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16/06/2022 | FRANCE | N°19/03845

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 16 juin 2022, 19/03845


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 JUIN 2022



N° RG 19/03845 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TQQZ



AFFAIRE :



[O] [Z] [X] [E]





C/

SAS SOCIETE FRANCAISE DES THES DE L'ORIENT 1842 -SFTO









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 24 Septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Chambre

:

N° Section : C

N° RG : 18/00137



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Mélina PEDROLETTI



Me Laurent PIERRE



le : 17 Juin 2022





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEIZE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 JUIN 2022

N° RG 19/03845 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TQQZ

AFFAIRE :

[O] [Z] [X] [E]

C/

SAS SOCIETE FRANCAISE DES THES DE L'ORIENT 1842 -SFTO

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 24 Septembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 18/00137

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Mélina PEDROLETTI

Me Laurent PIERRE

le : 17 Juin 2022

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant,fixé au 09 Juin 2022,puis prorogé au 16 Juin 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [O] [Z] [X] [E]

née le 30 Septembre 1984 à [Localité 5] (Portugal)

de nationalité Portugaise

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par : Me Laurent PIERRE de l'ASSOCIATION ASSOCIATION JARNOUX-DAVALON & PIERRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 491

APPELANTE

****************

SAS SOCIETE FRANCAISE DES THES DE L'ORIENT 1842 - SFTO

N° SIRET : 451 845 481

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par : Me Nathalie PAQUIN-FERNANDEZ de la SELARL AVEL AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de RENNES, vestiaire : 67 ; et Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie

DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,

Rappel des faits constants

La SAS Société Française des Thés et de l'Orient 1842, dont le siège social est situé à [Localité 4] dans les Yvelines, est spécialisée dans la distribution de thé. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale du commerce de gros de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie, alimentation fine et négociants-distributeurs de levures du 1er janvier 1985.

Mme [O] [Z] [X] [E], née le 30 septembre 1984, a été engagée par cette société le 7 octobre 2013, selon contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'employée polyvalente - magasinier.

Par avenant du 1er juin 2014, Mme [X] [E] a été promue opératrice de machine - conductrice de ligne.

Mme [X] [E] a été placée en arrêt de travail à compter de janvier 2015.

À l'issue d'une visite médicale de reprise du 20 décembre 2017, le médecin du travail a déclaré Mme [X] [E] inapte à son poste de travail, précisant « contre-indication médicale aux gestes et contraintes suivantes : port de charge avec son membre supérieur droit, geste répétitif avec son membre supérieur droit ».

Après un entretien préalable qui s'est déroulé le 23 janvier 2018, Mme [X] [E] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, par courrier du 26 janvier 2018, dans les termes suivants :

"Aux termes d'une visite médicale en date du 20 décembre 2017, le docteur [Y], médecin du travail vous a déclarée inapte à votre poste de conductrice de ligne de fabrication conformément aux dispositions de l'article R 4624-42 du code du travail.

Il a par ailleurs indiqué que dans le cadre d'un reclassement, vous pouviez occuper un poste respectant les contre-indications médicales aux gestes et contraintes suivantes : port de charge avec votre membre supérieur droit, geste répétitif avec votre membre supérieur droit.

Il a au surplus précisé que vous étiez en capacité de bénéficier d'une formation permettant de vous préparer à occuper un poste adapté.

Soucieux de respecter notre obligation de reclassement, nous avons recherché les postes actuellement disponibles susceptibles de correspondre aux préconisations du médecin du travail.

Suivant le courrier en date du 3 janvier 2018, nous vous avons proposé un poste de reclassement en qualité de préparatrice de commande web à temps partiel (25 heures hebdomadaires) au sein de la société. Était jointe à ce courrier la fiche de poste de préparatrice de commande web, détaillant les missions principales à ce poste.

Aux termes d'une correspondance en date du 5 janvier 2018, vous avez refusé cette proposition de reclassement.

Aucun autre poste compatible avec les préconisations du médecin du travail n'étant disponible au sein de la société, nous sommes dans l'impossibilité de vous reclasser."

Mme [X] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie en contestation de son licenciement par requête reçue au greffe le 31 juillet 2018.

La décision contestée

Par jugement contradictoire rendu le 24 septembre 2019, la section commerce du conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie a :

- dit que la Société Française des Thés et de l'Orient 1842 a satisfait à son obligation de reclassement,

- dit que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme [X] [E] est justifié,

- débouté Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la Société Française des Thés et de l'Orient 1842 en sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que Mme [X] [E] supportera les entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution.

Mme [X] [E] avait demandé au conseil de prud'hommes :

- indemnité spéciale de licenciement : 3 584,37 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 5 550 euros,

- congés payés afférents : 555 euros,

- indemnité au titre des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail : 15 000 euros,

- indemnité de congés payés afférents aux douze premiers mois d'arrêt de travail inhérents à l'accident de travail pour un montant brut de 2 200 euros brut,

- article 700 du code de procédure civile : 2 500 euros,

- intérêts légaux,

- remise de bulletins de paie correspondants (préavis, indemnité de congés payés) et de l'attestation Pôle emploi rectifiée,

- astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la date de notification de la décision,

- exécution provisoire sur la totalité.

La Société Française des Thés et de l'Orient 1842 avait, quant à elle, conclu au débouté de la salariée et avait sollicité sa condamnation à lui verser une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure d'appel

Mme [X] [E] a interjeté appel du jugement par déclaration du 21 octobre 2019 enregistrée sous le numéro de procédure 19/03845.

Prétentions de Mme [X] [E], appelante

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 29 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [X] [E] demande à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

. dit que la Société Française des Thés et de l'Orient 1842 a satisfait à son obligation de reclassement,

. dit que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme [X] [E] est justifié,

. débouté Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes,

. dit que Mme [X] [E] supportera les entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution,

en conséquence, statuant à nouveau,

- condamner la Société Française des Thés et de l'Orient 1842 à lui régler :

. une indemnité spéciale de licenciement de 3 584,37 euros,

. une indemnité compensatrice de préavis de 5 550 euros,

. une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 555 euros,

. une indemnité de congés payés afférente aux douze premiers mois d'arrêt de travail inhérents à l'accident du travail pour un montant brut de 2 220 euros,

. une somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail,

- débouter la Société Française des Thés et de l'Orient 1842 de toutes ses demandes fins et conclusions, plus amples ou contraires aux siennes.

L'appelante sollicite en outre les intérêts de retard au taux légal, la remise 'une attestation destinée à Pôle emploi et d'un bulletin de salaire rectificatif conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la date de notification de l'arrêt et une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prétentions de la Société Française des Thés de l'Orient 1842, intimée

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 1er avril 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Société Française des Thés de l'Orient 1842 demande à la cour d'appel de :

- débouter Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- la recevoir en son appel incident, et l'y déclarer fondée,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

. dit qu'elle a satisfait à son obligation de reclassement,

. dit que le licenciement pour inaptitude et l'impossibilité de reclassement de Mme [X] [E] est justifié,

. débouté Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes,

. dit que Mme [X] [E] supportera les entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicite une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de Mme [X] [E] aux entiers dépens qui seront recouvrés, pour ceux la concernant, par Me Mélina Pedroletti, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 30 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 7 avril 2022.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Pour contester son licenciement, Mme [X] [E] prétend que son inaptitude est d'origine professionnelle et soutient que son employeur a manqué à son obligation de reclassement.

Sur l'origine professionnelle du licenciement

Mme [X] [E] prétend que son inaptitude aurait une origine professionnelle comme résultant d'un accident du travail survenu le 19 décembre 2014.

La Société Française des Thés de l'Orient 1842, sans remettre en cause l'existence d'une lésion, conteste l'existence d'un accident du travail intervenu le 19 décembre 2014 sur le lieu de travail, faisant valoir qu'aucune indication n'a été donnée par la salariée sur les circonstances de ce prétendu accident et que celle-ci n'a fait aucune déclaration au moment du prétendu accident.

Il sera rappelé que, pour déterminer si l'inaptitude est d'origine professionnelle, il convient de rechercher si l'inaptitude a pour origine, au moins partiellement, un accident du travail ou une maladie professionnelle.

En l'espèce, l'employeur indique qu'aucun accident n'a eu lieu au sein de l'établissement le vendredi 19 décembre 2014, ni le lundi 22 ou le mardi 23 décembre, avant la fermeture pour congés. Il vise que, le 19 décembre 2014, Mme [X] [E] n'a, à aucun moment, alerté ses collègues ou la direction d'un tel fait, qu'elle ne s'est plainte d'aucune douleur, ni d'aucune lésion.

Il produit les attestations de plusieurs collègues de travail de la salariée qui confirment tous que Mme [X] [E] n'a pas fait état d'un accident qui serait survenu le 19 décembre 2014 ou de douleurs dans les jours qui ont suivi.

Ainsi, Mme [M] a attesté en ces termes : « j'ai demandé à [O] (Mme [X] [E]) de me ramener à la gare de [Localité 3]. Même en conduisant, elle ne s'est plainte de rien et m'a souhaité de bonnes fêtes » (pièce 1 de l'employeur).

Mme [P] a précisé qu'elle n'a « constaté aucun problème en date du 23 décembre 2014 (') [O] n'a jamais fait mention d'une douleur quelconque ni d'un accident qui aurait pu lui arriver au sein de l'entreprise. » (pièce 2 de l'employeur).

Ces attestations sont corroborées par celle de M. [F] (pièce 3 de l'employeur).

M. [D] [N], directeur d'exploitation, responsable hiérarchique de la salariée, a quant à lui attesté en ces termes : « elle (Mme [X] [E]) ne m'a en aucune façon manifesté un problème particulier concernant une éventuelle douleur, souffrance lors de mes passages pour contrôle que j'effectue plusieurs fois dans la journée (') Le 23 décembre 2014 j'ai constaté également que Mme [X] [E] s'amusait comme toutes les personnes présentes ce jour et qu'également elle ne m'a manifesté, ni à la direction ou à moi-même, aucune douleur, souffrance ou autre traumatisme particulier » (pièce 17 de l'employeur).

Mme [L], responsable administrative et comptable de la société, confirme ne pas avoir été alertée (pièce 18 de l'employeur).

Il est constant que l'entreprise était fermée du 23 décembre 2014 au soir jusqu'au 7 janvier 2015 inclus.

L'employeur indique que, le 8 janvier 2015, Mme [X] [E] l'a informé qu'elle serait absente à son poste car elle avait mal au poignet et qu'elle allait voir le médecin. La salariée a été arrêtée. Elle a repris le travail le 19 janvier 2015 mais, constatant qu'elle souffrait du poignet, son supérieur lui a conseillé de rentrer chez elle et de retourner voir le médecin. Elle a ensuite été arrêtée de façon continue à compter du 21 janvier 2015.

La salariée a fait état pour la première fois d'un accident du travail en transférant, le 27 février 2015, à son employeur un courrier de son médecin traitant du 26 février 2015 indiquant qu'il lui semblait que cette dernière aurait été victime d'un traumatisme du poignet droit le 19 décembre 2014 sur son lieu de travail, outre une ordonnance prescrivant le port d'une attelle ainsi que diverses prescriptions médicamenteuses.

Si le traumatisme est établi par les nombreux éléments médicaux produits par la salariée, Mme [X] [E] ne démontre toutefois pas que ce traumatisme trouverait son origine dans un accident survenu au temps et au lieu du travail.

Au demeurant, aucune indication suffisamment précise n'a été donnée sur les circonstances de l'accident allégué, tout au long de la procédure, à l'exception d'une indication donnée par le docteur [A] le 8 janvier 2015 qui fait état d'un « traumatisme par choc direct du poignet main droite contre un objet métallique » et d'une indication contradictoire donnée par la salariée au médecin du travail le 20 décembre 2017 en ces termes : « me dit avoir reçu le 19 décembre 2014 une pièce métallique lourde sur son poignet droit lors de l'entretien d'une machine ».

Par ailleurs, Mme [X] [E] n'a pas fait de déclaration immédiate, faisant part pour la première fois d'une douleur au poignet le 8 janvier 2015, soit trois semaines après la date indiquée de l'accident, ce qui conduit à exclure toute présomption de lien avec le travail du fait de la soudaineté de l'apparition de la lésion.

Au regard des éléments retenus, notamment la chronologie des faits et les attestations des collègues de travail, la lésion déclarée par la salariée ne pouvant être rattachée à un accident du travail, il n'est pas établi que l'inaptitude de Mme [X] [E] est d'origine professionnelle, comme l'a justement retenu le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie.

Sur l'obligation de reclassement

Mme [X] [E] soutient que son employeur lui a proposé un poste de travail comportant manifestement des actes de manutention, et donc le port de charges, et des actes de conditionnement et de préparation présentant les caractéristiques de gestes répétitifs, alors que l'avis d'inaptitude comportait une double contre-indication claire à ce type de postures et gestes. Elle estime avoir été bien fondée à refuser cette proposition et a d'ailleurs indiqué à son employeur qu'elle considérait que son reclassement serait, dans ces conditions, incompatible avec les préconisations du médecin du travail.

Il est rappelé que l'article L. 1226-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige, dispose : « Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail ».

Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a rempli son obligation, même si à l'issue de sa recherche, il ne propose pas de poste au salarié.

La société Française des Thés de l'Orient 1842 prétend, à l'inverse de ce que soutient la salariée, être allée au delà de son obligation, en créant un poste de préparatrice de commande web, en l'absence de poste disponible au sein de la société, dont elle rappelle qu'il s'agit d'une petite structure de moins de vingt salariés.

Il est rappelé qu'aux termes de son avis, le médecin du travail a préconisé un poste de reclassement « sans port de charge avec son membre supérieur droit, geste répétitif avec son membre supérieur droit » (pièce 6 du salarié).

La société Française des Thés de l'Orient 1842 indique avoir créé un poste de préparatrice de commande web à temps partiel comportant les tâches suivantes :

- réception des produits à mettre en stock après contrôle de la conformité de la livraison,

- impression des commandes des clients sur le poste informatique,

- prélèvement des produits selon les procédures établies,

- conditionnement des produits sur mesure (boîtes de thé),

- emballage et garnissage des colis,

- emballage des cadeaux éventuels,

- saisie de la sortie des colis par clients,

- dépôt des colis réalisés dans le monte-charge,

- identification des colis par clients,

- gestion des stocks,

- inventaire,

- nettoyage et rangement du poste de travail.

Ainsi que le souligne l'employeur, ce poste comprenait des tâches à prédominance administrative sans port de charges ni gestes répétitifs avec le membre supérieur droit. En effet, conformément aux dispositions de l'article D. 4161-1 du code du travail, le caractère répétitif d'une tâche est caractérisé par « la réalisation de travaux impliquant l'exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte » alors que le poste proposé comprenait un nombre important de tâches administratives excluant le caractère fréquent de mouvements répétés des membres supérieurs et ne comprenait pas de cadence contrainte, l'emballage des colis et des éventuels cadeaux se faisant au gré des commandes.

Sollicité par l'employeur par courrier du 21 décembre 2017, le docteur [Y] n'a pas émis d'avis précis, se retranchant, de façon difficilement compréhensible, derrière des règles de compétence alors qu'il était le rédacteur de l'avis d'inaptitude et donc qu'il s'était alors considéré compétent :

« Je tiens à vous préciser que le médecin du travail délivre un avis par rapport aux postes d'une entreprise adhérente à un service de santé au travail, sur un territoire défini par l'agrément de ce service. Dans ce cadre, tout avis sur le poste de travail à l'extérieur des compétences territoriales du service de santé au travail doit être soumis au médecin du travail des sites en question.

Mon conseil est donc que vous puissiez proposer à votre salariée ce poste de travail en tenant compte des préconisations et contre-indications stipulées sur l'avis délivré le 20 décembre 2017.

Si le salarié accepte ce poste et si ce poste est de notre compétence géographique, je réétudierai la situation médicale de Mme [X] et effectuerai l'étude de ce poste de travail afin de délivrer ' à la salariée ainsi qu'à vous-même ' mon avis médical.

Si ce poste est à l'extérieur de notre compétence géographique, vous voudrez bien vous rapprocher du médecin du travail concerné afin de connaître son avis » (pièce 15 de l'employeur).

L'employeur justifie avoir interrogé les délégués du personnel, qui ont émis un avis favorable, aux termes d'un compte-rendu de la réunion du 2 janvier 2018 (pièce 7 de l'employeur).

Le temps partiel retenu (25h par semaine au lieu de 35h auparavant) ne peut être reproché à l'employeur qui n'avait, en toute hypothèse, aucune obligation de créer un poste spécifique au titre de son obligation de reclassement.

Comme elle en avait le droit, Mme [X] [E] a refusé ce poste de reclassement par courrier du 5 janvier 2018 (sa pièce 10).

Il se déduit de ces différents éléments que la Société Française des Thés de l'Orient 1842 a rempli, sérieusement et loyalement, son obligation de reclassement.

Le licenciement prononcé par la société Française des Thés de l'Orient 1842 à l'égard de Mme [X] [E] est donc bien fondé.

Il s'ensuit le rejet de l'ensemble des demandes subséquentes de la salariée, fondées soit sur l'origine professionnelle de l'inaptitude, qui n'a pas été retenue, soit sur le manquement à l'obligation de reclassement, également écartée, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure

Mme [X] [E], qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ceux d'appel, au profit de Me Mélina Pedroletti, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [X] [E] sera en outre condamnée à payer à la Société Française des Thés de l'Orient 1842 une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 1 000 euros.

Mme [X] [E] sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.

Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie le 24 septembre 2019,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [O] [Z] [X] [E] à payer à la SAS Société Française des Thés de l'Orient 1842 une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE Mme [O] [Z] [X] [E] de sa demande présentée sur le même fondement,

CONDAMNE Mme [O] [Z] [X] [E] au paiement des entiers dépens, dont distraction, pour ceux d'appel, au profit de Me Mélina Pedroletti, avocat.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03845
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.03845 ?
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