COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88B
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 MAI 2022
N° RG 20/02302
N° Portalis DBV3-V-B7E-UDJR
AFFAIRE :
[H] [P]
C/
URSSAF CENTRE venant aux droits du RSI
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Septembre 2020 par le Pole social du TJ de Chartres
N° RG : 17/00314
Copies exécutoires délivrées à :
Me Sandra RENDA
URSSAF CENTRE
Copies certifiées conformes délivrées à :
[H] [P]
URSSAF CENTRE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [H] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparant en personne, assisté de Me Sandra RENDA, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000018 substitué par Me Emilie GATTONE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 693
APPELANT
****************
URSSAF CENTRE venant aux droits du RSI
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par M. [U] [S] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvia LE FISCHER, Président,
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [H] [P] (le cotisant) a été affilié au régime social des indépendants (le RSI) aux droits duquel vient l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l' URSSAF) jusqu'à sa cessation d'activité intervenue au mois de novembre 2012.
Le RSI a notifié au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception respectivement signé le 2 janvier 2013 et le 12 août 2013 deux mises en demeure en date du 31 décembre 2012 et 9 août 2013 d'avoir à payer la somme de 18 665 euros au titre des cotisations et celle de 1007 euros au titre des majorations de retard afférentes au 4ième trimestre 2012 et celle de 549 euros au titre de la régularisation 2012 outre 29 euros de majorations de retard.
Par acte d'huissier de justice du 7 septembre 2017, le RSI a signifié au cotisant la contrainte émise le 16 août 2017 pour la somme de 18 371 euros correspondant aux cotisations sociales dues au titre du quatrième trimestre 2012 et de la régularisation afférente à l'année 2012, majorations comprises.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 15 septembre 2017, le cotisant a formé opposition à la contrainte auprès du tribunal des affaires de sécurité sociale d'Eure et Loir, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres lequel par jugement contradictoire en date du 25 septembre 2020 (RG n°17/00314), a :
- dit l'opposition recevable;
- dit l'opposition non fondée;
- validé la contrainte du 16 août 2017 pour son montant de 18 371 euros;
- condamné le cotisant au paiement de cette somme ;
-condamné le cotisant au paiement des frais de signification pour un montant total de 72, 44 euros;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes;
- condamné le cotisant aux dépens de l'instance;
-rappelé que le présent jugement bénéficie de l'exécution provisoire de droit.
Par déclaration reçue le 16 octobre 2020, le cotisant a interjeté appel et les parties ont été appelées à l'audience du 2 mars 2022.
Par conclusion écrites reçues le 2 mars 2022, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, le cotisant demande à la cour :
-de le déclarer recevable et bien fondé en son appel;
-d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement;
Statuant à nouveau,
-de débouter l'URSSAF de ses demandes;
-d'annuler la contrainte du 16 août 2017;
-de condamner l'URSSAF aux dépens.
Par conclusion écrites reçues le 2 mars 2022, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, l'URSSAF, demande à la cour :
-de débouter le cotisant de son appel ;
A titre principal,
-de dire et juger que l'action en paiement de l'URSSAF n'est pas prescrite et que le cotisant n'est plus recevable à contester le bien-fondé des sommes réclamées dans la contrainte du 16 août 2017;
A titre subsidiaire,
-de constater que le cotisant ne justifie pas s'être acquitté des sommes réclamées dans la contrainte du 16 août 2017 et que la créance de l'URSSAF est justifiée en son principe et son montant ;
En tout état de cause,
-de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
En ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile, aucune des parties ne forme de demande de ce chef.
MOTIFS
-Sur la prescription de l'action en recouvrement
Le cotisant soutient en cause d'appel que l'action en recouvrement se prescrit par trois ans et que s'agissant de créances relatives à l'année 2012, l'action est prescrite, "celle ci étant possible jusqu'au 30 juin 2015", le délai de prescription partant pour les travailleurs indépendants " à compter du 30 juin de l'année qui suit l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues".
L'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, applicable jusqu'au 1er janvier 2017 prévoit que l'action en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, est de cinq ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévues aux articles L. 244-2 et L. 244-3.
L'article L. 244-8-1 du code de la sécurité sociale issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 dispose que le délai de prescription de l'action civile en recouvrement des cotisations et majorations de retard, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, est de trois ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévues aux articles L. 244-2 et L. 244-3.
L'article 24 IV 1° de la loi n°2016-1827 du 23 décembre 2016 prévoit que les dispositions sus- rappelées, s'appliquent aux cotisations et contributions sociales au titre desquelles une mise en demeure a été notifiée à compter du 1er janvier 2017.
L'article 24 IV 3° ajoute que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent à compter du 1er janvier 2017 aux créances ayant fait l'objet de mises en demeure notifiées avant cette même date, sans que la durée totale puisse excèder la durée prévue par la loi antérieure.
En l'espèce, les mises en demeure en cause ayant été régulièrement notifiées au cotisant le 2 janvier 2013 et le 12 août 2013 , et la contrainte litigieuse ayant été signifiée le 7 septembre 2017, il s'ensuit que l'action en recouvrement de l'organisme, qui était soumise au délai de cinq ans prévu par l'article L. 244-11 n'est pas prescrite.
Ce moyen doit donc être rejeté.
- Sur la prétendue irrecevabilité, faute de contestation des mises en demeure devant la commission de recours amiable
L'URSSAF fait valoir que le cotisant n'est pas recevable à critiquer la régularité et le bien fondé des cotisations qui lui sont réclamées dès lors qu'il n'a pas saisi la commission de recours amiable en contestation des mises en demeure qui lui ont été régulièrement notifiées.
En l'espèce, il est établi que l'URSSAF a régulièrement notifié au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception lequel a été signé le 2 janvier 2013 la mise en demeure en date du 31 décembre 2012, et par lettre recommandée avec accusé de réception lequel a été signé le 12 août 2013 la mise en demeure du 9 aôut 2013, que celles-ci mentionnent " Vous êtes mis en demeure de régler dans un délai d'un mois, à dater de sa réception la somme dont vous êtes redevable envers la caisse RSI au titre des cotisations et contributions sociales obligatoires dont décompte ci-après et sans préjudice des majorations de retard qui continueront à courir jusqu'au règlement définitif desdites cotisations et contributions. Si vous avez des motifs valables, vous pouvez contester cette mise en demeure auprés de la commission de recours amiable de la caisse RSI dont l'adresse figure ci-dessus dans le délai d'un mois à compter de sa réception. A défaut de paiement ou de contestation, dans le délai précité, des poursuites seront engagées sans nouvel avis selon les modalités indiquées au verso. Les frais en résultant seront à votre charge (articles R. 133-6, R. 612-11 et D. 133-16 du code de la sécurité sociale).
Cependant, la contrainte peut faire l'objet d'une opposition et le bien fondé de la créance peut être discuté même si la dette n'a pas été antérieurement contestée (Soc 27 juin 2002 n° 00-15.909; Soc 15 juillet 1999 n° 96-19. 245 Bull 1999, V, n° 355). Il en va différemment lorsqu'à la suite de la notification de la mise en demeure, la commission de recours amiable a rendu une décision régulièrement notifiée au cotisant sans qu'aucun recours n'ait été formé contre elle dans le délai requis, ce qui n'est le cas en l'espèce. Certes dans un arrêt publié du 4 avril 2019 (2e Civ 4 avril 2019 n° 18-12.014), la Cour de cassation a jugé qu'il résulte des dispositions des articles R. 133-3 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale, qui ne méconnaissent pas les exigences de l'article 6 § 1, de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'intéressé a été dûment informé des délais et voies de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, que le cotisant qui n'a pas contesté en temps utile la mise en demeure qui lui a été adressée au terme des opérations de contrôle, ni la décision de la commission de recours amiable saisie à la suite de la notification de la mise en demeure, n'est pas recevable à contester, à l'appui de l'opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, la régularité et le bien fondé des chefs de redressement qui font l'objet de la contrainte. Toutefois, il résulte du conclusif de cet arrêt que le litige portait sur une opposition à contrainte formée devant le juge, en présence d'une décision définitive de la commission de recours amiable ayant rejeté le recours du cotisant, de sorte que sa portée doit être circonscrite à cette situation.
En l'espèce, il est constant que les mises en demeure n'ont pas été contestées devant la commission de recours amiable de l'organisme. Le cotisant reste recevable dès lors à contester le bien fondé de sa créance au stade de l'opposition à contrainte.
-Sur le bien fondé de la contrainte
Au soutien de sa contestation, M. [P] se borne à soutenir que les relevés de compte pour l'année 2012 qu'il produit révélent que le RSI a perçu pour cette année la somme de 27 000 euros et que " les calculs effectués par le RSI dans ses pièces ne correspondant pas à ce qui a été payé" de sorte que l'organisme doit "revoir le calcul des cotisations".
Toutefois, l'URSSAF justifie avoir pris en compte les versements effectués par le cotisant lesquels s'élèvent au titre des échéances 2012 à la somme de 14 827 euros, le solde ayant été affecté sur des échèances impayées antérieures à 2012. Des remises de majorations de retard ont par ailleurs été accordées à celui-ci à hauteur de 241 euros. Le cotisant reste donc redevable d'un solde de 18 371 euros au titre de l'année 2012 dont 17 793 euros au titre du 4ième trimestre 2012 et 578 euros au titre de la régularisation 2012 soit les montants réclamés dans la contrainte, selon les motifs pertinents du premier juge que la cour adopte expréssement.
La contrainte doit ainsi être validée en son entier montant.
- Sur les dépens
Le cotisant qui succombe doit être condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Rejette le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement ;
Rejette le moyen tiré de l'irrecevabilité, faute d'avoir saisi la commission de recours amiable ;
Confirme le jugement rendu le 25 septembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres (RG n°17/00314) en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. [H] [P] aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sylvia Le Fischer, Président, et par Madame Morgane Baché , Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, La PRÉSIDENTE,