COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
1re chambre 2e section
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 24 MAI 2022
N° RG 21/02259 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UNTM
AFFAIRE :
S.A. 1001 VIES HABITAT
C/
Mme [M] [O] épouse [I] [F]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Mars 2021 par le Juge des contentieux de la protection de VERSAILLES
N° RG : 1120000387
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 24/05/22
à :
Me Jeanine HALIMI
Me Jean NGAFAOUNAIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A. 1001 VIES HABITAT
N° SIRET : 572 015 451 R.C.S. Paris
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 5]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Jeanine HALIMI de la SELARL JEANINE HALIMI, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 397
APPELANTE
****************
Madame [M] [O]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Assignée à personne
Monsieur [Z] [O]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Assigné à tiers présent à domicile
INTIMES DEFAILLANTS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé du 26 juin 2018, prenant effet le 28 juin 2018, la société anonyme d'HLM Logement Francilien, aux droits de laquelle vient la société d'HLM 1001 Vies Habitat, a donné en location à M. et Mme [O] un local à usage d'habitation, dépendant d'un ensemble immobilier sis [Adresse 4] (78), moyennant un loyer principal de 452,60 euros, outre les sommes de 72 euros à titre de provision pour charges, 62,67 euros pour prestation chauffage et 85,73 euros, pour charges d'eau.
Suivant acte d'huissier d'huissier de justice du 25 octobre 2019, la société bailleresse a délivré aux locataires, un commandement visant la clause résolutoire de payer la somme principale de 2 674,11 euros, correspondant aux loyers et charges impayés, selon décompte arrêté au 16 octobre 2019, terme de septembre 2019 inclus.
Par acte d'huissier de justice délivré le 24 février 2020, la société 1001 Vies Habitat a assigné M. et Mme [O] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir :
- constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail au profit de la société requérante et subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire pour défaut de paiement des loyers,
- ordonner, à défaut de départ volontaire, l'expulsion des défendeurs et celle de tous occupants de leur chef, avec le concours de la force publique si besoin est, sous astreinte de 8,00 euros par jour de retard au cas où ils ne quitteraient pas les lieux dans les deux mois de la signification de la décision,
- dire que le sort des meubles se trouvant dans les lieux serait régi par les articles L433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,
- condamner solidairement les défendeurs à lui payer la somme de 4 731,69 euros, représentant le montant des loyers, des charges et des frais de recouvrement, arrêtés au 8 janvier 2020, terme du mois de décembre 2019 inclus, après déduction du montant de la dette déclarée dans le dossier de surendettement, ladite somme assortie des intérêts au taux légal à compter du commandement de payer, outre les loyers, charges et indemnités d'occupation impayés au jour de l'audience,
- dire qu'à compter de la date de l'acquisition de la clause résolutoire et jusqu'à la libération effective des lieux, les défendeurs devront une indemnité d'occupation mensuelle égale aux loyers normalement appelés et au montant des charges contractuelles,
- condamner solidairement les défendeurs au paiement de la somme de 360 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par jugement réputé contradictoire du 10 mars 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Versailles a :
- constaté que la société Logement Francilien a remplacé sa dénomination sociale pour 1001 Vies Habitat,
- constaté la résiliation de plein droit du bail à la date du 26 décembre 2019, par acquisition de la clause résolutoire prévue au contrat de location de l'appartement, situé [Adresse 2],
- dit qu'à défaut pour M. et Mme [O] d'avoir volontairement quitté le logement deux mois après la signification du commandement d'avoir à le libérer, il sera procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin était, ainsi qu'au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais des expulsés dans tel garde-meuble désigné par ces derniers ou à défaut par le bailleur,
- dit que le sort des meubles serait régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
- rejeté la demande d'astreinte,
- condamné solidairement M. et Mme [O] à payer à la société 1001 Vies Habitat une indemnité d'occupation égale à l'équivalent du montant du loyer courant, majoré des charges et des taxes, qui serait dû si le bail s'était poursuivi, soit la somme de 705,18 euros, charges comprises et ce, jusqu'au départ effectif des lieux, caractérisé par la restitution des clés au bailleur ou par un constat de reprise des lieux par l'huissier, conformément aux dispositions de l'article L451-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- condamné solidairement M. et Mme [O] à payer à la société 1001 Vies habitat la somme de 10 756,53 euros, représentant les loyers, les charges et les indemnités d'occupation impayés, selon décompte en date du 31 décembre 2020, terme du mois de décembre inclus, ladite somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2019, date du commandement de payer, sur la somme de 2 674,11 euros et à compter du 24 février 2020, date de l'assignation, sur le surplus,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que le jugement était exécutoire de plein droit, en application de l'article 514 du code procédure civile,
- condamné in solidum M. et Mme [O] aux entiers dépens de l'instance qui comprenant le coût du commandement de payer d'un montant de 160,45 euros et de l'assignation,
- dit que le jugement sera transmis, par les soins du greffe, au préfet du département, en vue de la prise en compte de la demande de relogement de l'occupant dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées prévu par la loi n°90-449 du 31 mai 1990.
Par déclaration reçue au greffe le 6 avril 2022, la société 1001 Vies Habitat a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 19 avril 2021, elle demande à la cour :
- d'infirmer partiellement le jugement déféré en ce qu'il a condamné solidairement M. et Mme [O] à lui payer, conformément aux dispositions de l'article L451-1 du code des procédures civiles d'exécution, une indemnité d'occupation égale à l'équivalent du montant du loyer courant, majoré des charges et des taxes, qui serait dû si le bail s'était poursuivi, soit la somme de 705,18 euros, charges comprises, jusqu'au départ effectif des lieux, caractérisé par la restitution des clés au bailleur ou par un constat de reprise des lieux par l'huissier,
statuant à nouveau :
- de condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer, conformément aux dispositions de l'article L451-1 du code des procédures civiles d'exécution, une indemnité d'occupation égale à l'équivalent du montant du loyer courant, majoré des charges et des taxes, qui serait dû si le bail s'était poursuivi jusqu'au départ effectif des lieux, caractérisé par la restitution des clés au bailleur ou par un constat de reprise des lieux par l'huissier,
- de condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner solidairement M. et Mme [O] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de la SELARL Jeanine Halimi, avocat aux offres de droit.
Aux termes de leurs conclusions signifiées le 12 février 2022, M. et Mme [O] demandent à la cour de :
- les recevoir en leurs écritures et les y déclarer bien fondés,
- y faire droit,
- débouter la société 1001 vies et habitat de ses demandes,
- infirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il les a condamnés à payer à la société 1001 Vies Habitat la somme de 10 756,53 euros avec intérêts au taux légal selon les modalités qu'il définit à titre d'arriéré de loyers,
- rejeter les frais suivants du décompte locatif :
- les frais de rejet de prélèvement qui ressortent à 64,24 euros (8,03 x 8),
- les frais d'huissier qui ressortent à 783,64 euros (356,41 + 427,23),
- ordonner l'inscription à leur crédit de la somme de 3 370 euros correspondant à :
- 760 euros payés le 10 septembre 2020,
- 760 euros réglés le 10 décembre 2020,
- 1050 euros payés le 10 février 2021,
- 800 euros réglés le 11 mars 2021,
- ordonner l'inscription à leur crédit de la somme de 1 005, 22 euros correspondant au remboursement du surplus des provisions réglé à la suite de la régularisation des charges,
- ordonner au bailleur la communication des justificatifs et de la régularisation des charges,
- ordonner la réintégration dans le décompte locatif de la somme de 1 520 euros correspondant aux règlements effectués et annulés par le bailleur :
- le 6 septembre 2021 = 760 euros,
- le 6 septembre 2021 = 760 euros,
- condamner le bailleur au paiement de la somme de 3 370 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice,
- condamner le bailleur au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le bailleur aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 février 2022.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION.
Sur la recevabilité des conclusions signifiées dans l'intérêt de M. et Mme [O].
M. et Mme [K] ont sollicité l'aide juridictionnelle. Ils n'ont pas formé de recours à l'encontre de la décision ayant rejeté leur demande.
Me Jean Ngafaounain a néanmoins conclu dans leur intérêt le 12 février 2022.
Les conclusions qui ont été signifiées le 12 février 2022, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture prise le 3 février 2022, doivent être déclarées irrecevables, en application de l'article 802 du code de procédure civile.
Sur l'appel de la société 1001 Vies Habitat.
Au soutien de son appel, la société bailleresse reproche au premier juge d'avoir fixé le montant de l'indemnité d'occupation à un montant fixe forfaitaire de 705,18 euros, charges comprises, jusqu'à la libération effective des lieux loués, faisant essentiellement valoir qu'il a ainsi fait une inexacte interprétation de la notion d'indemnité d'occupation, laquelle constitue à la fois la contrepartie de la jouissance des locaux et la compensation du préjudice subi par le bailleur du fait de la privation de la libre disposition du bien, que l'objectif de cette indemnité est ainsi d'indemniser le maintien fautif dans les lieux, du locataire devenu occupant sans droit ni titre.
Sur ce,
L'indemnité d'occupation, en cas d'occupation sans droit ni titre, est effectivement destinée non seulement à compenser les pertes de loyer subies par le bailleur, mais également à l'indemniser du préjudice qu'il subit du fait de l'occupation qui rend indisponible, le logement anciennement loué . Il en résulte qu'elle peut être supérieure au loyer et qu'elle tient compte des circonstances particulières de chaque cas.
En raison de sa nature mixte, indemnitaire et compensatoire, l'indemnité d'occupation constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des lieux et assure, en outre, la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans bail.
Cette indemnité, qui s'apprécie en fonction du coût de l'occupation, doit nécessairement comprendre, dès lors qu'il n'est pas démontré que la valeur locative est inférieure au montant du loyer, et afin de réparer intégralement le préjudice résultant pour le bailleur du maintien dans les lieux de l'occupant sans droit ni titre, outre le paiement des charges, celui des révisions éventuelles du loyer et ne saurait, de ce fait, être inférieure à la somme qui aurait été payée en cas de poursuite du bail.
En effet, en l'absence de prise en compte des éventuelles augmentations de loyers pratiquées conformément à la législation sur les baux sociaux, le locataire déchu de son titre d'occupation qui se maintient dans les lieux malgré la décision d'expulsion, serait amené à payer une somme inférieure, pour le même logement, que celle payée par un locataire parfaitement à jour de ses loyers.
Par suite, le jugement déféré est infirmé de ce chef, l'indemnité d'occupation étant fixée au montant du loyer indexé, augmenté des charges qui aurait été dû, si le bail s'était poursuivi.
M et Mme [O] doivent être solidairement condamnés au paiement de cette indemnité, telle que ci-dessus fixée, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la parfaite libération des lieux matérialisée par la remise des clefs, ou l'expulsion de l'occupante.
Sur les mesures accessoires.
M. et Mme [O] doivent être condamnés aux dépens de la procédure d'appel, les dispositions du jugement contesté relatives aux dépens de première instance étant, par ailleurs, confirmées.
Il y a lieu de faire droit à la demande de la société Immobilière 1001 Vies Habitat au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d'appel en condamnant in solidum M. et Mme [O] à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS.
La cour,
Statuant par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au Greffe,
Déclare irrecevables les conclusions signifiées le 12 février 2022 dans l'intérêt de M. et Mme [O],
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par M. et Mme [O] à un montant fixe forfaitaire de 705,18 euros, charges comprises,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Fixe l'indemnité mensuelle d'occupation à une somme égale au montant du loyer actualisé, augmenté des charges, qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi,
Condamne solidairement M. et Mme [O] à son paiement à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des locaux, matérialisée par la remise des clefs ou un procès-verbal d'expulsion ou de reprise des lieux,
Condamne in solidum M. et Mme [O] à verser à la société Immobilière 3 F, la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. et Mme [O] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés par Me Halimi, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,