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02/06/2022 | FRANCE | N°19/02261

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 02 juin 2022, 19/02261


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 02 JUIN 2022



N° RG 19/02261 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TGTN



AFFAIRE :



[C] [L]





C/

S.A.S. SFR DISTRIBUTION









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Avril 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F17/02122



Copies

exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Aïcha CONDE



Me Antoine VIVANT





le : 03 Juin 2022



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arr...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 JUIN 2022

N° RG 19/02261 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TGTN

AFFAIRE :

[C] [L]

C/

S.A.S. SFR DISTRIBUTION

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Avril 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F17/02122

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Aïcha CONDE

Me Antoine VIVANT

le : 03 Juin 2022

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [C] [L]

né le 02 Août 1984 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par : Me Aïcha CONDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0023

APPELANT

****************

S.A.S. SFR DISTRIBUTION

N° SIRET : 410 358 865

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par : Me Antoine VIVANT de la SELEURL Vivant Avocat SELARL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1063,substitué par Me CURNIER-CRIBEILLET Pauline ,avocate au barreau de Paris.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Mars 2022, devant la cour composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS SFR Distribution intervient sur l'ensemble des activités de distribution du marché Grand Public au sein du Pôle Telecom du groupe SFR Group. Dans ce cadre, elle est en charge de l'exploitation des boutiques Espace SFR, du réseau Grandes enseignes, des circuits de proximité et de la vente à domicile.

En 2016, SFR Group a fait l'objet d'une réorganisation de ses activités de distribution. Il a été engagé le 9 septembre 2016 un processus d'information-consultation du comité d'entreprise sur ce projet et ses mesures d'accompagnement.

Un accord collectif majoritaire relatif à un projet de licenciement collectif pour motif économique a été signé le 19 octobre 2016 et validé par la Direccte le 17 novembre 2016.

Cet accord prévoyait un plan de mobilité professionnelle contenant des mesures de mobilité interne et externe (plan de départs volontaires) ainsi qu'un dispositif de transition de carrière.

M. [C] [L], né le 2 août 1984, a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée par la société SAS Numéricable aux droits de laquelle intervient la société SFR Distribution le 7 avril 2014, en qualité d'animateur VAD, la convention collective applicable étant celle des télécommunications.

Le 29 août 2016, le contrat de travail de M. [L] a été transféré à la société SFR Distribution. 

Suite à la conclusion de l'accord du 19 octobre 2016 portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation, la société SFR Distribution a informé trois animateurs VAD/ Région Ile de France dont M. [L], de la suppression de leur poste et de leur éligibilité au plan de mobilité professionnelle.

M. [L] a signé un protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique, le 10 avril 2017.

Par requête reçue au greffe le 28 juillet 2017, M. [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de voir constater que le protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner la société SFR Distribution à lui verser diverses sommes au titre de la rupture et de l'exécution de son contrat de travail.

Par jugement rendu le 18 avril 2019, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section encadrement, a :

- ordonné la clôture de la mise en état de l'affaire,

- débouté M. [L] de l'ensemble de ses demandes,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

M. [L] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 16 mai 2019.

Par conclusions adressées par voie électronique le 11 février 2020, M. [L] demande à la cour de :

- le recevoir en ses demandes,

- l'en déclarer bien fondé,

Ce faisant :

- dire et juger que le protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique signé le 10 avril 2017, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- fixer le salaire de référence à la somme de 3 178,30 euros, avant le rappel de salaire et de 3 621,40 euros avec le rappel de salaire,

En conséquence :

- condamner la société SFR Distribution à payer à M. [L] :

' 5 317,30 euros à titre de rappel de commissions au titre de 2016 et 2017

' 531,73 euros à titre de congés payés afférents,

' 940,01 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis,

' 94 euros de congés payés afférents,

' 374,99 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 730,90 euros titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,

' 312,65 euros à titre de solde d'allocation de reclassement,

' 2 099,33 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle,

' 983,53 euros à titre de solde de RTT,

' 38 103 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des accords d'entreprise,

' 8 530,44 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauche,

' 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance d'incident rendue le 2 septembre 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions adressées le 24 décembre 2019 par la société SFR Distribution.

Par ordonnance rendue le 9 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 29 mars 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Sur l'obligation de reclassement

Le salarié retient que si l'accord majoritaire portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation de la société SFR Distribution comprenait l'engagement de cette dernière de ne recourir qu'au volontariat et de ne procéder à aucun licenciement, il n'en demeure pas moins qu'afin d'atteindre la réorganisation cible de la société au sein du groupe, cet accord prévoyait des suppressions de postes déterminés et non un simple objectif global de réduction d'effectif.

Il fait valoir qu'aux termes de la lettre d'éligibilité qui lui a été adressée le 24 novembre 2016, il lui a été notifié que la société entendait supprimer les trois postes d'animateur VAD/ Région Ile de France , que dès lors, la société SFR Distribution était tenue d'une obligation de reclassement interne à son égard.

Il retient qu'il aurait été en droit de refuser la modification induite de son contrat de travail au cas où il lui aurait été proposé un repositionnement ce qui aurait nécessité son reclassement.

Il observe que cette obligation de reclassement découle de la décision de la Direccte elle même et des textes applicables. Il retient que cette obligation, préalable à la signature du protocole de rupture amiable découle du courrier même de l'employeur énonçant son éligibilité au plan de mobilité professionnelle en raison de la suppression de son poste d'animateurVAD étant relevé qu'à aucun moment, l'employeur n'indique dans sa lettre que faute d'acceptation du plan de départs volontaires, il n'y aurait pas de licenciement et qu'ainsi son emploi serait préservé.

Il fait également valoir que l'obligation de reclasser le salarié avant la signature du protocole de rupture amiable découle de l'accord majoritaire dont l'article 1.1 visait la possibilité pour chaque salarié éligible de candidater en interne ce qui impliquait son information sur les postes disponibles correspondant à son profil laquelle n'a pas été donnée, qu'en l'espèce l'employeur s'est contenté d'inviter les salariés éligibles au plan de mobilité professionnelle, en raison de la suppression de postes, à consulter la bourse de l'emploi , que ses candidatures ont fait l'objet d'un rejet systématique qui l'ont conduit à solliciter une mobilité externe, ce alors même que l'employeur ne justifie pas qu'il n'existait pas en son sein, dans les sociétés du groupe, des emplois disponibles de la même catégorie que la sienne ou de catégorie équivalente ou à défaut et sous réserve de son accord, d'une catégorie inférieure, que la société ne peut se prévaloir du fait qu'il ait candidaté au plan de départ volontaire pour échapper à son obligation, qu'il n'avait d'autre choix d'accepter ce dernier alors que sa candidature avait été rejetée pour tous les postes auxquels il avait postulé.

L'intéressé fait état d'une violation de l'accord majoritaire soit plus précisément de ses articles 4.1 , 4.2 et 4.3.1.

Il retient également que s'il avait été informé de ce qu'il bénéficiait sur son bassin d'emploi d'un emploi sans modification de rémunération et de même qualification, il n'aurait jamais souscrit au plan de départs volontaires.

Sur ce,

L'accord majoritaire portant sur les mesures sociales d'accompagnement du projet de réorganisation de la société SFR Distribution du 19 octobre 2016 mentionne en en- tête qu'il est conclu en application des dispositions de l'article L 1233-24-1 du code du travail.

Ce dernier énonce , dans sa version applicable en l'espèce, que dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en 'uvre des licenciements.

L'article L.1233-57-2 1° du code du travail, dans sa version applicable en l'espèce, vise que l'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 , ces articles déclinant les obligations de reclassement de l'employeur.

Selon l'article L.1235-7-1 du code du travail, l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.

Il s'en déduit que le juge judiciaire ne saurait ici examiner la question de savoir si l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 comprenait un plan de reclassement interne valable au regard des critères retenus par la Cour de cassation dans sa jurisprudence citée par le salarié laquelle répondait à la question de savoir dans quels cas un plan de reclassement interne devait être intégré au plan de sauvegarde de l'emploi lorsqu'un projet de réduction d'effectifs de l'employeur impliquait la suppression de l'emploi de salariés ne voulant ou ne pouvant quitter l'entreprise dans le cadre d'un plan de départs volontaires.

Sans soulever précisément la question de la validité du plan de départs volontaires ici conclu , M. [L] fait valoir qu'il aurait du bénéficier d'un reclassement interne régulier avant de signer le protocole de rupture d'un commun accord pour motif économique du 5 janvier 2017.

La question ainsi posée a trait à la mise en oeuvre des mesures de l'accord majoritaire et le rejet de l'exception d'incompétence en première instance a lieu d'être confirmé.

Sur le fond, la cour observe à titre liminaire que l'accord vise distinctement les mesures favorisant la mobilité interne et externe des salariés de celles relatives à leur 'repositionnement', la direction s'engageant alors à 'garantir au salarié sur son bassin d'emploi (...), un emploi de même qualification, sans modification de sa rémunération lorsque la Direction n'aura pu maintenir l'emploi du salarié qui aura été supprimé par l'effet de la réorganisation et que le salarié n'aura ni souhaité candidater à un départ volontaire ni accepté une mobilité interne'.

Cette clause exclut le licenciement du salarié du fait de la suppression de son emploi mais retient la proposition qui lui sera alors faite de le repositionner à défaut d'une mobilité interne ou externe.

Si l'intéressé énonce , dans ce cadre, que ce 'repositionnement' aurait inéluctablement conduit à une modification de son contrat de travail en raison de la suppression de la totalité des postes de distribution dans la région Ile de France' ce qui aurait abouti à son licenciement économique du fait de son refus de la modification de son contrat de travail en lien avec la réorganisation de l'entreprise, son moyen reste conditionnel , sans lien avec les faits soumis à la cour laquelle ne saurait déduire l'obligation de reclassement de l'employeur d'un cas juridiquement distinct de celui se déduisant des faits de l'espèce.

En tout état de cause, il ressort de ses termes que l'accord tout en visant la suppression de 868 postes visait aussi la création de 588 autres et que la proposition de repositionnement susvisée , qui dépendait également du nombre de départs volontaires effectifs, ne pouvait être anticipée, n'ayant vocation à intervenir que si le salarié, à terme, n'avait pas souhaité candidater à un départ volontaire ou à une mobilité interne ou si sa candidature n'avait pas été retenue ce qui ressort clairement des termes de l'accord majoritaire transmis aux salariés par les partenaires sociaux.

S'agissant de la proposition de 'reclassement' dont le salarié fait état et retient qu'elle aurait du lui être présentée avant la rupture d'un commun accord du 10 avril 2017, il est rappelé qu'aux termes de l'article L.1233-24-3 du code du travail , l'accord prévu à l'article L 1233-24-1 ne peut en effet déroger à l'obligation de reclassement incombant à l'employeur en application de l'article L 1233-4 du même code.

Il est rappelé à cet égard que l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 signé après la conclusion de l'accord collectif New Deal du 3 août 2016 prévoit la mise en place d'un plan de mobilité professionnelle dont l'objet est défini par référence à l'article L.1233-24-2 et suivants du code du travail ( page 5) lequel retient l'obligation de reclassement.

La cour observe que dans sa décision du 17 novembre 2016, la Direccte des Hauts de Seine a fait porter son contrôle 'sur le contenu du plan de sauvegarde mentionné aux articles L 1233-61 à 63 du code du travail ' ce qui induit son examen des actions visées à l'article L.1233- 62 du code du travail.

Ainsi qu'il l'a été rappelé, il n'appartient pas au juge judiciaire de procéder à ce même contrôle soit notamment d'examiner les conditions dans lesquelles la société et les organisations syndicales représentatives ont entendu, en l'espèce, décider des modalités d'accès, par les salariés éligibles, aux postes à pourvoir en interne ( page 14 de l'accord), des délais accordés pour candidater sur ces derniers et des mesures d'accompagnement pour ce faire..

A cet égard, il sera uniquement constaté que le plan énonce qu'une lettre d'information sera adressée à chaque collaborateur éligible, chacun pouvant ainsi choisir de préparer ou de formaliser un projet pour présenter sa candidature à une mobilité interne ou externe, les départs volontaires ou ceux s'inscrivant dans le cadre du dispositif de transition de carrière ainsi que les mobilités internes s'échelonnant sur toute la durée du plan, une mise à jour quotidienne des catégories d'emplois éligibles étant disponible auprès de l'espace conseil mobilité.

Le plan décline, s'agissant plus précisément de la mobilité intra groupe (articles 4.1 à 4.3 dont le salarié invoque la violation), les moyens spécifiques mis à la disposition des collaborateurs éligibles soit le recensement des postes disponibles en interne, l'aide à la préparation des candidatures et à la mobilité géographique, les formations possibles, la prise en charge des frais induits, ces candidatures pouvant être présentées pendant une période de huit semaines pour les postes à pourvoir au sein de SFR Distribution et SFR Business Distribution et de quatre semaines pour les postes à pourvoir au sein des autres entités du groupe, les collaborateurs éligibles restant cependant prioritaires à compétence égale par rapport à tout autre collaborateur du groupe passé ce délai. Il est également mentionné que lorsque la candidature du collaborateur est retenue, il dispose d'un délai de huit jours calendaires pour accepter et signer l'avenant à son contrat de travail.

Les mobilités externes sont fondées, pour leur part, sur des projets individuels des salariés volontaires accompagnés de pièces justificatives permettant l'analyse et la validation du projet par la commission de validation des projets, des mesures d'accompagnement étant déclinées dont une indemnité de différentiel de rémunération ou un accompagnement d'un projet finalisé de création/reprise d'entreprise.

La cour observe que dans les termes du courrier du 24 novembre 2016 de la société, il est fait état à M. [L] de son éligibilité tant au projet de mobilité interne qu'au projet de mobilité externe sur la base du volontariat et de son bénéfice, dans chacun des cas, des mesures d'accompagnement susvisées.

Il s'en déduit un respect de l'obligation d'information par la société.

Aux termes de son courrier du 28 mars 2017, M. [L] a énoncé que 'malgré ses différentes tentatives de reclassement en interne', il saisissait désormais l'opportunité d'une embauche par la société Paritel en tant que chef des ventes, ' son envie d'évoluer associée à celui d'avoir de plus grandes responsabilités se rapprochant de ce que lui ont proposé les managers de chez Paritel'.

La rupture d'un commun accord du 10 avril 2017 s'inscrit dans ce cadre.

Les pièces par ailleurs communiquées par M. [L] justifient de sa candidature en août 2016 à un poste d'animateur régional auprès de la société 5 sur 5 dont l'examen est suivi avec attention par Mme [E] , salariée de SFR Distribution. Dans son courrier du 16 décembre 2016 , M. [L] candidate également au poste de chef de vente et de responsable de projet VAD publié dans la bourse de l'emploi et fait part de l'explicitation qui lui est alors donnée de l'inadéquation de son profil avec un poste d'encadrement et/ou avec un poste nécessitant certaines compétences techniques.

Les pièces communiquées par le salarié visent également sa postulation à des fonctions de coach formateur en Ile de France en mars 2017 dans des termes suivis par M. [N] , responsable marketing opérationnel et formation au sein de SFR Distribution ainsi que de chef de projet formation en région méditerranée dans des termes cette fois suivis par M. [D], chef de projet Formation au sein de SFR Distribution, le salarié bénéficiant également d'entretiens réguliers au sein de SFR notamment le 16 mars 2017.

Il ressort des courriels échangés avec M. [R] début mars 2017 qu'une recherche a également été menée afin de trouver un poste en interne dans le cadre d'une substitution.

Dans un courriel du 12 avril 2017, il est enfin explicité au salarié l'existence d'un écart trop important entre ses candidatures en interne et les postes disponibles sans que le cour ne relève, au regard des éléments en présence, une volonté systématique de la société SFR Distribution de rejeter ses demandes.

Sachant dès lors que l'intéressé a été informé de sa possibilité de candidater à des postes en interne par le courrier du 24 novembre 2016, qu'il a eu accès à ces postes dans les termes déclinés dans l'accord du 19 octobre 2016, qu'il justifie de candidatures en interne dont le suivi est attesté, qu'aucun élément ne vient justifier d'un refus systématique et non fondé de ces candidatures avant l'acceptation de sa mobilité externe, les manquements opposés à la société SFR Distribution relativement à son obligation de reclassement en interne ne seront pas retenus.

- Sur la violation des accords d'entreprise,

Le salarié fait observer que l'employeur était tenu d'une garantie d'emploi dans le cadre de l'accord sur la garantie d'emploi du 25 juin 2014 et de l'accord de New Deal du 3 août 2016 ce, jusqu'au 1er juillet 2017 et que cette obligation prévalait jusqu'à la signature du protocole de rupture d'un commun accord signé le 8 février 2017.

Il oppose également à l'employeur la violation de l'accord du 17 décembre 2015 relatif aux mesures d'accompagnement dans le cadre de la transformation au sein de NC Numéricable et de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences GPEC du 1er février 2017

S'agissant de l'accord du 25 juin 2014 , il est ici observé que M. [L] était salarié de la société SFR Distribution et que celle-ci ne figure pas parmi la liste des sociétés (annexe 1 de l'accord du 25 juin 2014) entrant dans le champ d'application de cet accord sur les garanties au titre de l'emploi dans le cadre du projet de rapprochement de Numericable Group et de SFR conclu entre la société Numericable Group et les organisations syndicales représentatives.

L'accord constitutif d'un 'New deal' pour le pôle Télécoms de SFR Group du 3 août 2016 a trait pour sa part au projet de réorganisation de la distribution et l'accord du 19 octobre 2016 est conclu à sa suite.

Si cet accord du 3 août 2016 étend jusqu'au 1er juillet 2017 la garantie d'emploi déclinée dans

l' accord du 25 juin 2014 au sein de Numericable Group à la société SFR Distribution ( annexe1), la cour observe qu'il y est mentionné ( article 1.2) que cette garantie n'empêche pas la mise en place de plan de départs volontaires au sein de cette société, que ( article 1.3) jusqu'au 30 juin 2019, la direction s'engage sauf exceptions, à ce que les ruptures pour motif économique s'effectuent uniquement sur la base du volontariat, que ( article 1.4) si les sociétés parties du pôle Télécoms s'engagent à ce qu'aucun plan de départs volontaires pour motif économique ne soit mis en place avant le 1er juillet 2017, les filiales de la Distribution sont exclues de ce dispositif, la direction s'engageant ( article 1.5) à ce que les mesures d'indemnisation et d'accompagnement des plans de départs volontaires pour motif économique mis en 'uvre en 2016 et 2017 soient celles prévues au titre III de l'accord-cadre de méthode et de garanties sociales de SFR du 29 mars 2013 (ou PDV SFR 2013) annexé à l'accord de 2016.

Il s'en déduit que l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 n'ayant traité que de l'accompagnement à la mobilité interne et externe du plan de réduction des effectifs consécutif au projet de réorganisation des activités de distribution, ce dans les termes exhaustifs ici retenus, les accords sur la garantie d'emploi du 25 juin 2014 et de New Deal du 3 août 2016 n'ont pas été violés, la cour relevant en outre que dans le protocole de rupture d'un commun accord du10 avril 2017, le salarié énonce, sans justifier d'un vice de consentement à cet égard, renoncer en tout état de cause à toute garantie d'emploi qu'il tient d'accords collectifs en vigueur.

S'agissant de l'accord du 17 décembre 2015 , la cour relève que ce dernier , antérieur à celui du 3 août 2016, signé entre la société NC Numéricable et les organisations syndicales représentatives, a trait à un socle de mesures d'accompagnement devant être mises en 'uvre dans le cadre des projets prioritaires faisant l'objet d'une procédure d'information/consultation du comité d'entreprise de la société NC Numéricable.

Il y est d'ailleurs à cette époque envisagé la possibilité pour les salariés de la société NC Numéricable d'accepter une proposition de poste au sein d'un espace SFR des filiales de distribution (page 15) .

Le champ d'application et l'objet de cet accord ne permettent en tout état de cause pas de l'opposer dans les présents débats.

L'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences GPEC pour le pôle Télécom de SFR Group du 1er février 2017 est pour sa part applicable à la société SFR Distribution sous réserve cependant de son titre 9 'modalités spécifiques de la GPEC de février au 30 juin 2017"ce, étant tenu compte de ce qu'il n'est plus prévu de plan de départs volontaires s'agissant de la société SFR Distribution à compter du 1er juillet 2017 ( page 8).

Cet accord du 1er février 2017 est entré en vigueur à compter de l'accomplissement de ses formalités de dépôt tandis que la rupture d'un commun accord du contrat de travail de M. [L] dont l'examen a débuté avant le 1er févrfier 2017 était régi par les dispositions de l'accord majoritaire du 19 octobre 2016.

M. [L] fait de nouveau valoir à ce stade que les articles 4.1, 4.2, 4.3.1 de l'accord majoritaire du 19 octobre 2016 n'ont pas été respectés.

Cependant, il a d'ores et déjà été retenu par la cour que le salarié a bénéficié, dans les formes négociées par les partenaires sociaux, de l'information requise sur les postes disponibles en interne, que sa situation a fait l'objet d'un examen précis et circonstancié avait débouché sur un emploi , la cour observant que le plan prévoyait la possibilité de formation et d'adaptation en cas de nécessité.

Ces éléments conduiront à confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation en paiement de l'employeur pour non-respect des accords d'entreprise.

- sur le rappel de salaire au titre des commissions non perçues

M. [L] fait ici valoir que le défaut de remplacement à compter de janvier 2016 de vendeurs salariés dans son équipe a eu une incidence sur sa rémunération , que ces postes n'ont pas été pourvus compte tenu de l'anticipation opérée alors par la société SFR Distribution de la suppression d'emplois. Il ajoute en outre que les objectifs lui ont été assignés tardivement et sollicite un rappel de commissions pour les années 2016 et 2017.

Le contrat de travail de M. [L] retient, au titre de la rémunération, une partie fixe mensuelle et une partie variable dont les détails sont communiqués en annexe du contrat.

Cette annexe rappelle que l'animateur VAD anime une équipe de vente à domicile sur les zones et en fonction des consignes de la direction régionale, cette rémunération étant composée de trois primes liées à la performance et à l'atteinte des objectifs de son équipe soit une prime de vente directement associée aux actes de vente des commerciaux dont il a la responsabilité, une prime qualité associée au respect des orientations commerciales de l'entreprise et une prime sur objectifs de vente associée à l'atteinte des objectifs de vente de l'équipe commerciale dont il a la responsabilité.

Il s'en déduit que la rémunération variable de M. [L] dépendait majoritairement des résultats de son équipe et était par ailleurs fixée compte tenu de consignes de la direction régionale.

Or, les objectifs définis unilatéralement par l'employeur doivent être portés à la connaissance du salarié en début d'exercice. Les objectifs doivent également correspondre à des normes sérieuses et raisonnables, compatibles avec les moyens donnés.

En l'espèce, M. [L] justifie que sur une équipe de cinq vendeurs à domicile, l'un a été licencié en janvier 2016 sans être remplacé, deux ont été en arrêt maladie durant toute l'année 2016 sans être remplacés, le quatrième vendeur ayant été absent pendant six mois pour maladie sans être non plus remplacé.

Il est par ailleurs justifié du courriel de M. [L] à son employeur en date du 6 janvier 2017 faisant état de la signature par les vendeurs de leur plan de départ volontaire et de ce que son équipe ne comportait plus aucun effectif.

Il n'est pas, enfin, justifié d'objectifs fixés à compter de juillet 2016.

Ces éléments conduiront à faire droit à un rappel de commissions ce pour la période s'étendant de janvier 2016 au 10 avril 2017, dont le montant se déduit du manque à gagner lié aux manquements de l'employeur au regard des primes perçues antérieurement, soit la somme de 5317,30 euros au total outre congés payés afférents.

- sur le rappel d'indemnités de rupture

Le conseil de prud'hommes a ici fait application de l'article 12.2.2 de l'accord majoritaire lequel retient que le salaire brut utilisé pour calculer le montant de l'indemnité complémentaire est le salaire brut moyen versé sur les douze derniers mois précédant la rupture, primes, bonus, heures supplémentaires , astreintes et variable inclus et exclusion faite de tout élément perçu qui ne correspond pas à la contrepartie du travail du salarié sans tenir compte des périodes d'indemnisation maladi et à l'exclusion des remboursements de frais.

La période de référence s'étend en l'espèce d'avril 2016 à mars 2017.

Sur la base de la rémunération visée à l'article 12.2.2 perçue sur ces douze mois et après ajout du rappel de commissions durant la période de référence, la société SFR Distribution sera condamnée à régler à M. [L] les sommes suivantes sur la base d'un salaire de référence de 3472,13 euros

- 940,01 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis,

- 94 euros de congés payés afférents,

- 374,99 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 730,90 euros titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,

- 312,65 euros à titre de solde d'allocation de reclassement,

- 2 099,33 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle.

- sur la violation de la priorité de réembauche

M. [L] fait ici valoir qu'il a écrit à son employeur le 7 août 2017 afin de lui indiquer qu'il souhaitait bénéficier de la priorité de réembauche et qu'il n'a été destinataire d'aucune réponse.

L'article L.1233-45 du code du travail retient que le salarié, licencié pour motif économique, bénéficie d'une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il en fait la demande au cours de ce même délai.

Dans ce cas, l'employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. En outre, l'employeur informe les représentants du personnel des postes disponibles.

Le salarié ayant acquis une nouvelle qualification bénéficie également de la priorité de réembauche au titre de celle-ci, s'il en informe l'employeur.

L'article 5 du protocole de rupture amiable vise que l'intéressé bénéficie d'une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date à laquelle cesseront toutes les relations contractuelles entre les parties à condition d'avoir informé la société , dans ce délai, de son désir d'user de cette priorité.

Or, en l'espèce, les pièces produites aux débats permettent de retenir que le salarié, en adressant à son employeur, un courrier le 7 août 2017 a informé ce dernier de son désir d'user de cette priorité dans les délais ici déclinés.

A défaut de la justification d'une réponse de la société SFR Distribution, celle- ci sera condamnée à régler à M. [L] une indemnité d'un montant de 6944,26 euros.

- Sur les demandes au titre du solde de RTT

M. [L] fait ici remarquer que son bulletin de salaire du mois d'août 2016 fait état de 10,5 jours de RTT qui ne lui ont pas été payés lors du solde de tout compte tandis qu'il a été empêché de poser ces jours, la mention en ayant disparu de ses bulletins de salaire à compter du mois de septembre 2016, date du transfert de son contrat de travail à la société SFR distribution

Cependant ces éléments ne justifient pas d'un empêchement du salarié de poser et prendre ses jours RTT et le jugement du conseil de prud'hommes doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande.

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

Il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté les demandes du salarié au titre du rappel de commissions, du solde d'indemnités de rupture et d'une indemnité pour violation de la priorité de réembauche;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société SFR Distribution à payer à M. [C] [L] les sommes suivantes :

-5317,30 euros à titre de rappel de commissions 2016 et 2017 et 531,73 euros au titre des congés payés afférents

-940,01 euros à titre de solde d'indemnité compensatrice de préavis,

- 94 euros de congés payés afférents,

- 374,99 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 730,90 euros titre de solde d'indemnité complémentaire de licenciement,

- 312,65 euros à titre de solde d'allocation de reclassement,

- 2 099,33 euros à titre de solde d'indemnité de solution professionnelle,

- 6944,26 euros à titre d'indemnité pour non respect de la priorité de réembauche,

DIT que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la société SFR Distribution de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société SFR Distribution à payer à M. [C] [L] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE la société SFR Distribution aux dépens .

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/02261
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;19.02261 ?
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