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15/09/2022 | FRANCE | N°19/03956

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 15 septembre 2022, 19/03956


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 SEPTEMBRE 2022



N° RG 19/03956

N° Portalis DBV3-V-B7D-TRDA



AFFAIRE :



[M] [C]



C/



Association [Localité 3] SPORTING CLUB









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Section : AD

N° R

G : 16/03413









Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Margaux GOETZ NECTOUX



Me Jean-Claude CHEVILLER





le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUINZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX ,...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 19/03956

N° Portalis DBV3-V-B7D-TRDA

AFFAIRE :

[M] [C]

C/

Association [Localité 3] SPORTING CLUB

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : 16/03413

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Margaux GOETZ NECTOUX

Me Jean-Claude CHEVILLER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, fixé au 16 juin 2022, puis prorogé au 30 juin 2022, puis au 07 juillet 2022, puis au 15 septembre 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Monsieur [M] [C]

Né le 22 septembre 1981 à [Localité 7] (92)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par : Me Margaux GOETZ NECTOUX, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T 12

APPELANT

****************

Association [Localité 3] SPORTING CLUB

N° SIRET : 334 665 453

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par : Me Anne LOAËC-BERTHOU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS et Me Jean-Claude CHEVILLER, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0945.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Présidente,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseillère,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère,

Greffière lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,

Greffière placée lors de la mise à disposition : Mme Virginie BARCZUK

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

L'Association [Localité 3] Sporting Club est une association au sens de la loi 1901, ayant pour objet général l'organisation et le développement des activités physiques et sportives au profit de ses membres ainsi que la promotion du sport sur le plan local. Ce club sportif omnisports, situé à [Localité 6] dans les Hauts-de-Seine, compte 33 sections sportives, dont une section karaté, et réunit près de 17 000 adhérents.

Par contrat de travail intermittent à temps partiel du 1er décembre 2007, M. [M] [C], né le 22 septembre 1981, a été engagé par l'Association [Localité 3] Sporting Club (ci-après LSC) en qualité d'entraîneur de karaté, statut non cadre, groupe 4 de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005.

Par courrier du 24 juin 2016, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 4 juillet 2016. Il s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre du 25 juillet 2016 ainsi rédigée :

« (...) Nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave en raison des faits suivants.

Depuis plusieurs mois, à la suite de votre demande d'augmentation de rémunération, que nous avons été contraints de refuser, début 2016, votre comportement s'est très nettement dégradé.

Vous avez ostensiblement cessé d'adresser la parole à plusieurs membres du Bureau de la Section Karaté, suscitant les interrogations des adhérents. Vous avez aussi refusé de régulariser votre avenant pour la saison sportive 2015-2016, sans raison valable.

Nous vous avons rappelé à l'ordre oralement à plusieurs reprises, notamment au cours d'une réunion au siège de l'Association, mais ceci n'a conduit à aucune amélioration, bien au contraire.

En effet, ces dernières semaines, votre attitude est devenue intolérable.

Le 11 juin dernier, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste, sans nous fournir la moindre explication ni nous transmettre le moindre justificatif.

Le 16 juin, vous vous êtes permis d'adresser directement un courrier électronique groupé ('mailing') à tous les adhérents de la Section Karaté de l'Association. Dans ce message, intitulé 'Je souhaite connaître vos ressentis et vos points de vue', vous réclamiez l'avis des adhérents sur votre travail, et leur demandiez s'ils étaient 'satisfaits du travail que [vous faites] au sein de la Section'.

Vous n'avez pour cela à aucun moment demandé - et moins encore obtenu - l'autorisation des dirigeants de la Section, que vous n'avez pas même pris la peine d'informer de votre initiative personnelle.

Etant salarié de l'Association, il ne vous appartient nullement de décider ainsi, de votre propre chef, sans même aviser vos supérieurs, d'écrire à l'ensemble des adhérents pour leur demander de juger votre travail.

Au surplus, dans ce message, bien qu'envoyé en tant que salarié de notre Association, vous n'avez pas craint d'insérer un lien vers le site Internet que vous exploitez à titre personnel ('www.[05].com'), promouvant une activité de coaching qui vous est propre et qui n'a bien entendu aucun lien avec la Section Karaté du LSC.

Plusieurs adhérents, surpris de cet envoi, ont alerté la Direction de la Section Karaté, contraignant son Président à vous rappeler à l'ordre, le 17 juin, par courrier électronique, en vous indiquant que votre mailing était contraire aux règles de l'Association et qu'il n'était pas acceptable de procéder ainsi.

Or, en guise de réponse, vous lui avez adressé, 1e 18 juin, un e-mail contenant des propos tout à fait inacceptables envers un supérieur hiérarchique.

Vous lui avez écrit que 'personne [n'allait vous] reprocher de demander l'avis de [vos] élèves' (qui ne sont pas 'les vôtres' mais ceux du club), dédaignant ainsi son rappel à 1'ordre et n'hésitant pas à qualifier votre mailing aux adhérents de 'bilan de compétences', ce qui n'est absolument pas le cas.

Vous vous êtes permis d'ajouter : 'Quand on ne connaît pas le domaine de l'enseignement, alors mieux vaut ne pas s'attarder à poser des questions qui ne font ni évoluer, ni progresser. Contrairement à ce que tu dis, tu es le président et je suis l'enseignant alors ne mélange pas les genres, chacun à sa place', puis : 'C'est bien beau d'aligner la composition du bureau, je peux vous rappeler vos différentes missions à mener aussi !!! Mais je préfère vous voir sur le terrain et répondre aux différents besoins de la Section, c'est bien beau de parler mais pour agir il n'y a jamais personne comme par hasard'.

De tels propos sont non seulement parfaitement dénigrants pour le Président de Section, mais dénotent également un ton tout à fait déplacé, notamment en intimant un ordre à votre supérieur.

En conclusion de ce courriel, vous n'avez pas hésité à multiplier les critiques personnelles et à utiliser des formules arrogantes (telles que 'je te rappelle que je n'ai peur de personne'), tout en refusant de fournir une explication à propos de votre absence injustifiée du 11 juin.

La teneur d'un tel courrier envers votre supérieur hiérarchique direct, montrant un total mépris à son égard, est tout à fait inacceptable, de même que votre refus d'explication quant à votre absence du 11 juin.

Enfin, le 23 juin, vous n'avez pas hésité à réitérer le comportement reproché, en adressant de nouveau un courrier électronique groupé ('mailing') aux adhérents de la Section, sans consulter ni informer la Direction de celui-ci.

Ce faisant, vous avez commis un acte d'insubordination grave, en méconnaissant délibérément l'instruction très claire du Président de la Section, formulée par écrit quelques jours auparavant. Cela constitue une violation manifeste des articles 2 et 14 de votre contrat de travail (réitérés notamment dans votre avenant du 24 juillet 2015), qui stipulent que vous devez vous conformer strictement aux directives et instructions de votre hiérarchie. Nous ne saurions admettre une telle insubordination caractérisée.

Au surplus, dans ce courriel, vous n'hésitez pas à faire état auprès des adhérents de votre 'statut de contrat' et de votre 'rémunération' ou encore du fonctionnement de la Section (indiquant que vous n'auriez 'jamais eu de réunion depuis [vos] débuts').

Plus grave, encore, vous y exposez en détail votre propre position sur un point de fonctionnement interne de la Section, critiquant sa Direction, vos relations avec l'Association, ou encore votre rémunération et vous vous en plaignez auprès des adhérents en incriminant les dirigeants de la Section en des termes une nouvelle fois totalement inadmissibles : 'ils ne sont pas contents. Je n'ai pas d'autres revenus contrairement à d'autres professeurs, c'est leur choix s'ils veulent faire des cours bénévolement, j'en ai fait sans compter depuis ce temps-là, mais maintenant je me suis fait avoir et je vais réclamer ce qu'ils me doivent et surtout je l'ai fait pour servir tout le monde', ou encore : 'Maintenant comme ils se sont rendus compte de l'erreur ils veulent nous faire signer un papier comme quoi, les vacances scolaires on doit travailler bénévolement, sinon on ferme la Section', 'je n'étais pas d'accord avec eux', ou même : 'j'ai fait confiance mais maintenant je vais faire attention à tout'.

Il va de soi que de telles considérations n'ont absolument pas à être portées à la connaissance des adhérents, et encore moins par vous. Vos propos et les accusations que vous proférez (notamment selon lesquelles vous vous seriez 'fait avoir' !) constituent en outre un grave dénigrement de votre employeur auprès de ses propres adhérents, ce qui n'est absolument pas tolérable.

Enfin, ici encore, votre courriel était accompagné du lien vers le site Internet de votre activité privée de coaching 'www.[05].com'.

Ce second mailing a vivement interpellé plusieurs adhérents, qui n'ont pas compris, ni accepté d'être ainsi pris à témoins et s'en sont plaints auprès de la Direction de la Section.

Ces faits nuisent désormais gravement au bon fonctionnement de la Section Karaté de notre Association.

Nous considérons donc que l'ensemble des faits ci-dessus exposés constituent des fautes graves rendant impossible votre maintien même temporaire au sein de l'Association.

Les explications que vous nous avez fournies lors de l'entretien préalable ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de ceux-ci.

Nous avons donc décidé de vous licencier pour faute grave. (...) ».

Par requête reçue au greffe le 23 décembre 2016, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles aux fins de contester son licenciement et de voir condamner l'Association [Localité 3] Sporting Club au versement de diverses sommes indemnitaires et salariales.

Par jugement de départage rendu le 27 septembre 2019, le conseil de prud'hommes a :

- dit que le licenciement de M. [C] par l'Association [Localité 3] Sporting Club a une cause réelle et sérieuse,

- fixé la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 2 529,67 euros, congés payés inclus,

- condamné l'Association [Localité 3] Sporting Club à payer à M. [C] les sommes suivantes :

* 5 059,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant les congés payés afférents,

* 4 901,23 euros à titre d'indemnité de licenciement,

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2016,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement,

- condamné l'Association [Localité 3] Sporting Club à payer à M. [C] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné l'Association [Localité 3] Sporting Club aux dépens de l'instance,

- rappelé qu'en vertu de l'article R. 1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire les condamnations ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre ainsi que celles ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités.

M. [C] a interjeté appel de la décision par déclaration du 29 octobre 2019.

Par conclusions adressées par voie électronique le 23 janvier 2020, il demande à la cour de :

- constater que son licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

- constater que les conditions de validité du contrat de travail intermittent ne sont pas remplies,

- constater que les heures complémentaires effectuées par M. [C] ont eu pour effet de porter sa durée du travail au-delà de la durée légale,

- constater que le Club a omis de déclarer les heures complémentaires effectuées par M. [C] sur ses bulletins de salaire en toute connaissance de cause,

en conséquence,

* Sur le licenciement injustifié de M. [C] :

- condamner le LSC au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 6 860 euros,

- condamner le LSC au paiement de l'indemnité de congés payés afférente d'un montant de 686 euros,

- condamner le LSC au paiement de l'indemnité conventionnelle de licenciement pour un montant de 6 860 euros,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 35 000 euros net,

* Sur la requalification du contrat de travail intermittent à temps partiel de M. [C] en contrat de travail à temps complet :

- condamner le LSC au paiement d'un rappel de salaire pour un montant de 7 495 euros du 1er août au 31 décembre 2013,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 749 euros,

- condamner le LSC au paiement d'un rappel de salaire pour un montant de 18 194 euros pour l'année 2014,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 1 819 euros,

- condamner le LSC au paiement d'un rappel de salaire pour un montant de 18 194 euros pour l'année 2015,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 1 819 euros,

- condamner le LSC au paiement d'un rappel de salaire pour un montant de 10 613 euros du 1er janvier à fin juillet 2016,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 1 061 euros,

- condamner le LSC au paiement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé d'un montant de 20 580 euros,

En tout état de cause,

- condamner le LSC au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- 'assortir de l'exécution provisoire le jugement à intervenir'.

Par conclusions adressées par voie électronique le 23 mars 2020, l'Association [Localité 3] Sporting Club demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [C] de l'intégralité de ses demandes pour :

* 6 860 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 686 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents,

* 6 860 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 35 000 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 7 495 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er août au 31 décembre 2013,

* 749 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 18 194 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014,

* 1 819 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 18 194 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2015,

* 1 819 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 10 613 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier à fin juillet 2016,

* 1 061 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 20 580 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave de M. [C] en licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné l'Association LSC à lui verser la somme de 5 059,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant les congés payés afférents et 4 901,23 euros à titre d'indemnité de licenciement,

En tout état de cause, statuant à nouveau,

- juger le licenciement pour faute grave de M. [C] justifié,

- débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner M. [C] à payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mettre les entiers dépens à sa charge.

Par ordonnance rendue le 16 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 15 avril 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Sur les demandes de rappels de salaires

M. [C] prétend avoir effectué un nombre d'heures complémentaires, ni rémunérées ni déclarées pour la grande majorité d'entre elles, tel que sa durée du travail correspondait en réalité à un temps plein. Il fait valoir que son contrat de travail prévoyait qu'il était « chargé d'assurer l'animation et l'entraînement des adhérents de la section karaté du [Localité 3] Sporting Club » mais que la durée du travail mentionnée dans le contrat correspondait seulement aux heures de cours qu'il donnait au sein du club, que nombre de tâches qu'il réalisait n'étaient pas considérées comme du temps de travail effectif et n'étaient donc pas rémunérées ni déclarées, telles la communication avec les adhérents de la section karaté, les réunions de travail avec les dirigeants de la section karaté et les autres éducateurs sportifs, l'inscription administrative des adhérents ou leur inscription aux compétitions, l'accompagnement des adhérents aux compétitions le week-end, le reporting sur les résultats des adhérents en compétition.

Il sollicite un rappel de salaire sur la base d'un temps complet à compter du 1er août 2013 et jusqu'au 31 juillet 2016, soit la somme totale de 54 496 euros, outre congés payés afférents.

L'employeur soulève la prescription des demandes antérieures au 1er janvier 2014 et conclut en tout état de cause au rejet de l'intégralité des demandes.

Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, applicable à compter du 17 juin 2013, « L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. ».

M. [C] ayant saisi la juridiction prud'homale le 23 décembre 2016, il est prescrit en sa demande portant sur la période antérieure au 23 décembre 2013.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences légales ainsi rappelées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire, M. [C] ne communique aucun décompte précis, se contentant de procéder à une évaluation forfaitaire de ce qu'il estime lui être dû, sur la base d'un temps complet. Hormis une liste des tâches qu'il prétend avoir assumées, il ne produit aucun élément sur le temps qu'il y consacrait et les attestations dont il se prévaut se limitent à saluer ses compétences d'enseignant de karaté et ses bonnes relations avec ses élèves, ce qui n'est nullement l'objet du litige.

Ces éléments n'apparaissent pas suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, étant au surplus observé qu'il est justifié du paiement au salarié de 49 heures complémentaires au titre de la saison 2015/2016, de 45 heures complémentaires au titre de la saison 2014/2015 et de 18 heures complémentaires au titre de la saison 2013/2014.

L'appelant sera en conséquence débouté de ses demandes de rappels de salaires ainsi que de sa demande au titre du travail dissimulé, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la requalification du contrat intermittent à temps partiel en contrat à temps complet

M. [C] sollicite la requalification de son contrat intermittent à temps partiel en contrat à temps plein au double motif d'une part, que les conditions de validité du contrat intermittent n'ont pas été respectées et d'autre part, qu'il a régulièrement travaillé au-delà de ses horaires théoriques voire au-delà de la durée légale de travail.

S'agissant des conditions de validité du contrat intermittent, il fait valoir que les périodes de travail n'étaient pas définies, seuls deux avenants étant signés, l'un pour la saison 2008-2009 et l'autre pour la saison 2012-2013, aucun avenant, précisant les périodes et heures travaillées, n'ayant été signé pour les saisons 2009-2010, 2010-2011, 2011-2012, 2013-2014, 2014-2015 et 2015-2016.

Il prétend ensuite qu'alors que son premier contrat de travail stipulait qu'il ne travaillait pas pendant les vacances scolaires, il a régulièrement travaillé durant ces périodes, ce que la direction du club ne pouvait pas ignorer puisqu'elle incitait les éducateurs sportifs à maintenir leurs cours pendant les vacances et validait les heures de cours qu'ils souhaitaient maintenir, qu'en outre il a été amené à accomplir de nombreuses tâches non comptabilisées dans son temps de travail, de sorte qu'il a en réalité accompli un temps plein.

L'association LSC s'oppose à la demande de requalification. Elle énonce que le contrat de travail de M. [C] répondait exactement à la réglementation relative au contrat de travail intermittent, que le salarié était parfaitement informé depuis l'origine de la relation contractuelle de l'alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées et de la répartition des heures de travail au sein de ces périodes, qu'ainsi des plannings indiquant très précisément ses horaires de travail lui étaient communiqués tous les ans et repris dans les avenants remis chaque année avec mention des différentes heures de cours, que le fait qu'il n'ait pas retourné signés les avenants annuels ne signifie pas qu'il ne connaissait pas ses horaires de travail.

Elle ajoute que les quelques cours dispensés pendant les vacances scolaires ont été mis en place à la seule initiative des éducateurs sportifs et se plaçaient uniquement dans le cadre du bénévolat, que M. [C] ne saurait y puiser un motif de requalification du contrat de travail dès lors qu'il ne s'est jamais agi d'un travail commandé par le LSC, que le salarié n'a jamais été en charge de la communication de la section karaté, ni de l'inscription des adhérents, que lorsque sa participation à des compétitions a été demandée par le LSC, il a été rémunéré des heures complémentaires réalisées à ce titre, sachant que pendant ces périodes il n'effectuait pas les 3,5 heures de cours prévues le samedi et pour lesquelles il était néanmoins rémunéré.

Il résulte de l'article L. 3123-31 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que dans les entreprises pour lesquelles une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement le prévoit, des contrats de travail intermittent peuvent être conclus afin de pourvoir les emplois permanents, définis par cette convention ou cet accord, qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Selon l'article L. 3123-33 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, le contrat de travail intermittent est un contrat à durée indéterminée. Ce contrat est écrit. Il mentionne notamment :

1° La qualification du salarié ;

2° Les éléments de la rémunération ;

3° La durée annuelle minimale de travail du salarié ;

4° Les périodes de travail ;

5° La répartition des heures de travail à l'intérieur de ces périodes.

La convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005 dont relève le LSC, autorise expressément en son article 4.5, le recours au contrat intermittent pour les activités sportives.

En l'espèce, le contrat signé par M. [C] le 1er décembre 2007 mentionne :

- à l'article 2, sa qualification d'entraîneur de karaté, avec la qualité de technicien, correspondant au groupe 4 de la classification de la convention collective susvisée ;

- à l'article 8, sa rémunération ;

- à l'article 6, la durée minimale annuelle de travail de 94,5 heures entre le 1er septembre et le 31 août ;

- à l'article 5, les périodes de travail au cours de l'année scolaire, étant précisé que les périodes non travaillées sont les périodes de vacances scolaires pour le département des Hauts-de-Seine ainsi que les jours fériés. Le contrat mentionne les horaires et jours d'intervention pour l'année scolaire 2007/2008 et renvoie pour les années suivantes à un avenant établi le 1er septembre de chaque année.

Le LSC verse aux débats les avenants établis du 1er septembre 2008 au 2 septembre 2015, lesquels précisent les périodes et horaires de travail de M. [C] ainsi que sa rémunération. Le dernier avenant rectificatif relatif à la saison 2015-2016 fait état, à compter du 1er avril 2016, d'un nombre d'heures moyen de 85,01 par mois pour un salaire brut mensuel de 2 107,55 euros incluant les congés payés. Seuls sont signés par le salarié les avenants relatifs aux années scolaires 2008/2009, 2011/2012, 2012/2013.

L'employeur démontre néanmoins que les horaires des cours de karaté étaient arrêtés chaque année au printemps pour l'année à venir, à la fin de la période de pré-inscription, en concertation avec les éducateurs sportifs et les pièces par ailleurs produites par chacune des parties établissent que M. [C] avait une parfaite connaissance de ses horaires de travail.

Comme l'a justement retenu le conseil de prud'hommes, le défaut de signature de certains des avenants ne suffit donc pas à établir que le salarié n'a pas eu connaissance de ses heures et jours de cours au début de chaque année scolaire.

Il se déduit de ces éléments que le contrat de travail intermittent de M. [C] est régulier.

Outre que la cour n'a précédemment pas retenu le principe d'heures complémentaires non rémunérées, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont considéré que les éléments produits par le salarié étaient insuffisants pour justifier de l'accomplissement d'heures complémentaires qui porteraient son temps de travail au-delà de la durée légale du travail de 151,67 heures par mois.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande de requalification du contrat de travail intermittent à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

Sur le licenciement

L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.

La faute grave se définit comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir d'une faute grave du salarié d'en apporter seul la preuve. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, il est reproché au salarié :

- une absence injustifiée,

- une réitération d'actes d'insubordination,

- des propos dénigrants vis-à-vis de son supérieur hiérarchique et du LSC.

L'employeur expose que les relations avec M. [C] se sont brusquement dégradées au début de l'année 2016 lorsque celui-ci a réclamé une augmentation de son taux horaire et que cette augmentation lui a été refusée, que le salarié a multiplié les provocations vis-à-vis des membres du bureau de la section karaté, refusant de leur adresser la parole et de coopérer, qu'il a réclamé le paiement d'heures complémentaires pour lesquelles il avait déjà été payé, qu'il a refusé de signer l'avenant rectificatif pour l'année 2015/2016 qu'il avait pourtant réclamé.

Le salarié soutient quant à lui que son licenciement repose sur des motifs fallacieux et fantaisistes invoqués par le club pour les seuls besoins de la cause, que ces motifs ne constituent ni une faute grave, ni même une cause réelle et sérieuse.

- sur l'absence injustifiée

Il est reproché en premier lieu au salarié de ne pas s'être présenté à son poste le 11 juin 2016, sans fournir à sa hiérarchie la moindre explication.

Le LSC produit une attestation de M. [E] [W], trésorier de la section karaté, lequel écrit : « Je déclare ne pas avoir souvenir d'avoir été informé par Monsieur [M] [C] de son absence début juin 2016, afin de participer à une compétition de boxe française. A cette époque, les relations avec Monsieur [C] commençaient à se dégrader. Pour ma part, je limitais donc nos échanges au strict minimum afin d'éviter toute source de tension supplémentaire. J'étais déjà (je le suis toujours) très affecté par la tournure qu'ont pris nos relations qui ont été amicales et constructives durant de nombreuses années. »

M. [C] justifie cependant de sa participation à une compétition de boxe française pour la section du club et de ce que son remplacement par M. [V] [T] avait été organisé pour assurer en son absence les cours du samedi 11 juin 2016, ainsi qu'il en a informé les parents de ses élèves.

Le grief sera écarté.

- sur la réitération d'actes d'insubordination

Il est reproché en deuxième lieu au salarié d'avoir pris l'initiative d'adresser directement à l'ensemble des adhérents de la section karaté, le 16 juin 2016, un courriel sollicitant leur avis sur la qualité de son travail, et ce sans avoir obtenu l'autorisation des dirigeants de la section et sans même les en avoir informés, puis d'avoir envoyé le 23 juin 2016 aux mêmes destinataires un courriel dans lequel il mettait en cause le fonctionnement de la section karaté et faisait part de son différend avec les dirigeants de la section, alors que par courriel du 17 juin 2016, le président de la section karaté lui avait rappelé les règles de fonctionnement du club et notamment l'interdiction de contacter directement les adhérents pour leur demander leur avis.

Sont versés aux débats les deux courriels litigieux des 16 et 23 juin 2016 ainsi que le courriel de rappel des règles envoyé à M. [C] le 18 juin 2016 par M. [Y] [J], président de la section karaté, message dont le salarié n'a aucunement tenu compte, l'envoi d'un deuxième courriel caractérisant d'autant mieux l'insubordination reprochée.

Le grief est matériellement établi.

- sur les propos dénigrants vis-à-vis de son supérieur hiérarchique et du LSC

Il est reproché en troisième lieu au salarié d'avoir adressé le 18 juin 2016 au président de la section karaté, M. [J], un courriel contenant des propos dénigrants et déplacés envers son supérieur hiérarchique. L'employeur désapprouve également le ton du courriel du 23 juin 2016 aux adhérents, dans lequel M. [C] critique ouvertement le fonctionnement de la section karaté et met en cause l'honnêteté et la probité du LSC, de ses dirigeants et des membres du bureau de la section karaté.

Le salarié estime avoir répondu de façon mesurée à M. [J] et sans abuser de sa liberté d'expression. Il dit s'être ému de la réaction disproportionnée du président de la section karaté à son envoi du 16 juin 2016 mais être resté courtois, ses propos ne pouvant selon lui être qualifiés de malveillants, diffamatoires, excessifs ou injurieux. Quant au courriel du 23 juin 2016, il indique avoir seulement informé les adhérents qu'il n'assurerait plus de cours pendant les vacances scolaires, n'étant pas rémunéré pour ce travail.

La cour relève toutefois que dans son message au président de la section karaté, M. [C] lui signifie qu'il ne connait rien au domaine de l'enseignement et qu'il doit donc rester à sa place, il lui reproche de chercher à lui faire la morale ou à l'intimider, en indiquant qu'il n'a peur de personne, il reproche aussi aux membres du bureau leur inaction, ces propos pouvant être qualifiés de blessants et dénigrants, comme le fait justement valoir l'employeur, ce qui caractérise un abus dans la liberté d'expression reconnue au salarié.

Dans le courriel adressé le 23 juin 2016 aux adhérents, M. [C] laisse entendre qu'il n'a jamais été rémunéré à la hauteur du travail qu'il effectuait au sein du club, il dit s'être 'fait avoir' et envisager de réclamer ce qu'il estime lui être dû. Ce faisant, il critique publiquement la direction du club en des termes véhéments et irrespectueux mettant en cause sa probité et laissant supposer qu'elle ne respecte pas la loi, et ce à l'adresse de l'ensemble des adhérents.

Le grief est matériellement établi.

Au vu de ce qui précède, le licenciement de M. [C] s'imposait et faisait obstacle à la poursuite de son contrat de travail, y compris pendant la durée du préavis.

La faute grave étant caractérisée, le jugement entrepris sera infirmé et l'appelant sera débouté de l'intégralité de ses demandes indemnitaires.

Sur les dépens de l'instance et les frais irrépétibles

M. [C] supportera les dépens en application des dispositions de l'article'696 du code de procédure civile.

Il sera en outre condamné à payer à l'Association LSC une indemnité sur le fondement de l'article'700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement rendu le 27 septembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Nanterre sauf en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [M] [C] a une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné l'Association [Localité 3] Sporting Club à payer à M. [M] [C] une indemnité compensatrice de préavis incluant les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de l'instance ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le licenciement de M. [M] [C] repose sur une faute grave ;

DÉBOUTE M. [M] [C] de ses demandes de versement d'une indemnité de licenciement et d'une indemnité compensatrice de préavis ;

CONDAMNE M. [M] [C] à verser à l'Association [Localité 3] Sporting Club la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE M. [M] [C] de sa demande de ce chef ;

CONDAMNE M. [M] [C] aux dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signée par Madame Valérie DE LARMINAT, Conseillère, en remplacement de Madame Isabelle VENDRYES, Présidente, légitimement empêchée, et par Madame Virginie BARCZUK, Greffière placée, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIERE placée, P/ LA PRESIDENTE empêchée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03956
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.03956 ?
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