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24/05/2022 | FRANCE | N°21/01381

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 24 mai 2022, 21/01381


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50A



1re chambre 2e section



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 24 MAI 2022



N° RG 21/01381 - N° Portalis DBV3-V-B7F-ULIG



AFFAIRE :



Mme [C], [E], [K] [G]





C/

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2021 par le Juge des contentieux de la protection d'ANTONY





N° RG :

11-18/000764



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 24/05/22

à :



Me Niels ROLF-PEDERSEN



Me Mathieu KARM



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cou...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50A

1re chambre 2e section

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 24 MAI 2022

N° RG 21/01381 - N° Portalis DBV3-V-B7F-ULIG

AFFAIRE :

Mme [C], [E], [K] [G]

C/

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2021 par le Juge des contentieux de la protection d'ANTONY

N° RG : 11-18/000764

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 24/05/22

à :

Me Niels ROLF-PEDERSEN

Me Mathieu KARM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Monique, Nicole, Michèle BIN

née le 25 Juin 1959 à [Localité 7] (38)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Maître Niels ROLF-PEDERSEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 291 - N° du dossier 2021 753

Représentant : Maître Gilbert GARRETA de la SCP GARRETA ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PAU -

APPELANTE

****************

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902 RCS Paris

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Mathieu KARM de la SCP PICHARD DEVEMY KARM, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000040 - N° du dossier 34536

Représentant : Maitre Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P173

INTIMEE

S.E.L.A.S. ALLIANCE La SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [V] [H] ès qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SAS IC GROUPE anciennement dénommée IMMO CONFORT »

Ayant son siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Assignée à personne morale

INTIMEE DEFAILLANTE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Mars 2022, Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSE DU LITIGE

Le 5 octobre 2016, dans le cadre d'un démarchage à domicile, Madame [C] [G] a conclu avec la société IC Groupe anciennement dénommée Immo Confort un contrat relatif à la fourniture, la pose et l'installation de panneaux photovoltaïques d'un montant de 21 500 euros.

Pour financer intégralement cette installation, Mme [G] a le même jour souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem un crédit affecté d'un montant de 21 500 euros, remboursable en 120 mensualités, au taux contractuel de 3,83 %.

Le procès-verbal de réception des travaux a été signé le 26 octobre 2016 et les fonds débloqués le 3 novembre 2016.

Par actes d'huissier de justice délivrés les 6 et 7 novembre 2018, Mme [G] a assigné les sociétés IC Groupe et BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem devant le tribunal de proximité d'Antony aux fins de voir :

- déclarer nul et non avenu le contrat de vente du 5 octobre 2016,

- déclarer nul et non avenu le contrat de crédit du 5 octobre 2016,

- débouter la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem de sa demande de restitution du montant du capital du crédit,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à restituer les sommes perçues du montant arrêté à la somme de (mémoire) euros (somme à parfaire au jugement) dans le délai d'un mois suivant la signification de la décision et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai,

- ordonner à la société BNP Paribas Personal Finance, en cas de besoin, de procéder à la radiation de l'inscription au FICP dans le délai de 15 jours suivant la signification du jugement et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à 1'expiration de ce délai,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens,

- prononcer l'exécution provisoire de la décision, à tout le moins concernant la radiation au FICP/ Banque de France.

Par jugement contradictoire du 14 janvier 2021, le tribunal de proximité d'Antony a :

- déclaré recevables les demandes en nullité du contrat de vente et du contrat de prêt formées par Mme [G],

- débouté Mme [G] de sa demande de nullité du contrat de vente du 5 octobre 2016 conclu avec la société Immo Confort devenue IC Groupe,

- débouté Mme [G] de sa demande de nullité du contrat de crédit du 5 octobre 2016 conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance,

- débouté Mme [G] de ses demandes tendant à limiter la créance de la société BNP Paribas Personal Finance,

- débouté Mme [G] de sa demande de radiation de l'inscription au FICP,

- débouté Mme [G] de demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [G] aux dépens,

- dit qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 1er mars 2021, Mme [G] a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 20 décembre 2021, elle demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré recevables ses demandes en nullité du contrat de vente et du contrat de prêt,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [G] de sa demande de nullité du contrat de vente du 5 octobre 2016 conclu avec la société Immo Confort devenue IC Groupe,

- débouté Mme [G] de sa demande de nullité du contrat de crédit du 5 octobre 2016 conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance,

- débouté Mme [G] de ses demandes tendant à limiter la créance de la société BNP Paribas Personal Finance,

- débouté Mme [G] de sa demande de radiation de l'inscription au FICP,

- débouté Mme [G] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [G] aux dépens,

- débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires telles que dirigées à son encontre,

Statuant à nouveau, in limine litis sur la recevabilité de ses demandes :

- dire et juger que son action, qui n'a pas pour finalité le paiement d'une somme d'argent ou la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent, mais uniquement l'annulation d'un contrat de fourniture et subséquemment celle du crédit affecté, n'est pas soumise à la suspension des poursuites individuelles,

- dire et juger que la créance en restitution du prix de la vente naîtra, le cas échéant, de l'arrêt à intervenir et sera ainsi postérieure à l'ouverture de la procédure collective et n'est donc pas soumise à déclaration,

- en conséquence, déclarer recevables ses demandes dirigées à l'encontre de la société IC groupe, et à fortiori contre la société BNP Paribas Personal Finance,

- débouter les sociétés BNP Paribas Personal Finance et Alliance de cette fin de non-recevoir,

Sur le fond :

- sur le contrat principal de vente et le contrat de crédit affecté :

- dire que le contrat de vente du 5 octobre 2016 n'est pas conforme aux dispositions d'ordre public du code de la consommation, en ce que le bordereau de rétractation est irrégulier et de manière générale en ce qu'il ne comporte pas l'ensemble des mentions exigées par les articles L221-5 et L111-1 suivants du code de la consommation dans leur rédaction applicable,

- rappeler que la renonciation d'une partie à se prévaloir de la nullité relative d'un contrat par son exécution doit être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à la protéger,

- dire et juger qu'à aucun moment, dans les actes accomplis postérieurement au bon de commande, elle n'a fait référence aux dites dispositions du code de la consommation,

- dire et juger que la signature du procès-verbal de réception ou les actes postérieurs au contrat de vente réalisés par la concluante ne démontrent pas une connaissance préalable des irrégularités du bon de commande et ne sont pas de nature à couvrir la nullité du contrat,

- en conséquence, déclarer nul et non avenu le contrat de vente conclu le 5 octobre 2016 avec la société Immo Confort devenue IC Groupe, actuellement en liquidation judiciaire,

- lui donner acte de ce qu'elle tient à la disposition de la société Alliance, représentée par Maître [V] [H], ès qualités de mandataire, les matériels objets du contrat principal de vente,

- dire que l'annulation du contrat de vente a pour conséquence l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté,

- déclarer nul et non avenu le contrat de crédit conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance en date du 5 octobre 2016,

- sur les manquements fautifs de l'établissement bancaire :

- dire que la société BNP Paribas Personal Finance a manqué à ses obligations en procédant au décaissement des fonds sans s'assurer préalablement de la régularité formelle du bon de commande,

- dire que la société BNP Paribas Personal Finance a encore manqué à ses obligations en procédant au déblocage des fonds sans s'assurer de l'exécution complète des stipulations indivisibles énoncées dans le bon de commande au vu d'un procès-verbal de réception ne lui permettant pas de se convaincre de cette exécution complète sans procéder à de plus amples vérifications,

- sur le préjudice subi :

- dire et juger qu'au jour du déblocage des fonds par la société BNP Paribas Personal Finance, le 3 novembre 2016, à défaut d'exécution complète de toutes les prestations indivisibles prévues au bon de commande par l'installateur, ses obligations en tant qu'emprunteur, n'avaient pu prendre effet,

- dire et juger que le préjudice qu'elle a subi résulte dans le fait pour la société BNP Paribas Personal Finance d'avoir laissé la concluante s'engager dans une opération contractuelle complexe adossée à un prêt important sans bénéficier en contrepartie des dispositions protectrices du droit de la consommation, mettant à sa charge l'obligation de devoir rembourser un prêt affecté à un contrat conclu dans des conditions d'irrégularité,

- dire que le préjudice qu'elle a subi réside également dans l'obligation de devoir rembourser un crédit pour une installation dont elle ne sera plus propriétaire, sans perspective d'obtenir la restitution du prix par le fournisseur en déconfiture qui viendrait diminuer sa dette de restitution, et sans bénéficier en contrepartie de la livraison par le vendeur d'une installation pérenne lui fournissant les performances attendues alors même que la société BNP Paribas Personal Finance est directement à l'origine de cette situation contractuelle en ayant débloqué les fonds à une date (3 novembre 2016) où il était impossible pour la concluante de pouvoir apprécier la rentabilité de l'opération, faute de raccordement et de mise en service de l'installation,

- dire par conséquent que le capital qu'elle doit rembourser devient dès lors pour elle, un préjudice et que celui-ci est directement lié aux manquements de la banque lors du déblocage des fonds,

- en conséquence, dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance sera privée de sa créance de restitution au titre du capital prêté et de tous frais annexes,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser toutes les sommes versées à la date des présentes, soit la somme globale de 12 230,02 euros, (253,44 + 244,52 × 49) qui sera à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir puisque devront être prises en compte notamment les mensualités prélevées entre le jour des présentes écritures et la date de l'arrêt,

- voir débouter la société BNP Paribas Personal Finance et la société Alliance de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 2 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 17 septembre 2021, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Antony le 14 janvier 2021 dans toutes ses dispositions hormis en ce qu'il l'a déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- en tout état de cause, déclarer irrecevable la demande de Mme [G] en nullité du contrat conclu avec la société Immo Confort,

- déclarer, par voie de conséquence, irrecevable la demande de la société Immo Confort en nullité du contrat de crédit,

- dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées,

- débouter Mme [G] de sa demande en nullité du contrat conclu avec la société Immo Confort, ainsi que de sa demande en nullité du contrat de crédit conclu avec elle et de sa demande de restitution des mensualités réglées,

- en tout état de cause déclarer irrecevables les demandes de Mme [G] visant à la privation de sa créance et visant à sa condamnation à des dommages et intérêts,

- à tout le moins, débouter Mme [G] de ses demandes visant à la privation de sa créance et visant à sa condamnation à des dommages et intérêts,

- subsidiairement, en cas de nullité des contrats :

- déclarer irrecevable la demande de Mme [G] visant à être déchargée de l'obligation de restitution du capital prêté, à tout le moins, l'en débouter,

- en conséquence, et en tout état de cause, condamner Mme [G] à lui régler la somme de 21 500 euros en restitution du capital prêté,

- très subsidiairement :

-limiter la réparation qui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,

- limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour Mme [G] d'en justifier,

- en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, limiter la réparation à hauteur du préjudice subi,

- dire et juger que Mme [G] reste tenue de restituer l'entier capital à hauteur de 21 500 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de décharge de l'obligation de l'emprunteur :

- condamner Mme [G] à lui payer la somme de 21 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable,

- lui enjoindre de restituer, à ses frais, le matériel installé chez elle à la société Alliance, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Immo Confort, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité,

- dire et juger qu'à défaut de restitution, Mme [G] resterait tenue de la restitution du capital prêté,

- subsidiairement, priver Mme [G] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,

- dire et juger, en tout état de cause, en cas de nullité des contrats, que la société Immo Confort est garante du remboursement par l'emprunteur du capital prêté, ce qui n'exonère pas l'emprunteur de son obligation,

- condamner, en conséquence, la société Immo Confort à garantir la restitution du capital prêté, et donc à lui payer la somme de 21 500 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté,

- subsidiairement, la condamner au paiement de cette somme sur le fondement de la répétition de l'indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité,

- condamner, par ailleurs, la société Immo Confort au paiement des intérêts perdus du fait de l'annulation des contrats, et donc à lui payer la somme de 5 338 euros à ce titre,

- fixer ses créances à la procédure collective de la société Immo Confort à hauteur des sommes de 21 500 euros et 5 338 euros,

- débouter Mme [G] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

- ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- en tout état de cause, condamner Mme [G] à lui payer la somme de 3 000 euros.

La société Alliance, prise en la personne de Maître [H], en qualité de mandataire liquidateur de la société IC Groupe n'a pas constitué avocat. Par acte d'huissier de justice délivré le 6 mai 2021, la déclaration d'appel lui a été signifiée par remise à personne physique habilitée. Par acte d'huissier de justice délivré le 13 janvier 2022, les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées également par remise à personne physique habilitée. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance lui ont été signifiées le 29 septembre 2021 par acte d'huissier de justice signifiée selon les mêmes modalités.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 17 février 2022.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

La société Alliance, prise en la personne de Maître [H], en qualité de mandataire liquidateur de la société IC Groupe ne s'étant pas fait représenter mais la citation ayant été délivrée à personne, la cour statuera par arrêt réputé contradictoire, par application de l'article 473 alinéa 2 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est rappelé qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures, en sorte qu'il ne sera pas statué sur la demande de radiation de l'inscription au FICP qui n'est pas reprise dans les dernières écritures de Mme [G] ni au sein de son dispositif.

A titre liminaire également, il est précisé que la recevabilité des demandes de Mme [G] n'est plus discutée à hauteur de cour.

Enfin, il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de l'ordonnance du 14 mars 2016.

Sur l'annulation du contrat principal

Mme [G] reproche au premier juge d'avoir considéré que le bon de commande comportait les mentions requises alors même que selon elle, les caractéristiques essentielles, sur le fondement des articles L.111-1 et L221-5, n'y figurent pas : les dimensions et poids des panneaux photovoltaïques, leur aspect général, leur performance, la marque de l'onduleur, la marque du chauffe-eau, autant d'éléments pourtant essentiels, soulignant que la mention « ou équivalent » équivaut à une absence de mention. Elle soutient également que les modalités d'exécution ne sont pas précisées, les modalités de pose et la date de pose n'étant pas précisées, la seule mention d'une installation de « 2 à 6 semaines » étant trop imprécise et aléatoire pour le consommateur. Elle soutient enfin que les modalités de paiement ne sont pas suffisamment précises, puisque le montant de la mensualité avec assurance et le coût total du crédit, pourtant essentielles pour apprécier la rentabilité de l'opération n'y figurent pas.

La banque, de son côté, poursuit la confirmation du jugement. Elle soutient que le bon de commande est régulier au regard des dispositions des articles L. 221-8, L. 221-5 et L. 111-1 du code de la consommation puisque le bon de commande comporte les mentions essentielles sans que la mention de plusieurs marques possibles concernant l'onduleur et le ballon thermodynamique puisse remettre en cause le bon de commande, outre que les caractéristiques mentionnées sur le bon de commande n'ont jamais posé de difficulté à Mme [G]. Elle fait valoir que la date d'installation est prévue, outre que les conditions générales prévoient un article relatif à la livraison, rappelant que les modalités de pose n'ont pas à figurer dans le bon de commande. Elle rappelle que les modalités de paiement ont été précisées.

Sur ce,

En vertu des articles L.111-1, L.111-2, L.221-5, L.221-9 et L.221-29 du code de la consommation applicables au cas d'espèce, les contrats hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter notamment, à peine de nullité, les informations relatives à l'identité du démarcheur et ses coordonnées, les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, la faculté de rétractation du consommateur prévue à l'article L. 221-18 du code de la consommation et les conditions d'exercice de cette faculté.

Ces informations doivent être inscrites de manière lisible et compréhensible.

Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation, lequel doit être détachable pour permettre au consommateur d'adresser au professionnel sa rétractation.

En l'espèce, le bon de commande litigieux du 5 octobre 2016 porte sur un kit photovoltaïque comprenant 12 panneaux photovoltaïques (250 W) de marque Solarworld ou puissance équivalente, précisant la puissance unitaire des panneaux (3 kW), un coffret AC/DC, un onduleur Schneider ou équivalent, une étanchéité GSE ou équivalent agrée CEIAB, des câbles, connectiques, et un chauffe-eau thermodynamique Thaleos Thermor de 270 litres.

Le bon de commande mentionne la fourniture d'un onduleur de marque « Schneider ou équivalent » et un chauffe-eau thermodynamique « Thaleos Thermor ». Il y a lieu de constater que les marques des matériels sont indiquées au bon de commande.

Le bon de commande mentionne également le prix total du bien (19 545,45 euros HT, soit 21 500 euros TTC avec un taux de TVA de 10 % d'un montant de 1 954,55 euros), les caractéristiques du chauffe-eau (capacité de 270 litres) et des panneaux photovoltaïques (250 W) ainsi que la puissance individuelle d'un panneau.

Néanmoins, le bon de commande ne comporte aucune précision sur les dimensions, sur le lieu d'installation ni sur le positionnement des panneaux photovoltaïques, ni aucune indication sur la pose de ces matériels, la durée des travaux et leur coût. Au surplus, la mention du délai « date prévue d'installation : 2 à 6 semaines » paraît particulièrement imprécise. Le bon de commande ne satisfait donc pas aux dispositions légales précitées.

Ainsi Mme [G] ne disposait pas d'informations suffisantes sur le bon de commande à même de lui permettre de comparer utilement les produits proposés avec d'autres produits présents sur le marché pendant le délai de rétractation.

Dans ces conditions, le bon de commande signé le 5 octobre 2016 est affecté d'un vice susceptible d'entraîner sa nullité, faute de respecter les exigences précitées du code de la consommation.

Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l'acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle ce dernier peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l'article 1182 du code civil dans sa version applicable que la confirmation d'un acte nul impose, d'une part, la connaissance du vice l'ayant affecté et, d'autre part, l'intention de le réparer.

Il ressort de l'examen du bon de commande versé aux débats que celui-ci reproduit dans ses conditions générales les dispositions des articles L.121-23 à L121-26 du code de la consommation qui ne sont plus en vigueur au jour de la signature du contrat litigieux, de sorte qu'ils ne pouvaient permettre à Mme [G] d'avoir précisément connaissance des vices entachant le bon de commande.

Il en résulte que faute pour Mme [G] d'avoir eu connaissance du vice affectant le bon de commande, aucun de ses agissements postérieurs ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité qu'il s'agisse de l'absence d'exercice de la faculté de rétractation, de la signature sans réserve du procès-verbal de réception des travaux, de l'autorisation du déblocage des fonds, du règlement d'échéances du prêt, du délai d'attente avant d'introduire l'instance, ou de l'accomplissement des démarches de raccordement.

Aucune confirmation de la nullité ne saurait donc être caractérisée.

En conséquence, il y a lieu de d'infirmer le jugement déféré et de prononcer la nullité du contrat de vente et, subséquemment, la nullité du contrat de crédit affecté par application des dispositions de l'article L. 312-55 du code de la consommation.

Sur les conséquences de l'annulation du contrat accessoire

Mme [G] soutient que la banque a commis plusieurs fautes qui doivent avoir pour effet de la priver de son droit à restitution du capital emprunté. Elle reproche ainsi à la banque de ne pas avoir contrôlé la régularité du bon de commande et d'avoir débloqué les fonds sans s'être assurée de l'exécution du contrat principal. Elle soutient que ces fautes lui ont causé un préjudice consistant dans le fait qu'elle doit rembourser un capital à la banque pour une installation inutile non conforme à sa destination et dont elle va perdre la propriété en dehors de toute faute de sa part et sur laquelle aucune somme ne pourra plus être récupérée ni aucun recours intenté à l'encontre de l'installateur compte tenu de sa liquidation judiciaire pour obtenir une installation pérenne et performante. Elle précise que la vente de l'électricité ne lui permet pas de couvrir les échéances, puisque par an, l'installation génère un peu plus de 800 euros alors que les mensualités du prêt sont de 244,42 euros, et qu'elle subit une perte financière. Elle souligne que la banque, en libérant les fonds de manière anticipée, l'a privée de la possibilité de formuler des réserves sur le bon fonctionnement de l'installation, lequel ne pouvait effectivement être apprécié qu'après l'achèvement complet de toutes les prestations prévues au bon de commande et notamment le raccordement et la mise en service.

La banque réplique en substance qu'elle n'a commis aucune faute dans la vérification de la régularité formelle du bon de commande, n'ayant pas à se substituer au juge de la régularité du contrat, outre qu'en l'espèce, le bon de commande n'était entaché d'aucune irrégularité manifeste qu'elle aurait été en mesure de détecter. Elle soutient qu'elle n'a commis aucune faute non plus dans le déblocage des fonds, dans la mesure où elle était fondée à les débloquer au vu du procès-verbal de réception signé sans aucune réserve par Mme [G]. Elle rappelle que le vendeur ne procédait qu'aux démarches administratives et ne prenait à sa charge que les frais de raccordement, lequel était effectué par ERDF. Elle fait valoir au demeurant que la preuve d'un préjudice n'est pas rapportée, l'installation de Mme [G] étant parfaitement achevée et fonctionnelle, cette dernière revendant de l'électricité, soulignant que si Mme [G] reproche à l'installation un rendement insuffisant, elle n'en rapporte pas la preuve.

Sur ce,

Le contrat principal et le contrat de crédit dédié à son financement forment une « opération commerciale unique », au sens de l'article L. 311-1. 11° du code de la consommation. L'unicité de cette opération commerciale s'accompagne d'une interdépendance entre le contrat principal et le crédit qui le finance, une telle interdépendance étant d'ordre public. L'interdépendance des contrats signifie notamment que l'annulation ou la résolution du contrat principal entraîne de plein droit celle du contrat de crédit accessoire. Les parties au contrat de crédit sont alors rétablies dans leur état antérieur, ce qui impose pour le prêteur l'obligation de restituer les sommes déjà versées par l'emprunteur et pour l'emprunteur en principe de restituer le capital emprunté. L'emprunteur peut toutefois échapper à une telle restitution s'il parvient à démontrer que le prêteur a commis une faute. La faute du prêteur peut prendre deux formes : un défaut de vérification de l'exécution complète du contrat principal ou un défaut de vérification de la régularité formelle de ce contrat.

Si l'emprunteur peut invoquer la faute du prêteur pour échapper à la restitution de tout ou partie du capital, encore faut-il aussi qu'il justifie de l'existence d'un préjudice consécutif.

En l'espèce, la banque qui a versé les fonds au prestataire de services sans avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal alors que les irrégularités du bon de commande précédemment retenues étaient manifestes - vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat principal était affecté d'une cause de nullité - a commis une faute de nature à le priver de sa créance de restitution de ces fonds.

Par ailleurs, les fonds ont été libérés par le prêteur au vu d'une attestation du vendeur du 26 octobre 2016 certifiant la livraison du matériel conforme au bon de commande. Cette simple attestation ne pouvait toutefois permettre de s'assurer que l'ensemble des prestations prévues au contrat étaient réalisées, alors que l'attestation a été émise le 26 octobre 2016, soit seulement 21 jours après la signature du bon de commande, ce délai étant à l'évidence trop court pour assurer la finalisation totale de l'installation.

En versant ainsi les fonds au prestataire de services sans s'assurer de la régularité du contrat et de l'exécution complète de la prestation qu'elle finançait, la banque a commis une faute de nature à la priver de sa créance de restitution de ces fonds si cette faute est en lien avec le préjudice de l'emprunteur.

Cependant, Mme [G], sur qui repose la charge de la preuve du préjudice qu'elle dit avoir subi, ne caractérise pas un préjudice en lien causal avec la faute de la banque, dès lors qu'il ressort des pièces qu'elle produit elle-même aux débats - procès-verbal de réception des travaux, contrat de raccordement du 13 décembre 2016, factures de production EDF de 2017 à 2021 - que l'installation a été réceptionnée sans réserve et a été raccordée, que cette installation est parfaitement fonctionnelle, et produit de l'électricité dont la revente à la société EDF lui procure des revenus de plus de 800 euros par an.

Cette dernière ne justifie par conséquent d'aucun préjudice en lien direct avec la faute de la banque.

Son action témoigne en réalité de son insatisfaction sur la rentabilité économique de son investissement, la vente de la production électrique ne couvrant pas les mensualités de remboursement du prêt. Pour autant, Mme [G] ne démontre pas qu'un engagement du vendeur aurait été pris par écrit quant à la quantité d'énergie électrique devant être produite par l'installation vendue et, par suite, quant aux recettes attendues, qui permettraient d'établir que la rentabilité économique de l'installation était dans le champ contractuel.

Mme [G] a donc reçu la contrepartie du contrat conclu avec la société venderesse et ne justifie d'aucun préjudice en lien direct avec le contrôle de la régularité formelle du bon de commande et des conditions de libération du capital.

Dans ces conditions, c'est à bon droit que la banque fait valoir qu'en l'absence de préjudice subi par l'emprunteur en lien avec sa faute dans la libération des fonds et le contrôle de la régularité formelle du bon de commande, ce dernier doit lui rembourser le capital prêté. Mme [G] sera par conséquent condamnée à restituer le capital emprunté, sous déduction de l'ensemble des sommes payées par elle au titre du crédit, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Il lui sera donné acte de ce qu'elle tient à la disposition de la société Alliance, représentée par Maître [H], ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société IC Groupe les matériels objets du contrat principal.

Sur les demandes de la BNP Paribas Personal Finance

La banque sollicite à titre principal au titre de l'obligation de garantie du vendeur et à titre subsidiaire, sur le fondement de la répétition de l'indu ou de la responsabilité, la condamnation de la société Immo Confort à lui payer la somme de 21 500 au titre de la créance en garantie du capital prêté, outre la somme de 5 338 euros en paiement des intérêts perdus et à voir fixer ses deux créances à la procédure collective de la société Immo confort.

Sur ce,

Les demandes de condamnations en paiement de la banque sont irrecevables sur le fondement de l'article L. 641-3 du code de commerce, qui fait défense aux créanciers d'agir contre le débiteur placé en liquidation judiciaire, et de solliciter sa condamnation au paiement d'une somme d'argent.

Par ailleurs, ainsi qu'il vient d'être jugé, la banque n'est pas privée de son droit à restitution du capital emprunté, et, elle a, par ailleurs, commis une faute en ne vérifiant pas la régularité formelle du contrat de vente, qui est à l'origine de l'annulation du contrat de crédit affecté et, partant de la perte des intérêts contractuels qu'elle déplore, en sorte qu'elle doit être déboutée de sa demande visant à voir fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire.

Sur les demandes accessoires

Dès lors que l'appel principal est jugé partiellement fondé, il est équitable d'allouer à Mme [G] une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, qui sera mise à la charge de la société BNP Paribas Personal Finance.

Cette dernière sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Il n'est pas inéquitable de rejeter la demande formée par la société BNP Paribas Personal Finance sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré recevables les demandes en nullité du contrat de vente et du contrat de prêt formées par Mme [C] [G],

Statuant à nouveau,

Constate la nullité du contrat conclu entre Mme [C] [G] et la société IC Groupe le 5 octobre 2016,

Constate la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP Paribas Personal Finance et Mme [C] [G] le 5 octobre 2016,

Donne acte à Mme [C] [G] de ce qu'elle mettra les matériels vendus au titre du bon de commande du 5 octobre 2016 à la disposition de Maître [V] [H] de la SELAS Alliance ès qualités de mandataire liquidateur de la société IC Groupe,

Dit que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute en omettant de vérifier la régularité formelle du contrat principal du 5 octobre 2016 et l'exécution complète de la prestation, préalablement au déblocage des fonds auprès de la société IC Groupe,

Dit que Mme [C] [G] ne justifie pas d'un préjudice consécutif à cette faute,

Condamne en conséquence Mme [C] [G] à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 21 500 euros, dont à déduire le montant des échéances réglées jusqu'à la date du présent arrêt, le tout avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à Mme [C] [G] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 21/01381
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;21.01381 ?
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