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07/07/2022 | FRANCE | N°19/01082

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 07 juillet 2022, 19/01082


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 JUILLET 2022



N° RG 19/01082 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TAVT



AFFAIRE :



[L] [N]





C/

SAS RECTICEL









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 17/01291



Copies ex

écutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Roger KOSKAS



Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA





le : 08 Juillet 2022



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versaille...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 JUILLET 2022

N° RG 19/01082 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TAVT

AFFAIRE :

[L] [N]

C/

SAS RECTICEL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 17/01291

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Roger KOSKAS

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA

le : 08 Juillet 2022

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [L] [N]

née le 07 Octobre 1957 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par : Me Roger KOSKAS de la SELARL Brihi-Koskas & Associés, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0137 ; et Me Olivia MAHL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS; et

APPELANTE

****************

SAS RECTICEL

N° SIRET : 702 001 785

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par : Me Jules SACHEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS Me Pascal LAGOUTTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020 ; et Me Côme DE GIRVAL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020 ; Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2022, devant la cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le groupe belge Recticel est spécialisé dans la fabrication de mousse de polyuréthane souple et rigide et de produits connexes. Ce groupe, créé en 1967, emploie environ 7 500 salariés dans 27 pays. Il est composé de quatre divisions :

- division Isolation : fabrication et commercialisation d'isolations thermiques durables en mousse rigide polyuréthane,

- division Literie : développement, production et commercialisation de matelas, de sommiers et de lits entièrement finis,

- division Automobile : fabrication en mousse à peau d'éléments de finition intérieure (peaux de tableaux de bord et habillage de panneaux de porte) et de coussins de siège en mousse moulée à froid,

- division Mousses Souples : production et transformation de produits semi-finis en mousse de polyuréthane souple. Elle fournit notamment les divisions Literie et Automobile.

La filiale française, SAS Recticel, dont le siège social se situe à [Localité 8] en Seine-et-Marne en région Île-de-France, intervient sur le marché français des mousses souples.

En 2015, elle employait 565 salariés répartis sur cinq sites - [Localité 5] (43), [Localité 7] (27), [Localité 8] (77), [Localité 4] (18) et [Localité 3] (72).

La convention collective nationale applicable est celle de la plasturgie du 1er juillet 1960.

Au cours d'une réunion du comité central d'entreprise qui s'est tenue le 4 février 2016, la direction a présenté un projet de réorganisation emportant fermeture définitive de l'usine de Noyen, s'accompagnant de la suppression de 25 postes.

Le 31 mars 2016, la société et les organisations syndicales ont signé un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi lequel a été validé par la Direccte le 13 mai 2016 .

Entre le 13 et le 19 juillet 2016, l'inspection du travail a autorisé le licenciement des salariés protégés concernés par le projet de fermeture de l'établissement de Noyen. Le tribunal administratif de Nantes a cependant déclaré illégales les décisions administratives ayant autorisé le licenciement des salariés protégés. Par décision du 27 avril 2022, le Conseil d'Etat a rejeté le pourvoi de la société.

Mme [L] [N], née le 7 octobre 1957, a été engagée par cette société le 8 décembre 1975, selon contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de responsable paie et gestion administrative. Elle travaillait sur le site de Noyen dans la Sarthe.

Dans ce cadre, la société Recticel a initié une procédure de licenciement économique à l'égard de Mme [N] en la convoquant à un entretien préalable qui s'est déroulé le 26 mai 2016.

Le 13 juillet 2016, l'inspection du travail a autorisé le licenciement de Mme [N], celle-ci étant salariée protégée.

Puis, par courrier du 22 juillet 2016, la société Recticel a notifié à Mme [N] son licenciement pour motif économique :

'(...) Recticel est un groupe belge de dimension principalement européenne, qui intervient dans la fabrication de mousse de polyuréthane souple et rigide. Le groupe est organisé en quatre divisions : l'isolation, la literie, l'automobile et les mousses souples.

La division mousse souple est dédiée à la production et à la transformation de produits semi-finis en mousse de polyuréthane souple, destinés au marché du 'confort' ( siège, literie...) et au marché dit des 'mousses techniques' qui regroupe des applications techniques vendues dans l'industrie et utilisées pour leurs propriétés liées à l'acoustique, l'étanchéité ou la filtration. L'activité de cette division représente près de la moitié de celle du groupe.

Compte tenu de son poids économique, la division est composée de deux pôles intervenant sur deux marchés distincts: le pôle Eurofoam ( Europe de l'Est) qui a été construit autour d'une 'joint-venture' détenue à 50% par le groupe Recticel et à 50% par le groupe Greiner et qui intervient principalement dans les pays d'Europe de l'Est et le Pôle 100% Recticel ( Europe de l'Ouest) qui est composé des sociétés historiques du groupe, détenues à 100% par la société Recticel NVSA et qui intervient principalement en Europe de l'Ouest.

La société Recticel SAS intervient sur le marché français des mousses souples. A ce titre, elle fait partie du secteur d'activité des mousses souples de l'Europe de l'Ouest.

Or, le marché des mousses souples de l'Europe de l'Ouest est impacté négativement par la dégradation persistante de l'économie des pays de l'Europe de l'Ouest, dont celle de l'économie française et une fuite du marché de l'ameublement, dont celui du siège, vers les pays de l'Europe de l'Est et de l'Asie.

En effet, le phénomène de délocalisation qui touche l'ensemble de l'activité industrielle des pays de l'Europe de l'Ouest frappe particulièrement le marché de l'ameublement . Plusieurs acteurs du marché clients de Recticel SAS ont été contraints à la liquidation.

Du fait de ces éléments, en 2014, le secteur d'activité mousses souples Europe de l'Ouest du groupe Recticel a connu un résultat négatif de plus de 6,5 millions d'euros.

Au regard de l'absence d'évolution du chiffre d'affaires de ce secteur en 2015 et de l'absence d'évolution significative des prévisions de chiffre d'affaires pour l'année 2018, aucune évolution structurelle des résultats de ce secteur d'activité ne peut être envisagée.

Au sein du secteur d'activité mousse souple Europe de l'Ouest du groupe Recticel, les résultats de la société Recticel SAS sont particulièrement inquiétants. Ainsi, le résultat d'exploitation de la société qui était positif de 548 000 euros en 2012 n'a été que de 76 000 euros en 2013 pour devenir négatif en 2014 à hauteur de moins 1 416 000 euros.

Au cours de l'année 2015, la société a pris plusieurs mesures destinées à permettre un retour à la compétitivité et notamment le déploiement d'une démarche 'lean' destinée à l'amélioration de la productivité des sites industriels de la société, une structuration d'un service achat pour réaliser des économies sur les approvisionnements et une mise en place d'un partenariat avec une société de logistique destiné à générer des économies sur les coûts de transports 'projets 4PL'.

Toutefois, malgré les mesures correctives mises en place en 2015, le résultat d'exploitation de la société a continué à chuter pour atteindre 2'091 000 euros.

Il est donc indispensable, pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe et assurer la pérennité de la société, que Recticel SAS procède à la fermeture de l'établissement de Noyen dont le chiffre d'affaires est en baisse quasiment constante depuis 2011 et dont les résultats sont structurellement négatifs.

C'est dans ce contexte que la suppression du poste d'opérateur transformation profil n°3 que vous occupez au sein de l'établissement de Noyen n'a pas pu être évité.

Nous avons tout mis en 'uvre afin de procéder à votre reclassement, conformément aux obligations qui nous incombent. (...)

Pour l'ensemble de ces raisons, nous n'avons pas d'autres choix que de prononcer votre licenciement pour motif économique (...)'.

Par requête reçue au greffe le 17 mai 2017, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de voir renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Nantes afin qu'il soit statué dans le cadre d'une procédure en exception d'illégalité sur la légalité des décisions de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé son licenciement pour motif économique et aux fins de contester son licenciement.

Par jugement contradictoire rendu le 20 décembre 2018, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section encadrement, a :

- constaté que la décision d'autorisation de licenciement de Mme [N] rendue par l'inspection du travail de la Sarthe le 13 juillet 2016 ne souffre d'aucune contestation sérieuse,

- débouté Mme [N] de sa demande de renvoi auprès du tribunal administratif de Nantes,

- constaté la réalité des difficultés économiques,

- dit et jugé que le licenciement de Mme [N] est parfaitement justifié,

- dit et jugé que la société Recticel a parfaitement respecté son obligation de reclassement,

- débouté purement et simplement Mme [N] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société Recticel de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les éventuels dépens seront à la charge de Mme [N].

Mme [N] avait demandé au conseil de prud'hommes de :

- la déclarer recevable et bien fondée en ses fins et prétentions,

- dire et juger qu'il existe une contestation sérieuse quant à la légalité des décisions de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé son licenciement pour motif économique,

en conséquence,

- renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Nantes afin qu'il soit statué dans le cadre d'une procédure en exception d'illégalité sur la légalité des décisions de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé son licenciement pour motif économique,

- saisir le tribunal administratif de Nantes en ce sens,

- surseoir à statuer dans l'attente de la décision qui sera rendue par le tribunal administratif de Nantes,

à défaut,

- réparation du préjudice subi du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement : 107 495,53 euros net,

- article 700 du code de procédure civile : 2 500 euros,

- ordonner l'exécution provisoire des condamnations à intervenir sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,

- condamner la société Recticel aux intérêts légaux ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais de procédure et les éventuels frais d'exécution du jugement.

Mme [N] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 mars 2019.

Par conclusions adressées par voie électronique le 13 septembre 2021, Mme [N] demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et prétentions,

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 20 décembre 2018 dans toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau :

- dire et juger qu'il existe une contestation sérieuse quant à la légalité des décisions de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé le licenciement pour motif économique de Mme [N],

En conséquence,

- renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Nantes afin qu'il soit statué, dans le cadre d'une procédure en exception d'illégalité, sur la légalité des décisions de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé le licenciement pour motif économique de Mme [N],

- saisir le tribunal administratif de Nantes en ce sens,

- surseoir à statuer dans l'attente de la décision qui sera rendue par le tribunal administratif de Nantes,

Subsidiairement,

- condamner la société Recticel SAS à payer à Mme [N] la somme de 107 495,53 euros nets en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement,

En tout état de cause,

- condamner la société Recticel SAS à verser à Mme [N] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Recticel SAS aux intérêts légaux ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, en ce compris, les frais de procédure et les éventuels frais d'exécution du jugement.

Par conclusions adressées par voie électronique le 14 septembre 2021, la société Recticel demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 20 décembre 2018 en ce qu'il a :

A titre liminaire :

* constaté que la décision d'autorisation de licenciement de Mme [N] rendue par l'inspection du travail de la Sarthe le 13 juillet 2016 ne souffre d'aucune contestation sérieuse,

en conséquence :

* débouté Mme [N] de sa demande de renvoi auprès du tribunal administratif de Nantes,

en tout état de cause :

* constaté que le secteur d'activité retenu pour apprécier les difficultés économiques est parfaitement justifié,

* constaté la réalité des difficultés économiques,

* dit et jugé que le licenciement de Mme [N] est parfaitement justifié,

* dit et jugé que la société a parfaitement respecté son obligation de reclassement,

en conséquence :

* débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes,

* débouté Mme [N] de sa demande d'exécution provisoire,

- condamner Mme [N] à verser à la Société la somme de 5 000 euros à la société au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 15 septembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction.

Par arrêt rendu le 16 décembre 2021, la cour d'appel de Versailles a :

- ordonné le sursis à statuer dans le cadre de la présente affaire pour permettre d'examiner ensemble tous les dossiers concernant le même licenciement économique collectif et dans l'attente de l'arrêt du Conseil d'État à la suite du pourvoi formé contre le jugement du tribunal administratif de Nantes du 26 juin 2020,

- dit que l'affaire sera rappelée à l'audience collégiale du Mardi 24 mai 2022 à 09h00 en salle n°3,

- réservé les dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Mme [N] sollicite à titre principal de voir renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Nantes afin qu'il soit statué dans le cadre d'une procédure en exception d'illégalité sur la légalité de la décision de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé son licenciement pour motif économique.

La société Recticel oppose ici à Mme [N] que la décision de l'inspection du travail la concernant n'est plus susceptible de recours. Elle ajoute que la procédure d'exception d'illégalité nécessite par ailleurs qu'une telle décision soit entachée d'une grave illégalité ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Elle sollicite donc la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes en ce que ce dernier a débouté Mme [N] de sa demande de renvoi devant le tribunal administratif de Nantes.

Sur ce,

Il ressort des éléments en présence que le 13 juillet 2016, l'inspection du travail a autorisé le licenciement de Mme [N], celle-ci étant salariée protégée, tandis que par courrier du 22 juillet 2016, la société Recticel a notifié à l'intéressée son licenciement pour motif économique.

Saisie par requête reçue au greffe le 17 mai 2017, le conseil de prud'hommes de Nanterre, a, aux termes de son jugement en date du 20 décembre 2018, débouté Mme [N] de sa demande de renvoi devant le tribunal administratif de Nantes après avoir retenu que la décision d'autorisation de licenciement de l'intéressée ne souffrait d'aucune contestation sérieuse.

Mme [N] produit devant la cour une décision de l'inspecteur du travail en date du 13 juillet 2016 autorisant le licenciement d'un salarié protégé (pièce n°17) tandis qu'il est communiqué par la société Recticel son mémoire complémentaire devant le Conseil d'Etat dont il ressort que par jugement du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a déclaré que des décisions

du 13 juillet 2016 de l'inspection du travail autorisant le licenciement de salariés protégés étaient entachées d'une erreur d'appréciation portant sur le niveau du secteur d'activité dont relève la société Recticel. Il a par ailleurs été communiqué l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 27 avril 2022 rejetant les pourvois de cette dernière.

Il sera rappelé ici que l''exception devant le juge judiciaire tirée de l'illégalité d'un acte administratif individuel n'est soumise à aucune condition de délai.

Le juge judiciaire civil, lorsqu'il est saisi, par voie d'exception, d'un moyen d'illégalité, doit surseoir à statuer et renvoyer la question à la juridiction administrative par voie préjudicielle en application de l'article 49 du code de procédure civile à condition que la question présente un caractère sérieux et que le point sur lequel elle porte soit nécessaire à la solution du litige.

Or, le litige opposant Mme [N] à la société Recticel porte sur la cause économique de son licenciement dont l'examen du bien-fondé par l'inspection du travail est contesté.

Dans le même temps; il est rappelé que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient.

Le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national.

Or, si la société Recticel retient ici que les entreprises Eurofoam constituent un groupe distinct du groupe Recticel dès lors que ce groupe ne possède pas 51% des parts de la 'joint venture' Eurofoam non plus que la majorité des droits de vote au sein des sociétés Eurofoam, la permanence et l'importance des relations entre les sociétés constituant la joint-venture Eurofoam et le groupe Recticel n'en posent pas moins la question de leur appartenance à un même ensemble économique.

De même s'agissant du secteur d'activité à prendre en considération, la salariée soulève à juste titre que la juridiction administrative a, dans des décisions portant sur son périmètre, d'ores et déjà retenu une erreur d'appréciation de l'inspection du travail.

Ces éléments conduiront à retenir le caractère sérieux de l'exception d'illégalité et, par infirmation du jugement entrepris, à faire droit à la demande principale de Mme [N].

Il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

INFIRME le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Vu l'article 49 du code de procédure civile;

RENVOIE les parties devant le tribunal administratif de Nantes afin qu'il soit statué dans le cadre d'une procédure en exception d'illégalité sur la légalité de la décision de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 ayant autorisé le licenciement pour motif économique de Mme [L] [N] ;

TRANSMET le présent dossier au tribunal administratif de Nantes ;

SURSOIT à statuer dans l'attente de la décision qui sera rendue par le tribunal administratif de Nantes,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Recticel à payer à [L] [N] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la société Recticel de sa demande de ce chef,

CONDAMNE la société Recticel aux dépens ;

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Valérie DE LARMINAT,Conseiller,en remplacement de Madame Isabelle VENDRYES,Président,légitimement empêché, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER P/ LE PRESIDENT empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/01082
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;19.01082 ?
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