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14/09/2022 | FRANCE | N°20/00255

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 14 septembre 2022, 20/00255


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 SEPTEMBRE 2022



N° RG 20/00255

N° Portalis DBV3-V-B7E-TW67



AFFAIRE :



[E] [G]



C/



SARL EASY HOTEL [Localité 7]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : C

N° RG : F 18/00459<

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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Jennifer SERVE



Me Xavier D'HALESCOURT



Copie numérique adressée à :



Pôle Emploi







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATORZE SEPTEMBR...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 SEPTEMBRE 2022

N° RG 20/00255

N° Portalis DBV3-V-B7E-TW67

AFFAIRE :

[E] [G]

C/

SARL EASY HOTEL [Localité 7]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : C

N° RG : F 18/00459

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jennifer SERVE

Me Xavier D'HALESCOURT

Copie numérique adressée à :

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [E] [G]

née le 2 mars 1993 à [Localité 6]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentant : Me Jennifer SERVE, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 87

APPELANTE

****************

SARL EASY HOTEL [Localité 7]

N° SIRET : 522 053 263

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Xavier D'HALESCOURT, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau du HAVRE

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 2 juin 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

Par jugement du 23 décembre 2019, le conseil de prud'hommes de Montmorency (section commerce) a :

- débouté Mme [E] [G] de la totalité de ses demandes,

- débouté la société Easy Hotel [Localité 7] de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée au greffe le 28 janvier 2020 Mme [G] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 22 mars 2022.

Par dernières conclusions remises au greffe le 27 avril 2020, Mme [G] demande à la cour de':

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

. l'a déboutée de la totalité de ses demandes,

statuant à nouveau,

- dire que la société Easy Hotel [Localité 7] a manqué à son obligation de sécurité,

- condamner la société Easy Hotel [Localité 7] à lui verser la somme de 50 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

- dire que le comportement fautif de société Easy Hotel [Localité 7] est à l'origine du licenciement pour inaptitude de la salariée,

- dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamner la société Easy Hotel [Localité 7] à lui verser les sommes suivantes:

. 6 800,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 5 101,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 510,15 euros à titre de congés payés afférents,

. 1 470,62 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement,

- condamner la société Easy Hotel [Localité 7] à lui verser les sommes suivantes :

. 10 203,00 euros à titre d'indemnité forfaitaire travail dissimulé,

. 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de mise en place de la prévoyance complémentaire,

. 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêt pour défaut de bénéfice de la mutuelle d'entreprise,

. 593,65 euros à titre de rappel de salaire au titre de la retenue injustifiée sur le bulletin de paie de mai 2018,

. 59,37 euros à titre de congés payés afférents,

. 309,35 euros nets à titre de rappel de salaire au titre de la retenue injustifiée sur le bulletin de paie de juillet 2018,

. 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour négligence fautive dans la délivrance d'une attestation des salaires à la CPAM et retards de paiement,

- ordonner à la société Easy Hotel [Localité 7] la remise d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle emploi, d'un solde tout compte, et d'un bulletin de paie récapitulatif, conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 100,00 euros par document et par jour de retard sous quinzaine à compter de la notification de la décision à intervenir,

- condamner la société Easy Hotel [Localité 7] à lui verser la somme de 2 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappeler que les intérêts au taux légal courent de plein droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, et les faire courir à compter de cette date sur les créances de nature indemnitaire par application de l'article 1231-6 du code civil,

- condamner la société Easy Hotel [Localité 7] aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe le 29 mai 2020, la société Easy Hotel [Localité 7] demande à la cour de':

- confirmer le jugement attaqué,

- débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [G] à lui verser la somme de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

LA COUR,

Mme [E] [G] a été engagée par la société Easy Hotel [Localité 7] en qualité de réceptionniste tournante par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 25 novembre 2014.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective des hôtels, cafés et restaurants.

L'effectif de la société était de plus de 10 salariés.

Mme [G] a été victime d'un accident de trajet le 2 janvier 2015 et a été en arrêt de travail sans discontinuer jusqu'au 27 avril 2018.

Par certificat final transmis à la CPAM le 25 avril 2018, le docteur [I] a prescrit à la salariée un arrêt de travail jusqu'au 27 avril 2018 et a conclu à sa consolidation avec séquelles.

Mme [G] a repris son poste de travail le 28 avril 2018 et le médecin lui a prescrit un nouvel arrêt maladie du 15 au 25 mai 2018.

La salariée a travaillé de nouveau du 26 au 29 mai 2018.

Le 29 mai 2018, le médecin du travail a rendu l'avis d'inaptitude suivant au visa de l'article R.4624-42 lors de la visite de reprise ' l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi' et a conclu 'au vu de son état de santé, le salarié ne peut pas suivre une formation dans l'entreprise.'.

Par lettre du 2 juillet 2018, Mme [G] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 10 juillet 2018.

Mme [G] ne s'est pas présentée à l'entretien.

Mme [G] a été licenciée par lettre du 13 juillet 2018 pour inaptitude non professionnelle dans les termes suivants:

«'Je vous ai convoqué pour un entretien préalable le 10 juillet à 10h, la convocation vous a été distribuée par RAR 1A155 067 1154 1 en date du 05/07/2018. Vous n'avez pas répondu à cette convocation et ne vous êtes pas présentée à cet entretien.

Le médecin du travail vous a déclaré inapte à occuper l'emploi de réceptionniste tournante qui est le vôtre dans l'entreprise, en mentionnant expressément « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

«Je suis par conséquent dans l'obligation de vous notifier par la présente lettre votre licenciement à compter de ce jour. (...)'»

Le 16 juillet 2018, Mme [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency aux fins de dire que licenciement a un caractère professionnel, résulte du comportement de l'employeur et obtenir le paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Sur l'origine de l'inaptitude :

Sans évoquer le moindre moyen, la salariée estime que l'inaptitude est d'origine professionnelle à la suite d'un accident du travail, l'employeur ayant notifié un licenciement pour inaptitude non professionnelle résultant d'un accident de trajet.

L'accident de trajet n'est pas soumis au même régime que celui qui résulte d'une maladie non professionnelle ou d'un accident survenu pendant la vie personnelle du salarié.

Au cas présent, cependant, la salariée victime d'un accident du trajet ne peut pas bénéficier des règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle en application de l'article L. 1226-10 du code du travail.

Le licenciement pour inaptitude a donc été prononcé à juste titre comme étant consécutif à une maladie ou un accident non professionnel.

Sur l'obligation de sécurité :

La salariée reproche à l'employeur de ne pas avoir organisé la visite de reprise et d'avoir aggravé son état de santé justifiant un nouvel arrêt.

L'employeur réplique avoir bien organisé la visite de reprise dès le 23 avril 2018 en urgence. Il soutient qu'il n'a commis aucun manquement, la salariée ayant précipité sa reprise à la suite de la cessation du versement des indemnités journalières.

Aux termes de l'article R. 4624-31 en sa version alors applicable, le travailleur bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail notamment après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel.

Dès que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise.

Il appartient donc à l'employeur de prendre l'initiative d'organiser la visite médicale de reprise afin que le médecin du travail apprécie la capacité à reprendre le travail ou délivre, dans le cas contraire, un avis d'inaptitude.

Le médecin a informé la CPAM le 25 avril 2018 que la salariée était en arrêt de travail jusqu'au 27 avril 2018, avec consolidation à cette date à la suite de l'accident de trajet dont elle avait été victime le 2 janvier 2015 justifiant son admission en réanimation.

La salariée a repris son activité professionnelle le 28 avril 2018 avec planification de son travail sur plusieurs semaines.

Mme [W], 'responsable des réseaux adjointe Hôtels-restaurants', atteste le 16 septembre 2019 qu'elle a contacté la médecine du travail le 23 avril 2018 et a effectué plusieurs relances, la visite ayant lieu le 29 mai 2018, la salariée étant alors en arrêt maladie.

Aucun élément factuel plus précis n'est communiqué par l'employeur, lequel, tenu d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité notamment par l'organisation de la visite de reprise d'autant plus que la salariée était absente depuis plus de trois années et que le médecin traitant concluait à la consolidation avec séquelles.

La longue absence justifiait une attention particulière de l'employeur alors que la salariée occupait un poste de réceptionniste avec contrôle des chambres sur de longues journées, notamment de 12h à 22 heures ou 14h30 à 22 heures dès le week-end du 5 mai 2018.

La salariée a tenu informé l'employeur de son retour dès le 23 avril 2018 et la visite de reprise n'a pas été organisée dans les huit jours de sa reprise.

Finalement, elle a travaillé sans visite de reprise du 28 avril au 15 mai 2018. L'employeur ne démontre pas qu'il a respecté les dispositions légales de sorte qu'il a manqué à son obligation de sécurité.

La salariée établit que son état de santé s'est dégradé ayant été à nouveau arrêtée le 15 mai 2018.

Au regard de l'importance de ce manquement et de ses conséquences sur l'état de santé de la salariée, il convient, infirmant le jugement, de lui allouer en réparation du préjudice subi la somme de 3 000 euros.

Sur la rupture :

La salariée affirme que les manquements de l'employeur à son obligation de sécurité ont entraîné une nouvelle dégradation de son état de santé et que faute d'avoir organisé une visite médicale de reprise dans le délai légal, l'employeur est directement responsable de son inaptitude définitive et de la perte de son emploi.

L'employeur indique qu'il n'était pas informé de l'état de santé de la salariée, notamment qu'elle conservait des séquelles de l'accident de trajet et il conteste que la salariée impute l'aggravation de son état de santé à l'absence de visite de reprise.

L'employeur est tenu à l'égard du salarié d'une obligation de sécurité qui n'est pas une obligation de résultat mais une obligation de moyen renforcée, l'employeur pouvant s'exonérer de sa responsabilité s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En vertu des articles L. 4121-1 et L. 1152-4 du code du travail, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a respecté son obligation de sécurité telle que prévue aux articles précités.

Le non-respect de l'obligation de sécurité de l'employeur a été établi.

C'est à juste titre que la salariée soutient que la visite de reprise aurait permis d'apprécier ses aptitudes physiques à reprendre son poste ou à tout le moins, si un aménagement s'avérait nécessaire.

En tout état de cause, l'absence de visite empêche l'employeur de savoir si la salariée était apte à tout emploi dès le 28 avril 2018 alors qu'elle a repris son travail pour une première période de plus de deux semaines puis pour trois journées avant la décision du médecin du travail.

L'employeur n'établit pas avoir aménagé le poste de la salariée à sa reprise comme il l'allègue, les horaires de Mme [G] étant les mêmes que ceux des autres salariés sur le planning prévisionnel.

Pas davantage, l'employeur ne rapporte la preuve que la salariée a modifié sa date de reprise de sorte que la visite médicale n'a pas pu être effectuée dans les 8 jours de son retour.

Si l'état de santé de la salariée pré-existait avant la reprise, son médecin traitant certifie le 14 juin 2018 qu'elle s'est présentée le 27 avril 2018 sans canne au cabinet et a conclu à la consolidation, même si des séquelles demeuraient.

Enfin, la salariée qui n'avait eu que 5 actes de kinésithérapie en mai 2018, s'est vue délivrer à nouveau 11 séances en juin dont 7 à compter du 19 juin 2018.

La santé de la salariée a ainsi été compromise par une reprise de travail intempestive à temps plein.

Cette situation a manifestement contribué à la dégradation de son état de santé qui a conduit à la déclaration d'inaptitude définitive sans aménagement possible et au licenciement.

Il convient donc d'infirmer le jugement et de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture :

En application du barème fixé à l'article L. 1235-3 du code du travail, Mme [G] qui a 3 années d'ancienneté, a droit à une indemnité brute comprise entre 3 mois et 4 mois de salaire mensuel brut.

Au regard de son âge au moment du licenciement, 25 ans, de son ancienneté dans l'entreprise, du montant de la rémunération moyenne de 1 700, 50 euros qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et son état de santé, de ce qu'elle a perçu l'allocation Pôle Emploi jusqu'au 29 février 2020, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi la somme de 6 000 euros.

Peu important que l'inaptitude ne soit pas d'origine professionnelle, dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis.

Le 10 juillet 2017, la MDPH a notifié à Mme [G] sa décision de lui accorder une allocation adultes handicapées et a fixé son taux d'incapacité professionnelle entre 50 et 70 %, la salariée sollicitant une indemnité compensatrice de préavis de trois mois en qualité de travailleur handicapé.

Pour bénéficier des dispositions de l'article L. 5213-9 du code du travail, qui a pour but de doubler la durée du délai-congé en faveur des salariés handicapés qui trouve à s'appliquer à l'indemnité compensatrice de préavis pour inaptitude non professionnelle, le salarié doit justifier de la qualité de travailleur handicapé au moment de la notification du licenciement.

L'employeur ne peut, en revanche, soutenir qu'il n'était pas informé du statut de travailleur handicapé au moment du licenciement pour échapper au doublement.

Il convient, infirmant le jugement, d'allouer à Mme [G] à titre d'indemnité compensatrice de préavis la somme de 5'101,50 euros outre les congés payés afférents, conformément aux dispositions de l'article VIII du contrat qui prévoit un préavis de deux mois pour une ancienneté de plus de deux ans, sans prise en compte du statut de travailleur handicapé.

Mme [G] a perçu une indemnité de licenciement d'un montant de 159,03 euros et sollicite la prise en compte pour le calcul de cette indemnité des périodes d'indisponibilité consécutives à son accident de travail que la loi assimile à des temps de service.

Toutefois, il a été précédemment retenu que l'inaptitude n'était pas d'origine professionnelle à la suite d'un accident du travail.

Confirmant le jugement, Mme [G] sera déboutée de sa demande au titre de l'indemnité de licenciement.

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur s'est soustrait intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable d'embauche ou à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie.

La salariée soutient ne pas avoir perçu à la fin du mois d'avril 2018 le paiement des heures accomplies du 28 au 30 avril 2018, n'ayant reçu ses fiches de paie d'avril et mai que postérieurement au 25 juin 2018, ajoutant qu'elle n'a pas reçu le bulletin de paye du mois de juin 2018.

L'employeur explique que le retour anticipé de la salariée n'a pas permis de modifier le bulletin de paye d'avril et que les cotisations sociales ont été prélevées pour les heures dues en avril 2018 sur le bulletin de paye suivant.

La régularisation de la situation dénoncée par la salariée a été effectuée sur le bulletin de paye de mai 2018 et l'employeur ne s'est donc pas soustrait intentionnellement à la déclaration des heures réalisées par la salariée.

S'agissant du mois de juin 2018, aucun bulletin de paye n'est produit par l'employeur qui a réglé le salaire en septembre 2018 sur le solde de tout compte, document qui officialise la situation.

Il convient de confirmer le jugement qui a débouté Mme [G] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur le défaut de prévoyance complémentaire :

La salariée expose que l'employeur s'est montré défaillant dans la mise en 'uvre d'une prévoyance complémentaire à son bénéfice.

Un forfait social pour contribution de prévoyance apparaît sur les bulletins de paye de janvier et février 2016 communiqués par la salariée puis sur celui de mai 2018, ce qui n'est pas le cas pour le bulletin de paye d'avril 2018 puisque les heures effectuées sont apparues sur le bulletin de paye de juin 2018.

Les articles XI et XII du contrat prévoient la cotisation obligatoire au régime de prévoyance de sorte que l'employeur y est tenu, le maintien des garanties de frais de santé et de prévoyance étant organisé en cas de rupture du contrat.

Ces dispositions s'imposent à l'employeur et la salariée ne justifie pas avoir subi un préjudice en raison de l'absence de mise en 'uvre au titre de la prévoyance complémentaire, n'ayant pas été placée en invalidité ou en incapacité.

Confirmant le jugement, la salariée sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la privation de la mutuelle complémentaire :

La salariée affirme avoir découvert la ' pseudo existence' de la complémentaire santé dans le cadre du présent litige et n'en avoir jamais bénéficié, l'employeur ne lui ayant pas permis d'adhérer au régime des frais de santé collectif.

Le contrat prévoit la cotisation obligatoire de la salariée à la mutuelle, ce qui est le cas sur le bulletin de paye du mois de mai 2018 mais non sur ceux de 2016.

Si la salariée a été entièrement remboursée de ses frais de kinésithérapie par la CPAM, elle n'a bénéficié d'aucune mutuelle complémentaire ni de la portabilité des garanties liées au frais de santé après la rupture.

Cette situation entraîne un préjudice financier évident qui a duré plusieurs années et qui sera réparé par une allocation de 1 000 euros.

Infirmant le jugement, la société Easy Hotel [Localité 7] sera condamnée à verser à Mme [G] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de complémentaire santé.

Il convient donc, infirmant le jugement, de débouter la salariée de sa demande de ce chef.

Sur le rappel de salaire au titre des retenues injustifiées :

La salariée indique que l'employeur a procédé à une retenue de :

- 733,20 nets euros sur le salaire de mai 2018 alors qu'elle aurait dû percevoir la somme de 593,68 euros bruts pour le travail accompli,

- de 309,25 euros nets sur le solde de tout compte pour 'reprise de trop perçu.

L'employeur n'a pas répondu à la salariée et ne conteste pas les demandes.

Les bulletins de paye de mai et juillet 2018 font bien mention de ces retenues non justifiées, l'employeur n'apporte aucune explication rationnelle et il convient donc de restituer ces sommes à la salariée.

Dès lors, le jugement sera infirmé et la société Easy Hotel [Localité 7] sera condamnée à verser à Mme [G] les sommes indûment retenues.

Sur la négligence fautive dans la délivrance de l'attestation de salaire et les retards de paiement du salaire :

La salariée n'établit pas l'existence d'un versement différé des indemnités journalières en raison de la carence de l'employeur à lui remettre une attestation de salaire, étant précisé qu'elle disposait alors du bulletin de paye en juillet 2018 et l'attestation destinée à Pôle emploi à remettre, si besoin, à la CPAM.

En revanche, le salaire du mois de juin 2018 a été versé avec retard en septembre 2018 avec le solde de tout compte.

Toutefois, la salariée ne justifie pas d'un préjudice particulier et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur la remise des documents:

Il conviendra de donner injonction à la société Easy Hotel [Localité 7] de remettre à Mme [G] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette mesure d'une astreinte.

Sur les intérêts :

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il est inéquitable de laisser à la charge de Mme [G] les frais par lui exposés en première instance et en cause d'appel non compris dans les dépens à hauteur de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

DIT le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL Easy Hotel [Localité 7] à payer à Mme [G] les sommes suivantes :

. 593,65 euros à titre du rappel de salaire de mai 2018,

. 59,37 euros au titre des congés payés afférents,

. 309,35 euros nets au titre du rappel de salaire sur le bulletin de paye de juillet 2018,

. 5'101,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 510,15 euros à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis,

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du jour de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

. 6 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de bénéfice de la mutuelle d'entreprise,

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

CONFIRME le jugement pour le surplus le jugement,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

ORDONNE d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies à la salariée du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités,

DÉBOUTE la SARL Easy Hotel [Localité 7] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Easy Hotel [Localité 7] à payer à Mme [E] [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Easy Hotel [Localité 7] aux dépens.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Clotilde Maugendre, présidente et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

                                                                                                             

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00255
Date de la décision : 14/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-14;20.00255 ?
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