur [N]. J'ai alors indiqué que nous avions remarqué que des enveloppes contenant des espèces avaient régulièrement disparu et je vous ai demandé à toutes les trois si vous acceptiez que nous contrôlions le contenu de vos sacs à main. Vous avez accepté et chacune sortit le contenu de votre sac. Pour votre part, vous avez sorti un grand tas d'enveloppes, en prenant soin de les placer à l'envers. Lorsque j'ai insisté pour voir une par une, vous les [avez] fait défiler très rapidement, particulièrement les premières du tas. Je vous ai alors demandé de les retourner et il s'est avéré que l'un des premières enveloppes du tas portait les mentions suivantes : M. [T], Docteur [N], 77 euros espèces.

Lorsque je vous ai fait part, lors de l'entretien préalable, des faits qui vous étaient reprochés, vous avez tout d'abord répondu qu'il devait s'agit d'un complot à l'initiative de Mesdames [Y] qui souhaitaient que leur s'ur soit embauchée à votre place.

Or, ainsi que je vous l'ai indiqué lors de l'entretien préalable, Madame [V] a également été témoin de la disparition d'une enveloppe.

Je vous ai également précisé que Mesdames [Y] et [V] n'étaient pas présentes lorsque j'ai constaté l'absence de l'enveloppe destinée au Docteur [N] le 9 novembre 2017.

Déstabilisée, vous avez alors soutenu que j'avais moi-même dû placer cette enveloppe dans votre sac.

Je vous ai ensuite rappelé que j'étais en congés les 31 octobre et 2 novembre 2017, lors de la disparition de deux autres enveloppes, et que je n'avais aucun intérêt à vous voir partir, ce d'autant que le fonctionnement de l'entreprise a été fortement perturbé du fait de votre mise à pied.

Dans ces conditions, je vous confirme que les explications que vous avez fournies lors de l'entretien préalable, n'ont pas permis de modifier mon appréciation des faits.

Le contrat de travail qui vous lie à la société Cardilec est fondé sur une relation de confiance mutuelle. Par les agissements précités, vous y avez gravement porté atteinte.

Ces faits d'une particulière gravité rendent manifestement impossible la poursuite de notre collaboration même pendant la durée du préavis. C'est pourquoi je suis contraint de vous notifier votre licenciement pour faute grave, lequel prend effet immédiatement. »

Parallèlement, Mme [E] a été engagée en qualité de femme de ménage, par contrat de travail verbal à temps partiel à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 2010 par la SCM Cabinet de Cardiologie Carnot, dont, par suite de sa dissolution, le gérant a créé la SCM Cabinet de Cardiologie [6].

Cette société, composée des mêmes associés que la société Cardilec au sein de laquelle la salariée exerçait les fonctions de standardiste et d'accueil, est un cabinet de consultation médicale spécialisé dans le domaine de la cardiologie. Elle emploie moins de 10 salariés et applique la convention collective nationale des cabinets médicaux.

La salariée a accepté un nouveau contrat de travail écrit à temps partiel, en qualité de femme de ménage, à compter du 18 mars 2015 au nom de cette nouvelle société.

La salarié percevait une rémunération brute mensuelle de 578,53 euros.

Par lettre du 9 février 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 16 février 2018, avec mise à pied à titre conservatoire.

Elle a été licenciée par lettre du 27 février 2018 pour faute grave dans les termes suivants :

« Je fais suite à l'entretien préalable qui s'est tenu le mardi 16 février 2018 au cours duquel vous étiez assistée de votre mari et vous notifie, par la présente, votre licenciement pour faute grave.

Pour mémoire, vous exercez les fonctions de femme de ménage au sein de la société cabinet de cardiologie [6], composée des mêmes associés que la société Cardilec au sein de laquelle vous exerciez les fonctions de standardiste et d'accueil.

Les agissements qui vous ont été reprochés dans le cadre de vos fonctions au sein de la société Cardilec ' à savoir l'appropriation, à plusieurs reprises, d'enveloppes d'espèces destinées aux médecins intervenant au sein de cette structure ' ont créé un trouble caractérisé au sein du Cabinet de Cardiologie [6] et nous ont fait perdre toute confiance à votre égard, ce qui nous a conduit à envisager votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Nous avons depuis lors, découvert de nouveaux faits d'une particulière gravité.

Constatant que le cabinet était particulièrement poussiéreux et que le ménage était négligé, nous avons sollicité, au début du mois de février 2018, les rapports d'activité du cabinet auprès de notre entreprise de sécurité et avons constaté que vous n'effectuiez, en réalité qu'une heure à une heure trente de travail par jour et ce, depuis de nombreuses semaines.

Pourtant, vous n'êtes pas sans savoir que votre temps de travail est fixé contractuellement à 12 heures hebdomadaires réparties deux heures par jour, du lundi au samedi.

De tels agissements dénotent le peu de considération que vous avez à l'égard de vos obligations professionnelles.

Par ailleurs, le 2 février 2018, alors que le cabinet était fermé à la patientèle, vous avez fait introduire votre mari au sein du cabinet et avez tous deux proféré des propos injurieux à mon égard et à l'encontre de mon associé, le docteur [K], nous traitant, notamment, de « salopards », « connards » et de « couilles molles ».

Vous avez, en outre, proféré des insultes à caractère raciste visant deux de vos anciennes collègues les traitant de « putes portugaises ».

Lors de l'entretien préalable, vous n'avez eu de cesse de m'interrompre et de tenter d'écourter notre discussion en indiquant que vous étiez attendue pour un entretien d'embauche. La présence de votre mari lors de cet entretien ' alors même que la lettre de convocation ne prévoyait pas une faculté d'assistance par votre conjoint ' confirme votre volonté d'intimidation à mon égard.

S'agissant des griefs que je vous ai exposés et, tout d'abord, du trouble généré par vos agissements commis au sein de la société Cardilec, vous vous êtes contentée de nier lesdits agissements.

En ce qui concerne vos horaires de travail, vous avez rétorquée être engagée « au forfait », laissant entendre que vous n'étiez pas tenue d'accomplir vos deux heures de travail quotidiennes.

Vous avez, par ailleurs, reconnu avoir fait introduire votre mari le 2 février 2018 au sein du cabinet, tout en niant avoir proféré des injures et insultes à caractère raciste.

Dans ces conditions, je vous confirme que les explications que vous avez fournies, lors de l'entretien préalable, n'ont pas permis de modifier mon appréciation des faits.

Le contrat de travail qui vous lie à la société Cabinet de Cardiologie [6] est fondé sur une relation de confiance mutuelle. Par les agissements précités, vous y avez gravement porté atteinte.

Ces faits d'une particulière gravité rendent manifestement impossible la poursuite de notre collaboration même pendant la durée du préavis. C'est pourquoi, je suis contraint de vous notifier votre licenciement pour faute grave, lequel prend effet immédiatement. »

Le 3 décembre 2018, Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise à l'encontre de ses deux employeurs pour dire ses licenciements sans cause réelle et sérieuse, obtenir le paiement des rappels de salaire sur mise à pied ainsi que d'autres sommes de nature indemnitaire.

Par un premier jugement du 9 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise (section activités diverses) a :

- déclaré Mme [E] recevable et bien fondée dans ses demandes,

- fixé la moyenne des salaires à 2 620,69 euros,

- dit le licenciement de Mme [E] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Cardilec à verser à Mme [E], avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement, les sommes suivantes :

. 18 000 euros nets au titre des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, . 5 214,95 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

. 521,49 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 4 313,91 euros net au titre de l'indemnité de licenciement légale,

.1687,14 euros bruts au titre du paiement de la mise à pied conservatoire du 11 novembre 2017 au 6 décembre 2017,

. 168,71 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 1 500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation par la partie défenderesse en ce qui concerne les créances salariales et à compter du jugement en ce qui concerne les créances indemnitaires,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- ordonné la remise des bulletins de salaire de l'attestation Pôle emploi et d'un reçu pour solde tout compte conforme aux textes en vigueur et à la décision rendue,

- ordonné le remboursement, par la société Cardilec, à l'organisme concerné du montant des indemnités de chômage éventuellement servies,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- débouté Mme [E] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Cardilec de sa demande reconventionnelle,

- mis les entiers dépens de l'instance à la charge de la société Cardilec.

Par un second jugement du 9 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise (section activités diverses) a :

- déclaré Mme [E] recevable et bien fondée dans ses demandes,

- dit l'ancienneté de Mme [E] à compter du 1er septembre 2010,

- dit le licenciement de Mme [E] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- fixé la moyenne des salaires à 578,83 euros,

- condamné la SCM Cabinet de Cardiologie [6] à verser à Mme [E] les sommes suivantes :

. 289,27 euros bruts au titre des rappels de salaire sur mise à pied,

. 28,92 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 1 157,06 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

. 115,70 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 1 229,37 euros net au titre de l'indemnité de licenciement,

. 3 900 euros net au titre des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, . 1 000 euros net au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation par la partie défenderesse en ce qui concerne les créances salariales et à compter du jugement en ce qui concerne les créances indemnitaires,

- ordonné la remise des bulletins de salaire, de l'attestation Pôle emploi et d'un reçu pour solde tout compte conformes aux textes en vigueur et à la décision rendue,

- ordonné le remboursement, par la SCM Cabinet de Cardiologie [6], à l'organisme concerné du montant des indemnités de chômage éventuellement servies,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- débouté la SCM Cabinet de cardiologie [6] de sa demande reconventionnelle,

- mis les entiers dépens de l'instance à la charge de la SCM Cabinet de Cardiologie [6].

Par déclarations adressées au greffe le 11 novembre 2020, la société Cardilec et le Cabinet de Cardiologie [6] ont interjeté appel de ces deux jugements.

Initialement enrôlés sous des numéros de RG distincts, (RG n° 20/2514 et RG 20/2515) les deux affaires ont fait l'objet d'une ordonnance de jonction sous le seul numéro de RG 20/02514.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 5 juillet 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 8 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Cardilec et le Cabinet de Cardiologie [6] demandent à la cour de :

à titre principal,

- dire que le licenciement de Mme [E] est justifié et qu'il repose sur une faute grave tant en ce qui concerne la société Cardilec que le Cabinet [6],

en conséquence,

- infirmer en toutes leurs dispositions les deux jugements rendus par le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise le 9 octobre 2020 sauf en ce qu'il a débouté Mme [E] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire,

- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- dire que le licenciement de Mme [E] repose sur une cause réelle et sérieuse tant en ce qui concerne la société Cardilec que le Cabinet [6],

en conséquence,

- débouter Mme [E] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

à titre infiniment subsidiaire,

- fixer le salaire de référence de Mme [E] au sein de la société Cardilec à 2 478 euros bruts,

- limiter la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de Mme [E] à 3 mois de salaire soit 7 434 euros et, à tout le moins,

- ramener cette demande à de bien plus justes proportions en ce qui concerne la société Cardilec,

- réduire la demande de dommages et intérêts de Mme [E] à de plus justes proportions et en tout état de cause, à l'indemnité maximale prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail en ce qui concerne le Cabinet [6],

en tout état de cause,

- débouter Mme [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile tant en ce qui concerne la société Cardilec que le Cabinet [6],

- condamner Mme [E] à verser à la société Cardilec la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [E] à verser au Cabinet [6] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [E] aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [E] demande à la cour de :

- confirmer les deux jugements rendu par le conseil de prud'hommes le 9 octobre 2020 en ce qu'ils ont dit que les licenciements sont sans cause réelle et sérieuse tant en ce qui concerne la société Cardilec qu'en ce qui concerne le Cabinet de Cardiologie [6],

- confirmer les jugements du conseil de prud'hommes en ce qu'ils ont :

. condamné la société Cardilec au versement des sommes de :

. 1 687,14 euros au titre du rappel de salaires sur mise à pied,

. 168,71 euros au titre des congés payés y afférent,

. 5 214,92 euros au titre de l'indemnité de préavis,

. 521,49 euros au titre des congés payés y afférent,

. 4 313,91 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

. condamné la société Cabinet de Cardiologie [6] au versement des sommes de : 289,27 euros à titre de rappel de salaires sur mise à pied,

. 28,92 euros au titre des congés payés y afférent,

. 1 157,06 euros au titre de l'indemnité de préavis,

. 115,70 euros au titre des congés payés y afférent,

. 1 229,37 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- dire que ces sommes porteront intérêt à compter du jour de la saisine,

- confirmer les jugements du conseil de prud'hommes en ce qu'ils ont condamné la société Cardilec au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais en fixer le quantum à 30 000 euros et la société Cabinet de Cardiologie [6] au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais en fixer le quantum à 5 000 euros,

- condamner la société Cardilec à la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement réalisé dans des conditions vexatoires,

- condamner la société Cardilec à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Cabinet de Cardiologie [6] à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que ces sommes porteront intérêts à compter du prononcé du jugement,

- dire que les sociétés Cardilec et la société Cabinet de Cardiologie [6] devront fournir les documents sociaux rectifiés en fonction des condamnations prononcées,

- condamner les sociétés Cardilec et la société Cabinet de Cardiologie [6] aux dépens.

LA COUR,

Sur la rupture du contrat de travail avec la société Cardilec

Sur le licenciement

La salariée conteste les faits qui lui sont imputés. Elle invoque l'illicéité du moyen utilisé par l'employeur pour obtenir d'elle l'ouverture de son sac à main, exposant qu'il ne peut ouvrir ou faire ouvrir les sacs appartenant aux salariés pour en vérifier le contenu qu'avec leur accord et à la condition de les avoir avertis de leur droit de s'y opposer et d'exiger la présence d'un témoin de son choix ou d'un officier de police judiciaire.

Au contraire, l'employeur considère les faits établis par les pièces qu'il verse aux débats. Il expose que le gérant de la société ' M. [K], cardiologue ' avait pris soin, avant de convoquer les salariées et de leur demander de vider le contenu de leur sac, de contacter la police qui lui a confirmé qu'il pouvait lui-même constater le vol en sa qualité d'employeur.

***

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe exclusivement à l'employeur et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier, au vu des éléments de preuve figurant au dossier, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail, et d'une gravité suffisante pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise, le doute devant bénéficier au salarié.

En l'espèce, il est reproché à la salariée d'avoir volé des enveloppes contenant de l'argent liquide destiné aux médecins de la société.

D'abord, l'employeur établit la réalité d'un contexte caractérisé par des disparitions d'enveloppes contenant de l'argent liquide correspondant aux honoraires des médecins du cabinet à une époque antérieure ou contemporaine aux faits reprochés à la salariée. Plusieurs médecins du cabinet attestent en effet : le docteur [K] ' gérant ' témoigne de « signalements par les médecins de la constatation d'absences de règlements en espèces d'explorations complémentaires effectuées au sein de Cardilec et différences comptables sans relations nettes établie jusque-là », mais également le docteur [N] qui témoigne de la disparition « en 2016, [de] 700 euros de nos consultations » qui ont « disparu de mes poches personnelles un jour où je me suis rendu à Cardilec (travail entre hôpital ' Cardilec et maison médicale) » ainsi que le docteur [P] qui atteste avoir « constaté à [son] retour de vacances le 2 novembre 2017, la disparition de deux enveloppes contenant le règlement en espèces de 110 euros chacune pour la réalisation de Holter ECG de M. [O] [U] et Mme [A] [B] à Cardilec (') ».

Ensuite, il n'est pas discuté que la salariée pouvait avoir accès aux enveloppes d'argent liquide destinées aux médecins. Lesdites enveloppes étaient en effet placées dans un coffre, ou « boîte », fermé par une clé , auxquels il n'est pas contesté que la salariée avait accès.

Enfin, il ressort des témoignages circonstanciés des collègues de travail de la salariée (Mmes [G] [Y], [M] [Y] et [V]) que :

. le matin du 2 novembre 2017, Mmes [G] et [M] [Y] ont vu Mme [V] placer « dans la boîte », une enveloppe destinée au Dr [P], contenant la somme de 110 euros en paiement d'un examen réalisé au profit d'une patiente, Mme [A]. Les témoins expliquent avoir constaté à 14h00 « à leur retour » que l'enveloppe n'y était plus et que la salariée était présente ; que Mme [G] [Y] a interrogé le Dr [P] pour savoir s'il avait récupéré l'enveloppe, ce à quoi le médecin répondait par la négative ; que les deux témoins ont constaté que l'enveloppe se trouvait dans le sac de la salariée ;

. le 9 novembre 2017, Mme [G] [Y] a vu Mme [V] déposer « dans la boîte » vers 11h30 une enveloppe destinée au Dr [N] contenant 77 euros ; qu'en début d'après-midi le Dr [K] constatait que l'enveloppe n'était pas « dans la boîte » ; qu'elle a été retrouvée le soir vers 18h00 dans le sac à main de la salariée.

Les circonstances dans lesquelles, le soir du 9 novembre 2017, l'enveloppe destinée au Dr [N] a été découverte sont caractérisées par le fait que le gérant de la société a demandé à plusieurs employées (Mmes [G] et [M] [Y] et la salariée) de vider devant lui et devant le Dr [N] le contenu de leur sac à main.

Ces investigations, même réalisées dans un but probatoire et même si elles ont été autorisées par les services de police sur sa demande, ce dont il n'est pas justifié, sont de nature à porter atteinte à la vie privée de la salariée.

Or, l'employeur ne peut apporter aux libertés individuelles ou collectives des salariés que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Il ne peut ainsi, sauf circonstances exceptionnelles, ouvrir les sacs appartenant aux salariés pour en vérifier le contenu qu'avec leur accord et à la condition de les avoir avertis de leur droit de s'y opposer et d'exiger la présence d'un témoin.

En l'occurrence, faute, pour l'employeur d'établir qu'il a averti la salariée de son droit de s'opposer à la fouille de son sac et de son droit d'exiger la présence d'un témoin de son choix, le procédé qui lui a permis de découvrir l'enveloppe litigieuse dans le sac à main de la salariée constitue un moyen de preuve illicite.

Les faits reprochés à la salariée le 9 novembre 2017 ne peuvent donc être tenus pour établis.

En revanche, il ne ressort pas des attestations de Mmes [G] et [M] [Y] qu'elles ont pu être témoins des faits du 2 novembre 2017 par suite d'une fouille du sac de la salariée. La première témoigne en effet de ce que « J'ai compris que c'était quelqun de chez nous qui l'a pris. Je constate donc que l'enveloppe ce trouvé bien dans le sac de [Z] qui ce trouve toujour à coté d'elle par terre à coté de la poubelle à l'accueil » (sic) et la seconde atteste de ce que « Mme [Y] [G] et moi-même avons constate l'absence de l'enveloppe (note de la cour : dans la boîte prévue à cet effet) nous avons constate dans le sac de [Z] qu'elle garde systématiquement près de son poste et toujours grand ouvert la presence de plusieurs enveloppe dont une ou lon pouvais voir l'écriture de [H] avec le nom du medecin. » (sic). Le fait que Mme [M] [Y] témoigne avoir vu, dans un sac « toujours grand ouvert », la présence, dans le sac à main de la salariée, d'une enveloppe qui aurait dû se trouver sous clé, exclut l'idée d'une fouille.

Par conséquent, les faits du 2 novembre 2017 n'ont pas été découverts après un procédé de preuve illicite mais au contraire fortuitement parce que le sac de la salariée était « toujours grand ouvert » et son contenu visible par les collègues de la salariée.

Or, ces faits du 2 novembre, sont établis par les attestations précises et circonstanciées de Mmes [G] et [M] [Y], corroborées pour partie par celle de Mme [V], qui atteste avoir placé, le 2 novembre, l'enveloppe contenant l'argent liquide destiné au Dr [P], dans la boîte sous clé, et par celle du Dr [P] qui confirme la disparition d'une enveloppe qui lui était destinée le 2 novembre 2017.

Les faits du 2 novembre 2017, à eux seuls, présentent une gravité suffisante pour justifier l'éviction immédiate de la salariée de l'entreprise.

Infirmant le jugement, il conviendra de dire justifié le licenciement pour faute grave de la salariée.

Le jugement sera en outre infirmé en ce qu'il a condamné la société Cardilec à payer à la salariée :

. 18 000 euros nets au titre des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 5 214,95 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

. 521,49 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 4 313,91 euros net au titre de l'indemnité de licenciement légale,

. 1 687,14 euros bruts au titre du paiement de la mise à pied conservatoire du 11 novembre 2017 au 6 décembre 2017,

. 168,71 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Il sera en outre infirmé en ce qu'il a condamné l'employeur au remboursement des indemnités versées à la salariée par Pôle emploi en application de l'article L. 1235-4 du code du travail.

Statuant à nouveau, la salariée sera déboutée de ses demandes tendant au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de celles relatives au paiement de ses indemnités de rupture (indemnité compensatrice de préavis et indemnité légale de licenciement) et de celle relative au rappel de salaire sur mise à pied et aux congés payés afférents.

Sur la demande de intérêts formée à l'encontre de la société Cardilec pour licenciement vexatoire

Même si la cour a jugé qu'une faute grave justifiait le licenciement de la salariée, il demeure que c'est à raison que cette dernière expose que les conditions dans lesquelles elle a été tenue de vider le contenu de son sac, selon un procédé illicite, devant deux autres salariées, le médecin gérant et un autre médecin, sont vexatoires.

Il en est résulté un préjudice qui sera réparé par une indemnité de 1 000 euros.

Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef et, statuant à nouveau, il conviendra de condamner la société Cardilec à payer la somme ainsi arrêtée à la salariée.

Sur la rupture du contrat de travail avec la SCM Cabinet de Cardiologie [6]

La salariée expose que la perte de confiance qui lui est reprochée en raison des faits concernant la société Cardilec doit être écartée car elle ne concerne pas la SCM Cabinet de Cardiologie [6] et car la perte de confiance ne peut justifier un licenciement, a fortiori pour une faute grave. Ces faits sont au surplus prescrits .

Elle conteste le grief relatif au fait qu'elle n'aurait pas respecté ses horaires contractuels et, concernant les insultes relatives à ses anciennes collègues, reconnaît qu'en raison de leur dénonciation de la fin de l'année précédente, elle n'a effectivement pas mâché ses mots mais que sa colère était légitime les concernant ; qu'en revanche, elle n'a pas insulté ses employeurs.

En réplique, l'employeur affirme que les faits qu'il impute à la salariée sont établis.

***

Le licenciement pour faute grave implique une réaction immédiate de l'employeur, la procédure de licenciement devant être engagée dans des délais restreints et le licenciement devant intervenir rapidement.

En application de l'article L. 1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés, à moins que ces faits aient donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Un fait fautif dont l'employeur a eu connaissance plus de deux mois avant l'engagement des poursuites peut néanmoins être pris en considération lorsque le même comportement fautif du salarié s'est poursuivi ou répété dans ce délai.

Lorsque les faits sanctionnés par le licenciement ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites.

En l'espèce, la SCM Cabinet de Cardiologie [6] reproche à la salariée :

. son comportement via à vis de la société Cardilec,

. le fait que le ménage était négligé et qu'elle ne réalisait qu'une heure à une heure et demie par jour depuis plusieurs semaines au lieu de deux comme prévu au contrat,

. le fait que le 2 février 2018, alors que le cabinet était fermé à la patientèle, elle y a introduit son mari et qu'elle y a, avec lui, proféré des propos :

. injurieux à l'égard du gérant et à l'encontre du docteur [K],

. racistes à l'égard de deux anciennes collègues.

. le fait que lors de l'entretien préalable, la salariée a adopté un comportement inapproprié et qu'elle a entendu intimider l'employeur en lui imposant l'assistance de son conjoint.

Le comportement que la salariée a adopté au préjudice de la société Cardilec, connu de la SCM Cabinet de Cardiologie [6] depuis le 9 novembre 2017 dès lors que ses dirigeants sont les mêmes, ne pouvait plus, le 9 février 2018, faire l'objet de poursuites disciplinaires puisqu'il n'est pas allégué que le même comportement fautif de la salariée s'est poursuivi ou répété dans ce délai.

En ce qui concerne les horaires de travail, il ressort du contrat de travail que la salariée était engagée pour un horaire hebdomadaire de 12 heures par semaines ainsi réparties : du lundi au samedi de 18h00 à 20h00 au cabinet médical d'[Localité 7]. Selon les termes du contrat de travail, une modification de ces horaires était possible 7 jours avant la modification, laquelle devait être formalisée par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Il n'est pas discuté que, par suite du déménagement du cabinet le 1er janvier 2017, les horaires de travail de la salariée ont été modifiés de telle sorte qu'elle devait réaliser ses heures de ménage chaque matin avant l'ouverture du cabinet à la patientèle. Le contrat n'a cependant pas été modifié en ce sens. Il ressort en outre du relevé des activations/désactivations de l'alarme du cabinet ' rendant compte des horaires de travail de la salariée en janvier et février 2018 ' qu'il n'était pas ouvert le samedi. En définitive, à défaut, pour la société d'avoir procédé à un avenant modifiant les horaires de travail de la salariée, et à défaut pour l'employeur de montrer qu'il a satisfait aux règles contractuelles imposant une modification des horaires de travail 7 jours avant la modification et par lettre recommandée, il n'est pas possible de caractériser un quelconque manquement de la salariée du chef de ses horaires de travail.

Quant aux autres griefs (injures à l'égard des gérants, propos racistes à l'égard d'anciennes salariées et attitude durant l'entretien préalable), l'employeur ne produit en ce qui les concerne qu'une main courante du 13 février 2018, qui, pour avoir été rédigée sur la foi du seul témoignage du Dr [P], gérant de la société, est à elle seule insuffisante à les établir.

Il s'ensuit que le licenciement de la salariée par la SCM Cabinet de Cardiologie [6] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi qu'en a jugé à juste titre le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement.

La salariée peut en conséquence prétendre à ses indemnités de rupture ainsi qu'à un rappel de salaire sur mise à pied. Ces indemnités n'étant pas utilement critiquées, il conviendra de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes suivantes :

. 289,27 euros bruts au titre des rappels de salaire sur mise à pied,

. 28,92 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 1 157,06 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

. 115,70 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 1 229,37 euros net au titre de l'indemnité de licenciement,

La salariée peut aussi prétendre à une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse au visa de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017. Compte tenu de ce que la société employait habituellement moins de 11 salariés et de ce que la salariée, engagée le 1er septembre 2010 puis licenciée le 27 février 2018, comptait 7 années complètes d'ancienneté, peut prétendre à une indemnité minimale correspondant à 2 mois de salaire brut et à une indemnité maximale correspondant à 8 mois de salaire brut.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de son niveau de rémunération (578,53 euros bruts mensuels), de son âge lors de la rupture (58 ans), de ce qu'elle a bénéficié des allocations d'aide au retour à l'emploi du 13 mars 2018 au 30 septembre 2019 mais de ce qu'elle ne justifie pas de ses recherches d'emploi dans l'intervalle, il convient d'évaluer le préjudice qui résulte pour elle, de la perte de son emploi à la somme de 4 060 euros bruts.

Infirmant de ce chef le jugement, la société sera condamnée au paiement de la somme ainsi arrêtée.

Le jugement sera également infirmé en ce qu'il a condamné l'employeur au remboursement des indemnités de chômage versées à la salariée sur le fondement de l'article L. 1235-4 code du travail.

Sur les intérêts

Les condamnations au paiement de sommes ayant une vocation indemnitaire seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil de prud'hommes s'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse due par la SCM Cabinet de Cardiologie [6] et à compter du présent arrêt s'agissant de l'indemnité due par la société Cardilec au titre des circonstances vexatoires du licenciement.

Les condamnations au paiement des indemnités de rupture et des rappels de salaire produiront quant à elles intérêts au taux légal à compter de la réception, par la SCM Cabinet de Cardiologie [6] de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.

Sur la remise des documents

Il conviendra de donner injonction à la SCM Cabinet de Cardiologie [6] de remettre à la salariée un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant, la société Cardilec et la SCM Cabinet de Cardiologie [6] seront condamnées aux dépens.

Il conviendra de condamner la société Cardilec et la SCM Cabinet de Cardiologie [6], chacune, à payer à la salariée une indemnité de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :

Sur le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise dans l'affaire opposant Mme [E] à la société Cardilec

CONFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il a déclaré Mme [E] recevable et bien fondée dans ses demandes, a fixé la moyenne de salaires à 2 620,69 euros, a condamné la société Cardilec à payer à Mme [E] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et a débouté la société Cardilec de sa demande reconventionnelle,

INFIRME le jugement pour surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

DIT justifié le licenciement pour faute grave de Mme [E],

DÉBOUTE Mme [E] de ses demandes en paiement du rappel de salaires sur mise à pied, des congés payés y afférent, de l'indemnité de préavis, des congés payés afférent, d'une indemnité de licenciement, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Cardilec à payer à Mme [E] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison des circonstances vexatoires de son licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

CONDAMNE la société Cardilec à payer à Mme [E] la somme de 750 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel, CONDAMNE la société Cardilec aux dépens d'appel,

Sur le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise dans l'affaire opposant Mme [E] à la SCM Cabinet de Cardiologie [6]

INFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il condamne la SCM Cabinet de Cardiologie [6] à payer à Mme [E] la somme de 3 900 euros net au titre des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ordonne le remboursement, par la SCM Cabinet de Cardiologie [6], à l'organisme concerné du montant des indemnités de chômage éventuellement servies,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la SCM Cabinet de Cardiologie [6] à payer à Mme [E] la somme de 4 060 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil de prud'hommes,

ORDONNE à la SCM Cabinet de Cardiologie [6] de remettre à Mme [E] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

CONDAMNE la SCM Cabinet de Cardiologie [6] à payer à Mme [E] la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel,

CONDAMNE la SCM Cabinet de Cardiologie [6] aux dépens d'appel.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 20/02514
Date de la décision : 14/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-14;20.02514 ?
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