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25/05/2022 | FRANCE | N°20/00620

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 25 mai 2022, 20/00620


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 MAI 2022



N° RG 20/00620 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZCZ



AFFAIRE :



[L] [R]





C/

S.A.S.U. UNILEVER FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : Industrie

N° RG

: 18/01958



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Samia MSADAK



la SCP COURTAIGNE AVOCATS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'app...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 MAI 2022

N° RG 20/00620 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZCZ

AFFAIRE :

[L] [R]

C/

S.A.S.U. UNILEVER FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Janvier 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : Industrie

N° RG : 18/01958

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Samia MSADAK

la SCP COURTAIGNE AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [L] [R]

né le 08 Juillet 1971 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Samia MSADAK, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

S.A.S.U. UNILEVER FRANCE

N° SIRET : 555 119 216

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - Représentant : Me Nelly MORICE de la SELARL CAPSTAN LMS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,

M. [L] [R] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 9 avril 2001 par la société Unilever France et a occupé en dernier lieu les fonctions de comptable au sein de la direction financière.

Par lettre du 8 février 2018, la société Unilever France a convoqué M. [R] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Par lettre du 26 février 2018, la société Unilever France a notifié à M. [R] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la société Unilever France employait habituellement au moins onze salariés.

Le 25 juillet 2018, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre pour contester la validité et, subsidiairement, le bien-fondé de son licenciement et pour demander la condamnation de la société Unilever France à lui payer notamment des dommages-intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ainsi que des dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Par un jugement du 29 janvier 2020, le conseil de prud'hommes (section industrie) a :

- débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la société Unilever France de sa demande reconventionnelle ;

- mis les dépens à la charge de M. [R].

Le 2 mars 2020, M. [R] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 2 juin 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [R] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau de :

- à titre principal, dire son licenciement nul et condamner la société Unilever France à lui payer une somme de 95 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

- à titre subsidiaire, dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société Unilever France à lui payer une somme de 55 101,94 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- en tout état de cause, condamner la société Unilever France à lui payer les sommes suivantes :

* 10 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour circonstances vexatoires du licenciement ;

* 15 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

* 5 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité ;

- ordonner le remboursement par la société Unilever France aux organismes concernés des indemnités de chômage qui lui ont été versées ;

- assortir les condamnations de nature salariale des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice et les condamnations de nature indemnitaire des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner la société Unilever France à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions du 20 juillet 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société Unilever France demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement attaqué sur le débouté des demandes de M. [R] et débouter ce dernier de l'ensemble de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, limiter le montant des dommages-intérêts pour licenciement nul à la somme de 23 615,10 euros brut représentant six mois de salaire et le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle sérieuse à la somme de 11 807,55 euros brut représentant trois mois de salaire ;

- en tout état de cause, condamner M. [R] à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 22 mars 2022.

SUR CE :

Sur les dommages-intérêts pour harcèlement moral :

Considérant que M. [R] soutient qu'il a été victime depuis 2016 d'agissements de harcèlement moral de la part de M. [O], son supérieur hiérarchique (n+2), ayant dégradé ses conditions de travail et son état de santé et constitués par une surcharge de travail, des pressions managériales et des intimidations dénoncées à plusieurs reprises ; qu'il réclame en conséquence une somme de 15 000 euros net à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice ainsi causé ;

Que la société Unilever France soutient que M. [R] n'a été victime d'aucun harcèlement moral et qu'il convient de débouter ce dernier de ses demandes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Qu'en application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement dans la rédaction applicable au litige (pour les faits antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) ou présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement (pour les faits postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi sus-mentionnée), et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Qu'en l'espèce, M. [R] verse aux débats :

- des récriminations envoyées à son supérieur ou relayées par un représentant du personnel notamment à l'occasion de deux réunions de délégués du personnel avec l'employeur en octobre 2017 qui ne sont corroborées par aucun élément objectif notamment quant à la charge de travail ;

- des avis d'arrêts de travail ne contenant aucun élément sur son état de santé, un certificat médical établi en juin 2018, postérieurement au licenciement, mentionnant abusivement un lien de causalité entre l'anxiété diagnostiquée et les conditions de travail de l'intéressé dans l'entreprise en l'absence de constatation personnelle du praticien quant à ces conditions de travail, ainsi que des dires du délégué du personnel sur une dégradation de l'état de santé sans valeur probante en l'absence de compétence médicale de ce représentant du personnel ;

Que dans ces conditions, M. [R] n'établit pas de faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, ni ne présente de fait laissant supposer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il y a donc lieu de débouter M. [R] de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité :

Considérant en l'espèce et en tout état de cause, que M. [R] n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre ; qu'il convient donc de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur la validité du licenciement et ses conséquences :

Considérant qu'en application de l'article L. 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;

Qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun harcèlement moral ne ressort des débats ; qu'au surplus, M. [R] se borne à soutenir que le fait d'avoir subi un harcèlement moral rend son licenciement nul, sans même alléguer l'existence d'un lien de causalité entre un tel fait et le licenciement ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer le débouté de la demande de nullité du licenciement et de la demande de dommages-intérêts subséquente;

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

Considérant que la lettre de licenciement pour cause réelle et sérieuse notifiée à M. [R], qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée : « (...) Depuis plusieurs mois, vous affichez une attitude d'opposition systématique avec votre hiérarchie, entraînant des perturbations dans le bon fonctionnement de l'entreprise.

En effet, nous avons pu constater à plusieurs reprises que vous aviez un comportement de dénigrement quant aux consignes de travail au sein du service comptable et que vous émettiez des critiques sans fondement et virulentes contre les méthodes de travail notamment dans le cadre de la sous-traitance de certaines tâches. En désaccord avec la gestion de votre service, vous avez refusé d'exécuter plusieurs tâches entrants pourtant dans l'exercice de vos fonctions.

Ainsi, en date du 2 janvier 2018, vous n'avez pas hésité à tenir des propos négatifs à un de vos collègues de la Supply Chain à propos d'une facture fournisseur, créant ainsi des tensions. Vous avez adopté une posture réfractaire au changement de process mis en place et vous n'avez pas mis de liant dans les échanges. Vous n'avez, précisément dans ce cas, pas accompagné votre collègue lors des sollicitations estimant que cela n'est pas de votre ressort car vous estimez que ce n'était pas votre rôle d'effectuer des recherches dans les systèmes. Pourtant, en date du 1er juin 2017, votre manager a informé l'équipe (vous y compris) de conseiller et accompagner vos collègues vers l'endroit où ils peuvent trouver l'information. Vous n'étiez donc pas responsable de la tâche mais vous deviez aider votre collègue. Votre comportement est intolérable et dessert l'équipe.

Aussi, en date du 14 décembre 2017, votre manager [Z] [Y], dans le but de vous faciliter la tâche, vous a envoyé un mail vous proposant de réaliser le PDP, non pas dans l'outil de l'entreprise à cet effet mais à la main (version papier) car, en congés payés, vous n'aviez pas pu assister à la réunion d'information et de démonstration. Vous n'avez pas accepté l'aide de [Z] [Y], ni par la suite celle de [S] [O], votre n+2 celle de [M] [B], votre responsable ressource humaine. Vous avez remis en cause le process en prenant à partie vos collègues qui avaient suivi celui-ci (c'est-à-dire compléter l'autoévaluation avant l'entretien). [S] [O], qui avait pu communiquer ses commentaires a posteriori de l'entretien avec chacun des autres membres de l'équipe, étant donné que vous n'aviez pas complété votre autoévaluation, ne pouvait pas en revanche le faire avec vous. Nous regrettons votre manque de productivité sur les process Unilever et votre persistance contraire aux consignes.

Dans le cadre du PDP, en date du 4 janvier 2018, [S] [O], a évoqué de nouveau vos soucis de communication avec l'opérating Center / IBM dans le cadre du contrôle fiscal intervenu sur le fichier des immobilisations. [Z] [Y], votre manager a été obligée d'intervenir. Vous n'avez en effet pas été capable de communiquer avec les autres intervenants dans le cadre du modèle trois tiers. (...) Votre incapacité à communiquer de manière claire a ainsi contraint votre manager à devoir reprendre la main sur ce dossier.

Par ailleurs, en date du 18 janvier 2018, vous avez mentionné dans votre autoévaluation que vous aviez dû travailler pendant votre arrêt maladie du 18 octobre 2017. Nous constatons de nouveau votre mauvaise foi à cette occasion car votre responsable ressource humaine de l'époque, [J] [G], vous avait clairement exprimé en effet par mail que vous ne deviez pas travailler pendant votre arrêt maladie. Cette façon de procéder est déloyale à notre égard et nous est préjudiciable. Elle génère en outre pour la société Unilever France une perte de confiance à votre égard.

À l'énumération de ces faits, votre manager n+2 [S] [O] vous a, à plusieurs reprises, rappelé qu'un tel comportement était inadmissible. En vain puisque vous persistez dans votre attitude conflictuelle.

Ce comportement n'est pas concevable (...)' ;

Considérant que M. [R] soutient que les faits reprochés ne sont pas établis ou à tout le moins ne constituent pas des motifs sérieux de licenciement ; qu'il en déduit que son licenciement est dépourvu de cause réelle sérieuse et qu'il convient de lui allouer une indemnité à ce titre d'un montant de 55 101,94 euros net ;

Considérant que la société Unilever France soutient que les faits reprochés sont établis et que le licenciement est ainsi fondé sur une cause réelle et sérieuse ; qu'elle conclut donc au débouté à titre principal ; qu'à titre subsidiaire, elle conclut à une limitation du montant de l'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse exprimée de surcroît en brut ;

Considérant qu'en application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; que, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;

Qu'en l'espèce s'agissant des faits du 2 janvier 2018, la société Unilever France se borne à verser aux débats un courriel adressé par une salariée à M. [O] qui indique seulement que M. [R] lui a finalement donné l'information qu'elle lui demandait relative à une facture d'un fournisseur mais après une certaine réticence ; que cette pièce ne fait donc pas ressortir une absence d'aide à la collègue en cause, ni l'existence de propos négatifs, ni l'existence de tensions, ni encore l'existence d'une perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise, étant précisé de surcroît que la réticence reprochée par l'auteur de ce courriel ne ressort que de ses propres déclarations et que, par ailleurs, M. [R] fait valoir à juste titre que son supérieur n+2 avait expressément demandé dans des directives du 1er juin 2017 de ne plus fournir directement d'information aux salariés de la société Unilever France et de les diriger vers un outil informatique ad hoc ; que la réalité de ce grief n'est donc pas établie ;

Que s'agissant du deuxième grief tiré d'un manque de 'proactivité' et d'une 'persistance contraire aux consignes', il ressort des échanges de courriels versés aux débats que M. [R] a posé des questions et a émis quelques critiques, sur un ton qui n'était pas excessif, insultant ou polémique, relativement à la mise en oeuvre de la nouvelle procédure d'évaluation individuelle, prévoyant que le salarié rédige son autoévaluation avant d'être destinataire de celle de son supérieur ; qu'aucune remise en cause du processus ou de prise à partie de ses collègues ne sont établies ; que M. [R] s'est finalement exécuté et a rempli son autoévaluation ainsi que le montre le document d'évaluation ; que le grief de manque de 'proactivité', qui est au demeurant flou, et celui de 'persistance contraire aux consignes', qui est pour sa part peu compréhensible, ne sont donc pas établis ;

Que s'agissant du troisième grief tiré d'une incapacité à communiquer de manière claire avec des salariés de la société IBM, outre le fait que les échanges de courriels abscons versés aux débats ne font ressortir aucune défaillance de M. [R], il y a lieu de relever au surplus que l'employeur ne démontre à ce titre aucune abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée de la part de l'appelant alors que ce grief se rattache, à la lecture de la lettre de licenciement, à l'attitude 'd'opposition systématique' reprochée et partant, ne démontre aucun comportement fautif ; que ce grief sera donc écarté ;

Que s'agissant du quatrième grief, il ressort des pièces versées que M. [R] a envoyé en octobre 2017 des documents professionnels à sa hiérarchie et que l'employeur lui a alors indiqué qu'il était 'évidemment dispensé de toute activité' durant cet arrêt de travail pour maladie ; que M. [R] dans son autoévaluation annuelle réalisée en janvier 2018, en relatant les tâches accomplies pendant l'année écoulée, a ensuite précisé qu'il avait transmis ces documents 'même pendant un arrêt de travail' ; que ces seuls éléments sont insuffisants à faire ressortir l'existence d'une mauvaise foi du salarié pour avoir mentionné au détour d'une phrase de son évaluation un tel fait ;

Qu'il résulte de ce qui précède que l'attitude d'opposition systématique entraînant des perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise reprochée à M. [R] n'est pas établie ; que le licenciement de M. [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse contrairement ce qu'ont estimé les premiers juges ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Qu'en conséquence, M. [R], eu égard à son ancienneté (16 années) et à l'effectif habituel de l'entreprise au moment du licenciement, est fondé à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont le montant est compris entre 3 et 13,5 mois de salaire, en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ; qu'eu égard à son âge (né en 1971), à sa rémunération moyenne mensuelle (3 935,85 euros bruts selon les parties), à sa situation postérieure au licenciement (chômage avec justification de recherches d'emploi), il y a lieu d'allouer à l'appelant une somme de 40 000 euros brut ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour circonstances vexatoires du licenciement :

Considérant que M. [R] n'établit en rien que ses arrêts de travail sont consécutifs à des circonstances vexatoires entourant son licenciement, contrairement ce qu'il prétend ; qu'il convient donc de le débouter de cette demande de dommages-intérêts ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur les intérêts légaux et la capitalisation :

Considérant qu'il y a lieu de rappeler que la créance d'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse mentionnée ci-dessus porte intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; que la capitalisation des intérêts sera en outre ordonnée dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail :

Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement, par la société Unilever France, aux organismes concernés des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [R] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; que la société Unilever France, partie succombante, sera condamnée à payer à M. [R] une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il statue sur le bien-fondé du licenciement, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les intérêts légaux et la capitalisation, l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail, l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que le licenciement de M. [L] [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Unilever France à payer à M. [L] [R] une somme de 40 000 euros brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts légaux dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne le remboursement par la société Unilever France aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [L] [R] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités,

Condamne la société Unilever France à payer à M. [L] [R] une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Unilever France aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00620
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;20.00620 ?
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