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20/10/2022 | FRANCE | N°20/00664

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 20 octobre 2022, 20/00664


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 20 OCTOBRE 2022



N° RG 20/00664

N° Portalis DBV3-V-B7E-TZKK



AFFAIRE :



[K] [I] [J]



C/



[B] [G]



[E] [T]



[M] [O]



[A] [Y]



S.A.R.L. MAITRES CHIEN TELE SURVEILLANCE PARISIENS (MCTS PA RISIENS)



Association UNEDIC,DÉLÉGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 février 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section :

N° RG : F 18/00227





























Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 OCTOBRE 2022

N° RG 20/00664

N° Portalis DBV3-V-B7E-TZKK

AFFAIRE :

[K] [I] [J]

C/

[B] [G]

[E] [T]

[M] [O]

[A] [Y]

S.A.R.L. MAITRES CHIEN TELE SURVEILLANCE PARISIENS (MCTS PA RISIENS)

Association UNEDIC,DÉLÉGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 février 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section :

N° RG : F 18/00227

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Christian LE GALL

Me Roland ZERAH

Me Sophie CORMARY

le :

Expédition numérique délivrée à Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K] [I] [J]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 13]

Représentant : Me Christian LE GALL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0754

APPELANT

****************

Monsieur [B] [G]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représentant : Me Roland ZERAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0164 substitué par Me Géraldine CASINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2089

Madame [E] [T]

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentant : Me Roland ZERAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0164 substitué par Me Géraldine CASINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2089

Monsieur [M] [O]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentant : Me Roland ZERAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0164 substitué par Me Géraldine CASINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2089

Madame [A] [Y]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 11]

Représentant : Me Roland ZERAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0164 substitué par Me Géraldine CASINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2089

S.A.R.L. MAITRES CHIEN TELE SURVEILLANCE PARISIENS (MCTS PA RISIENS)

N° SIRET : 382 241 669

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentant : Me Roland ZERAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0164 substitué par Me Géraldine CASINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2089

Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST

[Adresse 3]

[Localité 14]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 septembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier placé lors des débats : Madame Virginie BARCZUK

RAPPEL DES FAITS CONSTANTS

La société Maître Chien Télé Surveillance Parisiens (ci-après MCTS Parisiens), dont le siège social est situé à [Localité 11], est spécialisée dans la sécurité privée. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.

Par jugement du tribunal de commerce de Paris du 18 février 2020, la société MCTS Parisiens a été placée en procédure de sauvegarde pour une durée de 8 ans, Me [B] [G] et Me [E] [T] ayant été désignés en qualité de commissaires à l'exécution du plan et Me [M] [O] et Me [A] [Y] en qualité de mandataires judiciaires.

M. [K] [I] [J], a été engagé par cette société, selon contrat de travail à durée indéterminée du 3 octobre 2013, en qualité d'agent cynophile (ou conducteur de chien de défense), le salarié étant accompagné d'un chien malinois, d'abord à temps partiel puis à temps plein suivant avenant du 1er janvier 2015, moyennant un salaire brut de 1 506,04 euros au 1er janvier 2015 pour 151,67 heures.

Par courrier du 30 août 2017, la société MCTS Parisiens a convoqué M. [J] à un entretien préalable fixé au 11 septembre 2017.

Puis par courrier du 15 septembre 2017, M. [J] s'est vu notifier son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

« Conformément à l'article à L. 1231-1 du code du travail, par la présente, nous vous avisons de notre décision de mettre fin au contrat de travail à durée indéterminée qui vous liait jusqu'alors à notre entreprise.

Conformément à l'article L. 1232-2 et suivants du code du travail, la présente décision relative à votre procédure de licenciement fait suite à une convocation à un entretien préalable conformément au courrier recommandé datant du 30 août 2017.

Cet entretien préalable était programmé pour le 11 septembre 2017 à 16h30 au siège administratif de la société MCTS Parisiens sis [Adresse 2].

Dans cette même correspondance notifiée, nous vous avions également rappelé la possibilité de vous faire assister lors de cet entretien par une personne de votre choix appartenant au personnel de l'entreprise.

Ainsi, il vous a été donné la possibilité de vous positionner sur nos griefs en faisant valoir des explications.

Vous vous êtes présenté à cet entretien, et nous avons pu recueillir vos explications sur les faits reprochés, à savoir :

- Absences injustifiées répétées

- Retard injustifié

- Abandons de poste caractérisés

Absences injustifiées répétées

A diverses reprises, nous avons attiré votre attention sur votre comportement fautif concernant vos absences injustifiées répétées. Or, force est de constater que vous n'en avez pas tenu compte, puisque au cours du mois d'août 2017, vous vous êtes absenté de votre poste de travail sans autorisation et sans présenter de justificatifs.

Nous avons relevé les absences injustifiées suivantes sur vos postes de travail « [Localité 15] & [Localité 16] » :

- le 4 août 2017,

- le 7 août 2017,

- le 8 août 2017,

- le 21 août 2017.

A ce titre, nous vous avons adressé le 4 août 2017 un courrier recommandé avec avis de réception afin que vous justifiiez vos absences.

Dans ce courrier, nous vous avons rappelé le passage de votre responsable hiérarchique Mme. [L] en date du 3 août 2017 sur votre poste de travail « [Localité 16] », où vous l'avez informée de votre imminente hospitalisation, à savoir dès le 4 août 2017.

Nous vous avons alors rappelé les dispositions de l'article L. 1226-1 du code du travail, et demandé les documents justifiants vos déclarations (convocations médicales, bulletin d'hospitalisation, arrêt maladie, etc.).

Malheureusement, à aucun moment vous ne nous avez fourni de justificatifs pour l'ensemble de vos absences.

Retard injustifié

En date du 26 août 2017, vous êtes arrivé à votre poste de travail à 7h25 minutes, soit avec 25 minutes de retard.

A aucun moment, vous n'avez informé notre service d'exploitation de ce retard, ni ne l'avez justifier.

Abandons de poste caractérisés

En date du 26 août 2017, vous étiez planifié sur le site « [Localité 15] » de 7h00 à 19h00.

A 17h00, vous avez abandonné votre poste de travail, alors que la fin de votre service était programmée à 19h00.

Plus grave, vous récidivez puisque le lendemain en date du 27 août 2017, de nouveau vous abandonnez votre poste de travail « [Localité 15] » à 18h15 au lieu d'attendre la fin de votre service à 19h00.

Vos abandons de poste sont effectués sans l'autorisation de notre service d'exploitation.

Par vos absences injustifiées répétées, votre retard et vos abandons de poste, vous n'êtes pas sans savoir la forte désorganisation que vous avez volontairement provoquée.

Par cet ensemble de faits fautifs, vous avez nui à la dynamique de notre équipe de travail, sur les différents sites où vous étiez affecté.

En plein plan Vigipirate, la défaillance d'un maître chien engendre de grosses difficultés dans la gestion et contraint notre service d'exploitation, la permanence, à assumer des situations difficiles.

Par ailleurs, la désorganisation de notre équipe a également nui à nos clients et altéré notre image professionnelle.

Nous ne pouvons accepter de tels comportements et le risque de perdre notre client que nous avons tant de difficultés à fidéliser.

Lors de l'entretien préalable en date du 11 septembre 2017, vous n'avez pas pu fournir de justificatifs nous permettant de modifier notre point de vue quant aux faits qui vous sont reprochés, d'autant plus que vous êtes un habitué de ces faits.

À titre de rappel, dernièrement en date du 7 août 2017, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour abandon de poste caractérisé et non-respect des obligations contractuelles. En date du 3 août 2017, vous avez été sanctionné d'un blâme, pour absences injustifiées prolongées.

Au cours de ces trois dernières années, vous avez également été sanctionné pour des faits similaires et autres :

- Le 8 décembre 2016, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour non-présentation à la visite médicale.

- Le 5 décembre 2016, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour non-port de la tenue professionnelle.

- Le 24 mai 2016, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour retard injustifié.

- Le 31 juillet 2015, vous avez été sanctionné d'une mise en garde pour un abandon de poste.

- Le 14 avril 2015, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour des absences injustifiées répétées.

- Le 28 novembre 2014, vous avez été sanctionné d'un avertissement pour un abandon de poste.

Par conséquent, nous sommes amenés à vous licencier pour faute grave.

Votre licenciement pour faute grave sera donc effectif dès la première présentation de cette lettre, sans préavis ni indemnité de rupture. »

M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en contestation de son licenciement, par requête reçue au greffe le 21 février 2018.

La décision contestée

Par jugement contradictoire rendu le 4 février 2020, la section activités diverses du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :

- dit le licenciement de M. [J] régulier et fondé sur une faute grave,

- débouté M. [J] de la totalité de ses demandes,

- débouté la société MCTS Parisiens de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux entiers dépens.

La procédure d'appel

M. [J] a interjeté appel du jugement par déclaration du 4 mars 2020 enregistrée sous le numéro de procédure 20/00664.

Par ordonnance rendue le 7 septembre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 15 septembre 2022.

Prétentions de M. [J], appelant

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 5 juin 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [J] conclut à l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la cour d'appel, statuant de nouveau, de :

- condamner la société MCTS Parisiens au paiement des sommes suivantes :

. 3 133,60 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 313,36 euros au titre des congés payés afférents,

. 1 556 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail,

. 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour sanction abusive,

. 6 579,05 euros à titre de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires outre 657,90 euros au titre des congés payés afférents,

. 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- avec intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

- condamner la société MCTS Parisiens aux entiers dépens y compris les dépens afférents aux actes de procédure de la présente instance à la charge de la partie défenderesse, y compris également ceux dus au titre d'une éventuelle exécution par voie légale en application des articles 10 et 11 des décrets du 12 décembre 1996 et du 8 mars 2001 relatifs à la tarification des actes d'huissiers de justice.

Prétentions de la société MCTS Parisiens, intimée

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 4 septembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société MCTS Parisiens conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Demandes de l'association Unedic, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest, intimée

Par conclusions adressées par voie électronique le 3 juillet 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, l'association Unedic, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest demande à la cour de :

- donner acte à M. [J] qu'il ne formule aucune demande à son encontre,

- la mettre hors de cause.

subsidiairement,

- la mettre hors de cause s'agissant des frais irrépétibles de la procédure.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la mise hors de cause de l'association Unedic, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest

Le salarié ne formulant aucune demande à son encontre, ni l'employeur, l'association Unedic, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest doit être mise hors de cause.

Sur les heures supplémentaires

M. [J] sollicite un rappel de salaires de 6 579,05 euros outre congés payés afférents, au titre des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées, à compter du mois de janvier 2015 jusqu'au mois de juillet 2017 inclus.

La durée légale du travail effectif prévue à l'article L. 3112-10 du code du travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L. 3121-22 du même code.

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2 et suivants qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

M. [J] présente, à l'appui de sa demande, différents plannings (sa pièce 3) au titre des mois de janvier 2015, février 2015, mai 2015, juin 2015, juillet 2015, septembre 2015, août 2016, octobre 2016, décembre 2016, mars 2017, avril 2017 et juillet 2017, sur lesquels il s'appuie pour présenter un décompte des heures supplémentaires qu'il prétend avoir accomplies, majorées à 25% et à 50% (il a été vérifié qu'il n'est repris que les mois dont le planning est produit).

Il produit par ailleurs l'intégralité de ses bulletins de paie sur la période considérée, qui permettent de relever les heures supplémentaires réglées.

Ces documents revêtent les précisions minimales nécessaires afin de permettre que s'instaure un débat contradictoire en plaçant l'employeur, à qui incombe la charge de contrôler les heures de travail accomplies, en situation de pouvoir y répondre utilement.

La société MCTS Parisiens se limite toutefois à faire valoir que le salarié ne communique aucun document tendant à justifier qu'il a effectué des heures supplémentaires à la demande de son employeur ou si l'employeur en a eu connaissance.

Cet argument doit toutefois être écarté dès lors que M. [J] produit des plannings dont il n'est pas remis en cause le fait qu'ils ont été établis par l'employeur lui-même ou par le client en concertation avec l'employeur, que la société MCTS Parisiens a donc, au travers de ces plannings, dont elle ne remet pas en cause l'authenticité, expressément demandé au salarié de réaliser les heures supplémentaires dont il est fait état.

Au vu des éléments en présence, il y a lieu de retenir le principe d'heures supplémentaires devant bénéficier au salarié, lesquelles seront évaluées compte tenu de la durée de travail de référence fixée à 35h et au montant du salaire versé, à la somme de 6 357,06 euros, outre celle de 635,70 euros au titre des congés payés afférents, correspondant à la période allant du mois de janvier 2015 jusqu'au mois de juillet 2017 inclus.

Le jugement dont appel sera infirmé de ce chef.

Sur l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail

M. [J] prétend que la société MCTS Parisiens a exécuté de mauvaise foi le contrat de travail en ne respectant pas les normes obligatoires en matière de droit du travail. Il sollicite l'allocation d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts sur ce fondement.

La société MCTS Parisiens s'oppose à la demande, faisant valoir que le salarié ne fait état d'aucune argumentation précise, ni ne produit de justificatif, de même qu'il n'allègue un quelconque préjudice.

Il est rappelé que, conformément aux dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

M. [J] démontre ici qu'au regard des plannings qu'il produit, dont l'authenticité n'est pas remise en cause par la société MCTS Parisiens, il a accompli de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées, que son employeur n'a pas respecté la durée maximale quotidienne du travail et qu'il n'a pas bénéficié des jours de repos obligatoires.

L'accord du 18 mai 1993 annexé à la convention collective fixe à 12 heures la durée quotidienne maximale du travail. Or, les plannings produits par le salarié (sa pièce 3) montrent que la durée maximale quotidienne de travail n'a pas été respectée, M. [J] ayant travaillé parfois 14 heures voire 17 heures par jour, par exemple le 12 janvier 2015 (17 heures), le 19 juin 2015 (16 heures) ou le 12 août 2016 (14 heures).

M. [J] justifie par ailleurs ne pas avoir bénéficié des jours de repos obligatoires, par exemple au mois d'avril 2017, il a travaillé tous les jours à l'exception des lundi 3 et mardi 4.

Le non-respect des règles tenant au temps de travail cause un préjudice au salarié, qui sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, par infirmation du jugement entrepris.

Sur le licenciement pour faute grave

L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.

La faute grave se définit comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir d'une faute grave du salarié d'en apporter seul la preuve. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, la société MCTS Parisiens reproche à M. [J] des absences injustifiées réitérées, un retard injustifié et des abandons de poste caractérisés.

Concernant les absences injustifiées « [Localité 15] & [Localité 16] », les 4, 7, 8 et 21 août 2017

La société MCTS Parisiens ne produit aucun justificatif de ces absences.

Elle fait état d'avoir « adressé le 4 août 2017 un courrier recommandé avec avis de réception afin que vous justifiiez vos absences. Dans ce courrier, nous vous avons rappelé le passage de votre responsable hiérarchique Mme. [L] en date du 3 août 2017 sur votre poste de travail « [Localité 16] », où vous l'avez informée de votre imminente hospitalisation, à savoir dès le 4 août 2017 ». Ce courrier n'est toutefois pas produit, de sorte qu'il ne peut en être tenu compte.

Pour sa part, M. [J] conteste avoir conversé avec Mme [L] le 3 août 2017. Il considère qu'aucune absence ne peut lui être reprochée dès lors qu'il n'a reçu aucun planning en violation de l'accord du 18 mai 1993 annexé à la convention collective, qui dispose que chaque agent doit recevoir son planning 7 jours au moins avant le début du mois. Il explique qu'il téléphonait à son employeur pour obtenir des vacations, raison pour laquelle il a réalisé des vacations aux mois de juillet et d'août 2017.

En toute hypothèse, en l'absence de preuve de sa matérialité, la réalité de ce grief ne peut être retenue.

Concernant le retard injustifié du 26 août 2017,

La société MCTS Parisiens reproche au salarié d'être arrivé à son poste de travail à 7h25 minutes, soit avec 25 minutes de retard et de ne pas avoir informé le service d'exploitation de ce retard, ni de l'avoir justifié.

Elle ne produit aucun justificatif.

M. [J] reconnaît être arrivé en retard sur son lieu de travail ce jour-là mais fait valoir qu'il avait au préalable appelé sa relève qui lui a demandé de prévenir l'employeur, qu'il a appelé immédiatement la société pour l'informer de ce retard imputable, selon lui, à des embouteillages sur le trajet, de sorte qu'il oppose que ce retard était justifié par des circonstances portées à la connaissance de l'employeur.

En considération des éléments en présence, ce grief n'est pas matériellement établi.

Concernant les abandons de poste caractérisés,

La société MCTS Parisiens reproche ici au salarié d'avoir le 26 août 2017, abandonné son poste de travail à 17h alors que la fin de son service était programmée à 19h. Elle reproche encore au salarié d'avoir « récidivé » le 27 août 2017, en ayant quitté son poste de travail à 18h15 au lieu d'attendre la fin de son service à 19h00, sans l'autorisation du service d'exploitation.

L'employeur est défaillant dans l'administration de la preuve, qui lui incombe, puisqu'il ne produit pas de justificatifs utiles. Ce grief n'est pas matériellement établi.

Au demeurant, M. [J] explicite, concernant la journée du 26 août 2017, que dans l'après-midi, sur le site de [Localité 17], il a été victime d'une violente crise d'asthme et de douleurs cardiaques alors qu'il réalisait une ronde, selon lui, particulièrement longue et fastidieuse, que vers 17h, son chef d'équipe, après avoir constaté qu'il avait un problème de santé, a téléphoné à l'employeur afin qu'il soit relevé par un autre agent, que la relève s'est présentée à 18h et qu'il a alors pu quitter son travail. Il nie avoir abandonné son poste. Il souligne que, conformément aux préconisations du médecin du travail au regard de ses problèmes de santé, il aurait dû bénéficier d'un aménagement de poste, ce qu'il n'a pas obtenu. Il considère que son employeur est malvenu de lui reprocher ce départ anticipé dans ces conditions. Concernant la journée du 27 août 2017, le salarié prétend ne pas avoir quitté son poste à 18h15 mais à 18h30, compte tenu de son état de santé, en s'assurant que la relève était d'ores-et-déjà arrivée, le chef d'équipe lui ayant demandé de quitter le site.

L'employeur rappelle encore, aux termes de la lettre de licenciement, les antécédents disciplinaires qu'il impute au salarié.

Ceux-ci ne peuvent cependant constituer des griefs fondant le licenciement puisqu'il est constant que l'employeur, informé de l'ensemble des faits reprochés au salarié, choisit de lui notifier un avertissement ou toute autre sanction, a épuisé son pouvoir disciplinaire et ne peut prononcer un licenciement pour des faits antérieurs à la sanction prononcée.

En définitive, faute de rapporter la preuve de la matérialité des griefs reprochés au salarié, la société MCTS Parisiens doit être déboutée de ses prétentions, le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnisation du salarié

Au vu de ses bulletins de paie et compte tenu de son ancienneté, M. [J] peut prétendre à différentes indemnités, en conséquence de son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Indemnité compensatrice de préavis  : le salarié ayant droit à un préavis de deux mois, il est dû à ce titre la somme de 3 133,60 euros outre les congés payés afférents.

Indemnité légale de licenciement  : celle-ci s'élève à la somme de 1 556 euros.

Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse  :

M. [J] expose qu'il était âgé de 48 ans au moment de son licenciement, qu'il n'a pas retrouvé d'emploi, qu'il est père de quatre enfants et que son épouse ne travaille pas.

En application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Eu égard à son ancienneté et à son âge au moment du licenciement, à la rémunération qui lui était versée et au vu des pièces produites sur sa situation postérieure à la rupture du contrat, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer les dommages-intérêts dus au salarié en réparation de la perte de son emploi, à la somme de 11 000 euros.

Sur les indemnités de chômage versées au salarié

L'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version résultant de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable au litige, énonce : « Dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées. »

En application de ces dispositions, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités.

Sur l'abus de sanctions

Aux termes de la lettre de licenciement, la société MCTS Parisiens fait état de six sanctions disciplinaires entre novembre 2014 et décembre 2016 :

- le 8 décembre 2016, avertissement pour non-présentation à la visite médicale,

- le 5 décembre 2016, avertissement pour non-port de la tenue professionnelle,

- le 24 mai 2016, avertissement pour retard injustifié,

- le 31 juillet 2015, mise en garde pour un abandon de poste,

- le 14 avril 2015, avertissement pour des absences injustifiées réitérées,

- le 28 novembre 2014, avertissement pour un abandon de poste.

Elle fait par ailleurs état d'un avertissement du 7 août 2017, que M. [J] dément avoir reçu tandis que l'employeur ne fournit pas de justificatif de la réception de cette sanction par le salarié. Au surplus, l'appelant oppose à juste titre que l'avertissement sanctionne une absence du 4 août 2017 et qu'un avertissement aurait été délivré le 7 août 2017, de sorte que l'entreprise, qui avait épuisé son pouvoir de sanction, ne pouvait le sanctionner pour des faits antérieurs dans le cadre du licenciement.

M. [J] conteste le blâme du 3 août 2017 et conteste des absences injustifiées prolongées alors même que les plannings ne lui étaient pas adressés.

Il prétend s'être rendu aux visites médicales auxquelles il a été convoqué

Alors qu'il lui est reproché de ne pas avoir porté la parka qui lui avait été fournie par l'entreprise aux termes de l'avertissement du 5 décembre 2016, il répond qu'il a accompli sa ronde avec un pull qui lui avait été remis par la société et qui portait le logo de celle-ci. Il soutient à juste titre qu'il portait donc l'uniforme de la société MCTS, de sorte que l'avertissement n'est pas fondé. Faute toutefois de demander l'annulation de cet avertissement dans le dispositif de ses conclusions, il ne sera pas fait droit à cette demande, laquelle n'est formulée que dans les motifs, comme c'est le cas également pour toutes les autres sanctions disciplinaires.

M. [J] indique ne pas se souvenir avoir reçu les avertissements des 14 avril 2015 et 24 mai 2016 et la mise en garde du 31 juillet 2015. Il conteste les faits et l'employeur ne produit aucune pièce utile pour justifier ces sanctions, en l'absence notamment de tout planning de travail versé aux débats à son initiative.

L'absence de justification de la réception de certaines sanctions par le salarié, l'importance du nombre de sanctions non justifiées conduisent à retenir que l'employeur a abusé de son pouvoir de sanction et en conséquence à allouer à M. [J], au regard des circonstances rappelées ici, la somme de 1 500 euros en réparation du préjudice subi, par infirmation du jugement entrepris.

Sur les intérêts moratoires

Le créancier peut prétendre aux intérêts de retard calculés au taux légal, en réparation du préjudice subi en raison du retard de paiement de sa créance par le débiteur. Les condamnations prononcées produisent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation pour les créances contractuelles et à compter de l'arrêt, qui en fixe le principe et le montant, pour les créances indemnitaires.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure

La société MCTS Parisiens, qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamnée à payer à M. [J] une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 2 500 euros.

La société MCTS Parisiens sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.

Le jugement de première instance sera infirmé en ses dispositions concernant les dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,

MET hors de cause l'association Unedic, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 4 février 2020,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT le licenciement prononcé par la SARL MCTS Parisiens à l'égard de M. [K] [I] [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] à payer à M. [K] [I] [J] les sommes suivantes :

3 133,60 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

313,36 euros au titre des congés payés afférents,

1 556 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

11  000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail,

1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour sanction abusive,

6 357,06 euros à titre de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires

635,70 euros au titre des congés payés afférents,

CONDAMNE la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] à payer à M. [K] [I] [J] les intérêts de retard au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de sa convocation devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation sur les créances contractuelles et à compter de l'arrêt sur les créances indemnitaires,

ORDONNE le remboursement par la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. [K] [I] [J] dans la limite de trois mois d'indemnités,

DIT qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée par le greffe par lettre simple à la direction générale de Pôle emploi conformément aux dispositions de l'article R. 1235-2 du code du travail,

CONDAMNE la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] à payer à M. [K] [I] [J] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] de sa demande présentée sur le même fondement,

CONDAMNE la SARL MCTS Parisiens en présence de Me [G], Me [T], Me [O] et Me [Y] au paiement des entiers dépens.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine BOLTEAU-SERRE, président, et par Mme Virginie BARCZUK, greffier placé, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER placé, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00664
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.00664 ?
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