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11/05/2022 | FRANCE | N°20/01730

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 11 mai 2022, 20/01730


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 11 MAI 2022



N° RG 20/01730 - N° Portalis DBV3-V-B7E-T7WL



AFFAIRE :



[O] [P]





C/

Association ESPEREM











Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section : AD

N° RG : 18/01418
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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la AARPI OMNES AVOCATS



la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel d...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 11 MAI 2022

N° RG 20/01730 - N° Portalis DBV3-V-B7E-T7WL

AFFAIRE :

[O] [P]

C/

Association ESPEREM

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section : AD

N° RG : 18/01418

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la AARPI OMNES AVOCATS

la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [O] [P]

né le 8 Avril 1978

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Aurélien WULVERYCK de l'AARPI OMNES AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS,

vestiaire : J091

APPELANT

****************

Association ESPEREM

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

Représentant : Me Frédéric RENAUD de la SELARL RENAUD AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 504

substitué par Me Aurore TALBOT, avocat au barreau de Lyon

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 2 Février 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Mame NDIAYE,

M. [O] [P] a été embauché, à compter du 18 août 2015, selon contrat de travail à durée déterminée puis à durée indéterminée en qualité 'd'éducateur de groupe en internat' par l'association Esperem, assurant notamment la gestion de foyers d'hébergement pour mineurs.

M. [P] a été employé en 'horaires de nuit'.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

Le 22 novembre 2018, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt pour demander la condamnation de l'association Esperem à lui payer divers rappels de salaire et des dommages-intérêts.

Par un jugement du 16 juin 2020, le conseil de prud'hommes (activités diverses) a :

- débouté M. [P] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté l'association Esperem de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que M. [P] et l'association Esperem supporteront chacun leurs dépens.

Le 31 juillet 2020, M. [P] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 30 octobre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [P] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et de :

- condamner l'association Esperem à lui payer les sommes suivantes :

* 14 844,97 euros brut à titre de rappel de salaire pour heures de nuit et pour heures de réunion et 1 484,49 euros brut au titre des congés payés afférents ;

* 2 808,80 euros brut à titre de rappel de salaire pour temps de pause et 280,08 euros brut au titre des congés payés afférents ;

* 6 276,91 euros brut à titre de rappel de salaire pour 'jours fériés et dimanche' et 627,69 euros brut au titre des congés payés afférents ;

* 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'amplitude horaire ;

* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-paiement du salaire ;

* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner à l'association Esperem de lui remettre des bulletins de salaire rectifiés conformes, sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard ;

- condamner l'association Esperem aux dépens.

Aux termes de ses conclusions du 11 janvier 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'association Esperem demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes ;

- débouter M. [P] de ses demandes ;

- condamner M. [P] à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 11 janvier 2022.

SUR CE :

Considérant qu'au préalable, il est rappelé qu'aux termes de l'article 954 du code de procédure civile : 'Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé./Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte / La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion (...)' ;

Sur le rappel de salaire afférents à des heures de nuit et à des temps de réunion :

Considérant que M. [P] soutient que l'association Esperem lui a appliqué un régime d'heures d'équivalence entre minuit et 6h00, payées à hauteur de trois heures, alors qu'il devait intervenir la nuit à de nombreuses reprises et accomplir ainsi des prestations de travail durant toute cette période, ce qui doit aboutir à une rémunération à hauteur de six heures de travail effectif ;

Qu'il soutient également qu'il 'devait participer suite à sa nuit de travail aux réunions de service organisé par l'employeur le matin' et que 'ces heures de travail n'étaient toutefois pas rémunérées' ;

Qu'il réclame en conséquence, sur ces deux fondements, un rappel de salaire global d'un montant de 14 844,97 euros brut pour la période courant de 2015 à 2018, outre les congés payés afférents;

Considérant que l'association Esperem soutient qu'elle a régulièrement appliqué le régime d'équivalence prévu par le code de l'action sociale et des familles et la convention collective, au demeurant de manière plus favorable encore, pour la période comprise entre minuit et 06h00 qui s'analyse en une période de surveillance nocturne en chambre de veille ; qu'elle ajoute que les réunions en cause ne se tenaient que le jeudi matin de 09h00 à 12 h00, que M. [P] n'était tenu d'y assister que les jours où il n'avait pas travaillé dans la nuit précédente et que ces heures de réunion lui ont été payées ; qu'elle conclut donc au débouté de la demande salariale ;

Considérant, sur le rappel de salaire afférent aux heures accomplies entre minuit et 6h00, qu'aux termes de l'article L. 3121-9 du code du travail dans sa version applicable au litige : ' Une durée du travail équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d'inaction soit par décret, pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche, soit par décret en Conseil d'Etat./Ces périodes sont rémunérées conformément aux usages ou aux conventions ou accords collectifs de travail' ;

Qu'aux termes de l'article R. 314-201 du code de l'action sociale et des familles : 'Les dispositions du présent paragraphe sont applicables :

1° Aux établissements gérés par des personnes privées à but non lucratif comportant un hébergement qui sont mentionnés aux 1°, 2°, 4°, 6°, 7° et 8° du I de l'article L. 312-1 ;

2° Aux emplois à temps plein de personnels éducatifs, d'infirmiers ou d'aides-soignants ou de personnels de même niveau de qualification appelés à les remplacer dont les titulaires assurent en chambre de veille au sein de l'établissement la responsabilité d'une surveillance nocturne';

Qu'aux termes de l'article R. 314-202 du même code : 'Pour le calcul de la durée légale du travail dans les établissements et pour les emplois mentionnés à l'article R. 314-201, chacune des périodes de surveillance nocturne en chambre de veille est décomptée comme trois heures de travail effectif pour les neuf premières heures et comme une demi-heure pour chaque heure au-delà de neuf heures' ;

Qu'aux termes de l'article R. 314-203 du même code : 'La période de présence en chambre de veille s'étend du coucher au lever des personnes accueillies tels qu'ils sont fixés par les tableaux de service, sans que sa durée puisse excéder douze heures' ;

Qu'aux termes de l'article 11 de l'annexe III de la convention collective : ' Dans le cas où le personnel éducatif en internat est appelé à assumer en chambre de " veille " la responsabilité de surveillance nocturne, ce service s'étend, du coucher au lever des pensionnaires, sans que sa durée puisse excéder 12 heures.

Ce service fait l'objet d'une compensation dans les conditions suivantes :

- les 9 premières heures sont assimilées à 3 heures de travail éducatif ;

- entre 9 et 12 heures, chaque heure est assimilée à 1/2 heure de travail éducatif' ;

Qu'en l'espèce, il ressort des débats et des pièces versées, et notamment de la fiche de poste d'éducateur spécialisé de nuit et de compte-rendus de réunion entre l'association et le personnel, que la période de minuit à 06h00 en litige couvre une période pendant laquelle les mineurs accueillis dans le foyer sont couchés ; que M. [P], en tant qu'éducateur, assurait donc pendant cette période la responsabilité d'une surveillance nocturne en chambre de veille au sein de l'établissement au sens des dispositions mentionnées ci-dessus ; que l'association intimée est donc fondée à appliquer un régime d'heures d'équivalence pendant cette période et à rémunérer, d'ailleurs de manière plus favorable que la convention collective, les six heures en cause à hauteur de trois heures ;

Que par ailleurs, M. [P] ne démontre pas qu'il accomplissait personnellement des prestations de travail effectives pendant cette période, puisqu'il se réfère seulement dans ses conclusions à un document d'ordre général issu du site Internet de l'association mentionnant qu'un accueil des mineurs dans l'établissement était possible de jour comme de nuit et ne renvoie par ailleurs à aucune autre pièce numérotée ;

Considérant sur le paiement d'heures de réunion, qu'en application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ; qu'après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant ;

Qu'en l'espèce, M. [P] se borne à alléguer que des heures de réunion ne lui ont pas été payées, sans verser le moindre élément sur les heures de travail en cause ; qu'au surplus, l'association Esperem produit les plannings de travail de l'appelant qui démontrent que M. [P] n'assistait à des réunions hebdomadaires que les jours où il n'avait pas travaillé dans la nuit précédente et que ces heures de réunion étaient ainsi incluses dans son temps de travail et lui ont été payées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. [P] n'est pas fondé à réclamer un rappel de salaire à ces titres ni les congés payés afférents ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur les dommages et intérêts pour non-respect de l'amplitude maximale journalière :

Considérant que M. [P] fait valoir qu'il a 'à de nombreuses reprises' 'travaillé au-delà de l'amplitude horaire maximale' de treize heures journalières découlant de l'article L. 3131-1 du code du travail et demande l'allocation d'une somme de 20 000 euros à titre de 'dommages-intérêts en réparation', sans autres précisions ;

Que toutefois l'association intimée verse aux débats notamment les directives pour l'établissement des plannings des salariés travaillant de nuit ainsi que les plannings et les relevés d'heure de travail de l'intéressé qui démontrent le respect de cette amplitude maximale journalière de treize heures ;

Qu'il y a donc lieu de débouter l'appelant de cette demande ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;

Sur 'l'absence de paiement des temps de pause' :

Considérant que M. [P] soutient à ce titre qu'il 'n'a pas bénéficié du temps de pause de 20 minutes prévues par R. 314-203-2 du code de l'action sociale et des familles' et qu'en conséquence il 'est en droit de solliciter le paiement de ce temps de pause de 20 minutes au bout de six heures de travail qui ne lui a pas été octroyé' ;

Mais considérant que M. [P] n'allègue pas qu'il n'a pas été payé pour les 20 minutes de travail en litige ; que M. [P] allègue ainsi implicitement mais nécessairement qu'il a travaillé pendant le temps qui aurait dû être consacré à la pause, sans alléguer par ailleurs que ce temps ne lui a pas été payé ; qu'il ne demande pas de dommages et intérêts pour le non-respect du temps de pause ; que le débouté de cette demande salariale sera confirmé ;

Sur le rappel de 'salaire pour jours fériés et dimanche' :

Considérant que M. [P] développe à ce titre une argumentation confuse en invoquant simultanément l'article 23 de la convention collective relatif à l'octroi de repos compensateur pour les salariés travaillant un dimanche férié alors que leur jour de repos hebdomadaire n'est pas un dimanche et l'article 10 de la convention collective relatif à une majoration de salaire pour le travail les dimanches et jours fériés ; que de la sorte il n'allègue pas de moyens de faits et de droit propres à fonder sa prétention salariale ; que le débouté sera donc confirmé ;

Sur les dommages et intérêts pour non paiement du salaire :

Considérant que M. [P] ne soulève aucun moyen au soutien de cette demande ; que le débouté sera donc confirmé ;

Sur la remise d'un bulletin de salaire rectifié sous astreinte :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le débouté de cette demande ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; que M. [P], qui succombe en première instance et en appel, sera condamné à payer à l'association Esperem une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris, sauf sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne M. [O] [P] à payer à l'association Esperem une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne M. [O] [P] aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01730
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;20.01730 ?
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