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22/06/2022 | FRANCE | N°20/01485

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 22 juin 2022, 20/01485


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 22 JUIN 2022



N° RG 20/01485 - N° Portalis DBV3-V-B7E-T6OG



AFFAIRE :



S.A. ACCOR prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité au siège







C/

[M] [X]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes de BOULOGN

E BILLANCOURT

N° Chambre :

N° Section : Encadrement

N° RG : F18/00772



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES



la SELEURL THE LEGAL LAB







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 JUIN 2022

N° RG 20/01485 - N° Portalis DBV3-V-B7E-T6OG

AFFAIRE :

S.A. ACCOR prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité au siège

C/

[M] [X]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Chambre :

N° Section : Encadrement

N° RG : F18/00772

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

la SELEURL THE LEGAL LAB

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. ACCOR prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Jérémie PAUBEL de la SELARL ACTANCE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 168 substitué à l'audience par Me Marine BOISSY, avocat au barreau de PARIS

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

APPELANTE

****************

Monsieur [M] [X]

né le 22 Septembre 1962 à [Localité 6]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Alexis MOISAND de la SELEURL THE LEGAL LAB, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P393

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,

M. [M] [X] a été embauché à compter du 10 octobre 1981 selon contrat de travail à durée indéterminée par la société Accor.

Par avenant d'expatriation à effet au 1er février 2015, la société Accor a mis M. [X] à la disposition d'une de ses filiales en Hongrie (la société Accor Pannonia Hotels ZRT) pour une durée de deux années et au maximum de trois années en qualité de 'Area General Manager Mercure Brand et Directeur général Mercure [Localité 5] Korona'.

Le 2 février 2015, un contrat de travail a été conclu parallèlement pour cet emploi entre M. [X] et la filiale hongroise.

Par lettre du 15 juin 2017, la société Accor a indiqué à M. [X] qu'elle mettait fin à son expatriation à compter du 30 juin suivant et qu'il était placé en 'période d'inter contrat' en son sein à compter de cette date, dans l'attente d'une nouvelle affectation.

Par lettre du 26 juin 2017, la filiale hongroise a rompu son contrat de travail avec M. [X].

Par lettre du 3 octobre 2017, la société Accor a convoqué M. [X] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Par lettre du 19 octobre 2017, la société Accor a notifié à M. [X] son licenciement pour motif personnel.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la société Accor employait habituellement au moins onze salariés.

Le 13 juin 2018, M. [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt pour contester la validité et subsidiairement le bien-fondé de son licenciement et demander la condamnation de la société Accor à lui payer notamment des indemnités de rupture, des dommages-intérêts et des rappels de salaire.

Par jugement du 25 juin 2020, le conseil de prud'hommes (section encadrement) a :

- fixé la rémunération moyenne mensuelle des douze derniers mois à 26 088,22 euros ;

- condamné la société Accor à payer à M. [X] les sommes suivantes :

* 5 381,19 euros brut à titre de rappel de bonus 2017 ;

* 521 764 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral né du caractère brutal et vexatoire du licenciement ;

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné à la société Accor de remettre des documents sociaux, à savoir bulletins de salaire, solde de tout compte et attestations pour Pôle emploi, sans astreinte ;

- débouté M. [X] du surplus de ses demandes ;

- rappelé l'exécution provisoire de droit ;

- dit que les intérêts porteront effet, avec capitalisation, pour les condamnations de nature salariale à la date de la saisine du conseil de prud'hommes et pour les condamnations de nature indemnitaire à la date du prononcé de la décision ;

- ordonné en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail le remboursement par la société Accor aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à M. [X] du jour de son licenciement au jour du prononcé de la décision dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- débouté la société Accor de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Accor aux dépens.

Le 15 juillet 2020, la société Accor a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 24 février 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société Accor demande à la cour de :

- infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

- dire que le licenciement de M. [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [X] à payer à la société Accor une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions du 7 mai 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [X] demande à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société Accor à lui payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice moral né du caractère brutal et vexatoire du licenciement et en conséquence condamner la société Accor à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts légaux et capitalisation à compter de la saisine du conseil de prud'hommes :

- 15 293,65 euros brut à titre de rappel de bonus 2017 pour la période du 11 août au 24 octobre 2017 ;

- 55 178,56 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 10 août au 24 octobre 2017;

- 181 228,86 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral né de la violation caractérisée des dispositions contractuelles relatives à l'obligation de réintégration/reclassement ;

- 83 827,36 euros à titre de reliquat d'indemnité légale de licenciement ;

- 68 028,35 euros brut à titre de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 6 720,56 euros brut à titre de reliquat d'indemnité de congés payés (11 jours) ;

- 1 087 553,16 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ou, à titre subsidiaire, 604 196,20 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ;

- 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 12 avril 2022.

SUR CE :

Sur le rappel de salaire pour la période du 10 août au 24 octobre 2017 et sur le rappel de bonus pour la période du 11 août au 24 octobre 2017 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1231-5 du code du travail, lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein ; qu'il en résulte que, en l'absence d'offre de réintégration sérieuse, précise et compatible avec l'importance des précédentes fonctions du salarié au sein de la société mère, cette dernière est tenue, jusqu'à la rupture du contrat de travail la liant au salarié, au paiement des salaires et des accessoires de rémunération du dernier emploi, dès lors que le salarié s'est tenu à la disposition de l'employeur ;

Qu'en l'espèce, il est constant que la société Accor n'a, à la suite du licenciement de M. [X] par la filiale hongroise, proposé aucun poste à ce dernier et qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur ; qu'il est donc fondé, par application des dispositions légales mentionnées ci-dessus, à réclamer le paiement des salaires et accessoires de rémunération afférents à son dernier emploi au sein de cette filiale pendant la période en litige ;

Qu'il ressort des débats et des pièces versées, et notamment des tableaux établis par les parties, que la rémunération annuelle sur les douze derniers mois de M. [X] dans son poste en Hongrie s'élevait à 307 484,81 euros brut, représentant une moyenne mensuelle de 25 623,73 euros brut ; que M. [X] est de plus fondé à réclamer la prise en compte de la somme de 6 192,96 euros au titre des frais annuels de scolarité d'un enfant, qui, selon l'avenant d'expatriation, constituait un élément de rémunération ; qu'il n'est en revanche pas fondé à réclamer la prise en compte des sommes versées par la filiale au titre de la protection sociale des expatriés, lesquelles, eu égard à leur caractère facultatif, n'entrent pas dans la définition du salaire brut ;

Que dans ces conditions, sur la base d'une rémunération moyenne mensuelle d'un montant de 26 139,81 euros brut, M. [X] est fondé à réclamer, pour la première fois en appel, un rappel de salaire d'un montant de 47 744,65 euros brut pour la période en litige ;

Qu'il n'est en revanche pas fondé à réclamer un rappel de salaire au titre de la rémunération variable pour cette période, puisqu'il ressort des débats et des pièces versées que la rémunération moyenne mensuelle mentionnée ci-dessus inclus déjà le montant du bonus versé au titre de l'année 2016 ; qu'il y a donc lieu de débouter M. [X] de cette demande ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur la validité du licenciement et les dommages-intérêts afférents :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige : 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français' ; qu'aux termes de l'article L. 1134-1 du même code : 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations./ Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination./ Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles' ;

Qu'en l'espèce, M. [X] soutient que la décision de le licencier résulte uniquement d'une discrimination liée à l'âge ou au sexe en ce qu'il a été remplacé par une femme plus jeune dans le cadre d'un programme de la société Accor en faveur de l'égalité des sexes et de la 'parité' dénommé 'HeForShe' ;

Que toutefois, il verse aux débats à ce titre des courriels rédigés en langue étrangère, sans traduction en français, ainsi qu'un extrait d'une publication interne au groupe Accor qui indique seulement que ce dernier s'engage 'à fin 2017" 'à une égale représentation des sexes dans le management et la parité salariale' avec '35 % de directrice d'hôtels' ; que de la sorte, il ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande tendant à l'annulation du licenciement et de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement nul ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur le bien-fondé du licenciement et l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse:

Considérant que la lettre de licenciement pour motif personnel du 19 octobre 1017 notifiée à M. [X] par la société Accor est ainsi rédigée : ' (...) Nous avons le regret de vous informer par la présente de notre décision de procéder à votre licenciement compte tenu de l'inadaptation de votre profil à tous postes disponibles au sein du groupe Accor.

À compter du 1er février 2015, vous avez fait l'objet d'une expatriation en Hongrie de deux ans (...). Cette expatriation a été prolongée jusqu'au 30 juin 2017. Votre expatriation devait donc arriver à son terme le 30 juin 2017. Au 1er juillet 2017 vous être devenu salarié de la société Accor SA dans le cadre d'un inter contrat tout en étant resté sur le payroll d'Accor-Pannonia Hotels Zrt jusqu'au 10 août 2017.

Dans ces circonstances, nous avons recherché au sein du groupe un poste conforme à votre profil de directeur général hôtels et directeur délégué zone.

Néanmoins, l'évaluation de votre profil sur votre poste en Hongrie ne permet pas d'envisager une affectation à un nouveau poste avec une responsabilité identique.

En particulier, vos dernières évaluations annuelles ont fait état d'une communication insuffisante avec votre hiérarchie entraînant un risque de confusion et d'incompréhension, et de réactions trop émotionnelles et impulsives, incompatibles avec le sang-froid requis pour un manager ayant votre expérience et votre responsabilité.

Ont été également souligné lors de ces mêmes évaluations une implication personnelle insuffisante pour le développement de l'activité, et une gestion de projets pas assez rigoureuse.

Cet état de fait a restreint considérablement les solutions de reclassement envisageables malgré votre niveau d'expérience au sein de notre société.

En conséquence, nous n'avons pas d'autre choix que de prononcer votre licenciement pour motif personnel compte tenu de votre niveau de performance, qui est incompatible avec les exigences que le groupe attache au poste de niveau équivalent à celui que vous occupiez en Hongrie (...)';

Considérant que la société Accor soutient que l'insuffisance professionnelle de M. [X] n'a pas permis de le reclasser dans un poste à la fin de son expatriation et que le licenciement est ainsi fondé sur une cause réelle et sérieuse ; qu'elle conclut donc au débouté de la demande d'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse ;

Considérant que M. [X] soutient que les faits reprochés sont imprécis, d'ordre disciplinaire, prescrits et en tous cas non établis ; que la société Accor a ainsi manqué à son obligation de réintégration à la fin de son expatriation prévue par les dispositions de l'article L. 1231-5 du code du travail et par l'avenant d'expatriation et qu'il convient donc de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant équivalent à 20 mois de salaire en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ;

Considérant qu'en application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; que, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ; que l'insuffisance professionnelle qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié ; qu'aux termes de l'article L. 1231-5 du même code : 'Lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein./Si la société mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables.(...)' ;

Qu'en l'espèce, la société Accor ne verse pas le moindre élément aux débats venant établir l'insuffisance professionnelle reprochée à M. [X], se bornant à procéder par allégations ; que ce dernier à l'inverse produit sa dernière évaluation démontrant la très bonne qualité de son travail dans son poste au sein de la filiale hongroise et même le dépassement des objectifs qui lui étaient assignés ;

Que dans ces conditions, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse comme l'ont justement estimé les premiers juges ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Qu'en conséquence, eu égard à son ancienneté de 36 années et à l'effectif de la société Accor au moment du licenciement, M. [X] est fondé à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant minimal équivalent à trois mois de salaire brut et d'un montant maximal équivalent à vingt mois de salaire brut, par application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ; qu'eu égard à son âge (né en 1962), à sa rémunération moyenne mensuelle de 26 139,81 euros brut mentionnée ci-dessus, à sa situation postérieure au licenciement (chômage sans justificatifs de recherche d'emploi), il y a lieu de confirmer l'allocation de la somme de 521 764 euros fixée par les premiers juges ;

Sur les rappels d'indemnité de rupture et d'indemnité compensatrice de congés payés :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1231-5 du code du travail déjà mentionné, lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein ; qu'il en résulte que lorsque la société mère ne réintègre pas le salarié après son licenciement par la filiale étrangère, les indemnités de rupture auxquelles le salarié peut prétendre doivent être calculées par référence aux salaires perçus par celui-ci dans son dernier emploi ;

Que par suite, eu égard à la rémunération moyenne mensuelle au sein de la filiale hongroise s'élevant à 26 139,81 euros brut ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il y a lieu d'allouer à M. [X] les sommes suivantes :

- 72 533,76 euros à titre de rappel d'indemnité légale de licenciement ;

- 58 863,26 euros brut à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 5 815,13 euros brut à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;

Que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ces points ;

Sur les dommages-intérêts pour violation de l'obligation de réintégration après la fin de sa mise à disposition de la filiale étrangère :

Considérant qu'en l'espèce, M. [X] invoque à ce titre un préjudice moral, sans verser le moindre élément venant en justifier l'existence ; que le débouté sera donc confirmé ;

Sur les dommages-intérêts pour circonstances brutales et vexatoires du licenciement :

Considérant qu'il ressort des débats et des pièces versées que la société Accor a fondé le licenciement de M. [X], après trente-six années de carrière méritoire, sur des motifs d'insuffisance professionnelle dénués de toute consistance et même démentis par ses évaluations professionnelles versées aux débats ; que le préjudice moral résultant de cette éviction brutale et vexatoire sera réparé intégralement par l'allocation d'une somme de 3 000 euros à ce titre, en l'absence de justification d'un plus ample préjudice ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur le quantum de ces dommages-intérêts ;

Sur les intérêts légaux et la capitalisation :

Considérant qu'il y lieu de rappeler que les sommes allouées portent intérêts légaux à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes pour ce qui est des créances de nature salariale et à compter du jugement en ce qui concerne les créances de nature indemnitaire ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Que la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil sera quant à elle confirmée ;

Sur le remboursement des indemnités de chômage par la société Accor :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué sur ce point ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; qu'en outre, la société Accor, qui succombe majoritairement en appel, sera condamnée à payer à M. [X] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué, sauf sur le rappel de bonus pour l'année 2017, sur les rappels d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice de congés payés et sur les intérêts légaux,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Accor à payer à M. [M] [X] les sommes suivantes :

- 72 533,76 euros à titre de rappel d'indemnité légale de licenciement,

- 58 863,26 euros brut à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis,

- 5 815,13 euros brut à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 47 744,65 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 11 août au 24 octobre 2017,

- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour circonstances brutales et vexatoires du licenciement,

Rappelle que les sommes allouées à M. [M] [X] portent intérêts légaux à compter de la date de réception par la société Accor de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes pour ce qui est des créances de nature salariale et à compter du jugement en ce qui concerne les créances de nature indemnitaire,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Accor à payer à M. [M] [X] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société Accor aux dépens d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01485
Date de la décision : 22/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-22;20.01485 ?
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