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07/07/2022 | FRANCE | N°19/02939

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 07 juillet 2022, 19/02939


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 JUILLET 2022



N° RG 19/02939 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TK2O



AFFAIRE :



Société SOREA-CAIN venant aux droits de la société LA TREILLE



C/



[J] [K]



L'UNEDIC, Délégation AGS CGEA d'Ile de France Ouest



S.E.L.A.R.L. JSA prise en la personne de Me [P] [F] ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL CRNB

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Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Janvier 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Section : C

N° RG : 16/01116



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 JUILLET 2022

N° RG 19/02939 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TK2O

AFFAIRE :

Société SOREA-CAIN venant aux droits de la société LA TREILLE

C/

[J] [K]

L'UNEDIC, Délégation AGS CGEA d'Ile de France Ouest

S.E.L.A.R.L. JSA prise en la personne de Me [P] [F] ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL CRNB

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Janvier 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

N° Section : C

N° RG : 16/01116

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Anne-Laure DUMEAU

Me Pascale PINEL

Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE et Associés

Me Nathalie CHEVALIER

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société SOREA-CAIN venant aux droits de la société LA TREILLE

N° SIRET : 509 989 281

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentant : Me Anne-Laure DUMEAU, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - Représentant : Me Stéphanie RESCHE, Plaidant, avocat au barreau de NANTES, vestiaire : K154, substituée par Me Damien MEYNIEL, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Mademoiselle [J] [K]

née le 26 Août 1991

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentant : Me Pascale PINEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 49

L'UNEDIC, Délégation AGS CGEA d'Ile de France Ouest

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE et Associés, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98, substituée par Me François GREGOIRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

****************

S.E.L.A.R.L. JSA prise en la personne de Me [P] [F] ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL CRNB

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Nathalie CHEVALIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : 143

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Mai 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène PRUDHOMME, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

Le 14 mars 2012, Mme [J] [K] était embauchée par la société CRNB exerçant sous l'enseigne La Treille en qualité de serveuse, par contrat à durée indéterminée à effet du 11 avril 2012. La société CRNB signait le 31 mars 2012 un contrat de location-gérance avec la SARL La Treille, propriétaire du fonds de commerce de restauration classique, rapide et vente à emporter.

Le contrat de travail était régi par la convention collective nationale des hôtels cafés et restaurants.

Le 5 novembre 2015, le tribunal de commerce de Versailles constatait l'état de cessation des paiements de l'EURL CRNB et prononçait sa liquidation judiciaire et nommait la SELARL SMJ prise en la personne de Me [U] en qualité de liquidateur judiciaire. Par courrier du 10 novembre 2015, la SELARL SMJ ès-qualités résiliait le contrat de location-gérance compte tenu de la liquidation judiciaire de la société CRNB et informait Mme [K] de la résiliation et des conséquences : reprise du fonds de commerce par le loueur du fonds et poursuite du contrat de travail au sein de cette société. Le contrat de travail de Mme [K] était donc transféré à la SARL La Treille.

Le 31 décembre 2015, la SARL La Treille notifiait à Mme [K] son licenciement pour motif économique. La SARL La Treille a été reprise par la société civile Sorea-Cain.

Le 12 août 2016, Mme [K] saisissait le conseil des prud'hommes de Versailles.

Vu le jugement du 31 janvier 2019 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Versailles qui a':

- Condamné la société La Treille à payer à Mme [K] la somme de 7'000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Condamné 1a société La Treille à payer à Mme [K] la somme de 2'127,34 euros au titre du solde de l'indemnité des congés payés ;

- Condamné la société civile Sorea-Cain à payer à Mme [K] la somme de 1'000 euros an titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- Condamné la société La Treille aux dépens ;

- Dit que Mme [K] est mal fondée en l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SELARL SMJ en sa qualité de liquidateur de la Société CRNB;

- Dit que les AGS - CGEA sont hors de cause.

Vu l'appel interjeté par la Société Civile Sorea-Cain le 16 juillet 2019.

Vu l'ordonnance du 14 novembre 2019, par laquelle le conseiller de la mise en état a :

- donné acte à la société civile Sorea-Cain de son désistement partiel d'appel à l'encontre de Me [U] pris en qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL CRNB,

- constaté l'extinction de l'instance entre la société civile Sorea-Cain et Me [U] pris en qualité de mandataire liquidateur de l'EURL CRNB,

- dit que l'instance se poursuivait entre la société civile Sorea-Cain, Mme [K], la SELARL SMJ en qualité de mandataire ad hoc de l'EURL CRNB et l'AGS CGEA d'Île de France Ouest

- constaté enfin le dessaisissement partiel de la cour.

Vu les conclusions de l'appelante, la société civile Sorea-Cain, venant aux droits de la SARL La Treille, notifiées le 4 mars 2022 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Versailles en ce qu'il a :

- condamné la société La Treille (devenue depuis la Société Civile Sorea-Cain) à verser à Mme [K] une somme de 7'000 euros a titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société La Treille à payer à Mme [K] une somme de 2'127,34 euros au titre du solde de l'indemnité de congés payés ;

- condamné la société La Treille à payer à Mme [K] une somme de 1'000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens;

- mis hors de cause les AGS-CGEA ;

- Débouter Mme [K] et les autres intimés de l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la société La Treille ;

- Condamner Mme [K] à payer à la société La Treille une somme de 2'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens incluant la somme de 600 euros versée à la SELARL JSA aux fins qu'elle intervienne à la présente procédure.

Vu les écritures de l'intimée, Mme [J] [K], notifiées le 14 mars 2022 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de':

- Confirmer le jugement :

- en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [K] était sans cause réelle et sérieuse

- en ce qu'il a dit que Mme [K] bénéficiait de 36,50 jours de congés payés et qu'il lui était donc dû à ce titre la somme de 2'127,34 euros

- en ce qu'il a condamné la société La Treille, et donc la Société Civile Sorea-Cain qui vient aux droits de celle-ci, au paiement :

- de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- de la somme de 2'127,34 euros au titre de l'indemnité de congés payés.

- Recevoir Mme [K] en son appel incident et, en conséquence,

- Infirmer le jugement sur le quantum de la somme allouée au titre des dommages et intérêts et les fixer à la somme de 10'492 euros

A titre subsidiaire, et pour le cas où la cour estimerait que la Société Civile Sorea-Cain venant aux droits de la société La Treille n'est pas redevable des sommes dues à Mme [K],

- Infirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme [K] était mal fondée en toutes ses demandes à l'encontre de la SELARL JSA représentée par Maître [P] [F] en qualité de mandataire ad hoc de la Société CRNB et, en conséquence,

- Fixer au passif de la Société CRNB les sommes suivantes :

- 10'492 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2'127,34 euros au titre du solde de l'indemnité de congés payés

- Infirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause le CGEA-AGS Ile De France Ouest et, en conséquence,

- Déclarer l'arrêt à intervenir opposable au CGEA-AGS Ile De France Ouest.

En tout état de cause,

- Condamner la Société Civile Sorea-Cain au paiement de la somme de 4'000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- La condamner aux entiers dépens.

Vu les écritures de l'intimée, l'AGS CGEA IDF Ouest, notifiées le 23 février 2022 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de':

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et mettre l'AGS hors de cause au titre de la présente instance.

Subsidiairement :

- Mettre l'AGS hors de cause au titre des créances de rupture.

A titre très subsidiaire :

- Débouter Mme [K] de ses demandes fins et prétentions.

A titre plus subsidiaire :

- Ramener à de plus justes proportions la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En tout état de cause :

- Mettre hors de cause l'AGS s'agissant des frais irrépétibles de la procédure.

- Dire et juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l'ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l'article L 622-28 du code du commerce.

- Fixer l'éventuelle créance allouée au salarié au passif de la Société.

- Dire que le CGEA, en sa qualité de représentant de l'AGS, ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-6, L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15, L 3253-19 à 21 et L 3253-17 du code du travail.

Vu les écritures de l'intimée, la SELARL JSA, en qualité de mandataire ad hoc de la société CRNB, intervenant volontaire, notifiées le 17 février 2022 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de':

Sur l'intervention volontaire

- Prendre acte de l'intervention volontaire de la SELARL JSA ès qualité de mandataire ad hoc de la société CRNB,

En conséquence :

- Permettre l'intervention et la participation de la SELARL JSA ès qualité de mandataire ad hoc de la société CRNB à la procédure principale en cours ès qualité d'intervenante volontaire,

- Constater, dire et juger la SELARL JSA ès qualité de mandataire ad hoc de la société CRNB recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- Constater, dire et juger Mme [K] mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la SELARL JSA ès qualité de mandataire ad hoc de la société CRNB,

En conséquence,

- Confirmer en son intégralité le jugement du conseil de prud'hommes de Versailles du 31 janvier 2019,

- Débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner Mme [K] aux dépens

Vu l'ordonnance de clôture du 11 avril 2022.

SUR CE,

Il convient de rappeler le dessaisissement partiel de la cour à l'égard de la SELARL SMJ prise en la personne de Me [U], mandataire liquidateur de l'EURL CRNB et l'intervention volontaire de la SELARL JSA en sa qualité de mandataire ad hoc de l'EURL CRNB.

Sur la demande de nullité de l'acte introductif d'instance devant le conseil de prud'hommes et subséquemment du jugement du conseil de prud'hommes du 31 janvier 2019 présentée par la société civile Sorea-Cain.

La cour rappelle que l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile précise que «'la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont évoqués dans la discussion'». À défaut pour la société civile Sorea-Cain d'avoir mentionné sa demande de nullité dans le dispositif de ses écritures, la cour ne statue pas sur cette demande dont elle n'est pas saisie.

Sur l'exécution du contrat de travail':

Mme [K] réclame à son employeur le règlement d'un solde de l'indemnité de congés payés dont elle disposait en octobre 2015, soit 36,5 jours de congés payés, qui ne lui ont pas été réglés, pour un montant de 2'127,34 euros. Elle demande à titre principal la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SARL La Treille devenue la société civile Sorea-Cain à lui payer cette somme et, à titre subsidiaire, elle sollicite que cette somme soit inscrite au passif de la liquidation judiciaire de l'EURL CRNB.

La société civile Sorea-Cain conclut à l'infirmation du jugement de ce chef, au motif que si le nouvel employeur est tenu, par principe, à l'égard des salariés, par les obligations qui incombaient à l'ancien employeur, à charge pour lui de se faire rembourser par celui-ci, il est prévu une exception, en cas de procédure collective, puisqu'il appartient au salarié de s'adresser au représentant des créanciers afin d'être garanti du paiement de ce qui lui est dû par l'assurance des créances, l'AGS, de sorte que Mme [K] doit être déboutée de sa demande à son égard.

Il apparaît qu'à la suite de la liquidation judiciaire de l'EURL CRNB prononcée le 5 novembre 2015, la SARL La Treille a résilié à effet du 3 novembre 2015 le contrat de location-gérance qui la liait à cette société. Par lettre du 10 novembre 2015, le mandataire liquidateur prenait acte de cette résiliation et rappelait à la SARL La Treille que la résiliation du contrat de location-gérance faisait qu'elle retrouvait la propriété du fonds de commerce, du mobilier et du matériel servant à son exploitation et que cette reprise emportait de plein droit la poursuite des contrats de travail en cours de sorte que la SARL La Treille est devenue l'employeur de Mme [K] en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail à compter du 5 novembre 2015 ; aussi, c'est l'employeur de Mme [K] à compter du 5 novembre 2015 qui doit assumer les conséquences du contrat de travail de cette salariée et il lui appartient de poursuivre les obligations incombant à l'employeur.

Il convient de prendre acte de l'intervention volontaire de la SELARL JSA ès-qualités et de la mettre hors de cause, la salariée étant devenue salariée de la SARL La Treille le 5 novembre 2015 à l'issue du transfert de son contrat de travail réalisé après la liquidation judiciaire du locataire-gérant ; ainsi, il convient de débouter Mme [K] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de l'EURL CRNB et de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

Il ressort du bulletin de salaire de Mme [K] d'octobre 2015 que celle-ci disposait, au 30/10/2015, d'un solde non pris de 36,5 jours de congés payés : 31,5 jours de l'année N-1 et 5 jours de l'année en cours ; elle réclame le paiement de la somme de 2'127,34 euros à son employeur ; l'employeur ne conteste pas le montant de la somme réclamée ; ainsi, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SARL La Treille devenue la société civile Sorea-Cain à payer cette somme à Mme [K].

Sur la rupture du contrat de travail':

Suivant lettre du 31 décembre 2015, la SARL La Treille a notifié à Mme [K] son licenciement pour motif économique en raison de la liquidation du locataire-gérant (son ancien employeur), le non-paiement des loyers, le départ des deux cuisiniers, conjugaison d'éléments qui a entraîné la fermeture de l'établissement.

Mme [K] reproche à son employeur de n'avoir effectué aucune recherche de reclassement. Elle demande alors sa condamnation à lui verser la somme de 10'492 euros en réparation du préjudice subi pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société civile Sorea-Cain répond que le licenciement économique était parfaitement fondé et d'ailleurs non contesté par la salariée ; elle affirme qu'elle ne possédait qu'un seul fonds de commerce, celui du restaurant dans lequel était employée Mme [K] de sorte que le fonds ayant périclité, suite au retard pris par le mandataire liquidateur de remettre les clés du fonds de commerce, elle n'a plus eu comme recours que de vendre celui-ci à hauteur du seul pas de porte qu'elle indique dans le cadre de la procédure d'un montant de 230'000 euros.

Il résulte des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date de la rupture que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

La société civile Sorea-Cain affirme, sans être contestée, n'appartenir à aucun groupe ; si le propriétaire du fonds de commerce avait l'intention de poursuivre son exploitation lors de la liquidation judiciaire du locataire-gérant, il est apparu que la fermeture du restaurant à compter de fin octobre 2015 après le départ des deux cuisiniers (chef de cuisine et second) et la reprise des quatre contrats de travail des autres salariés (serveur, plongeur et deux apprentis) s'est effectuée en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; la réouverture du commerce de restauration ne s'est pas faite, en l'absence du recrutement d'un cuisinier par l'employeur et du fait que le mandataire liquidateur a traîné dans les opérations de remise des clés et autre inventaire des biens corporels et incorporels du fonds, le transfert ne s'étant matériellement réalisé que le 8 janvier 2016 ; alors, la SARL La Treille a procédé à la mise en vente immédiatement du fonds après avoir licencié tous ses salariés, vente régularisée le 25 janvier 2016.

Il apparaît cependant que la SARL La Treille ne justifie d'aucune recherche de reclassement de sa salariée, se contentant de sa seule affirmation dans la lettre de licenciement et s'est engagée directement dans une vente du fonds de commerce vide de tous ses salariés ; ce défaut de recherche de reclassement rend sans cause réelle et sérieuse le licenciement économique de Mme [K] ;

La SARL La Treille avait moins de 11 salariés ; il sera donc fait application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date de la rupture ; compte tenu de l'âge de la salariée (25 ans), de son ancienneté de plus de 3 ans dans l'entreprise et du montant de son salaire mensuel (1'748,52 euros) et alors qu'elle justifie être restée plus de deux ans inscrite à Pôle emploi en recherche de travail, la cour évalue à la somme de 10'000 euros son préjudice résultant de son licenciement abusif. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le remboursement par l'employeur à l'organisme des indemnités de chômage

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur l'intervention de l'AGS CGEA d'Île de France Ouest

Alors, l'AGS CGEA d'Île de France Ouest soutient que le contrat de travail de Mme [K] ayant été transféré à la SARL La Treille, aux droits de laquelle vient la société civile Sorea-Cain, elle doit être mise hors de cause au titre de la présente instance et subsidiairement, elle demande à la cour de constater que le licenciement de la salariée est intervenu plus de 15 jours suivant la liquidation judiciaire de sorte qu'elle doit également être mise hors de cause. Il convient également de confirmer le jugement entrepris de ce chef, les demandes de la salariée devant être supportée par son employeur qui n'a fait l'objet d'aucune procédure collective à compter de la reprise du contrat de travail.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de la société civile Sorea-Cain';

La demande formée par Mme [K] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel sera accueillie, à hauteur de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement

Prend acte de l'intervention volontaire de la SELARL JSA ès-qualités,

Confirme le jugement entrepris sauf en celle de ses dispositions ayant fixé les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société civile Sorea-Cain à verser à Mme [J] [K] la somme de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Ordonne le remboursement par la société civile Sorea-Cain aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme [K] dans la limite de 6 mois d'indemnités en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,

Condamne la société civile Sorea-Cain aux dépens d'appel

Condamne la société civile Sorea-Cain à payer à Mme [K] la somme de 2'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme'Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIERLe PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 19/02939
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;19.02939 ?
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