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02/11/2022 | FRANCE | N°20/01916

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 02 novembre 2022, 20/01916


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 02 NOVEMBRE 2022



N° RG 20/01916

N° Portalis DBV3-V-B7E-UBQJ



AFFAIRE :



[Y] [O]



C/



SAS EUROP NET II









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 février 2020 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : C

N° RG : F 17/01911



Cop

ies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Gabriel DE FROISSARD DE BROISSIA



Me Amandine BOULEBSOL







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versaill...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 NOVEMBRE 2022

N° RG 20/01916

N° Portalis DBV3-V-B7E-UBQJ

AFFAIRE :

[Y] [O]

C/

SAS EUROP NET II

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 février 2020 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : C

N° RG : F 17/01911

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Gabriel DE FROISSARD DE BROISSIA

Me Amandine BOULEBSOL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [Y] [O]

né le 31 décembre 1965 à [Localité 6] (Mali)

de nationalité malienne

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Gabriel DE FROISSARD DE BROISSIA, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 372

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/007018 du 06/08/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANT

****************

SAS EUROP NET II

N° SIRET : 518 515 564

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE ET BOULEBSOL, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2293

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 septembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

M. [O] a été engagé par la société ISS Propreté en qualité d'agent de propreté par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 4 février 1994.

Par avenant du 1er juin 2012, le salarié a été affecté sur le site de [Localité 7], à temps partiel, sur la base de 110,50 heures mensuelles.

A la suite de la perte de ce marché, l'inspectrice du travail a autorisé, le 3 décembre 2013, le transfert de M. [O], délégué du personnel, de la société ISS Propreté vers la société entrante, la société Europtnet II, à compter du 1er janvier 2014.

La société Europ Net II applique la convention collective des entreprises de propreté et emploie, à la date de la rupture, plus de 10 salariés.

Le 31 décembre 2013, les parties ont signé un nouveau contrat à durée indéterminée, le temps de travail, la rémunération et l'affectation du salarié restant inchangés.

En dernier lieu, il percevait une rémunération brute mensuelle de 1 153,74 suros.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 8 janvier 2014, la société Europ Net II a convoqué le salarié à un entretien pouvant aller jusqu'au licenciement.

Le 30 janvier 2014, le salarié a fait l'objet d'un avertissement pour comportement inadapté, le salarié refusant d'effectuer certaines prestations.

Le 23 février 2015, la société Europ Net II l'a informé de sa mutation sur le site d'Orange à [Localité 8], moyennant un rythme horaire hebdomadaire et mensuel inchangé, avec effet au 4 mars 2015.

Par lettre du 1er mars 2015, M. [O] a informé la société Europ Net II qu'il refusait la modification de son contrat de travail.

La société Europ Net II a renoncé à cette mutation et lui a adressé le 9 mars 2015, une seconde proposition pour une mutation sur le site Gecina, à [Localité 5], sans modification aucune de son temps de travail et de ses horaires.

Le 17 mars 2015, le salarié a également refusé cette mutation indiquant rester sur le poste de travail situé à [Localité 7].

Le 27 mars 2015, il a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 15 avril 2015.

M. [O] a été licencié par lettre du 12 mai 2015 pour cause réelle et sérieuse pour refus d'une mutation justifiée par les intérêts de l'entreprise mettant en 'uvre la clause de mobilité inscrite à son contrat de travail, l'employeur indiquant avoir pris la décision de le faire effectuer son préavis à son domicile et de le lui rémunérer.

Le 13 juillet 2017, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins d'obtenir la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.

Par jugement du 18 février 2020, le conseil de prud'hommes de Nanterre a:

- dit que le licenciement M. [O] est justifié et repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [O] de l'intégralité de ses demandes,

- reçu la demande de la société Europnet II au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais n'y fait pas droit,

- laissé les dépens à la charge respective des parties.

Par déclaration adressée au greffe le 14 septembre 2020, M. [O] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 14 juin 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 8 février 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [O] demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre section commerce en date du 18 février 2020,

et, statuant à nouveau, de :

- prononcer l'annulation de l'avertissement en date du 30 janvier 2014,

- dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

et en conséquence, de :

- condamner société Europnet II à lui verser la somme de 13 844,88 euros a titre de dommages et intérêts en raison du préjudice qu'il a subi du fait de la perte de son emploi,

- dire que les condamnations à intervenir porteront intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2015, date à laquelle le licenciement lui était notifié,

- condamner société Europnet II à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de 1'artic1e 700 du code de procédure civile,

- condamner société Europnet II aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 13 décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Europ Net II demande à la cour de :

- la dire recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

en conséquence,

à titre principal, de :

- dire la demande de M. [O] tendant à l'annulation de l'avertissement du 30 janvier 2014 irrecevable, et par conséquent, l'en débouter,

- confirmer le jugement rendu le 18 février 2020 par le conseil de prud'hommes de Nanterre en ce qu'il a :

. dit que le licenciement de M. [O] est justifié et repose sur une cause réelle et sérieuse,

. débouté M. [O] de l'intégralité de ses demandes,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,la société Europe Net II demande à la cour de :

- condamner M. [O] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- condamner M. [O] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner M. [O] aux entiers dépens,

à titre subsidiaire, si la Cour venait à dire le licenciement de M. [O] sans cause réelle et sérieuse, de :

- allouer à M. [O] la somme de 6 922,44 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter M. [O] de ses autres demandes.

MOTIFS

Sur l'annulation de l'avertissement

Le salarié fait valoir que la formule motivant la sanction est vague et que l'employeur ne précise pas en quoi son comportement serait inadapté ni quelles raisons justifient l'avertissement.

L'employeur oppose l'irrecevabilité de la demande d'annulation de l'avertissement présentée pour la première fois en cause d'appel.

Aux termes de l'article L. 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'interventions d'un tiers ou de la survenance ou la révélation d'un fait.

L'article 565 précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si le fondement juridique est différent.

Par ses écritures d'appelant communiquées le 13 décembre 2020, M. [O] a sollicité pour la première fois l'annulation de la sanction disciplinaire.

Dès lors que le salarié n'a pas sollicité devant le conseil de prud'hommes l'annulation de l'avertissement, cette demande présentée pour la première fois en cause d'appel est irrecevable.

Sur la rupture

Le salarié expose que le motif véritable de son licenciement est la recherche de la rentabilité de l'entreprise au détriment de la stabilité de l'emploi, le poste d'une autre salariée ayant été également supprimé pour créer des emplois nouveaux à un coût moindre.

Il ajoute que rien ne pouvait lui être reproché et que l'employeur ne justifie pas de la nécessité de la réorganisation de l'entreprise.

L'employeur réplique que les mutations notifiées au salarié sont conformes aux obligations contractuelles et relève de son pouvoir de direction.

Il affirme que la société était de bonne foi car la mutation répondait à l'intérêt de l'entreprise et que licenciement, motivé par le refus du salarié d'un changement de lieu de travail, en application d'une clause de mobilité régulière, constitue un licenciement pour motif personnel et non un licenciement économique quand bien même la clause est mise en oeuvre suite à la perte du marché par son ancien titulaire.

* *

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué. En retenant l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, les juges du fond écartent par là mêmetoute autre cause de licenciement.

Enfin, la bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n'ont pas à rechercher si la décision de l'employeur de modifier les conditions de travail d'un salarié est conforme à l'intérêt de l'entreprise et il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Au cas présent, les premiers juges ont retenu à juste titre que la société Europ Net II n'a fait qu'exercer son pouvoir de direction en modifiant les conditions de travail du salarié en conformité avec la clause de mobilité.

Le salarié, qui n'invoque pas le bénéfice de la protection attachée à son ancienne qualité de délégué du personnel, ne conteste pas que l'employeur avait la faculté de modifier son lieu de travail dans le cadre de la relation contractuelle et ne s'oppose à la mise en oeuvre de la clause de mobilité.

Au surplus, si le salarié soutient que le véritable motif de la rupture est la recherche de la rentabilité, le seul projet de licenciement par l'employeur d'une autre salariée ne suffit pas à démontrer la volonté de l'employeur de procéder à une réorganisation de l'entreprise par suppression de postes.

Dès lors, le licenciement dont le salarié a fait l'objet, motivé par le refus d'un changement d'affectation modifiant ses seules conditions de travail, repose sur une cause réelle et sérieuse de licenciement, excluant par là-même toute autre cause de licenciement.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un licenciement injustifié.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Le salarié qui succombe, doit supporter la charge des dépens et ne saurait bénéficier de l'article 700 du code de procédure civile ; toutefois, pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de faire application à son encontre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

DÉCLARE irrecevable, comme nouvelle en cause d'appel, la demande d'annulation de l'avertissement du 30 janvier 2014,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l=article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [Y] [O] aux dépens d'appel.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01916
Date de la décision : 02/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-02;20.01916 ?
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