La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2022 | FRANCE | N°21/06107

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 06 décembre 2022, 21/06107


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51A



1re chambre 2e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 6 DECEMBRE 2022



N° RG 21/06107 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UYVQ



AFFAIRE :



S.A. 1001 VIES HABITAT VENANT AUX DROITS DE COOPERATION ET FAMILLE





C/



M. [W] [F]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Août 2021 par le Juge des contentieux de la protection d'ASNIERES
r>

N° RG : 1120000309



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06/12/22

à :



Me Ondine CARRO



Me Stéphanie TERIITEHAU



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51A

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 6 DECEMBRE 2022

N° RG 21/06107 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UYVQ

AFFAIRE :

S.A. 1001 VIES HABITAT VENANT AUX DROITS DE COOPERATION ET FAMILLE

C/

M. [W] [F]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Août 2021 par le Juge des contentieux de la protection d'ASNIERES

N° RG : 1120000309

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06/12/22

à :

Me Ondine CARRO

Me Stéphanie TERIITEHAU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. 1001 VIES HABITAT VENANT AUX DROITS DE COOPERATION ET FAMILLE, 1001 VIES HABITAT

Ayant son siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Ondine CARRO, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C212 - N° du dossier 14633

Représentant : Maître Karim BOUANANE de l'ASSOCIATION LEGITIA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1971 -

APPELANTE

****************

Monsieur [W] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Maître Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 N° du dossier 20220010

Représentant : Maître Louis TARON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 490

Madame [R] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Maître Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 N° du dossier 20220010

Représentant : Maître Louis TARON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 490

INTIMES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Octobre 2022, Monsieur Philippe JAVELAS, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Laurence TARDIVEL, Vice présidente placée,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 30 août 2020, la société d'HLM 1001 Vies Habitat, venant aux droits de la société d'HLM Coopération et Famille, a consenti un bail à M. [W] [F] et Mme [R] [F] portant sur un logement à usage d'habitation et un parking situés [Adresse 1].

Se prévalant du non-paiement des loyers par les locataires, la société 1001 Vies Habitat a assigné, par acte de commissaire de justice du 21 janvier 2020, M. et Mme [F] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières-sur-Seine afin notamment qu'il constate l'acquisition de la clause résolutoire insérée au contrat de bail du 30 août 2020.

Par jugement réputé contradictoire du 31 août 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières-sur-Seine a :

- déclaré recevable la demande formée par la société 1001 Vies Habitat, venant aux droits de la société d'HLM Coopération et famille elle-même venue aux droits de la société d'HLM Terre et Famille, à l'encontre de M. et Mme [F] dans le cadre du contrat de location conclu le 30 août 2000 entre les parties portant sur un logement à usage d'habitation et un emplacement de parking situés [Adresse 1],

- déclaré nul le commandement de payer,

- débouté la société 1001 Vies Habitat de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de M. et Mme [F],

- condamné la société 1001 Vies Habitat à verser à M. et Mme [F] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande reconventionnelle de M. et Mme [F],

- rejeté toute demande plus ample ou contraire,

- condamné la société 1001 Vies Habitat aux entiers dépens de l'instance,

- assorti le jugement de l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 7 octobre 2021, la société 1001 Vies Habitat a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 18 mai 2022, la société 1001 Vies Habitat, appelante, demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures,

- infirmer le jugement rendu le 31 août 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Asnières-sur-Seine en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue aux conditions générales du contrat de bail du 30 août 2000 et visée dans le commandement de payer délivré le 29 janvier 2019, par Me [Z] [M], commissaire de justice associé de la S.C.P. [M] & Associés, titulaire d'un Office de commissaire de justice, sis [Adresse 3]),

- constater la résiliation du bail sur le local d'habitation sis [Adresse 1] et l'emplacement de stationnement sis à la même adresse et ce, à compter du 29 mars 2019,

- en conséquence, ordonner l'expulsion sans délai de M. et Mme [F] et de tous occupants de leur chef et ce, avec l'assistance du commissaire de police, de la force publique et d'un serrurier s'il y a lieu,

- ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble qu'il désignera ou tel autre lieu au choix du bailleur et ce, en garantie de toutes sommes qui pourront être dues, aux frais, risques et périls de M. et Mme [F],

- condamner solidairement M. et Mme [F] à lui payer une indemnité d'occupation au titre du local d'habitation correspondant au loyer actualisé augmenté des charges à compter de la résiliation bail et jusqu'à parfaite libération des locaux par remise des clés, procès-verbal d'expulsion ou de reprise,

- condamner solidairement M. et Mme [F] à lui payer la somme de 2 238,88 euros au titre des arriérés de loyers et charges, échéances d'avril 2022 pour le logement et mai 2022 pour le stationnement incluses, selon décompte arrêté au 4 mai 2022, avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2019,

- confirmer le jugement en date du 31 août 2021 en ce qu'il a débouté M. et Mme [F] de leur demande reconventionnelle,

- condamner solidairement M. et Mme [F] à lui payer la somme de 2 000 en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'établissement du commandement de payer et de justifier de l'assurance, délivré par huissier le 29 janvier 2019.

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 28 février 2022, M. et Mme [F], intimés, demandent à la cour de :

- les juger recevables et bien fondés en l'ensemble de leurs écritures,

- débouter la société 1001 Vies Habitat de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- confirmer le jugement entrepris du 31 août 2021 en ce qu'il :

* a déclaré recevable la demande formée par la société 1001 Vies Habitat, venant aux droits de la société d'HLM Coopération et famille elle-même venue aux droits de la société d'HLM terre et Famille, à leur encontre dans le cadre du contrat de location conclu le 30 août 2000 entre les parties portant sur un logement à usage d'habitation et un emplacement de parking situés [Adresse 1],

* a déclaré la nullité du commandement de payer et de justifier d'une assurance contre les risques locatifs en date du 29 janvier 2019,

*a débouté la société 1001 Vies Habitat de l'intégralité de ses demandes à leur encontre,

* a condamné la société 1001 Vies Habitat à leur verser la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* a condamné la société 1001 Vies Habitat aux entiers dépens de l'instance,

A titre subsidiaire,

- leur accorder les plus larges délais pour quitter les lieux,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté leur demande reconventionnelle,

Statuant à nouveau,

- condamner la société 1001 Vies Habitat à leur payer la somme de 971, 02 euros,

En tout état de cause,

- condamner la société 1001 Vies Habitat à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société 1001 Vies Habitat aux entiers dépens de première instance et aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Stéphanie Teriitehaut- SELARL Minault-Teriitehau et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 septembre 2022.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la validité du commandement de payer et l'acquisition de la clause résolutoire

La bailleresse appelante fait grief à la décision attaquée d'avoir déclaré nul le commandement de payer signifié aux époux [F].

Elle fait valoir à hauteur de cour que le commandement était régulier et qu'il y a lieu, par conséquent, de constater l'acquisition de la clause résolutoire et de condamner les époux [F] au paiement d'une indemnité d'occupation, dès lors que :

- les époux [F] restaient devoir la somme de 3 316, 10 euros au mois de janvier 2019, échéance du mois de janvier incluse et aucune régularisation de la dette n'est intervenue dans les deux mois de la délivrance du commandement litigieux,

- les époux [F] n'avaient pas justifié de la souscription d'une police d'assurance avant la délivrance de l'assignation, si bien qu'elle ne peut être considérée comme étant de mauvaise foi,

- contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, le contenu du commandement de payer était conforme aux disposition de l'article 24-1 de la loi du 6 juillet 1989 en vigueur au moment de la délivrance de l'acte, en ce qu'il précisait la mention que le locataire dispose d'un délai de deux mois pour payer sa dette, le montant mensuel du loyer et des charges, le décompte de la dette, l'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation, la mention de la possibilité de saisir le fonds de solidarité pour le logement, la mention de la possibilité pour le locataire de saisir à tout moment la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce.

Les époux [F], locataires intimés, répliquent que l'acquisition de la clause résolutoire ne peut être constatée, en raison de la mauvaise foi de leur bailleresse au moment de la délivrance du commandement litigieux, dès lors que :

- ils sont convenus, avec leur bailleur, d'un plan de remboursement de la dette locative, par des remboursements mensuels de 50 euros depuis le mois de février 2019,

- le commandement de payer qui leur a été délivré était irrégulier, car il se bornait à indiquer qu'il est dû une somme de 3 316, 10 euros sans apporter de précision sur la ventilation de cette somme, et du fait qu'il comporte des incohérences, trois montants différents ayant été appelés au titre de la régularisation des charges de l'année 2016,

- les sommes réclamées au titre de la régularisation des charges pour les années 2010 à 2015, ne sont pas dues, étant prescrites

Réponse de la cour

Dans l'hypothèse où le bail contient une clause résolutoire, le bailleur est autorisé, en cas de défaut de paiement d'un seul loyer, à faire délivrer au locataire un commandement de payer. Si, à l'issue du délai de deux mois qui suit la délivrance de cet acte, le locataire ne s'est pas acquitté de sa dette, le bail est de plein droit résolu et le bailleur peut saisir le juge d'instance en vue de faire constater cette résolution et ordonner l'expulsion du locataire.

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti, prévu au contrat de bail, le preneur ne peut contester l'acquisition de la clause résolutoire, sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer.

Il ressort des pièces de la procédure que, par acte de commissaire de justice du 29 janvier 2019, la société 1001 vies habitat a fait délivrer à M. et Mme [F] un commandement d'avoir à justifier de la souscription d'une assurance contre les risques locatifs et de payer la somme de 3316, 10 euros, représentant les loyers et charges échus et demeurés impayés au 25 janvier 2019, terme du mois de janvier 2019 inclus.

Les époux [F] soutiennent que leur bailleur était de mauvaise foi dans la mesure où il n'a pas respecté le plan d'apurement de la dette qu'il leur avait consenti préalablement et du fait des imprécisions et incohérences que comporte le commandement litigieux.

Toutefois, les locataires intimés ne justifient ni de l'existence du plan d'apurement de leur dette locative dont ils entendent se prévaloir ni du fait qu'ils auraient communiqué à leur bailleur leur assurance multirisque habitation avant la délivrance du commandement de payer dont ils contestent la régularité.

Par ailleurs, le commandement de payer délivré était suffisament explicite pour leur permettre d'en vérifier le bien-fondé en ce qu'il comportait, en annexe, un compte locatif détaillant les dates d'échéance, les sommes réclamées, en distinguant entre loyers et charges locatives.

Les trois montants appelés au titre de la régularisation des charges en 2016 ne portaient pas sur la régularisation des charges de l'année 2016 : la somme de 427, 33 euros, appelée le 29 février 2016, régularisait les charges de l'année 2012 ; la somme de 492, 22 euros, appelée le 14 juillet 2016, régularisait les charges de l'année 2013 ; la somme de 608, 15 euros, appelée le 16 décembre 2016, régularisait les charges de l'année 2014.

Pareillement, les deux montants appelés au titre de la régularisation des charges en 2017 ne concernaient pas la régularisation des charges de l'année 2017 : la somme de 477, 68 euros, appelée le 18 avril 2017 régularisait les charges de l'année 2015 ; la somme de 107,90 euros, appelée le 28 décembre 2017, régularisait les charges de l'année 2016.

Enfin, les époux [F] ne sauraient exciper utilement de la mauvaise foi du bailleur au motif que certaines sommes ne seraient pas dues, en raison de la prescription triennale, dès lors que l'existence d'une dette locative au jour de la délivrance n'est pas contestée - il est reconnu une dette de 828, 98 euros par les locataires intimés au 29 janvier 2019 - et qu'un commandement de payer visant des sommes supérieures au montant de la créance demeure valable à concurrence des sommes dues (Cass. 3e civ., 5 mars 2013, n°12-11.985).

Par ailleurs, depuis la loi ELAN du 23 novembre 2018, entrée en vigueur le 25 novembre 2018, l'article 24, I, alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989 précitée prévoit que le commandement de payer doit contenir six mentions à peine de nullité de l'acte :

- la mention que le locataire dispose d'un délai de 2 mois pour payer sa dette ;

- le montant mensuel du loyer et des charges ;

- le décompte de la dette ;

- l'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d'expulsion ;

- la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l'adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière ;

- la mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l'article 1343-5 du Code civil.

Le commandement de payer litigieux, qui comporte, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, toutes les mentions requises par le texte précité, ne peut être déclaré nul au motif qu'il n'a pas reproduit la clause résolutoire insérée dans le bail, cette obligation ne figurant pas dans cette liste limitative.

Le décompte locatif fait apparaître que les causes du commandement n'ont pas été réglées dans les deux mois de sa délivrance.

Par suite, il y a lieu d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a annulé le commandement litigieux et de constater l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 30 mars 2019.

Subséquemment, l'expulsion des époux [F] , qui n'ont formé aucune demande de suspension des effets de la clause résolutoireet de tous occupants de leur chef sera ordonnée et les intimés seront condamnés solidairement au paiement d'une indemnité d'occupation correspondant au loyer actualisé augmenté des charges qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi.

II) Sur le montant de la dette locative et la demande reconventionnelle en paiement des époux [F]

La société 1001 vies habitat critique le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré prescrites les sommes réclamées au titre des années 2010 à 2015, au titre de l'arriéré locatif, et sollicite la condamnation solidaire des locataires intimés à lui payer une somme de 2 294, 98 euros, au titre des sommes restant dues pour le logement au mois de mai 2022 et pour l'emplacement de stationnement au mois de juin 2022.

Elle soutient qu'en application des dispositions de l'article 1342-10 du code civil, et faute de précision sur la nature des sommes réglées, les réglement ont été imputés sur les sommes les plus anciennes et que le point de départ de la prescription se situe au jour de la régularisation des charges.

Les époux [F] rétorquent que :

- le bailleur ne peut réclamer le paiement de sommes dues au titre des charges récupérables au-delà du 29 janvier 2016, le commandement de payer datant du 29 janvier 2019,

- à la date de délivrance du commandement de payer, il était dû une somme de 828,98 euros, la somme de 2 487, 12 euros correspondant à la régularisation de charges pour l'année 2012 (427, 33 euros), pour l'année 2010 (563, 32 euros) pour l'année 2013 (492, 22 euros), pour l'année 2011 (506,57 euros) et pour l'année 2015 (477, 68 euros), ne pouvant être utilement réclamée en raison de la prescription triennale.

- compte tenu des réglements de 50 euros par mois, il a été payé une somme totale de 1 800 euros,

- par suite, la bailleresse doit être condamnée à rembourser une somme de 971, 02 euros (1800-828,98).

Réponse de la cour

Avant l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, dite Alur, l'action en paiement des loyers était soumise à la prescription quinquennale de droit commun de l'article 2224 du code civil.

L'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, crée par la loi du 24 mars 2014, dispose désormais que toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.

Cet article est immédiatement applicable aux baux en cours conformément à l'article 82 II 2º de la loi du 6 août 2015 dite Macron, dans les conditions de l'article 2222 du code civil.

Selon l'alinéa 2 de cet article, en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

La prescription triennale s'est ainsi substituée à la prescription quinquennale à compter du jour de l'entrée en vigueur la loi du 6 août 2015, soit le 7 août suivant, la loi dite Macron ne comportant aucune disposition rétroactive.

Par ailleurs, le point de départ du délai de prescription en matière de charges locatives est la date de la régularisation des charges, et non la date de paiement des provisions dues (Cass.3e civ. 9 novembre 2017, n°16-22.445).

Enfin, le commandement de payer du 29 janvier 2019 ne constitue pas, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, un acte interruptif de prescription selon l'article 2244 du code civil, si bien qu'en l'espèce, la prescription a été interrompu par l'acte introductif d'instance du 21 janvier 2020.

Il convient d'analyser la prescription des charges locatives en application de ces règles et pour chacune des années concernées.

- Régularisation charges locatives de l'année 2010 (563, 32 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 24 octobre 2012, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors de 5 ans a expiré le 24 octobre 2017, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 563, 32 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2011 (506, 57 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 24 juin 2015, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors de 5 ans a expiré le 24 juin 2019, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 506,57 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2012 (427,33 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 8 décembre 2015, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors passé à trois ans, en application de la loi Macron, applicable depuis le 7 août 2015, a expiré le 8 décembre 2018, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 427,33 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2013 (492,22 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 22 février 2016, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors passé à trois ans, en application de la loi Macron, applicable depuis le 7 août 2015, a expiré le 22 février 2019, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 492,22 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2014 (608,15 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 29 septembre 2016, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors passé à trois ans, en application de la loi Macron, applicable depuis le 7 août 2015, a expiré le 29 septembre 2019, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 608, 15 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2015 (477, 88 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 28 novembre 2016, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors passé à trois ans, en application de la loi Macron, applicable depuis le 7 août 2015, a expiré le 28 novembre 2019, soit antérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription est acquise et que la somme de 477, 88 euros doit être déduite des montants réclamés par le bailleur.

- Régularisation des charges de l'année 2016 (107,90 euros) : le dies a quo (point de départ) est le 23 octobre 2017, date de la régularisation des charges - pièce n°4 des intimés - et le délai de prescription qui était alors passé à trois ans, en application de la loi Macron, applicable depuis le 7 août 2015, a expiré le 23 octobre 2020, soit postérieurement à l'assignation du 21 janvier 2020, si bien que la prescription n'est pas acquise et que la somme de 107, 90 euros n'a pas à être déduite des montants réclamés par le bailleur.

Les régularisation de charges pour les années postérieures à l'année 2016 ne sont pas prescrites, compte tenu du fait que ces charges ont été régularisées - 17 février 2020 pour l'année 2017, 13 novembre 2020 pour l'année 2018 - moins de trois ans avant la délivrance de l'assignation interruptive d'instance.

Il résulte de ce qui précède qu'il doit être déduit des montants réclamés par le bailleur - 2294,98 euros - une somme totale de 3 075, 47 euros (563, 32 + 506,57 + 427,33 + 492,22 + 608,15 +477,88) en sorte que l'appelante doit être déboutée de sa demande en paiement.

Le jugement sera par suite confirmé de ce chef.

Les époux [F] soutiennent, par ailleurs, avoir fait des paiements mensuels de 50 euros trente six mois durant pour un total de 1 800 euros et sollicitent, en conséquence, le remboursement de la somme de 971,02 euros représentant la différence entre la somme acquittée de 1 800 euros et le montant de la dette au jour de la délivrance du commandement de payer (828,98 euros).

Toutefois, les intimés ne rapportent pas la preuve du paiement de la somme totale de 1 800 euros, se bornant à verser aux débats quelques photocopies d'avis d'échéance sur lesquels a été ajoutée une mention manuscrite ' 50 euros' sans qu'il soit démontré que le bailleur est le scripteur de cette mention.

Il sera relevé qu'à la date de délivrance du commandement de payer, soit le 29 janvier 2019, la dette locative s'élevait à la somme de 240, 63 euros (3 316, 10 -3 075, 47).

Les intimés seront, par suite, déboutés de leur demande en paiement.

III) Sur la demande de délai pour quitter les lieux

Les époux [F] ont déjà bénéficié des délais de la procédure et bénéficieront, en outre, du sursis hivernal de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, jusqu'au 31 mars de l'année 2023.

En outre, ils n'ont pas sollicité de délais de paiement à titre rétroactif, ni de suspension des effets de la clause résolutoire, qui leur aurait permis, en l'absence de toute dette locative au jour où la cour statue, de faire échec aux demandes de résiliation et d'expulsion de l'appelante.

La demande de délais sera, par suite, rejetée.

IV) Sur les demandes accessoires

Les époux [F], qui succombent pour l'essentiel, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant débouté la société d'hlm 1001 Vies habitat de sa demande en paiement au titre de l'arriéré locatif ;

Statuant à nouveau

Constate au 30 mars 2019 l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail du 30 août 2000 ;

Dit M. [W] [F] et Mme [R] [F] occupants sans droit ni titre depuis cette date des locaux loués ;

A défaut de libération volontaire des lieux, autorise la société d'hlm 1001 Vies habitat à faire procéder dans les formes légales à l'expulsion de M. [W] [F] et Mme [R] [F] , ainsi qu'à celle de tous occupants de son fait, des lieux loués situés [Adresse 1], avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin, et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à libérer les lieux ;

Dit que conformément aux dispositions des articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991 et 200 et suivants du décret du 31 juillet 1992 , les meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais du locataire expulsé, en un lieu que ce dernier aura choisi et qu'à défaut ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution , avec sommation au locataire expulsé d'avoir à les retirer, à ses frais, dans le délai d'un mois ;

Condamne solidairement M. [W] [F] et Mme [R] [F] à payer à la société d'hlm 1001 Vies habitat une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer contractuel actualisé, outre les charges, à compter de la résiliation du bail jusqu'à libération complète des lieux ;

Déboute M. [W] [F] et Mme [R] [F] de leurs demandes ;

Condamne in solidum M. [W] [F] et Mme [R] [F] à payer à la société d'hlm 1001 Vies habitat la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [W] [F] et Mme [R] [F] aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront, s'agissant des dépens de première instance, les frais du commandement de payer délivré par acte de commissaire de justice du 29 janvier 2019.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 21/06107
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;21.06107 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award