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18/05/2022 | FRANCE | N°20/00591

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 18 mai 2022, 20/00591


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 MAI 2022



N° RG 20/00591 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TY5R



AFFAIRE :



[K] [N]





C/

[I] [P] mandataire judiciaire, es qualités de liquidateur de la société AGEFA PME GROUPE.









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTE

RRE CEDEX

N° Chambre :

N° Section : Encadrement

N° RG : 18/01582



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Jean-Claude CHEVILLER



Me Mélina PEDROLETTI



Me Claude-Marc BENOIT



la SCP C R T D ET A...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 MAI 2022

N° RG 20/00591 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TY5R

AFFAIRE :

[K] [N]

C/

[I] [P] mandataire judiciaire, es qualités de liquidateur de la société AGEFA PME GROUPE.

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Décembre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE CEDEX

N° Chambre :

N° Section : Encadrement

N° RG : 18/01582

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jean-Claude CHEVILLER

Me Mélina PEDROLETTI

Me Claude-Marc BENOIT

la SCP C R T D ET ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K] [N]

né le 26 Juin 1960 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Sophie REICHMAN de la SELEURL REICHMAN Société d'avocat, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1658 - Représentant : Me Jean-Claude CHEVILLER, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0945

APPELANT

****************

Me [I] [P] mandataire judiciaire, es qualités de liquidateur de la société AGEFA PME GROUPE

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Isilde QUENAULT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1515 - Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 substitué à l'audience par Me Mathilde DE CASTRO avocat au barreau de PARIS

AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentant : Me Claude-Marc BENOIT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1953 substitué à l'audience par Me Christel ROSSE, avocat au barreau de VERSAILLES

Association CPME

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentant : Me Guillaume BOULAN de la SCP C R T D ET ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 713

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,

L'association AGEFA PME a été créée par l'association Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises (ci-après l'association CGPME), avec pour objet d'être un organisme collecteur et répartiteur de la taxe d'apprentissage (OCTA).

M. [K] [N] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er janvier 1995, avec reprise d'ancienneté au 1er juin 1989, en qualité de directeur général (statut de cadre dirigeant) par l'association AGEFA PME.

La loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a notamment prévu que seuls des organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) pouvaient désormais être habilités à collecter la taxe d'apprentissage.

À la suite de cette modification législative lui faisant perdre sa capacité à collecter la taxe d'apprentissage, l'association AGEFA PME a modifié ses statuts le 11 février 2014, notamment quant à son objet et à sa dénomination, devenant AGEFA PME Groupe.

L'association AGEFOS PME est devenue quant à elle un organisme collecteur paritaire agréé pour la collecte de la taxe professionnelle.

Par lettre du 19 mai 2016, l'association AGEFA PME Groupe, alors présidée par M. [B], a convoqué M. [N] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

À compter du 23 mai 2016, M. [N] été placé en arrêt de travail pour maladie.

Le 26 mai 2016, à la suite de la démission de M. [B], M. [S] a été nommé président de l'association AGEFA PME Groupe.

Par requête en date du 2 juin 2016, M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail notamment pour harcèlement moral et la condamnation de l'association AGEFA PME Groupe, ainsi que l'association CGPME au titre d'un coemploi, à lui verser des indemnités de rupture et diverses sommes notamment à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Par lettre du 30 juin 2016, l'association AGEFA PME Groupe a notifié à M. [N] son licenciement pour faute lourde, dans les termes suivants : '(...) Alors que les dispositions de la loi ont été modifiées suivant la loi du 5 mars 2014, et que cette modification du contexte légal nécessitait une analyse exacte et des décisions adaptées pour l'avenir de notre association, vous avez conduit la destinée de cette dernière en ignorant ces nouvelles dispositions législatives dans le but manifeste de les contourner, et en vous basant sur une stratégie erronée, voir en fin de compte illicite dans le but de capter coûte que coûte les sommes, objet de la collecte que nous n'étions plus en droit d'effectuer, ainsi qu'il apparaît notamment de l'acte du huissier signifié le 4 mai 2016 à AGEFOS PME pour obtenir le paiement direct au profit d'AGEFA d'une somme de 23 198 423 euros.

Il en est découlé un certain nombre de blocages et de potentiels conflits dont vous portez la responsabilité.

Enfin et en tout état de cause et quelle que soit l'analyse relative aux faits évoqués ci-dessus, suivant votre mail du 19 mai 2016, vous avez clairement fait savoir que vous refusiez de mettre en place la politique définie par AGEFA PME en maintenant une opposition formelle et sans appel.

Dans ces conditions d'opposition clairement exprimée, je ne vois pas d'autre issue que la rupture immédiate de notre contrat qui par définition même ne peut plus se dérouler dans des conditions normales y compris durant un éventuel préavis et c'est donc pour faute lourde que vous est notifiée la rupture (...)'.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la rémunération moyenne mensuelle de M. [N] s'élevait à 14 951,98 euros brut, selon ses dires.

Dans le cadre de l'instance prud'homale, M. [N] a contesté à titre subsidiaire la validité et le bien-fondé de son licenciement.

Par jugement du 28 novembre 2016, le tribunal de grande instance a prononcé la liquidation judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe et a désigné Me [I] [P] en qualité de liquidateur judiciaire.

En cours d'instance prud'homale, l'association CGPME a été dénommée Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (ci-après l'association CPME).

Par jugement du 7 décembre 2019, le conseil de prud'hommes (section encadrement) a :

- dit qu'il n'y a pas de situation de coemploi avec l'association CPME ;

- dit que le licenciement de M. [N] est fondé sur une faute lourde ;

- débouté M. [N] de toutes ses demandes ;

- débouté l'association AGEFA PME Groupe et l'association CPME de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [N] aux dépens.

Le 27 février 2020, M. [N] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 16 février 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [N] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué, sauf sur les déboutés des demandes reconventionnelles au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau de :

1°) dire que l'association CGPME devenue CPME à la qualité de coemployeur à son égard ;

2°) à titre principal, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et dire qu'elle produit les effets d'un licenciement nul et en conséquence condamner l'association CGPME devenu CPME à lui payer les sommes suivantes, ou en l'absence de reconnaissance d'un coemploi, fixer au passif de la liquidation judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe et de l'association AGEFA PME Entreprises sa créance aux sommes suivantes :

- 44 855,95 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 4 485,59 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 10 327,80 euros brut à titre d'avance sur treizième mois ;

- 122 306,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 538 271,28 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-4 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'interdiction d'agissements de harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour préjudice de carrière et familial ;

3°) à titre subsidiaire, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et dire qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence condamner l'association CGPME devenu CPME ou en l'absence de reconnaissance d'un coemploi, fixer au passif de la liquidation judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe et de l'association AGEFA PME Entreprises sa créance aux sommes suivantes :

- 44 855,95 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 4 485,59 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 10 327,80 euros brut à titre d'avance sur treizième mois ;

- 122 306,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 538 271,28 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-4 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'interdiction d'agissements de harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour préjudice de carrière et familial ;

4°) à titre subsidiaire, en l'absence de résiliation judiciaire du contrat de travail, dire que son licenciement est nul et en conséquence condamner l'association CGPME devenu CPME à lui payer les sommes suivantes ou en l'absence de reconnaissance d'un coemploi, fixer au passif de la liquidation judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe et de l'association AGEFA PME Entreprises sa créance aux sommes suivantes :

- 44 855,95 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 4 485,59 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 10 327,80 euros brut à titre d'avance sur treizième mois ;

- 122 306,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 538 271,28 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-4 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'interdiction d'agissements de harcèlement moral sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

- 89 711,88 euros net à titre de dommages-intérêts pour préjudice de carrière et familial ;

5°) en tout état de cause :

- débouter les intimées de leurs demandes à son encontre ;

- condamner l'association CPME à lui payer une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure ;

- condamner les intimées aux entiers dépens ;

- déclarer la décision à intervenir opposable à l'AGS CGEA d'Île-de-France Ouest.

Aux termes de ses conclusions du 19 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, Me [I] [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de résiliation judiciaire formée par M. [N] ;

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes ;

- débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes ;

- subsidiairement, requalifier le licenciement pour faute lourde en licenciement pour faute grave ;

- condamner M. [N] à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Mélina Pedroletti.

Aux termes de ses conclusions du 26 février 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'association CPME demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué, sauf sur le débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et statuant à nouveau, condamner M. [N] à lui payer une somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ;

- condamner M. [N] aux dépens ;

- à titre subsidiaire, en cas de reconnaissance d'un coemploi à son égard, débouter M. [N] de ses demandes ;

- à titre très subsidiaire, requalifier le licenciement pour faute lourde en licenciement pour faute grave et limiter les indemnités de rupture de plus justes proportions.

Aux termes de ses conclusions du 12 mars 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'AGS CGEA Île-de-France Ouest demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire, dire le jugement opposable dans les termes et conditions de l'article L. 3253-19 du code du travail et dans la limite du plafond 6 de sa garantie toutes créances brutes confondues par application des articles L. 3253-6, L. 3253-8 et L. 3253-17 du code du travail ;

- dire ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à sa charge.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 15 février 2022.

SUR CE :

Considérant au préalable qu'il sera rappelé qu'aux termes des trois premiers alinéas de l'article 954 du code de procédure civile : ' Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé./ Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte./La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion' ;

Sur l'existence d'un coemploi par l'association CGPME devenue CPME :

Considérant que M. [N] soutient que l'association CGPME, devenue CPME, a la qualité de coemployeur à son égard aux motifs que :

- le président de cette association détenait un pouvoir de nomination et 'un pouvoir de directive et de sanction notamment par son pouvoir destitution' des cadres de l'association AGEFA PME Groupe, ce qui caractérise l'existence d'un lien de subordination ;

- cette dernière 's'est immiscée dans la gestion économique de l'AGEFA PME et la subordonnée [sic] dans le choix de ses décisions stratégiques et économiques' en ce qu'elle a décidé en avril 2016 d'un 'changement de stratégie' ' portant sur l'affectation des fonds collectés par le biais de l'AGEFOS PME, qui ne seront pas affectés et versés aux établissements du réseau AGEFA pour faire vivre son réseau de CFA';

Considérant que l'association CGPME soutient qu'elle n'a pas la qualité de coemployeur de M. [N] et conclut au débouté de l'ensemble des demandes formulées à son égard ;

Considérant, sur le moyen tiré de l'existence d'un lien de subordination entre M. [N] et l'association CGPME, qu'il appartient à celui qui se prévaut d'un contrat de travail de rapporter la preuve qu'il exécute une prestation de travail en contrepartie d'une rémunération sous la subordination juridique de l'employeur ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ;

Qu'en l'espèce, M. [N] s'appuie sur les pièces suivantes :

- les statuts de l'association AGEFA PME Groupe qui prévoient que le président et les membres du conseil d'administration sont désignés par le président de l'association CGPME, ce qui ne fournit aucun élément sur sa propre situation de directeur salarié à l'égard de cette dernière association ;

- une lettre adressée le 24 mai 2016 au président de l'association AGEFA PME Groupe par le président de l'association CGPME dans lequel ce dernier lui demande de simples informations sur les modalités de transfert des salariés de l'association AGEFA PME Groupe vers l'association AGEFOS PME ainsi que sur l'état d'avancement de la procédure de licenciement engagée à l'encontre de l'appelant, et qui ne contient ainsi aucune directive au président de l'association AGEFA PME Groupe notamment quant au licenciement en cause ;

- une attestation de M. [B], président démissionnaire de l'association AGEFA PME Groupe en mai 2016, qui ne contient pas le moindre élément sur l'existence d'un lien de subordination entre M. [N] et l'association CGPME mais seulement des considérations personnelles sur le sort de l'association qu'il a présidée ;

Que M. [N] ne démontre ainsi en rien l'existence d'un lien de subordination avec l'association CGPME ;

Considérant que, sur le moyen tiré d'une immixtion de l'association CGPME dans la gestion de l'association AGEFA PME Groupe, il y a lieu de relever que M. [N] n'allègue pas que l'immixtion en cause est permanente et a conduit à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière ;

Que l'appelant se borne à invoquer :

- à nouveau les statuts de l'association AGEFA PME Groupe qui prévoient que le président et les membres du conseil d'administration sont désignés par le président de l'association CGPME ;

- quelques lettres ou attestations de personnes dont les fonctions ne sont pas définies, livrant leurs appréciations subjectives sur le 'sabordage' et la liquidation judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe par l'association CGPME ;

- des phrases éparses d'un rapport de l'IGAS sur le contrôle de la gestion de l'association AGEFA PME Groupe, réalisé en octobre 2017, relatives à un simple questionnement sur une possibilité d'appel en garantie de l'association CGPME pour le comblement du passif de l'association AGEFA PME Groupe ou relatives à des interrogations évasives sur le fait que l'association CGPME, 'disposant de la maîtrise totale de la gestion d'AGEFA n'a pas empêché une dérive qu'elle avait tous les éléments pour connaître';

- une lettre du président de l'association AGEFA PME Groupe qui fait seulement ressortir qu'il a recours au même avocat que l'association CGPME pour la rédaction de la lettre du licenciement en cause ;

Que ces éléments sont en eux-mêmes insuffisants à caractériser une immixtion permanente de l'association CGPME conduisant à une perte totale d'autonomie d'action de l'association AGEFA PME Groupe et, partant, à établir la qualité de coemployeur dans le cadre du présent litige prud'homal ;

Qu'il résulte de ce qui précède que M. [N] n'établit pas la qualité de coemployeur de l'association CGPME devenue CPME à son égard ; qu'il y a donc lieu de débouter l'appelant de l'ensemble des demandes formées à l'encontre de cette association ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur la 'recevabilité' des demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Considérant que lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie, le juge doit rechercher si la demande était justifiée ; que si tel est le cas, il fixe la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement ;

Qu' en l'espèce, il est constant que M. [N] a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail le 2 juin 2016 avant d'être licencié le 30 juin suivant ; qu'il y a donc lieu de rejeter la 'fin de non-recevoir' soulevée à ce titre par le liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe, étant précisé que le conseil de prud'hommes n'a pas statué sur une telle 'irrecevabilité' dans le dispositif du jugement ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul :

Considérant que M. [N], aux termes d'une argumentation confuse, demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul aux motifs qu'il a été victime d'un harcèlement moral de la part de l'association CGPME et de la part de M. [S] (nouveau président de l'association AGEFA PME Groupe à compter de mai 2016) ayant fortement dégradé son état de santé et constitué par :

- le fait d'avoir été confronté à des changements brutaux d'orientation stratégique de la part de l'association CGPME en mai 2016 relativement au financement de l'association AGEFA PME Groupe par l'association AGEFOS PME ;

- des menaces proférées à son encontre, des comportements vexatoires et déloyaux, des agissements constitutifs de violence morale et psychologique, des maltraitances et des représailles, une convocation à entretien préalable au licenciement ;

Considérant que le liquidateur judiciaire et l'AGS concluent au débouté ;

Considérant qu'un salarié est fondé à poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement, par ce dernier, à ses obligations ; qu'il appartient au juge de rechercher s'il existe à la charge de l'employeur des manquements d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail afin de prononcer cette résiliation qui emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul le cas échéant ;

Qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en application de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa version applicable au litige, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le salarié établit des faits précis et concordants qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en application de l'article L. 1152-3 du même code, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;

Qu'en l'espèce, s'agissant du premier grief, M. [N] se borne à verser aux débats différents échanges de courriels entre M. [B], président de l'association employeuse, et M. [E], président de l'association CGPME, ainsi que des courriers d'avocats entre ces associations et l'association AGEFOS PME, lesquels montrent seulement une opposition de l'association CGPME aux décisions prises par l'association AGEFA PME Groupe relatives à son financement auprès de l'association AGEFOS PME et un désaccord sur ce point entre ces différentes entités ; qu'aucun agissement de harcèlement moral personnellement subi par l'appelant ne ressort des pièces versées ;

Que les autres griefs tirés de menaces proférées à son encontre, de comportements vexatoires et déloyaux, d'agissements constitutifs de violence morale et psychologique, de maltraitances et de représailles, qui ne sont d'ailleurs pas précisés, ne résultent que des allégations de M. [N] ;

Que la convocation à entretien préalable au licenciement est rédigée en des termes neutres et habituels et ressort du pouvoir de direction de l'employeur ; que M. [N] ne demande d'ailleurs pas en appel de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et n'en conteste donc pas le bien-fondé ; qu'en outre, il s'agit en toutes hypothèses de l'unique fait matériellement établi, ce qui est impropre à caractériser un harcèlement moral ;

Que les arrêts de travail de M. [N] versés aux débats ne font aucun lien entre l'état dépressif qui y est mentionné et ses conditions de travail au sein de l'association AGEFA PME Groupe ; que le certificat médical d'un médecin psychiatre établi en mai 2016 ne fait que reprendre les dires de l'intéressé quant à une origine professionnelle de la dégradation de son état de santé et a de plus été amendé par ce praticien à la suite d'une procédure engagée par le liquidateur judiciaire devant le conseil de l'ordre des médecins ; que M. [N] procède par ailleurs par simples allégations relativement à son état de santé postérieur à la rupture ;

Que dans ces conditions, M. [N] n'établit pas de faits précis et concordants qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ;

Qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul aux torts de l'association AGEFA PME Groupe, étant précisé par ailleurs que l'appelant n'a pas mis dans la cause l'association AGEFA PME Entreprises et n'explique en rien à quel titre il serait titulaire de créances à son égard à inscrire à son passif ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral :

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun harcèlement moral ne ressort des débats ; qu'il y a donc lieu de débouter M. [N] de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral :

Considérant que M. [N] n'explique pas en quoi l'employeur aurait manqué à son obligation de prévention du harcèlement moral ; que de plus et en tout état de cause, il n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

Considérant que là encore, M. [N] n'explique pas en quoi son employeur aurait manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail ; que de plus et en tout état de cause, il n'établit ni même n'allègue là non plus l'existence d'un préjudice à ce titre ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Considérant que M. [N] ne soulève aucun moyen au soutien de cette demande ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté sur ce point ;

Sur la demande de nullité du licenciement :

Considérant que M. [N] soutient que son licenciement est nul aux motifs que :

- cette décision constitue une représaille à sa dénonciation de faits illicites, en l'occurrence d'une organisation frauduleuse de l'insolvabilité de l'association AGEFA PME Groupe, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1132-3-3 du code du travail ;

- le signataire de la lettre de licenciement n'est pas identifiable ou n'a pas reçu de délégation de pouvoir ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1332-3-3 du code du travail : 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions./ Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. / En cas de litige relatif à l'application des premier et deuxième alinéas, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu'elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime, ou qu'elle a signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles' ;

Qu'en l'espèce, M. [N] ne verse aucune pièce montrant qu'il a dénoncé des faits d'organisation fraudeuse d'insolvabilité ; qu'il ne présente ainsi aucun élément de fait qui permet de présumer que le licenciement a été prononcé au motif qu'il a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime, ou qu'il a signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;

Considérant que, par ailleurs, les moyens relatifs à la signature de la lettre de licenciement sont inopérants pour obtenir la nullité du licenciement ;

Considérant qu'en conséquence, il y a lieu de débouter M. [N] de sa demande de nullité de son licenciement ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur les demandes de dommages-intérêts pour licenciement nul, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement, de dommages-intérêts pour préjudice de carrière et familial :

Considérant qu'il résulte du rejet des demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail et de nullité du licenciement qu'il y a lieu de débouter M. [N] de ses demandes subséquentes de dommages-intérêts pour licenciement nul, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement et de dommages-intérêts pour préjudice de carrière et familial ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur 'l'avance sur treizième mois' :

Considérant que M. [N] n'énonce aucun moyen au soutien de cette demande ; qu'il y a donc lieu d'en confirmer le débouté ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige et aux demandes des parties, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur les dépens et et l'application de l'article 700 du code de procédure civile entre M. [N] et Me [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe, et de l'infirmer en ce qu'il statue sur l'application de l'article 700 du même code entre M. [N] et l'association CPME ;

Que M. [N] sera condamné à payer à Me [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe, une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel et sera condamné à payer une somme de 8 000 euros à l'association CPME pour la procédure suivie en première instance et en appel ; qu'il sera en outre condamné aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Mélina Pedroletti pour ce qui concerne les dépens engagés par le liquidateur judiciaire ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué, sauf sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile entre M. [K] [N] et l'association Confédération des Petites et Moyennes Entreprises,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Rejette la 'fin de non-recevoir' soulevée par Me [I] [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe,

Condamne M. [K] [N] à payer à l'association Confédération des Petites et Moyennes Entreprises une somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Condamne M. [K] [N] à payer à Me [I] [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe, une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne M. [K] [N] aux dépens d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Mélina Pedroletti pour ce qui concerne les dépens engagés par Me [I] [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association AGEFA PME Groupe,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00591
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;20.00591 ?
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