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18/05/2022 | FRANCE | N°19/02125

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 18 mai 2022, 19/02125


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 MAI 2022



N° RG 19/02125 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TF5Z



AFFAIRE :



[G] [Z] épouse [V]





C/

SAS SAINT GOBAIN SERVICES RH FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Mars 2019 par le Conseil de l'ordre des avocats de [Localité 6]

N° Chambre :

N° Section : Encadrementr>
N° RG : 17/02587



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELEURL CNE



la SCP COBLENCE AVOCATS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 MAI 2022

N° RG 19/02125 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TF5Z

AFFAIRE :

[G] [Z] épouse [V]

C/

SAS SAINT GOBAIN SERVICES RH FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Mars 2019 par le Conseil de l'ordre des avocats de [Localité 6]

N° Chambre :

N° Section : Encadrement

N° RG : 17/02587

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL CNE

la SCP COBLENCE AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [G] [Z] épouse [V]

née le 01 Août 1961 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Christophe NEVOUET de la SELEURL CNE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0106

APPELANTE

****************

SAS SAINT GOBAIN SERVICES RH FRANCE

N° SIRET : 508 102 175

[Adresse 7]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me Catherine DAVICO-HOARAU de la SCP COBLENCE AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0053

substitué à l'audience par Me Hélène FONTANILLE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,

EXPOSE DU LITIGE

[G] [X] a été engagée par la société Saint-Gobain Glass France suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2011 en qualité d'adjointe de formation au sein du service des ressources humaines, cadre confirmé, niveau 8C, coefficient 550 en référence aux dispositions de la convention collective nationale des industries de fabrication mécanique du verre, moyennant une rémunération annuelle brute forfaitaire valeur treize mois de 53 000 euros, outre une prime de vacances et un bonus en fonction de l'atteinte d'objectifs, pour 217 jours travaillés par an.

Par avenant au contrat de travail, la salariée a été mutée à compter du 1er novembre 2014 au sein du groupement d'intérêts économiques Saint-Gobain Glass Solutions France au poste de responsable de l'organisme de formation du pôle matériaux innovants, statut cadre confirmé C2, coefficient 410, en référence aux dispositions de la convention collective nationale de la miroiterie, de la transformation et du négoce de verre.

Par contrat à compter du 1er janvier 2016, la salariée a été mutée au sein de la société Saint-Gobain Services Rh France en qualité de responsable de l'organisme de formation du pôle matériaux innovants, statut cadre, position 2.3, coefficient 150, en référence aux dispositions de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseil, dite Syntec.

Par lettre datée du 25 mai 2016, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 2 juin suivant, puis par lettre datée du 24 juin 2016, l'employeur lui a notifié son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le 22 septembre 2017, [G] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre afin d'obtenir la condamnation de la société Saint-Gobain Services Rh France à lui communiquer des documents ainsi qu'à lui payer des dommages et intérêts notamment au titre de son licenciement qu'elle estime dénué de cause réelle et sérieuse.

Par jugement prononcé le 21 mars 2019, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- débouté [G] [X] de l'intégralité de ses demandes au titre des dispositions encadrant la durée du travail, les heures supplémentaires et le travail dissimulé,

- l'a déboutée de sa demande au titre du manquement à l'obligation de formation,

- dit le licenciement pour insuffisance professionnelle pourvu de cause réelle et sérieuse,

- l'a déboutée du surplus de ses demandes,

- l'a condamnée aux entiers dépens éventuels.

Le 9 mai 2019, [G] [X] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 15 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, [G] [X] demande à la cour de :

- avant dire droit, faire injonction à la société Saint-Gobain Services Rh France de communiquer, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document à compter de la notification de l'arrêt, les documents suivants :

* ses relevés informatiques des heures de passage d'entrées et de sorties au titre de la période de juin 2013 à juin 2016 sur le fondement de l'article D. 3171-14 du code du travail,

* le registre unique du personnel de la société Saint-Gobain Services Rh France et des autres sociétés du groupe Saint-Gobain au titre des années 2016 et 2017,

et fixer une nouvelle date d'audience concernant les chefs de demandes pour lesquels la société Saint-Gobain Services Rh France doit communiquer des documents,

- trancher sur le fond ses autres demandes, infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et a jugé le licenciement pour insuffisance professionnelle pourvu de cause réelle et sérieuse, statuant à nouveau, juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et condamner la société Saint-Gobain Services Rh France à lui verser les sommes suivantes :

* 60 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5 014,99 euros nets à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de reclassement,

* 5 014,99 euros nets à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage,

* 13 841,37 euros nets à titre de dommages-intérêts pour défaut de proposition du congé de reclassement et des mesures d'accompagnement liées au licenciement pour motif économique,

* 77 375,26 euros bruts à titre de rappels d'heures supplémentaires pour les années 2016 à 2013,

* 7 737,53 euros bruts de congés payés afférents,

* 44 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour privation du bénéfice des contreparties obligatoires en repos,

* 15 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de formation,

* 30 000 euros nets à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

* 3 500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,

et dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 4 octobre 2019 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société Saint-Gobain Services Rh France demande à la cour de :

- déclarer la demande en paiement d'heures supplémentaires, de congés payés y afférents, de dommages-intérêts pour privation du bénéfice des contreparties obligatoires en repos et pour travail dissimulé tant sur la période du 1 er juillet 2011 au 31 octobre 2014 que sur celle du 1er novembre 2014 au 31 décembre 2015, irrecevable en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de la société Saint-Gobain Services Rh France qui n'était pas son employeur, [G] [X] étant salariée de la société Saint-Gobain Glass France s'agissant de la première période et de la société Saint-Gobain Glass Solutions France s'agissant de la seconde période,

- déclarer prescrites les demandes de rappel d'heures supplémentaires, de contrepartie obligatoire en repos et de congés payés afférents pour la période antérieure au 22 septembre 2014,

- confirmer le jugement, débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes et la condamner aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 16 juin 2021.

MOTIVATION

Sur les demandes de communication de pièces

- [G] [X] sollicite avant-dire droit la communication par la société Saint-Gobain Services Rh France de ses 'relevés informatiques des heures de passage d'entrées et de sorties au titre de la période de juin 2013 à juin 2016".

La société Saint-Gobain Services Rh France s'oppose à cette demande.

Alors que la société Saint-Gobain Services Rh France indique, sans être démentie par la salariée, qu'elle n'a pas mis en place de système de pointage ni de contrôle de la durée du travail des salariés à l'entrée de l'immeuble 'Les Miroirs', il convient de débouter l'appelante de cette demande qui n'est pas utile à la solution du litige.

- [G] [X] sollicite en outre la communication par la société Saint-Gobain Services Rh France du 'registre unique du personnel de la société Saint-Gobain Services Rh France et des autres sociétés du groupe Saint-Gobain au titre des années 2016 et 2017".

La société Saint-Gobain Services Rh France s'oppose à cette demande.

Alors que l'appelante soutient que le véritable motif du licenciement notifié le 24 juin 2016 serait à rechercher dans la suppression de son poste à la suite de la réorganisation du groupe, la société Saint-Gobain Services Rh France réplique que la salariée a été licenciée pour un motif d'insuffisance professionnelle et que son poste n'a pas été supprimé, ce qui exclut tout motif économique de licenciement.

Il ressort en effet d'une note interne à l'entreprise datée du 5 juillet 2016 qu'il a été annoncé la promotion à compter du 1er juillet 2016 d'[M] [S], jusqu'alors collaboratrice de [G] [X], au poste de 'Learning and Development Manager' pour matériaux innovants, chargée de la gestion de l'organisme de formation du pôle, poste jusqu'alors occupé par [G] [X] et il ressort du curriculum vitae de [K] [A] que celle-ci occupe le poste de gestionnaire administrative et financière du service formation du pôle des matériaux innovants depuis 2016. Il s'ensuit que le poste de la salariée n'a pas été supprimé. Le moyen tiré du licenciement économique déguisé n'est donc pas fondé et il convient de débouter l'appelante de cette demande qui n'est pas utile à la solution du litige.

Le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur le bien-fondé du licenciement

Par lettre datée du 24 juin 2016, l'employeur a notifié à la salariée son licenciement pour insuffisance professionnelle en ces termes :

'(...) Vous avez été embauchée le 1er juillet 2011 en qualité d'adjointe formation au sein du service RH de SG Glass.

Le 1er novembre 2014, vous êtes mutée sur la Société GIE Glass solutions France en qualité de Responsable de l'organisme de formation.

En 2014, nous avons été contraints de réduire l'étendue de vos responsabilités puisque la gestion des plans de formation de la société du siège (SGGF, SEPR et SGCIO) et l'animation du réseau des correspondants de formation ont été confiés à [M] [S]. [M] [S] était alors rattachée à [T] [F].

L'appréciation de vos résultats au cours de l'entretien annuel que vous avez eu le 03/02/2015 a été qualifiée d'insuffisante.

Fin 2015, la gestion des projets de formation vous a été retirée et confiée à une autre collaboratrice [J] [Y]. La responsabilité des projets d'évolution pour lequel Matériaux Innovants était pilote notamment le projet Foederis et le remplacement d'Albatros vous ont été retirés, compte-tenu des difficultés que vous avez rencontrées dans le management de vos équipes, nous avons été contraints de rattacher [J] [Y] à [T] [F].

L'objectif était que vous puissiez vous consacrer à 100% à la gestion de l'organisme de formation de Matériaux Innovants.

L'appréciation de vos résultats au cours de l'entretien annuel que vous avez eu le 05/02/2016 était de nouveau qualifiée d'insuffisante.

Il vous a alors été demandé de vous consacrer uniquement à la gestion de l'organisme de formation avec la volonté d'aborder la gestion des 70 stages de façon plus collaborative, transversale et digitale.

Dès lors et compte tenu des difficultés rencontrées, la gestion de la taxe d'apprentissage vous a également été progressivement retirée.

Depuis votre prise de poste, le périmètre de vos responsabilités n'a cessé de se réduire compte tenu de la difficulté à tenir le poste.

Néanmoins en dépit des mesures que nous avons prises pour vous accompagner, vous avez multiplié les erreurs et carences. A titre d'exemples non exhaustifs :

- Problème de feedback avec votre manager et avec l'équipe (vous participez à des séminaires externes, aucun retour n'est fait à leur issue, vous ne faites pas de point régulier avec votre manager, alors que ceux-ci vous sont demandés).

- Vous recevez des organismes avec lesquels nous pourrions être amenés à travailler sans que votre manager ne soit informé. Exemple récent avec Equicoaching. Votre manager invité à participer à une présentation de cet organisme de formation découvre à cette occasion qu'une présentation a été faite, sans aucun feed-back là encore, ni aucune suite donnée à ce contact alors que vous les avez reçus quelques semaines auparavant.

- Votre manager vous demande de faire des points mensuels sur l'état financier de l'organisme de formation' Vous lui indiquez qu'elle n'a qu'à aller sur le réseau partagé N ...

- Vous ne suivez pas correctement votre alternante (Marine fait des erreurs, il n'y a pas un contrôle suffisant de son travail). Vous reconnaissez qu'il s'agit d'une erreur de recrutement.

- Les processus ne sont pas maîtrisés notamment la gestion du bilan pédagogique, compte de résultat d'un OF (3 chiffres différents communiqués en 3 jours), dans un poste où cette partie s'est renforcée du fait du changement de société de portage.

- Vous avez un réel manque de communication avec l'équipe alors que vos bureaux se côtoient (problème de passage de consignes, transmission orale, ').

Ces erreurs et manquements, votre incapacité à lancer des projets, les organiser et les animer, nous ont conduit à vous convoquer à cet entretien.

(...)'.

[G] [X] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en que les griefs sont infondés.

La société Saint-Gobain Services Rh fait valoir que le licenciement est fondé sur l'insuffisance professionnelle avérée de la salariée.

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

L'insuffisance professionnelle qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

La lettre de licenciement sus-reproduite est motivée par l'insuffisance professionnelle de la salariée.

Il ressort de la lettre de motivation de la salariée au poste de responsable de la formation adjoint au siège de Saint-Gobain Glass France datée du 4 avril 2011 et de son curriculum vitae que celle-ci a mis en exergue son expérience d'une vingtaine d'années dans le domaine des ressources humaines acquise principalement dans le secteur de la distribution spécialisée en tant que généraliste Rh et au sein d'établissements comptant 400 à 500 collaborateurs puis de responsable de la formation avec un périmètre de 6 500 salariés.

Il ressort du compte-rendu d'entretien d'évaluation de la salariée au titre de l'année 2012 que celle-ci a d'abord occupé le poste de responsable de formation adjointe pendant six mois et a été formée au poste de responsable par le salarié qui occupait alors ce poste.

Il ressort en outre des comptes-rendus d'entretien d'évaluation de la salariée au titre des années 2013, 2014 et 2015 et du document intitulé 'passeport formation' que celle-ci a bénéficié d'actions de formation régulières dans son domaine de compétence professionnelle, notamment en management, langue anglaise, ressources humaines, systèmes d'information, en 2011, 2012, 2014 et 2015.

Si la salariée a perçu des bonus entre son embauche et son licenciement, celle-ci ne conteste cependant pas n'avoir jamais perçu l'intégralité de la part de 10 % de la rémunération brute annuelle de base en cas d'atteinte de ses objectifs individuels, ce qui résulte tant des explications fournies par la société que des comptes-rendus d'entretien d'évaluation au titre des années 2012, 2013, 2014 et 2015 précisant les objectifs et les résultats de la salariée.

Le compte-rendu d'entretien d'évaluation de l'année 2014, non contesté par la salariée, indique que malgré une réduction de sa responsabilité, la salariée n'étant plus en charge des plans de formation des sociétés du siège afin de se concentrer sur la gestion de l'organisme de formation, 'le niveau de tenue du poste et insuffisant' et fait état de la non fiabilité des états financiers remis par la salariée, de son incapacité à aller à l'essentiel et à anticiper les problèmes rencontrés, de sa difficulté à s'extraire de l'administration au détriment du développement et de ses difficultés managériales.

Le compte-rendu d'entretien annuel du 5 février 2016 de l'année 2015, non contesté par la salariée, mentionne une gestion comptable de l'organisme de formation très difficile avec des tensions avec les équipes financières et des chiffres différents chaque semaine, il est acté que la gestion des projets de formation est confiée à une autre collaboratrice afin que la salariée puisse se consacrer totalement à la gestion du quotidien de l'organisme de formation et l'appréciation globale est évaluée en 1, soit insuffisant.

Aux termes d'une attestation établie conformément ax dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, [T] [F], se présentant comme 'Drh Sg Abrasifs France' indique, en sa qualité d'ancienne supérieure hiérarchique de la salariée, avoir été alertée à plusieurs reprises par des membres de son équipe 'qui souffraient de ses lacunes financières et manquement en terme de communication', notamment le 2 octobre 2015 par une jeune collaboratrice, [J] [Y] qui lui a fait part de son manque d'organisation et de gestion, puis le 15 avril 2016. Elle ajoute avoir, dans le cadre de la procédure de licenciement, 'veillé à permettre à C. [Z] de suivre un coaching financé à 100 % par notre société'.

Aux termes d'une attestation établie dans les formes légales, [J] [Y] indique avoir connu et entretenu des relations cordiales avec la salariée durant leur collaboration entre 2012 et 2016 mais avoir exprimé des difficultés 'concernant son attitude de manager et avoir demandé un changement d'organisation auprès de notre hiérarchie suite au manque d'organisation et de rigueur compliquant mon travail quotidien'.

Les difficultés rencontrées par [J] [Y] dans ses relations professionnelles avec la salariée ressortent de la lecture d'un courriel adressé à [T] [F] le 15 avril 2016 ainsi rédigé : 'une semaine difficile pour ma part, mes relations avec [G] ne s'améliorent pas. Je dois lui rappeler tous nos processus. Je suis pourtant transparente sur tous les processus en place, voir procédure Back Office en P.J. et transmission orale'.

En outre les erreurs et retards reprochés à la salariée dans la lettre de licenciement sont illustrés matériellement par la production d'échanges de courriels professionnels de 2014 et 2015 avec notamment la salariée.

Les pièces produites par [G] [X] consistant en des courriels exprimant satisfactions et remerciements émanant de personnes extérieures à l'entreprise, ayant bénéficié de formations à l'époque où elle était responsable du pôle de formation, ainsi que des attestations établies par Mme [B] [O], qui témoigne de ses relations professionnelles avec la salariée en 2018, soit postérieurement au licenciement en 2018, par Mme [P] et par Mme [L], qui ont travaillé avec elle au sein du groupe Saint-Gobain, sans se situer dans une position hiérarchique ou de collaboration de proximité avec elle, ne sont pas incompatibles avec les insuffisances présentées par celle-ci en matière de management et de communication avec sa hiérarchie et ses collaborateurs directs.

Le fait que la salariée a exprimé dans le cadre de l'entretien d'évaluation 2014 un souhait de formation finance et leadership auquel la société n'a pas donné de suite ne suffit pas à remettre en cause les insuffisances professionnelles répétées sus-relevées, eu égard aux fonctions exercées.

Il résulte de tout ce qui précède que le licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse.

La salariée sera déboutée de toutes ses demandes en lien avec le licenciement et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le manquement à l'obligation de formation

[G] [X] forme une demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation.

La société Saint-Gobain Services Rh France s'oppose à cette demande.

Outre qu'il a été retenu que la salariée a régulièrement bénéficié d'actions de formation en lien avec ses domaines d'activité professionnelle tout au long de la relation de travail, celle-ci n'allègue ni ne justifie en tout état de cause d'aucun préjudice que lui aurait causé le manquement à l'obligation de formation allégué.

Il convient de la débouter de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la durée du travail

Sur la prescription d'une partie des demandes

La société Saint-Gobain Services Rh France conclut à l'irrecevabilité des demandes de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires pour la période antérieure au 22 septembre 2014 au motif de la prescription triennale applicable.

[G] [X] fait valoir que ses demandes de rappel de salaire sur la période comprise entre le 24 juin 2013 et le 24 juin 2016 ne sont pas prescrites compte tenu de la rupture du contrat de travail intervenue le 24 juin 2016.

L'article L. 3245-1 du code du travail dispose que : 'L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer./La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat'.

Il s'ensuit qu'alors que le contrat de travail a été rompu le 24 juin 2016 et que la salariée a saisi le conseil de prud'hommes le 22 septembre 2017, les demandes de rappel d'heures supplémentaires, de contrepartie obligatoire en repos et de congés payés afférents pour la période comprise entre le 24 juin 2013 et le 24 juin 2016 ne sont pas prescrites.

Il convient de rejeter la fin de non-recevoir au titre de la prescription.

Sur la recevabilité des demandes portant sur la période antérieure au 31 décembre 2015 dirigées contre la société Saint-Gobain Services Rh

La société Saint-Gobain Services Rh France conclut à l'irrecevabilité des demandes portant sur la période antérieure au 31 décembre 2015 au motif d'une part, qu'elle n'était pas l'employeur de la salariée entre le 1er juillet 2011 et le 31 octobre 2014 et qu'elle n'a pas repris son contrat de travail sur le fondement de l'article L. 1224-1 du code du travail et d'autre part, qu'elle n'était pas son employeur entre le 1er novembre 2014 et le 31 décembre 2015.

[G] [X] ne réplique pas à cette fin de non-recevoir.

Alors que la société Saint-Gobain Services Rh Services indique qu'elle n'a pas repris le contrat de travail de la salariée, embauchée par contrat de travail à compter du 1er juillet 2011 par la société Saint-Gobain Glass France, sur le fondement de l'article L 1224-1 du code du travail, que celle-ci a été mutée à compter du 1er novembre 2014 au sein de la société Saint-Gobain Glass Solutions France et que la société Saint-Gobain Services Rh Services a embauché la salariée par contrat de travail à compter du 1er janvier 2016, et en l'absence de toute autre indication donnée quant au sort des obligations résultant du contrat de travail de la salariée à l'occasion des changements d'employeur, la cour constate que s'agissant de la période comprise entre le 1er juillet 2011 et le 31 décembre 2015, il ne peut être retenu que la société Saint-Gobain Services Rh France était l'employeur de la salariée.

Sans les déclarer irrecevables, il convient de débouter la salariée de ses demandes dirigées à l'encontre de ladite société pour la période courant jusqu'au 31 décembre 2015.

Sur l'inopposabilité de la convention de forfait en jours

La salariée fait valoir que sa clause de forfait en jours lui est inopposable au motif qu'embauchée en qualité d'adjointe de formation, elle ne disposait pas du degré d'autonomie de son emploi nécessaire pour se voir appliquer une telle clause, que par ailleurs la société Saint-Gobain Glass France n'a établi aucun document de contrôle du nombre de journées ou demi-journées travaillées, que de plus, l'accord collectif (sans autre précision) ne détermine pas le nombre de jours travaillés pour les salariés au forfait en jours, qu'en outre la convention collective de la miroiterie et autres ne prévoit pas les modalités de mise en place des conventions de forfait en jours et qu'enfin la convention collective Syntec ne prévoyait pas des garanties suffisantes au profit d'un salarié soumis à un forfait en jours.

La société Saint-Gobain Services Rh France réplique que la convention de forfait en jours est opposable à la salariée et que celle-ci ne peut donc prétendre qu'elle était soumise à la législation relative à la durée hebdomadaire de travail et réclamer des heures supplémentaires.

La salariée ayant été déboutée de ses demandes formées à l'encontre de la société Saint-Gobain Services Rh France au titre de la durée du travail pour la période courant jusqu'au 31 décembre 2015, il convient d'examiner les demandes afférentes à la période courant à compter du 1er janvier 2016, date de son embauche par la société Saint-Gobain Services Rh France.

Le contrat de travail signé par la salariée le 19 novembre 2015 avec ladite société concerne à compter du 1er janvier 2016 un poste de responsable de l'organisme de formation du pôle matériaux innovants, statut cadre, position 2.3, coefficient 150 et prévoit 217 jours travaillés par an, en référence aux dispositions de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseil, dite Syntec, pour laquelle un avenant du 1er avril 2014 ayant fait l'objet d'un arrêté d'extension a modifié les dispositions relatives au forfait annuel en jours. Ces nouvelles dispositions assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires pour les salariés soumis à une convention de forfait en jours.

Il s'ensuit que le moyen tiré de l'inopposabilité de la convention de forfait en jours n'est pas fondé.

La salariée sera par conséquent déboutée de ses demandes d'heures supplémentaires, de congés payés incidents, de contreparties obligatoires en repos ainsi que d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur les dépens

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens de première instance.

Au regard de la solution du litige, la salariée sera condamnée aux dépens exposés en cause d'appel.

Sur les frais irrépétibles

[G] [X] qui succombe en ses prétentions d'appel sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

REJETTE les fins de non-recevoir au titre de la prescription des demandes de rappel d'heures supplémentaires, de contrepartie obligatoire en repos et de congés payés afférents pour la période antérieure au 22 septembre 2014, et au titre des demandes en paiement d'heures supplémentaires, de congés payés y afférents, de dommages-intérêts pour privation du bénéfice des contreparties obligatoires en repos et pour travail dissimulé pour la période courant jusqu'au 31 décembre 2015,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DEBOUTE [G] [X] de ses autres demandes,

CONDAMNE [G] [X] aux dépens d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 19/02125
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;19.02125 ?
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