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07/09/2022 | FRANCE | N°20/00505

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 07 septembre 2022, 20/00505


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 7 SEPTEMBRE 2022



N° RG 20/00505

N° Portalis DBV3-V-B7E-TYPS



AFFAIRE :



[C] [P]



C/



SASU PARCOURS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 15/03125



Copies

exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Clémentine TELLIER MAZUREK



Me Martine DUPUIS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 7 SEPTEMBRE 2022

N° RG 20/00505

N° Portalis DBV3-V-B7E-TYPS

AFFAIRE :

[C] [P]

C/

SASU PARCOURS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de NANTERRE

Section : E

N° RG : F 15/03125

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Clémentine TELLIER MAZUREK

Me Martine DUPUIS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [C] [P]

née le 17 décembre 1977 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Michel VERNIER, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 192 et Me Clémentine TELLIER MAZUREK, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 579

APPELANTE

****************

SASU PARCOURS

N° SIRET : 399 399 484

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Catherine LEGER de la SELARL ALTERLEX, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0703 et Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 mai 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

Par jugement du 18 décembre 2019, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section encadrement) a :

- dit que le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme [C] [P] repose sur des faits précis et objectifs, étrangers à toute discrimination,

- débouté Mme [P] de l'intégralité de ses prétentions,

- débouté la société Parcours de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire des parties,

- laissé les éventuels dépens à la charge de Mme [P].

Par déclaration adressée au greffe le 21 février 2020, Mme [P] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 8 mars 2022.

Par dernières conclusions remises au greffe le 7 mars 2022, Mme [P] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- dire que le licenciement est nul,

- ordonner sa réintégration dans son poste de directrice comptable, ou dans un poste équivalent, avec toutes conséquences de droit,

- condamner la société Parcours au paiement de la somme de 438 219 euros à titre de provision sur l'indemnité égale au montant des rémunérations dues pour la période du 30 décembre 2015 au 31 janvier 2022 (date des conclusions),

- dire que cette somme sera actualisée à la date de la réintégration effective, et sur la base d'un salaire brut reconstitué intégrant les augmentations moyennes de salaire et les primes accordées au personnel d'encadrement depuis le 30 décembre 2015, de même que les montants versés au titre de l'intéressement et de la participation,

- ordonner la remise en état du contrat de travail à compter de la réintégration de Mme [P] dans son poste de directrice comptable ou dans un poste équivalent,

- dire que cette remise en état devra notamment intégrer la prise en compte des augmentations moyennes de salaire accordées entre décembre 2015 et la date de réintégration effective, ainsi que le montant moyen des primes versées à l'encadrement sur la même période et la mise à disposition d'un véhicule de même catégorie à titre d'avantage en nature,

si la cour devait considérer que la réintégration est matériellement impossible,

- condamner la société Parcours au paiement de la somme de 36 018 euros (6 003 euros x 6), à titre d'indemnité en application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail (dans sa version antérieure à l'ordonnance du 22 septembre 2017), en complément de l'indemnité de 438 219 euros égale au montant des rémunérations dues pour la période du 30 décembre 2015 au 31 janvier 2022 (date des conclusions),

à titre subsidiaire,

- dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Parcours au paiement de la somme de 72 036 euros (12 mois de salaire), à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail,

- condamner la société Parcours au paiement de la somme de 18 009 euros (soit 3 mois) à titre de dommages et intérêts en réparation des circonstances vexatoires de la rupture, sur le fondement des articles 1147 du code civil et L. 1222-1 du code du travail,

en tout état de cause,

- condamner la société Parcours au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Parcours aux entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution forcée de la décision à intervenir, ainsi que les frais de signification de l'arrêt,

- débouter la société Parcours de son appel incident au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe le 3 mars 2022, la société Parcours demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 18 décembre 2019 en ce qu'il a :

. dit que le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme [P] repose sur des faits précis et objectifs, étrangers à toute discrimination,

. débouté Mme [P] de l'intégralité de ses prétentions,

. laissé les éventuels dépens à la charge de Mme [P],

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 18 décembre 2019 en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

en conséquence,

statuant à nouveau,

- débouter Mme [P] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions à son encontre,

- condamner Mme [P] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [P] aux entiers dépens.

LA COUR,

La société Parcours a pour activité principale la location longue durée de véhicules.

Mme [P] a été engagée par la société Parcours, en qualité de directrice comptable, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 2014.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective de l'automobile.

Enceinte lorsqu'elle a été engagée, Mme [P] a fait l'objet d'un arrêt de travail du 26 septembre au 12 octobre 2014 en raison d'une fausse couche.

Elle a fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail pour maladie à compter du 24 juin 2015 ; arrêt de travail en lien avec une deuxième grossesse.

Par lettre du 9 septembre 2015, alors que son arrêt de travail avait pris fin le 5 septembre 2015, Mme [P] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 21 septembre 2015.

Elle a été licenciée par lettre du 29 septembre 2015 pour insuffisance professionnelle dans les termes suivants :

« 1) Tant que Monsieur [Y] [M], Directeur Administratif et Financier, et Madame [D] [E], Comptable siège étaient présents, la comptabilité était à peu près correctement tenue.

En prévision de son absence pour maternité, Madame [E] vous a envoyé, par mail du 2 avril 2015, une liste des sujets sur lesquels il fallait qu'elle vous fasse un transfert de compétences.

Étaient notamment concernés les sujets suivants : les interfaces, le dossier Belge, les SCI, la fiscalité, la gestion des immobilisations et les a-nouveaux.

En dépit de ses relances et propositions de réunion, vous avez systématiquement repoussé celles-ci et n'avez ainsi pas pris le temps nécessaire à un transfert de compétences.

Votre manque d'organisation et d'anticipation a ainsi contraint Madame [E] à rédiger des procédures de fonctionnement pendant son congé de maternité, pour permettre la passation des dossiers qu'elle gérait.

Or, il était de votre responsabilité de mettre en place l'organisation permettant de faire face à l'absence de Madame [E], et de veiller à ce que le transfert des dossiers et des compétences soit effectué en temps utile.

2) Nous avons également constaté votre incapacité à mettre en place des processus comptables efficients.

Cette difficulté avait déjà été mise en évidence lors d'un comité d'audit du 26 février 2015, au cours duquel les commissaires aux comptes et les actionnaires avaient mis en cause l'organisation des processus comptables dont vous aviez la responsabilité, concernant les dossiers suivants :

- Le lettrage des comptes clients,

- Le lettrage des comptes fournisseurs,

- Les rapprochements des comptes intercos.

Ces trois dossiers nécessitaient la mise en place d'une organisation structurée, d'un suivi et de plans d'action, ce à quoi vous vous étiez engagée.

Cependant, lors du deuxième comité d'audit de mai 2015, nous avons constaté avec regret que vous n'aviez pris aucune mesure sur ces dossiers, malgré vos engagements.

Face à votre inertie ainsi qu'à l'urgence de la situation, nous avons dû prendre la décision fin juin 2015, de structurer et de renforcer la Direction comptable en créant les postes suivants :

- Responsable comptable agences,

- Comptable siège.

Or, il vous incombait en votre qualité de Directrice comptable, d'organiser votre département, de définir les priorités et de répartir les tâches de façon à permettre une gestion et un suivi optimal des dossiers.

3) Le 26 juin 2015, vous avez été brutalement contrainte de vous arrêter pour raisons médicales.

Pendant votre arrêt, nous ne souhaitions évidemment pas que vous travailliez et avions besoin d'être autonomes rapidement sur les différents sujets.

Or, vous n'avez pas organisé les transferts de dossiers, ni spontanément, ni sur nos demandes répétées.

Vous avez procédé à une rétention délibérée des informations et des procédures, et ce, afin de vous rendre indispensable et de nous contraindre à continuer à faire appel a vous.

Vous avez dès lors continué à intervenir ponctuellement et de façon parcellaire sur certains sujets, sans tenir compte des souhaits de la Direction qui vous enjoignait de ne plus le faire.

Ces interventions se sont révélées inopportunes car vous n'aviez pas de vision d 'ensemble et n'avez tenu aucun compte de l'organisation mise en place en votre absence, ce qui a occasionné un échange tendu avec Monsieur [F] [A], Contrôleur de gestion, le 22 juillet 2015.

En plus, alors que vous étiez en arrêt maladie, vous vous êtes rendue inopinément dans les locaux de la Société sans avoir prévenu personne et sans que cela n 'apparaisse réellement nécessaire. Par exemple, la brève réunion de rentrée du 1er septembre 2015.

Par ailleurs, en posant votre arrêt maladie du 27 juin 2015, vous avez demandé à ce que nous maintenions votre salaire intégralement alors même que la convention collective ne prévoit un tel maintien qu'après une année d 'ancienneté.

Vous avez justifié cette demande en indiquant que vous continueriez à travailler, et vous vous êtes donc arrangée pour que nous soyons contraints de faire appel à vous.

4) Par ailleurs, votre poste impliquait le management direct des comptables du siège et le management fonctionnel des comptables en agences.

Force est de constater que sur ce point, votre bilan est également très négatif.

En effet, nous déplorons :

- Un manque de relation entre collaborateur et supérieur hiérarchique,

- Des bonjour et au revoir aléatoires,

- L'absence de listes de tâches ou d'objectifs clairement définis pour chacun des membres de l'équipe.

- L 'absence de relation quotidienne.

- L 'absence de suivi des travaux.

- L 'absence de réponse aux courriels demandant des instructions, ce qui est handicapant lorsque l'on doit animer des équipes. A ce titre, il est apparu que vous aviez plus de 200 mails non lus.

- De plus, vous n'avez pas géré la relation qui se tendait avec Monsieur [V] [R] Comptable siège, et j'ai été contraint de prendre le relai et de mener les divers entretiens jusqu'à celui annonçant la rupture de sa période d'essai.

5) Malheureusement, des divergences de vue sont apparues concernant la politique de recrutement des comptables, la structure de l'équipe et les priorités concernant les tâches à effectuer.

De même, vous n'avez pas été capable de gérer normalement vos relations avec les autres services, notamment avec Monsieur [I] [G], trésorier auquel vous demandiez systématiquement au dernier moment la TVA.

Vous ne le teniez pas informé de l'existence d'un crédit ou d'un débit.

Ainsi, vous le préveniez systématiquement la veille pour le lendemain alors qu'une anticipation est nécessaire et ce, afin de pouvoir faire des virements et couvrir les positions de certains comptes.

Votre manque d'anticipation a également été constaté sur les reportings de paie que vous demandiez systématiquement avec une exécution immédiate (journal de paie, état des cotisations' mensuel).

Ces derniers éléments confirment un problème d'organisation de travail et de gestion des priorités.

Ainsi, vous vous êtes focalisée sur des problèmes à faible valeur ajoutée délaissant les dossiers sur lesquels nous attendions la prise en charge d'une Directrice comptable.

A ce titre, vous avez passé beaucoup de temps sur le social et particulièrement sur les fichiers d'OD de paie qui vous prenaient jusqu'à une semaine par mois, sans que vous fassiez le nécessaire pour transmettre les bons comtes comptables pour régulariser cette situation. »

Mme [P] a été dispensée d'effectuer son préavis qui lui a été néanmoins rémunéré.

Par courrier du 8 octobre 2015, Mme [P] a contesté les conditions de la rupture de son contrat de travail prétendant qu'elle serait liée à son état de santé et à une grossesse difficile.

Par lettre du 16 octobre 2015, la société lui a répondu maintenir sa position.

Le 18 avril 2016, Mme [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin de contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes de nature salariale et de nature indemnitaire.

SUR CE,

Sur la demande tendant à dire nul le licenciement pour discrimination :

La salariée expose avoir été licenciée en raison de son état de santé ; qu'elle a en effet fait l'objet de plusieurs arrêts de travail en raison de grossesses difficiles et de fausses couches. La société conteste tout lien entre l'état de santé de la salariée et le licenciement dont elle a fait l'objet.

Il ressort de l'article L. 1132-1 du code du travail qu'aucun salarié ne peut être licencié en raison de sa grossesse ou en raison de son état de santé.

Sur le terrain de la preuve, il n'appartient pas au salarié qui s'estime victime d'une discrimination d'en prouver l'existence. Suivant l'article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, la salariée présente comme un fait laissant supposer l'existence d'une discrimination la chronologie des événements caractérisée par :

. le fait qu'elle a pris son poste le 1er septembre 2014 et que dès le 26 septembre, elle a fait une fausse couche et a fait l'objet d'un arrêt de travail de 15 jours,

. le fait qu'elle a bénéficié d'un second arrêt de travail du 24 juin 2015 au 7 septembre pour raisons médicales en lien avec un début de grossesse difficile,

. le fait qu'elle a été dispensée de présence dans l'entreprise jusqu'au 8 septembre, date de la visite médicale de reprise,

. le fait que dès le 9 septembre 2015, elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement alors qu'elle n'avait jamais auparavant fait l'objet de lettres de recadrages et que sa période d'essai avait été validée sans réserve le 19 mai 2015 et qu'elle avait perçu une prime exceptionnelle de 2 500 euros en juillet 2015.

L'ensemble de ces faits est établi et l'employeur ne les conteste pas.

Il apparaît aussi comme un fait constant que la salariée était enceinte lorsqu'elle a été engagée. Or, elle en avait avisé l'employeur qui, en toute connaissance de cause, a décidé de l'engager.

Les faits présentés par la salariée ne font donc pas présumer une discrimination.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ce chef de demande et des demandes subséquentes (nullité du licenciement, réintégration, indemnité d'éviction).

Sur les causes du licenciement :

L'insuffisance professionnelle constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

L'incompétence alléguée doit reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur. L'insuffisance professionnelle, qui ne suppose aucun comportement fautif du salarié, doit être constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou purement conjoncturelle, être directement imputable au salarié et non la conséquence d'une conjoncture économique difficile, ne doit pas être liée au propre comportement de l'employeur ou à son manquement à l'obligation d'adapter ses salariés à l'évolution des emplois dans l'entreprise.

En l'espèce, plusieurs griefs d'insuffisance sont reprochés à la salariée :

. un manque d'organisation et d'anticipation du départ en congé maternité de Mme [E], comptable siège (1),

. une incapacité à mettre en place des processus comptables efficients et à structurer la direction comptable (2),

. une absence de transfert des dossiers et des procédures aux équipes en place, malgré son arrêt maladie, nuisant au bon fonctionnement de la direction administrative et financière (3),

. des carences dans le management des comptables sous sa responsabilité (4),

. des difficultés relationnelles avec les autres services (5).

Préalablement à l'étude des griefs, il convient d'observer, comme le fait la salariée, que sa période d'essai a pris fin le 19 mai 2015 (cf. sa pièce 15 : courrier de l'employeur du 16 janvier 2015 renouvelant la période d'essai du 19 janvier 2015 au 19 mai 2015).

Elle tire cependant de ce fait une conséquence qui n'est pas pertinente : se fondant sur le fait que sa période d'essai s'était achevée, elle en déduit qu'aucune réserve sur son aptitude à remplir ses fonctions n'avait été élevée de telle sorte que son insuffisance devrait selon elle être appréciée entre le 19 mai 2015 et le 25 juin 2015, date de son arrêt de travail. Mais à partir du moment où l'insuffisance professionnelle s'apprécie sur le long terme et dès lors que la relation contractuelle a été de courte durée (1er septembre 2014 - 29 septembre 2015) son insuffisance éventuelle doit être appréciée depuis le début de la relation de travail. Par ailleurs, même si la salariée a fait l'objet d'arrêts de travail à partir du 24 juin 2015 (cf. pièces 19 et 21 E : arrêt de travail du 24 juin 2015 initialement prescrit jusqu'au 27 juin 2015 puis renouvelé jusqu'au 5 septembre 2015), il demeure que certains reproches sont adressés à la salariée pour des faits survenus pendant son arrêt de travail. Certaines obligations découlant du contrat de travail subsistant pendant un arrêt pour maladie, c'est jusqu'au terme de la relation contractuelle qu'il conviendra d'étudier les griefs présentés par l'employeur.

(1) Il ressort des débats que Mme [E] exerçait des fonctions de comptable au sein de la société et que la salariée était sa supérieure hiérarchique. Il n'est pas discuté que Mme [E] devait partir en congé pour maternité. Les parties sont en discussion sur le point de savoir si ce départ était initialement prévu le 28 avril 2015 ou le 8 mai. En pièce 40, la salariée produit un courriel que lui a transmis Mme [E] le 13 mars 2015 dans lequel elle fait état d'un congé maternité débutant le 8 mai pour s'achever le 27 août 2015. En pièce 22 la société produit ce qu'elle présente comme un « fichier de saisie des arrêts de travail de Mme [E] » révélant un début d'arrêt de travail le 28 avril 2015. Il s'agit donc de deux pièces contradictoires. Aucune des deux n'est plus probante que l'autre.

En tout état de cause, il est admis comme un fait constant que Mme [E] est en réalité partie le 10 avril 2015 au lieu du 28 avril ou du 8 mai.

Mme [E] témoigne dans une attestation (pièce 24 E) : « [C] [P] n'a pas anticipé mon départ en congé maternité et (') j'ai dû effectuer des procédures pendant ce congé. De plus j'ai demandé que certaines tâches devaient être faites pendant mon absence par ordre d'importance. Mais lorsque je suis revenue après 5 mois d'absence, aucune de ces tâches étaient traitées. De ce fait, suite à cette « non gestion », la comptabilité a subi du retard et dès mon retour, nous avis (sic) mis les moyens pour effectuer ce rattrapage ». Ce témoignage, dont la valeur probante est contestée par la salariée, est toutefois corroboré par :

. le fait que dans un courriel du 2 avril 2015 (pièce 14 S), Mme [E] rédigeait un plan d'action à prévoir en raison de son départ. Dans ce courriel, Mme [E] indiquait à la salariée quelles étaient ses tâches quotidiennes et comment prévoir leur répartition et la formation qui en découlait ;

. le fait que dans un courriel du 28 avril 2015 (pièce 23 E), Mme [E] ' qui était en arrêt de travail ' faisait un point comptable à la salariée sur les actions restant à mener,

. le fait que M. [S] ' directeur administrateur et financier (DAF) de la société ayant pris ses fonctions le 27 avril 2015 ' atteste notamment de ce que (pièce 29 E) la salariée n'avait pas réalisé le transfert de compétence au départ de Mme [E], que les tâches de chacun des comptables de l'équipe n'avaient pas été définies,

. le fait que M. [A] ' contrôleur de gestion ' atteste (pièce 30 E) de ce qu'en dépit de demandes faites en février 2015 certaines opérations comptables importantes pour la clôture des comptes semestriels n'avaient pas été faites ; que la comptable de l'agence d'[Localité 3], se plaignant de l'absence de réponses de la salariée, l'avait contacté pour obtenir les informations comptables qu'elle sollicitait ; que devant les carences de la salariée, il a organisé une réunion le 14 avril 2015 et que la salariée avait reconnu les manquements et s'était engagée à les traiter avant la clôture semestrielle ; que cependant, les problèmes n'avaient pas été traités.

Que le départ de Mme [E] ait initialement été prévu le 28 avril ou le 8 mai, il revenait à la salariée, dès le 10 avril, date du départ effectif de Mme [E], de répartir ses tâches ce qu'elle n'avait pas fait.

Le grief est donc ici établi.

(2) Comme le montre l'attestation de M. [S], DAF à compter du mois d'avril 2015 (pièce 29 E déjà citée), le service de la salariée souffrait d'un manque d'effectifs : « l'équipe de Mme [C] [P] était en effectif insuffisant après 2 départs en congé maternité. », « 6 postes de comptable agence » n'étaient pas pourvus. Et M. [S], dans son attestation, de préciser qu'il avait dû « prendre des mesures rapidement pour pallier les carences constatées, mesures qui étaient clairement du ressort de la directrice comptable : renforcement de l'équipe comptable siège, accélération des recrutements de comptables en agences (') ». Le fait que des effectifs manquaient au service comptabilité, lequel devait urgemment être renforcé, découle aussi du courriel interne de M. [S] en date du 21 mai 2015 (pièce 36 E). Dans ce courriel ayant pour objet « Postes ouverts en comptabilité », M. [S] écrivait : « Je confirme bien l'urgence du recrutement de comptables en agence et en particulier du remplacement provisoire du poste de [D] au siège qui est prioritaire (note de la cour : « [D] » pour Mme [E]) ('). (') il nous faut être plus flexible (note de la cour : plus flexibles sur les salaires proposés aux candidats comptables) pour recruter de la compétence et ne plus louper les rares opportunités récentes. »

Or il apparaît que la salariée ne peut être tenue pour responsable du déficit en personnel. Il ressort en effet de l'attestation précise et circonstanciée de M. [M] (pièce 38 S), lequel était le DAF précédent jusqu'à mi-avril 2015, que : « S'agissant de l'organisation de l'équipe, Mme [P] m'avait fait part de son souhait de recruter des comptables siège en plus pour chapeauter les régions afin de contrôler les comptables en agence et fiabiliser ainsi les clôtures mensuelles. La présidence a toujours refusé l'augmentation des effectifs siège justifiant sa position de conserver un modèle comptable décentralisé à 100 %. Il était donc extrêmement compliqué de pallier rapidement tous les problèmes rencontrés par le service ».

A ce contexte de sous-effectif s'ajoutaient d'ailleurs, ainsi qu'il découle toujours de l'attestation de M. [M], des problèmes relatifs à la comptabilité de la société se traduisant par de nombreux retards déjà accumulés avant même l'arrivée de la salariée en septembre 2014. Ce fait ressort aussi des extraits de rapport d'audit des 31 décembre 2013 et 30 juin 2014 (pièces 43-1 et 43-2 S) montrant par exemple que les comptes fournisseurs présentaient une antériorité de plus d'un an et qu'un plan d'action était recommandé pour y remédier.

Certes, la comparaison entre d'une part les rapports d'audit des 31 décembre 2013 et 30 juin 2014 et d'autre part les rapports d'audit des 19 février et 30 juillet 2015 en pièces 31 et 32 de l'employeur montre que la situation comptable de la société ne s'est pas améliorée après l'arrivée de la salariée.

Mais dans le contexte d'un important déficit en personnel - déficit auquel la salariée avait voulu remédier par des recrutements auxquels s'était opposée la direction -, l'employeur ne peut reprocher à la salariée une incapacité à mettre en place des processus comptables efficients et à structurer la direction comptable.

(3) Sous le grief ici étudié, il est en substance reproché à la salariée de ne pas avoir organisé la passation de ses dossiers lors de son arrêt de travail de juin 2015, d'être intervenue dans la gestion de la comptabilité de façon intempestive et même, d'avoir délibérément retenu des informations pour se rendre indispensable.

Le fait, pour la salariée d'avoir continué à travailler pendant son arrêt maladie n'est pas contesté et est du reste établi par l'attestation de M. [A] et par les courriels que ce dernier adressait à la salariée le 22 juillet 2015 (pièce 41 E). Dans un vif échange de courriels, M. [A] reprochait en substance à la salariée de continuer à intervenir alors qu'elle était en arrêt maladie, ce qui, selon lui, perturbait le fonctionnement de la société. Cela déterminait le DAF qui venait de prendre ses fonctions (M. [S]) à écrire un courriel à la salariée le 24 juillet par lequel il lui demandait de ne plus intervenir sur tous les dossiers. M. [S] demandait cependant aussi à la salariée : « En ce qui concerne la Belgique et Luxembourg, je souhaite au plus tôt que [J] et [K] reprennent la TVA. Merci de leur donner la procédure à suivre. Je reviens donc vers toi avec les points sur lesquels je suis amené à te solliciter et bien sûr le moins possible pour que tu puisses te reposer ». En somme, le DAF demandait à la salariée de ne plus intervenir spontanément dans les dossiers et de se contenter de répondre aux sollicitations qui lui seraient adressées.

Et précisément, lorsque la salariée est intervenue plus tard, dans le courant du mois d'août, il apparaît qu'elle l'a généralement fait après des sollicitations principalement formulées par

Mme [Z], DRH ou pour expliquer notamment à M. [S] ou à Mme [H], qui la remplaçait dans le cadre d'un CDD, telle ou telle procédure (cf. pièces 45 à 50 S). En revanche, s'agissant d'un échange du 19 août 2015 entre elle et le trésorier de la société, il n'apparaît pas que la salariée ait communiqué à la demande de la société.

Mais il n'apparaît pas que la salariée ait, contrairement à ce qui lui est reproché, retenu des informations pour se rendre indispensable.

Quant au fait, pour la salariée, d'avoir manqué d'organiser les transferts des dossiers, ce fait est purement et simplement incompatible avec le fait que c'est « brutalement » (pour reprendre les termes mêmes de la lettre de licenciement) que la salariée a été placée en arrêt pour maladie le 26 juin 2015.

Il est aussi reproché à la salariée de s'être rendue inopinément dans les locaux de la société qui prend pour exemple « la brève réunion de rentrée du 1er septembre 2015. ». Si effectivement, la salariée n'aurait pas dû se présenter à cette réunion parce qu'elle était en arrêt de travail, il demeure que l'employeur l'y avait invitée, ne sachant pas encore, au moment où il procédait à l'invitation, que l'arrêt de travail serait prolongé.

Les griefs ici étudiés ne sont donc que partiellement établis dès lors qu'effectivement, la salariée a continué à intervenir ponctuellement et de façon parcellaire sur certains sujets (notamment le 19 août 2015), sans tenir compte des souhaits de la direction qui l'enjoignait de ne plus le faire.

(4) Pour établir la réalité du grief relatif au management de la salariée, la société se fonde sur les témoignages de MM. [S] et [A] qui, effectivement, attestent d'un « climat relationnel difficile entre [C] [P] et les collaborateurs de son équipe », de « tâches non définies » pour les comptables de l'équipe, d'un poste non tenu par la salariée, d'une comptable en agence ([Localité 3]) se plaignant de « l'absence de réponse de Mme [P] », de la nécessité pour elle d'améliorer la communication avec les comptables en agence et de lire ses mails « près de 200 mails non lus » à la date du 14 avril 2015 (pièces 29 et 30 E).

Dans le témoignage qu'il livre de la prestation de la salariée, l'ancien DAF, M. [M] expose quant à lui que « s'agissant de son relationnel, Mme [P] s'est parfaitement intégrée et n'avait de problèmes avec personne » (pièce 38 S) ce qui ne remet pas en cause les témoignages de

MM. [S] et [A] sur le manque de définition des tâches et le manque de communication avec les comptables en agence.

A la lumière de ces divers témoignages,

. ne sont pas établis les griefs suivants :

« - Un manque de relation entre collaborateur et supérieur hiérarchique,

- Des bonjour et au revoir aléatoires,

- L 'absence de relation quotidienne,

- L 'absence de suivi des travaux,

- De plus, vous n 'avez pas géré la relation qui se tendait avec Monsieur [V] [R] Comptable siège, et j'ai été contraint de prendre le relai et de mener les divers entretiens jusqu'à celui annonçant la rupture de sa période d'essai. »

. sont en revanche établis les griefs suivants :

- L'absence de listes de tâches ou d'objectifs clairement définis pour chacun des membres de l'équipe,

- L 'absence de réponse aux courriels demandant des instructions.

(5) Sont enfin reprochées à la salariée des difficultés relationnelles avec les autres services.

La société invoque les rapports de la salariée avec M. [A]. Les mauvaises relations entre ce dernier et la salariée transparaissent clairement de leurs échanges de courriels de juillet 2015 lorsque M. [A] reprochait à la salariée d'intervenir pendant son arrêt maladie ; interventions qu'il jugeait perturbantes pour le service, ce que confirmait M. [S] (cf. supra). Les difficultés rencontrées en juillet 2015 avec M. [A] étant imputables à la salariée - qui n'était pas supposée intervenir pendant son arrêt de travail -, la société pouvait lui en faire le reproche.

La société invoque aussi les rapports entre la salariée et le responsable trésorier. Il est en substance reproché à la salariée d'avertir tardivement le trésorier des virements de TVA à effectuer. Ce fait ressort d'échanges entre la salariée et le trésorier en dates des 19 août 2015 (pièce 44 E) et 22 juin 2015 (pièce 32 S). Il découle de ces échanges que le trésorier reprochait à la salariée de lui transmettre le 19 les sommes à payer le lendemain. Les échanges montrent que le trésorier reprochait à la salariée de lui transmettre des informations tardives et que la salariée reprochait au trésorier de ne pas anticiper, ce que le trésorier contestait puisqu'il ne souhaitait pas faire de prévision « au doigt mouillé » dès lors qu'il observait que les montants des virements à effectuer n'étaient pas constants dans le temps.

S'agissant de l'échange du 19 août 2015, la cour observe que la salariée était à cette date en arrêt pour maladie. Dès lors, elle n'était pas supposée transmettre quoi que ce soit à la trésorerie sans y avoir été invitée.

En tout état de cause, dès lors qu'effectivement les informations transmises par la salariée au trésorier étaient tardives, ce qui générait des tensions avec ledit trésorier, c'est à juste titre que la société reproche à la salariée ses difficultés relationnelles avec lui.

En ce qui concerne le manque d'anticipation relatif aux « reportings de paie que vous demandiez systématiquement avec une exécution immédiate (journal de paie, état des cotisations mensuel). » et au fait que la salarié aurait « passé beaucoup de temps sur le social et particulièrement sur les fichiers d'OD de paie qui vous prenaient jusqu'à une semaine par mois, sans que vous fassiez le nécessaire pour transmettre les bons comtes comptables pour régulariser cette situation », ce fait n'est pas établi.

En synthèse de ce qui précède, les faits suivants ont été démontrés :

. un manque d'organisation et d'anticipation du départ en congé maternité de Mme [E], comptable siège,

. le fait pour la salariée d'avoir continué à intervenir ponctuellement et de façon parcellaire sur certains sujets (notamment le 19 août 2015), sans tenir compte des souhaits de la direction qui l'enjoignait de ne plus le faire,

. l'absence de listes de tâches ou d'objectifs clairement définis pour chacun des membres de l'équipe,

. l 'absence de réponse aux courriels des comptables agence demandant des instructions,

. des difficultés relationnelles avec M. [A] et M. [G], trésorier.

Mais la cour a aussi relevé que le service de la salariée était insuffisamment doté en personnel, ce à quoi elle avait souhaité remédier en recrutant du personnel et qui lui avait été refusé. La cour a aussi relevé que la comptabilité de la société présentait déjà des carences à l'arrivée de la salariée. Or, comme rappelé plus haut, l'insuffisance professionnelle doit, pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, être directement imputable au salarié et non la conséquence d'une conjoncture difficile et ne doit pas être liée au propre comportement de l'employeur.

En outre, il doit être observé que la salariée ne s'est vue adresser aucun reproche de la part de sa hiérarchie relativement à son travail et que, comme elle le fait observer, il lui a été octroyé une prime exceptionnelle d'un montant de 2 500 euros en juillet 2015.

Dès lors, l'insuffisance professionnelle n'est pas caractérisée.

La salariée peut en conséquence prétendre au paiement d'une indemnité de licenciement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable au présent litige.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée (1 an et 28 jours), de son niveau de rémunération (la salariée percevait une rémunération brute de 4 921 euros outre un avantage en nature (véhicule) valorisé à 203,26 euros mensuels et des heures supplémentaires variant d'un mois à l'autre), de son âge lors de la rupture (38 ans) le préjudice qui résulte, pour elle, de la perte de son emploi sera intégralement réparé par une indemnité de 40 000 euros, somme au paiement de laquelle, infirmant le jugement, la société sera condamnée.

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire :

La salariée expose qu'elle a fait l'effort de déménager pour se rapprocher de son travail après la validation de sa période d'essai, qu'elle a fait des sacrifices personnels et s'est investie dans son travail ; qu'en dépit de tous ces efforts, récompensés par une prime exceptionnelle de

2 500 euros en juillet 2015, elle a néanmoins été licenciée, l'employeur ayant d'ailleurs engagé la procédure de licenciement le jour de sa reprise après une seconde fausse couche.

Pour sa part, la société estime le licenciement fondé et, en tout état de cause, considère que la salariée ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui réparé par l'allocation de dommages-intérêts pour licenciement abusif, rappelant que la salariée a déménagé en cours de période d'essai et qu'elle y avait été aidée par la société qui lui avait prêté un camion de 15 m³, que son lieu de travail était plus proche de son domicile initial (29 minutes) que ses deux lieux de travail précédents et qu'il n'y avait donc pas d'urgence à déménager.

En l'espèce, le fait que la salariée a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement le premier jour de sa reprise après un arrêt de travail nécessité par une grossesse difficile qui s'est conclue par une fausse couche, caractérise l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé par la perte de son emploi.

Ce préjudice sera intégralement indemnisé par une somme de 4 000 euros, somme au paiement de laquelle, infirmant le jugement, la société sera condamnée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Succombant, la société sera condamnée aux dépens.

Il conviendra de condamner la société à payer à la salariée une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

DIT sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [P],

CONDAMNE la société Parcours à payer à Mme [P] :

. 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice distinct,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

CONDAMNE la société Parcours à payer à Mme [P] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d'appel,

CONDAMNE la société Parcours aux dépens.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et par Madame Dorothée MARCINEK, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00505
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;20.00505 ?
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