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12/05/2022 | FRANCE | N°19/02895

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 12 mai 2022, 19/02895


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 12 MAI 2022



N° RG 19/02895 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TKQJ



AFFAIRE :



SASU QUALICONSULT





C/

[P], [V] [G]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 12 Juin 2019 par le Conseil de Prud'hommes de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 18/00402



Copies exécu

toires et certifiées conformes délivrées à :



Me Martine DUPUIS



Me Virginie RIBEIRO







le :13 Mai 2022





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arr...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 MAI 2022

N° RG 19/02895 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TKQJ

AFFAIRE :

SASU QUALICONSULT

C/

[P], [V] [G]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 12 Juin 2019 par le Conseil de Prud'hommes de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 18/00402

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Martine DUPUIS

Me Virginie RIBEIRO

le :13 Mai 2022

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX ,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant,fixé au 17 Mars 2022,puis prorogé au 12 Mai 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

SASU QUALICONSULT

N° SIRET : 401 449 855

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par : Me Sarah USUNIER de la SELARL RACINE, Plaidant, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : L0301, substituée par Me GALVAN Amanda,avocate au barreau de Paris; Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625.

APPELANTE

****************

Monsieur [P], [V] [G]

né le 21 Mars 1969 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par : Me Virginie RIBEIRO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1066,substituée par Me MARIUS Alexandre,avocat au barreau de Paris.

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Janvier 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle VENDRYES, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SAS Qualiconsult a pour activité l'accompagnement d'entreprises dans toutes les étapes de la construction et de l'exploitation des bâtiments, des installations techniques et des infrastructures. Elle emploie plus de dix salariés.

Par contrat de travail à durée indéterminée du 24 janvier 2006, M. [P] [G], né le 21 mars 1969, a été engagé par la société Qualiconsult, à compter du 20 février 2006, en qualité de spécialiste de sécurité incendie, statut cadre, position 2.2.1, coefficient 130 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 (Syntec).

Il percevait en dernier lieu un salaire brut mensuel de base de 3 225 euros, payé sur treize mois.

En novembre 2015, M. [G] a été élu en tant que délégué du personnel titulaire et représentant salarié au comité d'entreprise.

Arguant de la dégradation de ses conditions de travail, il a demandé en juillet 2017 la rupture conventionnelle de son contrat de travail, ce que la société Qualiconsult a refusé. Il a réitéré sa demande le 1er décembre 2017 puis le 5 janvier 2018, la société maintenant son refus.

Par courrier du 21 décembre 2017, M. [G] s'est vu notifier un avertissement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 6 février 2018, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Par requête reçue au greffe le 28 juin 2018, M. [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles aux fins de voir juger que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement nul.

Par jugement rendu le 12 juin 2019, le conseil de prud'hommes a :

- dit que l'affaire est recevable,

- fixé le salaire mensuel brut de M. [G] à 3 524,80 euros,

- dit et jugé que la prise d'acte de rupture du contrat de travail de M. [G] est aux torts exclusifs de la SASU Qualiconsult et en produit les effets d'un licenciement nul,

- condamné en conséquence la SASU Qualiconsult à verser à M. [G] :

' la somme de 35 248 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

' la somme de 14 099,20 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' la somme de 10 547,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' la somme de 1 054,74 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

' la somme de 94 414,28 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

' la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné, sans astreinte, à la SASU Qualiconsult de remettre à M. [G] les documents rectifiés suivants :

' bulletin de paie rectifié pour février 2018 avec les éléments de salaires issus de ce jugement,

' certificat de travail,

' reçu de solde de tout compte,

' attestation Pôle emploi,

- ordonné l'exécution provisoire de l'ensemble du jugement, sans constitution de garantie, en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,

- ordonné, en application de l'article 1153-1 du code civil, pour les sommes dues par la SASU Qualiconsult à M. [G], la production et la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la date de :

' réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement pour les créances salariales,

' mise à disposition du jugement pour les indemnisations à titre de dommages et intérêts,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes et la SASU Qualiconsult de sa demande 'reconventionnelle' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SASU Qualiconsult aux entiers dépens.

La société Qualiconsult a interjeté appel de la décision par déclaration du 12 juillet 2019.

Par conclusions adressées par voie électronique le 18 mars 2021, elle demande à la cour de :

- la déclarer recevable en son appel,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [G] du surplus de ses demandes (rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, indemnité de repos compensateur, dommages et intérêts pour violation des obligations de loyauté et de sécurité, indemnité pour travail dissimulé, dommages et intérêts pour remise de bulletins de paie et de documents de fin de contrats erronés),

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* dit et jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [G] est aux torts exclusifs de la société Qualiconsult et produit les effets d'un licenciement nul,

* condamné la société Qualiconsult à verser à M. [G] les sommes suivantes :

' 35 248 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

' 14 099,20 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 10 547,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 1 054,74 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

' 94 414,28 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

' 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* ordonné, sans astreinte, à la société Qualiconsult de remettre à M. [G] les documents rectifiés suivants :

' bulletin de paie rectifié pour février 2018 avec les éléments de salaires issus du jugement,

' certificat de travail,

' reçu de solde de tout compte,

' attestation Pôle emploi,

* ordonné, en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil, pour les sommes dues par la société Qualiconsult à M. [G], la production et la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la date de :

' réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement pour les créances salariales,

' mise à disposition du jugement pour les indemnisations à titre de dommages et intérêts,

* débouté la société Qualiconsult du surplus de ses demandes et de sa demande 'reconventionnelle' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Qualiconsult aux entiers dépens,

en conséquence, statuant à nouveau,

- dire et juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission,

- débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [G] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [G] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions adressées par voie électronique le 17 juin 2021, M. [G] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* dit que l'affaire était recevable,

* fixé le salaire moyen brut mensuel à 3 524,80 euros,

* dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [G] est aux torts exclusifs de la société Qualiconsult et produit les effets d'un licenciement nul,

* condamné en conséquence la société Qualiconsult à verser à M. [G] :

' 35 248 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

' 14 099,20 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 10 547,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 1 054,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

' 94 414,28 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

' 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, 'sauf en ce qui concerne le montant alloué sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile',

* ordonné la remise d'un bulletin de paie rectifié pour février 2018 avec les éléments issus du jugement, le certificat de travail, le reçu pour solde de tout compte et l'attestation Pôle emploi sauf en ce qui concerne la période sur laquelle les bulletins de paie sont à rectifier et en ce qu'il n'a pas ordonné d'astreinte,

* ordonné la production et la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement pour les créances salariales, et mise à disposition du jugement pour les indemnisations à titre de dommages et intérêts,

* débouté la société Qualiconsult du surplus de ses demandes et de sa demande 'reconventionnelle', 

* ordonné l'exécution provisoire du jugement,

* condamné la société Qualiconsult aux entiers dépens,

- infirmer ledit jugement en ce qu'il a :

* débouté M. [G] des demandes suivantes : condamner la société Qualiconsult à lui verser la somme de 27 728,80 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non payées sur la période de novembre 2015 à décembre 2017 et la somme de 2 772,88 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents ; condamner la société Qualiconsult à lui verser la somme de 10 604,48 euros à titre d'indemnité de repos compensateur et la somme de 1 060,44 euros à titre d'indemnité compensatrice des congés payés afférents pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires ; annuler l'avertissement du 21 décembre 2017 ; dire et juger que la société Qualiconsult a manqué à ses obligations de loyauté et de sécurité envers M. [G] ; condamner en conséquence la société Qualiconsult à lui verser la somme de 35 248 euros de dommages et intérêts pour violation des obligations de loyauté et de sécurité ; dire et juger que M. [G] a fait l'objet de travail dissimulé ; condamner en conséquence la société Qualiconsult à lui verser la somme de 21 149 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ; en ce qu'il a alloué à M. [G] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au lieu de la somme de 3 000 euros qui était demandée ; en ce qu'il a ordonné la délivrance d'un bulletin de paie sur la période de février 2018 et non la délivrance de bulletins de paie sur la période de novembre 2015 à février 2018, en ce qu'il n'a pas ordonné d'astreinte sur la délivrance du bulletin de paie de février 2018, du certificat de travail, du reçu pour solde de tout compte et de l'attestation Pôle emploi et en ce qu'il a débouté M. [G] de sa demande visant à faire condamner la société Qualiconsult à lui verser la somme de 3 525 euros à titre de dommages et intérêts, remise de bulletins de paie et documents de fin de contrat erronés,

en conséquence, statuant à nouveau,

- dire et juger que la prise d'acte du contrat de travail de M. [G] aux torts exclusifs de son employeur produit les effets d'un licenciement nul,

- condamner en conséquence la société Qualiconsult à verser à M. [G] les sommes suivantes :

' 35 248 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul,

' 14 099,20 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 10 547,40 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

' 1 054,74 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

' 94 414,28 euros au titre de la violation du statut protecteur,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [G] la somme de 19 799,79 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non payées sur la période de novembre 2015 à décembre 2017 et la somme de 1 979,79 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [G] la somme de 10 604,48 euros à titre d'indemnité de repos compensateur et la somme de 1 060,44 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents pour dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires,

- annuler l'avertissement du 21 décembre 2017,

- dire et juger que la société Qualiconsult a manqué à ses obligations de loyauté et de sécurité envers M. [G],

- condamner en conséquence la société Qualiconsult à lui verser la somme de 35 248 euros de dommages et intérêts pour violation des obligations de loyauté et de sécurité,

- dire et juger que M. [G] a fait l'objet de travail dissimulé,

- condamner en conséquence la société Qualiconsult à lui verser la somme de 21 149 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- ordonner la remise à M. [G] de ses bulletins de paie sur la période de novembre 2015 à février 2018, son reçu pour solde de tout compte et l'attestation destinée à Pôle emploi rectifiés sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [G] la somme de 3 525 euros à titre de dommages et intérêts, remise de bulletins de paie et documents de fin de contrat erronés,

- dire et juger que les intérêts au taux légal courent à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement pour les créances salariales, et à compter de la décision pour les dommages et intérêts,

- débouter la société Qualiconsult de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [G] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant le conseil de prud'hommes,

y ajoutant,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [G] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour d'appel,

- condamner la société Qualiconsult aux entiers dépens.

Par ordonnance rendue le 5 janvier 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 28 janvier 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

Sur la durée du travail

M. [G] soutient que durant l'exécution de son contrat de travail, il s'est vu appliquer le forfait 'réalisation de missions' prévu par l'article 3 de l'accord du 22 juin 1999 annexé à la convention collective, sans qu'une convention de forfait ait été valablement conclue. Il en déduit que la convention de forfait 'réalisation de missions' est nulle et qu'il doit se voir appliquer le droit commun de la durée du travail.

Il revendique le paiement de 678,16 heures supplémentaires accomplies de novembre 2015 à décembre 2017, soit la somme de 19 799,79 euros, outre les congés payés afférents, les sommes dues au titre du dépassement du contingent annuel des heures supplémentaires ainsi qu'une indemnité pour travail dissimulé.

La société Qualiconsult réplique que le salarié ne s'est pas vu appliquer une convention de forfait annuel en jours et qu'il a, dès son embauche, été soumis à l'organisation de la durée du travail au sein de l'entreprise telle que régie par l'accord collectif relatif à la réduction du temps de travail conclu le 17 janvier 2002 et visant notamment une durée moyenne de travail appréciée sur l'année de 35 heures.

Elle s'oppose à la demande en paiement d'heures supplémentaires.

Il sera constaté que l'article 6 (Rémunération) du contrat de travail conclu le 24 janvier 2006 est ainsi rédigé :

« M. [P] [G] disposant dans l'organisation de ses missions de la plus grande liberté et passant à l'extérieur de l'entreprise une part significative de son temps, la rémunération contractuelle rentre strictement dans le cadre de l'accord de branche Syntec du 22 juin 1999, étendu par arrêté du 10 novembre 2000 - article 3. En contrepartie, il est versé à M. [P] [G] la rémunération forfaitaire suivante (...) ».

L'article 3 de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, annexé à la convention collective Syntec, vise le forfait 'réalisation de missions' tandis que l'article 2 de cet accord s'applique aux salariés concernés par les 'modalités standard', c'est-à-dire la durée hebdomadaire de travail de 35 heures.

Outre cependant que les conventions individuelles de forfait doivent être passées par écrit et que ne constitue pas l'écrit requis le seul renvoi général fait dans le contrat de travail à l'accord conventionnel relatif à l'aménagement du temps de travail, ce qui doit conduire à retenir la nullité de la clause contractuelle relative au forfait jours, l'employeur indique lui-même que le salarié ne s'est pas vu appliquer de convention de forfait en jours, ce que confirment les bulletins de paie qui font tous référence à une durée du travail mensuelle de 151,67 heures, soit 35 heures hebdomadaires, et qui mentionnent chaque mois les jours de RTT (JRTT) acquis et pris par le salarié.

Il convient donc d'examiner la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

Il sera rappelé que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences légales ainsi rappelées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire, M. [G] produit un tableau de décompte des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées entre novembre 2015 et décembre 2017, indiquant pour chaque jour l'heure de début de matinée et l'heure de fin de matinée, l'heure de début d'après-midi et l'heure de fin d'après-midi, le total des heures travaillées chaque jour et chaque semaine, le nombre d'heures supplémentaires réalisées chaque semaine ainsi que les majorations applicables.

Le salarié fournit ainsi des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre.

L'employeur fait observer en réplique que le décompte établi par le salarié, aux seules fins du présent contentieux, n'est étayé par aucun document (agenda ou calendrier), que M. [G] ne produit notamment aucune demande expresse de ses supérieurs hiérarchiques de réaliser des heures supplémentaires conformément à l'accord d'entreprise, qu'il tente artificiellement de majorer le volume de ses heures de travail en invoquant des temps de trajet excédant le trajet habituel domicile-travail sans produire aucun élément justificatif probant.

Il vise l'accord collectif relatif à la réduction du temps de travail conclu le 17 janvier 2002 entre la société Qualiconsult et les organisations syndicales, lequel prévoit pour les salariés non sédentaires une organisation de la durée du travail selon les modalités suivantes :

- une durée moyenne de travail appréciée sur l'année de 35 heures par semaine,

- un horaire hebdomadaire de travail effectif de 36,86 heures, les salariés ayant la faculté de réaliser cet horaire à leur convenance dans le cadre d'une plage horaire de 8h à 19h,

- le bénéfice de 10 JRTT afin de ramener la durée du travail hebdomadaire moyenne à 35 heures,

- un décompte annuel de la durée du travail et des heures supplémentaires : seules les heures réalisées au-delà de 1 599 heures constituent des heures supplémentaires,

- la possibilité de réaliser des heures supplémentaires uniquement « à la demande préalable de l'employeur ».

Au regard de ces constatations, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à la somme de 7 634,23 euros les heures supplémentaires devant être rémunérées.

La société Qualiconsult sera en conséquence condamnée, par infirmation du jugement entrepris, au paiement de la somme ainsi déterminée, outre les congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes, soit le 9 juillet 2018, la capitalisation des intérêts étant en outre ordonnée en application de l'article 1343-2 du code civil.

Compte tenu du nombre d'heures supplémentaires retenues sur la période courant de novembre 2015 à décembre 2017, inférieur au contingent annuel de 220 heures, la demande d'indemnité au titre du repos compensateur sera rejetée, par confirmation du jugement entrepris.

Il n'est en outre pas établi que l'employeur a, de manière intentionnelle et dans le dessein de se soustraire à ses obligations légales, porté sur les bulletins de paie de M. [G] un nombre d'heures de travail inférieur à celui effectivement réalisé. Par suite, la demande d'indemnité pour travail dissimulé doit être rejetée, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la prise d'acte

M. [G] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 6 février 2018 ainsi rédigée :

« Objet : Notification de la prise d'acte de la rupture de mon contrat de travail

Fonction : Spécialiste Sécurité Incendie - Mandats d'IRP

Monsieur [B] (directeur de l'agence)

Les faits suivants (notamment) :

- Harcèlement moral (cf. courrier avertissement).

- Calomnies (cf. courrier avertissement).

- Discrimination (transfert d'entité au sein du groupe Qualiconsult).

- Entraves aux mandats d'IRP (seront développées devant le juge des prud'hommes).

- Non-respect de la GPEC signée (IRP).

- Non-paiement des heures supplémentaires par rapport à la charge de travail réelle en fonction du volume du chiffre d'affaires qui m'a été attribué pendant 12 ans cela représente un dépassement de 10 heures hebdomadaires (en moyenne).

- Non-augmentation de salaire basée sur plusieurs objectifs réels notamment (chiffre agence, chiffre d'affaires individuel et compte client agence) dont je suis titulaire.

- Critères d'attribution de bonus sous-évalués par rapport aux objectifs atteints et dépassés qui représentent une surcharge de travail sans équivalent de salaire et traitements.

- Absence d'évolution de positions, coefficients, notamment pour les fonctions de spécialiste sécurité incendie, chargé d'affaire, référent technique au sein du Cofrac. Non-affectation du salaire minimum correspondant au cumul de ces fonctions. Mon coefficient n'a jamais évolué malgré ce cumul de fonction. Qualiconsult est entièrement responsable de l'ensemble des faits énoncés ci-dessus qui m'ont causé un préjudice et un dommage certain pour non-exécution loyale et de bonne foi du contrat de travail.

Pour ces raisons je suis contraint de vous notifier la présente prise d'acte de la rupture de mon contrat de travail.

Cette rupture est entièrement imputable à Qualiconsult puisque les faits précités constituent un grave manquement aux obligations (contractuelles /conventionnelles) de l'entreprise considérant le contenu de mon contrat de travail et des mandats de délégué du personnel et membre élu du comité d'entreprise.

Cette rupture prendra effet à la date de première présentation du présent recommandé avec AR.

L'effet de la rupture sera immédiat et sera suivi d'une assignation de Qualiconsult devant le conseil de prud'hommes afin d'obtenir le respect de mes droits et la réparation financière du préjudice subi. (...) »

Il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquements suffisamment graves de l'employeur qui empêchent la poursuite du contrat. Cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Lorsqu'elle est justifiée, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par un salarié protégé, du fait de l'inexécution par l'employeur de ses obligations contractuelles, produit les effets d'un licenciement nul.

L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige, en sorte que d'autres manquements peuvent être invoqués, ne figurant pas dans cet écrit.

En l'espèce, M. [G] s'estime bien fondé à solliciter que sa prise d'acte produise les effets d'un licenciement nul eu égard à sa qualité de salarié protégé.

Il conviendra dans un premier temps d'examiner les manquements invoqués.

Dans ses conclusions, M. [G] développe une argumentation relativement aux manquements suivants :

- une classification conventionnelle ne correspondant pas à ses fonctions,

- une entrave de la société Qualiconsult à l'exercice de ses fonctions représentatives,

- une surcharge de travail et un cumul de différentes fonctions,

- l'application d'une convention de forfait irrégulière,

- la notification d'un avertissement injustifié,

- l'absence de formation et d'adaptation à son poste,

- la diminution de son bonus,

- l'absence d'indemnisation de ses temps de déplacements,

- une dégradation de ses conditions de travail.

La société Qualiconsult soutient que la soudaine prise d'acte du salarié, qui s'explique uniquement par son mécontentement face au refus pourtant légitime de l'employeur d'accepter sa demande de rupture conventionnelle, est artificielle et vise uniquement à faire supporter à la société le coût financier de la décision du salarié de démissionner afin de « se consacrer à de nouveaux projets professionnels et [familiaux] » ainsi qu'il s'en est expliqué dans un courrier du 1er décembre 2017 par lequel il demandait la rupture conventionnelle de son contrat de travail.

S'agissant de l'application d'une convention de forfait irrégulière, si la cour a précédemment retenu la nullité de la clause contractuelle relative au forfait jours, elle a également constaté que le salarié ne s'est dans les faits pas vu appliquer de convention de forfait en jours et a retenu le principe d'heures supplémentaires non rémunérées.

- sur la classification conventionnelle

M. [G] considère qu'au regard de ses fonctions et de son expérience professionnelle, il aurait dû bénéficier, dès son embauche, d'une classification au moins égale à une position 3.1, coefficient 170. Il fait valoir qu'il était sous la responsabilité de sa chef de service, elle-même placée sous la responsabilité du directeur d'agence ; qu'à la suite de sa prise d'acte, il a été embauché au sein d'une autre société sur un poste de chargé d'affaires, soit sur des fonctions d'un même niveau de responsabilité que celles qu'il exerçait au sein de la société Qualiconsult, avec une classification 3.1, coefficient 170.

La société Qualiconsult réplique que le salarié a bénéficié d'une classification conforme à ses fonctions et son expérience professionnelle, que le conseil de prud'hommes a jugé à tort qu'il remplissait les conditions pour accéder à la position 2.3, coefficient 150 alors que cette demande n'avait pas été formulée par le salarié, qu'il ne remplissait pas les conditions pour prétendre à la position 3.1, coefficient 170, occupée par les salariés ayant le plus haut niveau de responsabilité au sein de la société, qu'il n'assumait notamment aucune responsabilité managériale, qu'en tout état de cause, une erreur de classification ne pouvait justifier la prise d'acte du contrat de travail.

Il est établi que M. [G] a été engagé par la société Qualiconsult en qualité de spécialiste de sécurité incendie, statut cadre, position 2.2.1, coefficient 130 de la convention collective Syntec.

Selon l'article 3 de son contrat de travail, ses fonctions étaient les suivantes :

« - Réalisation de missions de sécurité incendie, contrôle technique, diagnostics, missions ponctuelles et périodiques relatives aux opérations entrant dans sa spécialité, en prenant les contacts nécessaires auprès des architectes, maîtres d''uvre, clients, ainsi qu'avec l'ensemble des entreprises intervenant sur ses opérations ;

- Réalisation en tant que de besoin des travaux administratifs et commerciaux connexes »,

le contrat précisant en outre que « La direction se réserve la possibilité de modifier le détail de ses attributions dans une mesure compatible avec sa qualification pour tenir compte des contraintes de son organisation ».

Aux termes de l'annexe 2 de la convention collective, la classification 2.2, coefficient 130, est ainsi décrite :

« Remplissent les conditions de la position 2.1 et, en outre, partant d'instructions précises de leur supérieur, doivent prendre des initiatives et assumer des responsabilités que nécessite la réalisation de ces instructions. Etudient des projets courants et peuvent participer à leur exécution. Ingénieurs d'études ou de recherches, mais sans fonction de commandement »,

sachant que la position 2.1 vise des « Ingénieurs ou cadres ayant au moins deux ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d'études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu'eux dans les corps d'état étudiés par le bureau d'études ».

La classification 3.1, coefficient 170, revendiquée par le salarié, vise les « Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d'un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en 'uvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef ».

M. [G] n'explicite cependant pas en quoi il est légitime à revendiquer la position 3.1. Il ne démontre notamment pas qu'il disposait de « connaissances pratiques étendues », étant observé que M. [X] [B], son supérieur hiérarchique, a accédé à la position 3.1, coefficient 170, le 1er juillet 2018, lorsqu'il a été promu au poste de directeur d'agence, ainsi qu'en atteste l'avenant à son contrat de travail versé aux débats par la société Qualiconsult, qu'en outre M. [G] a bénéficié d'un salaire supérieur au minimum conventionnel du coefficient 170, comme en justifient ses bulletins de paie.

Le manquement n'est pas établi.

- sur l'entrave à l'exercice des fonctions représentatives

M. [G] prétend qu'il a fait l'objet d'une entrave à l'exercice de ses fonctions de représentant du personnel en ce que la société lui a proposé de renoncer à ses mandats en contrepartie d'une promotion au poste de référent technique régional, qu'en outre il n'a pas pu utiliser l'intégralité des heures de délégation qui lui étaient attribuées au titre de ses fonctions représentatives.

Il produit un courriel qu'il a adressé le 11 juillet 2016 à M. [J] [E], directeur régional adjoint Grand Paris Métropole, par lequel il refuse sa nomination au poste de référent technique régional. La cour constate néanmoins que le salarié ne fait nullement référence dans ce courriel à de quelconques pressions de la part de sa hiérarchie, ce que l'attestation de M. [W] [D], ancien salarié de la société Qualiconsult qui n'a assisté à aucune des discussions relatives à cette éventuelle promotion, ne permet pas de remettre en cause.

S'agissant des heures de délégation, la production de fiches individuelles faisant le compte des heures de délégation effectivement prises est insuffisante à démontrer que l'employeur a empêché le salarié d'utiliser l'intégralité de ses heures de délégation.

Au surplus, et comme le fait justement observer la société Qualiconsult, M. [G] n'a manifestement jamais jugé utile d'informer l'inspection du travail de l'entrave alléguée, et ce alors que suite au refus de l'employeur d'accéder à sa demande de rupture conventionnelle, il a sollicité cette administration en janvier 2018, soit peu avant sa prise d'acte.

Le manquement n'est pas établi.

- sur la surcharge de travail et le cumul de différentes fonctions

M. [G] prétend avoir subi une surcharge de travail liée au fait qu'il assumait, outre ses fonctions de spécialiste sécurité incendie, la fonction de chargé d'affaires, celle de superviseur auprès du Comité Français d'Accréditation (COFRAC) et celle de référent technique régional.

Le salarié n'apporte cependant pas d'élément utile sur les différentes fonctions qu'il prétend avoir occupées. La cour observe notamment que le simple fait d'être destinataire des comptes-rendus de réunions des référents techniques sécurité incendie ne démontre pas que M. [G] assumait les fonctions de référent technique régional, ces comptes-rendus étant au demeurant adressés à d'autres spécialistes sécurité incendie intéressés comme lui aux informations contenues dans ces documents. Les attestations produites par le salarié sont par ailleurs inopérantes à établir la surcharge de travail alléguée dès lors que leurs auteurs se contentent de rapporter les propos que leur aurait tenus M. [G].

Le seul fait que la cour ait retenu le principe d'heures supplémentaires, dans des proportions au demeurant limitées, ne saurait suffire à établir le manquement allégué.

- sur la notification d'un avertissement injustifié

M. [G] soutient qu'il a fait l'objet d'un avertissement injustifié le 21 décembre 2017, que les griefs énoncés dans la lettre d'avertissement, à savoir un prétendu retard dans le traitement d'un chantier et une conduite violente et déplacée, sont dépourvus de fondement et fallacieux et qu'il les a contestés dans un courrier du 5 janvier 2018.

Il sera rappelé qu'aux termes de l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autres que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu'en application de l'article L. 1333-1 du même code, le salarié peut demander au juge l'annulation d'une sanction disciplinaire prise à son encontre par son employeur ; que le juge forme sa conviction au vu des éléments apportés par les deux parties ; que toutefois, l'employeur doit fournir les éléments retenus pour prendre cette sanction qui sera annulée si elle est irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée.

En l'espèce, il ressort de la lettre d'avertissement du 21 décembre 2017 que lors d'un point technique le 13 décembre 2017, M. [X] [B], directeur de l'agence d'[Localité 6], a demandé au salarié des précisions sur le respect des plannings afin d'anticiper d'éventuelles réclamations de clients, que celui-ci s'est soudainement et violemment emporté, qu'il a pris à partie son supérieur hiérarchique, devant ses collègues de travail, en hurlant dans l'open space, en frappant dans un caisson et en proférant des menaces.

Le comportement agressif du salarié est confirmé par Mme [C] [F] qui témoigne en ces termes : « Le 13/12/2017 en début de soirée aux environs de 18h30, j'ai assisté à une altercation opposant M. [P] [G] préventionniste sécurité incendie au sein de l'agence de [Localité 5] à M. [X] [B], directeur de cette même agence.

L'altercation a débuté dans le bureau de M. [B], alors que j'étais en train de terminer les bordereaux récapitulatifs d'examen de documents à mon poste de travail, en présence de mon supérieur hiérarchique à son poste.

J'ai été inquiétée par le ton qui est monté très vite. M. [G] exprimait son mécontentement vis-à-vis de la société de manière grossière. Par exemple, vous m'avez pris pour votre pute ou quoi ' Il exprimait le fait d'en avoir marre de la situation dans laquelle il se trouvait au sein de l'entreprise. J'ai vraiment cru que ça se terminerait en violence physique, de ce fait je n'ai pas bougé de mon bureau. J'ai été choquée par cet incident, les propos ainsi que les coups dans les armoires portés par M. [G]. (...) ».

L'avertissement prononcé à l'encontre de M. [G] apparaît ainsi justifié, les premiers juges ayant d'ailleurs relevé qu'à plusieurs reprises dans ses entretiens d'évaluation, le salarié avait été invité à développer son 'self-control' dans le cas de situations conflictuelles.

Il y a donc lieu de débouter M. [G] de sa demande d'annulation de l'avertissement.

- sur l'absence de formation et d'adaptation au poste

M. [G] prétend qu'il n'a pas bénéficié des formations nécessaires au développement de ses compétences en application de l'accord GPEC. Il invoque une formation de coordinateur SSI (Spécialiste Sécurité Incendie) qui lui aurait été refusée.

Outre que cette demande s'inscrivait dans le cadre du DIF et qu'elle a fait l'objet d'un examen par l'employeur, les courriels échangés entre juillet 2013 et février 2014 ne faisant au demeurant état d'aucun refus, la société Qualiconsult justifie que depuis son embauche, le salarié a bénéficié de douze formations, en lien avec ses fonctions.

Le manquement n'est pas caractérisé.

- sur la diminution du bonus

M. [G] fait valoir qu'il a vu son bonus diminuer, et ce sans aucune justification.

La cour constate toutefois que son contrat de travail ne prévoyait pas le versement d'un bonus et que les sommes qui lui ont été versées en 2015, 2016 et 2018 l'ont été à titre de primes exceptionnelles, soit de manière discrétionnaire.

Aucun manquement ne saurait donc être reproché à l'employeur.

- sur l'absence d'indemnisation des temps de déplacements

M. [G] fait ici valoir que ses fonctions nécessitaient qu'il se déplace de manière habituelle, que son temps de déplacement, qui dépassait son temps de trajet domicile-travail, n'a pas été compensé, ni en repos, ni par une contrepartie financière.

Il produit ses notes de frais qui font état des déplacements et des distances parcourues. La cour observe que ces déplacements étaient inhérents à ses fonctions de spécialiste de sécurité incendie, qui impliquaient selon son contrat de travail la « réalisation de missions de sécurité incendie, contrôle technique, diagnostics, missions ponctuelles et périodiques relatives aux opérations entrant dans sa spécialité, en prenant les contacts nécessaires auprès des architectes, maîtres d''uvre, clients, ainsi qu'avec l'ensemble des entreprises intervenant sur ses opérations ».

Il n'est toutefois pas démontré que les temps de trajet dont le salarié fait état ont été effectués en dehors des horaires habituels de travail et donc non rémunérés.

- sur la dégradation des conditions de travail

M. [G] soutient en dernier lieu qu'il a subi une dégradation de ses conditions de travail et que la société Qualiconsult a manqué à ses obligations de sécurité et de loyauté. Il reprend au titre de ce grief les manquements qui viennent d'être écartés par la cour.

Il évoque également l'existence de risques psychosociaux dans l'entreprise, sans établir un quelconque lien avec sa situation personnelle.

Les pièces médicales qu'il verse aux débats soit ne font pas de lien entre son état de santé et ses conditions de travail, soit font abusivement état d'un tel lien en l'absence de toute constatation personnelle du praticien relatives aux conditions de travail du salarié dans l'entreprise.

La dégradation alléguée des conditions de travail n'est pas démontrée.

Ainsi, seul a été retenu le non-paiement par l'employeur des heures supplémentaires effectuées. Ce manquement n'apparait toutefois pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La prise d'acte de son contrat de travail par M. [G] doit donc produire les effets d'une démission, la cour observant au surplus que le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 6 février 2018 et qu'il a retrouvé un emploi dès le 5 mars 2018.

Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé et le salarié sera débouté de l'intégralité de ses demandes indemnitaires, en ce compris la demande de dommages-intérêts formée au titre du non-respect des obligations de sécurité et de loyauté qui n'a pas été caractérisé.

Sur les documents de fin de contrat

Compte tenu du rappel de salaire pour heures supplémentaires, M. [G] apparaît bien fondé à solliciter la remise par la société Qualiconsult d'un bulletin de paie récapitulatif, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt, les circonstances de l'espèce ne nécessitant pas d'assortir cette obligation d'une astreinte.

Le jugement entrepris mérite par ailleurs confirmation en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour remise de bulletins de paie et de documents de fin de contrat erronés, faute de démonstration d'un quelconque préjudice.

Sur les dépens de l'instance et les frais irrépétibles

La société Qualiconsult supportera les dépens en application des dispositions de l'article'696 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamnée à payer à M. [G] une indemnité sur le fondement de l'article'700 du code de procédure civile, que l'équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, qui sont donc confirmés, et 1'000'euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement rendu le 12 juin 2019 par le conseil de prud'hommes de Versailles en ce qu'il a jugé que la prise d'acte de rupture du contrat de travail de M. [P] [G] produit les effets d'un licenciement nul, en ce qu'il a condamné en conséquence la société Qualiconsult à verser à M. [P] [G] des dommages et intérêts pour licenciement nul, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, et une indemnité pour violation du statut protecteur et en ce qu'il a débouté M. [P] [G] de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société Qualiconsult à verser à M. [P] [G] la somme de 7 634,23 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre la somme de 763,42 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 2018 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions fixées à l'article 1343-2 du code civil ;

ORDONNE à la société Qualiconsult de remettre à M. [P] [G] un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes à la décision ;

DIT n'y avoir lieu à astreinte de ce chef ;

DIT que la prise d'acte de rupture du contrat de travail de M. [P] [G] produit les effets d'une démission ;

DÉBOUTE M. [P] [G] de l'intégralité de ses demandes indemnitaires ;

CONDAMNE la société Qualiconsult à verser à M. [P] [G] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la société Qualiconsult de sa demande de ce chef ;

CONDAMNE la société Qualiconsult aux dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour,les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code procédure civile et signé par Madame Isabelle VENDRYES, Président, et par Madame BOUCHET-BERT Elodie,Greffière,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 19/02895
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;19.02895 ?
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