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16/06/2022 | FRANCE | N°19/03930

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 16 juin 2022, 19/03930


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 JUIN 2022



N° RG 19/03930 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TQ62



AFFAIRE :



[M] [I] épouse [C]



C/



SARL ALDI MARCHE [Localité 3]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Octobre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : C

N° RG : 17/002

70



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



M. [W] [O] (Délégué syndical ouvrier)



Me Laurence HERMAN-GLANGEAUD







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 JUIN 2022

N° RG 19/03930 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TQ62

AFFAIRE :

[M] [I] épouse [C]

C/

SARL ALDI MARCHE [Localité 3]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Octobre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : C

N° RG : 17/00270

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

M. [W] [O] (Délégué syndical ouvrier)

Me Laurence HERMAN-GLANGEAUD

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [M] [I] épouse [C]

née le 30 Avril 1973 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : M. [W] [O] (Délégué syndical ouvrier)

APPELANTE

****************

SARL ALDI MARCHE [Localité 3]

N° SIRET : 444 330 781

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentant : Me Laurence HERMAN-GLANGEAUD, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 253

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mai 2022, Madame Hélène PRUDHOMME, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE

Le 6 janvier 2014, Mme [M] [C] était embauchée par la société Aldi Marché [Localité 3] en qualité d'employée commerciale, par contrat à durée déterminée prolongé par un contrat à durée indéterminée.

Le contrat de travail était régi par la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Mme [C] était placée en arrêt maladie à plusieurs reprises en 2017. La salariée saisissait la CPAM afin de faire reconnaître l'origine professionnelle de l'accident ayant conduit à l'arrêt maladie. La CPAM refusait le 3 juillet 2017 de reconnaître le caractère professionnel de l'accident déclaré.

Le 6 juin 2017, le médecin du travail concluait à l'aptitude de la salariée à reprendre son travail, soulignant toutefois plusieurs restrictions. Puis, à la suite d'une seconde visite de reprise réalisée le 20 juin 2017, le médecin du travail déclarait Mme [C] «'inapte au poste, apte à un autre poste, sans port de charge, ni de position assise prolongée, ni de gestes répétitifs ou accroupie, ne doit conduire plus de 40 mn aller et 40 mn retour de son travail'». L'entreprise cherchait à reclasser la salariée à compter du 3 juillet 2017 à un autre poste compatible, en vain. Les délégués du personnel étaient réunis pour examiner la situation de la salariée le 8 août 2017.

Le 10 août 2017, la société Aldi Marché [Localité 3] convoquait Mme [C] à un entretien préalable en vue de son licenciement. L'entretien se déroulait le 21 août 2017. Le 23 août 2017, elle lui notifiait son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Le 15 décembre 2017, Mme [C] saisissait le conseil des prud'hommes de Rambouillet pour contester son licenciement et reprocher à son employeur d'avoir violé l'obligation de sécurité à son encontre.

Vu le jugement du 10 octobre 2019 rendu en formation paritaire par le conseil de prud'hommes de Rambouillet qui a':

- Constaté que le licenciement de Mme [C] repose sur une cause réelle et sérieuse';

- Constaté que l'employeur n'a pas manqué quant à la garantie de la sécurité des personnels';

- Dit que la procédure de licenciement montre une irrégularité ;

- En conséquence,'

- Débouté Mme [C] de l'ensemble de ses demandes';

- Débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- Condamné la société Aldi Marché [Localité 3] au paiement des entiers frais et dépens';

Vu l'appel interjeté par Mme [C] le 25 octobre 2019

Vu les conclusions de l'appelante, Mme [C], notifiées le 22 mars 2022 et soutenues à l'audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- Infirmer dans toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud'hommes de Rambouillet du 10 octobre 2019';

Statuant à nouveau

- Condamner la société Aldi Marché [Localité 3] à payer à Mme [C] pour le non respect de la procédure de licenciement la somme de 1'897,24 euros';

- Condamner la société Aldi Marché [Localité 3] à payer à Mme [C] au titre de dommages et intérêts prévus par l'article L1226-15 pour méconnaissance des dispositions en matière de reclassement, la somme de 22'766,90 euros';

- Condamner la société Aldi Marché [Localité 3] à payer à Mme [C] au titre du non respect de l'obligation de sécurité la somme de dommages et intérêts de 20'000 euros';

- Condamner la société Aldi Marché [Localité 3] à payer à Mme [C] la somme de 1'500 euros d'article 700 du code de procédure civile';

- Condamner la partie perdante aux entiers dépens de l'appel';

Vu les écritures de l'intimée, la société Aldi Marché [Localité 3], notifiées le 25 février 2020 et développées à l'audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de':

- Recevoir la société Aldi Marché [Localité 3] en ses demandes, fins et conclusions.

- Dire les demandes de Mme [C] particulièrement mal fondées.

En conséquence,

- Confirmer la décision du conseil de prud'hommes de Rambouillet du 10 octobre 2019 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- Condamner l'appelante au paiement de la somme de 1'500 euros par application et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'ordonnance de clôture du 9 mai 2022.

SUR CE,

Sur l'exécution du contrat de travail':

Sur la violation de l'obligation de sécurité

Mme [C] reproche à son employeur de n'avoir pas tenu compte des préconisations du médecin du travail après sa première visite de reprise puisqu'elle était amenée à faire de la manutention à un rythme intensif, que le magasin n'est équipé que d'un seul tire-palette électrique, que l'employeur n'a pas fait d'étude de son accident du travail et que les arrêts de travail sont compensés par la modification des plannings des salariés et la surcharge de travail de ceux qui compensent. Elle réclame la condamnation de son employeur à lui verser la somme de 20'000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

La SARL Aldi Marché [Localité 3] conteste ses affirmations et conclut que la salariée ne démontre pas les inobservations qu'elle lui reproche ; elle indique que l'accident du travail n'a pas été retenu de sorte qu'il convient de débouter la salariée de ce chef de demande.

Il ressort de l'article L. 4121-1 du code du travail que «'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent':

1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail';

2° des actions d'information et de formation';

3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes'».

Il apparaît que Mme [C] ne verse aucune pièce justifiant des critiques qu'elle mentionne dans ses écritures, l'accident du travail qu'elle déplore n'a pas été retenu par la CPAM et tandis que les difficultés de santé qu'elle subit et qui sont reprises dans l'avis médical du médecin du travail du chef des restrictions médicales ne permet pas d'en déduire l'existence d'un lien entre l'état de santé constaté et l'activité professionnelle de l'appelante.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'appelante échoue à rapporter la preuve d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité en lien de causalité direct et certain avec le préjudice invoqué, de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [C] de sa demande.

Sur la rupture du contrat de travail':

Sur la violation de la procédure

Mme [C] reproche à nouveau à la SARL Aldi Marché [Localité 3] d'avoir adressé la lettre de licenciement moins de deux jours ouvrables après la date de tenue de l'entretien préalable et réclame la condamnation de la SARL Aldi Marché [Localité 3] à lui verser la somme de 1'897,24 euros au titre du non-respect de la procédure de licenciement. Ainsi, elle a été convoquée à l'entretien préalable devant se tenir le 21/08/2017 de sorte que la lettre de licenciement ne pouvait être adressée avant le 24 août 2017. De plus, elle a été convoquée au siège social de la SARL Aldi Marché [Localité 3] à [Localité 3], soit à 250 km de son domicile situé à [Localité 7] alors que le médecin du travail avait limité à 40 mn son temps de déplacement de sorte qu'elle n'a pas pu présenter sa cause et répondre aux interrogations de l'employeur.

La SARL Aldi Marché [Localité 3] répond qu'elle ne dispose pas, dans ses magasins, de locaux assurant la confidentialité nécessaire à la tenue d'un entretien de licenciement de sorte qu'elle convoque tous ses salariés à son siège social à [Localité 3] ; elle rappelle que la salariée ne lui a pas demandé d'aménagement en ce sens ni ne l'a informée de son impossibilité de se rendre à la convocation ; elle indique enfin que Mme [C] ne justifie du préjudice résultant de l'envoi de la lettre de licenciement le 23 août au lieu du 24 août 2017, qu'elle n'est allée chercher à la Poste que le 29 août 2017.

Si effectivement la SARL Aldi Marché [Localité 3] a omis de respecter le délai de réflexion de deux jours après la tenue de l'entretien préalable, institué pour permettre à l'employeur de réfléchir aux arguments soulevés par le salarié au cours de l'entretien préalable, la faute de l'employeur est atténuée du fait de l'absence de Mme [C] à cet entretien, ne nécessitant pas pour l'employeur d'apprécier les arguments invoqués par son salarié au cours de cet entretien. Il apparaît également que Mme [C] est mal venue de reprocher à son employeur sa convocation à [Localité 3] alors qu'elle n'a pas demandé une délocalisation de cet entretien dans un lieu plus proche de son domicile. La cour relève ainsi que Mme [C] ne justifie d'aucun préjudice résultant du non-respect formel du délai de réflexion. Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la salariée de ce chef de demande.

Sur le défaut de respect de l'obligation de reclassement

Mme [C] indique que le seul fait d'envoyer une lettre à certaines filiales du groupe et l'éventuelle réponse négative reçue par l'employeur ne prouve nullement que ce dernier a satisfait à son obligation préalable de reclassement alors qu'elle rappelle qu'elle était mobile sur la France et à l'étranger, qu'elle n'a reçu aucune proposition de reclassement alors que certaines des sociétés du groupe, celle de [Localité 4], a présenté une offre qui ne lui a pas été soumise, pas plus que la proposition d'employée de comptabilité pour la centrale d'[Localité 3] et les 85 postes correspondant aux entrées au sein de la société à [Localité 6]. Aussi, elle réclame la condamnation de la SARL Aldi Marché [Localité 3] à lui verser la somme de 22'766,90 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'article L. 1226-15 du code du travail.

La SARL Aldi Marché [Localité 3] répond qu'en ce qui concerne la recherche de reclassement, elle adressé une demande à l'ensemble des sociétés du groupe qui ont répondu par la négative, à l'exception de la société Aldi Marché [Localité 4] qui proposait des postes d'employés commerciaux, préparateur de commande ou chauffeur-livreur, tous postes exclus par le médecin du travail dans son avis d'inaptitude. Elle a d'ailleurs consulté le médecin du travail qui a fait une étude de poste avant de prendre son avis d'inaptitude, les postes administratifs ne pouvant pas plus être occupés par Mme [C] du fait de la position assise continue.

La cour constate que la SARL Aldi Marché [Localité 3] a respecté les dispositions nouvelles mises en place en 2017 relativement à l'inaptitude médicale des salariés en consultant les délégués du personnel, en l'absence de lien justifié de l'inaptitude avec un accident du travail ou une maladie professionnelle ; à défaut pour Mme [C] de démontrer que les postes disponibles mentionnés étaient compatibles avec son état de santé tel que décrit par le médecin du travail et alors que les restrictions médicalement constatées l'empêchaient d'occuper un poste avec port de charge, qu'elle ne pouvait avoir une position assise prolongée, qu'elle ne pouvait accomplir de gestes répétitifs, qu'elle ne pouvait s'accroupir, et enfin qu'elle ne devait pas conduire plus de 40 mn aller et 40 mn retour de son travail, la cour constate qu'aucun des postes revendiqués que ce soit à [Localité 4] ou à [Localité 6] n'était compatible avec ces restrictions de sorte que la cour confirme le débouté justement prononcé par le conseil de prud'hommes.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de Mme [C]';

La demande formée par la SARL Aldi Marché [Localité 3] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel sera accueillie, à hauteur de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement entrepris'en toutes ses dispositions

Condamne Mme [M] [C] aux dépens d'appel';

Condamne Mme [M] [C] à payer à la SARL Aldi Marché [Localité 3] la somme de 1'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme'Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIERLe PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03930
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.03930 ?
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