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11/05/2022 | FRANCE | N°19/03754

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 11 mai 2022, 19/03754


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 11 MAI 2022



N° RG 19/03754 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TP6Z



AFFAIRE :



[J] [O] [K]





C/

SCP CANET Es qualités de liquidateur judiciaire de la société SDS

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Août 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY
>N° Chambre :

N° Section : Industrie

N° RG : F18/00385



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SAS CABINET JELTY PICHAVANT



Me Claude-Marc BENOIT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPL...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 11 MAI 2022

N° RG 19/03754 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TP6Z

AFFAIRE :

[J] [O] [K]

C/

SCP CANET Es qualités de liquidateur judiciaire de la société SDS

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Août 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Chambre :

N° Section : Industrie

N° RG : F18/00385

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SAS CABINET JELTY PICHAVANT

Me Claude-Marc BENOIT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [J] [O] [K]

né le 01 Juin 1966 à [Localité 7] (PORTUGAL)

de nationalité portugaise

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Agnès JELTY de la SAS CABINET JELTY PICHAVANT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 60

APPELANT

****************

SCP CANET Es qualités de liquidateur judiciaire de la société SDS

[Adresse 1]

[Localité 6]

Non constitué

AGS CGEA IDF EST

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Claude-Marc BENOIT, Déposant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1953

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,

M. [J] [O] [K] a été embauché, à compter du 21 mai 2014, selon contrat à durée déterminée puis contrat à durée indéterminée à temps complet, en qualité de boiseur par la société Full Time Bat, ayant une activité d'entreprise de bâtiment et qui a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 13 février 2015.

À compter du 19 décembre 2014, M. [O] [K] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité de boiseur par la société Full Time, ayant une activité d'entreprise de bâtiment et qui a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 2 juin 2016.

A compter du 1er mars 2016, M. [O] [K] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité de boiseur, avec reprise d'ancienneté au 21 mai 2014, par la société SDS. La convention collective applicable à ce contrat de travail est la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés.

Par jugement du 23 juin 2017, le tribunal de commerce de Pontoise a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société SDS, a fixé la date de cessation des paiements au 23 février 2016 et a désigné la SCP Canet en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre du 7 juillet 2017, le liquidateur judiciaire a notifié à M. [O] [K] son licenciement pour motif économique.

Le contrat de travail a été rompu le 26 juillet 2017 à la suite de l'acceptation par M. [O] [K] d'un contrat de sécurisation professionnelle.

Le 11 juin 2018, M. [O] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency pour demander la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS de créances salariales et de congés payés ainsi que d'une créance d'indemnité de licenciement, à la suite d'un refus de prise en charge de ces sommes par l'AGS.

Par jugement du 27 août 2019, le conseil de prud'hommes (section industrie) a :

- prononcé la nullité du contrat de travail de M. [O] [K] par application des dispositions de l'article L. 632-1 du code de commerce ;

- débouté M. [O] [K] de ses demandes ;

- ordonné à M. [O] [K] de restituer l'original de l'attestation pour pôle emploi, du certificat de travail et des bulletins de salaire édité par la SCP Canet dans le cadre de la procédure collective ;

- mis les dépens à la charge de M. [O] [K].

Le 14 octobre 2019, M. [O] [K] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 29 juillet 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [O] [K] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau, de :

- fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS sa créance aux sommes suivantes :

* 2 373,64 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er au 26 juillet 2017 ;

* 4 394,98 euros à titre de rappel de salaire correspondant aux congés payés du 1er avril 2016 au 27 juillet 2017 ;

* 1 055,03 euros à titre de rappel de prime de vacances BTP ;

* 1 808,16 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- ordonner la garantie des créances par l'AGS CGEA d'Île-de-France Est.

Aux termes de ses conclusions du 16 novembre 2019, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'AGS CGEA d'Île-de-France Est demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire, dire le jugement opposable dans les termes et conditions de l'article L. 3253-19 du code du travail et dans la limite du plafond 6 de sa garantie toutes créances brutes confondues par application des articles L. 3253-6, L. 3253-8 et L. 3253-17 du code du travail ;

- dire ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à sa charge.

La SCP Canet, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SDS, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées, ne s'est pas constituée.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 20 octobre 2021.

SUR CE :

Sur la nullité du contrat de travail :

Considérant, en premier lieu, sur la conclusion du contrat de travail en période suspecte, qu'aux termes du I.- de l'article L. 632-1 du code de commerce : 'I.- Sont nuls, lorsqu'ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements, les actes suivants : (...) 2° Tout contrat commutatif dans lequel les obligations du débiteur excèdent notablement celles de l'autre partie' ;

Qu'en l'espèce, l'AGS, pour demander la nullité du contrat de travail de M. [O] [K] à ce titre, se borne à soutenir qu'il a été conclu en période suspecte, sans établir ni même alléguer l'existence d' un déséquilibre notable entre les obligations des parties ;

Considérant en deuxième lieu, que l'AGS soutient également que le contrat de travail de M. [O] [K] est nul en ce qu'elle se trouve, en l'espèce, 'confrontée à un montage de sociétés de bâtiment avec des gérances tournantes et des salariés qui entendent se poser en victime alors qu'ils ont tout participé à ces constructions tournantes de sociétés gigognes' ; que l'AGS ne démontre toutefois en rien que M. [O] [K] en concluant le contrat de travail en litige et les précédents contrats de travail avec des sociétés ayant fait l'objet de liquidation judiciaire a participé sciemment à une fraude ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune cause de nullité du contrat de travail de M. [O] [K] n'est démontrée par l'AGS ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement sur ce point et de dire que le contrat de travail de M. [O] [K] est valide ;

Sur la demande de rappel de salaire pour la période du 1er au 26 juillet 2017 :

Considérant que l'AGS se borne à invoquer sur ce point la nullité du contrat de travail, laquelle n'est pas établie ainsi qu'il a été dit ci-dessus ; qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande de rappel de salaire et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS une créance d'un montant de 2 373,64 euros à ce titre ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur le rappel de salaire correspondant aux congés payés du 1er avril 2016 au 27 juillet 2017:

Considérant que M. [O] [K] demande en réalité à ce titre la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS d'une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à un solde de 39 jours de congés payés existant au moment de la rupture du contrat de travail, en faisant valoir que son employeur n'a pas cotisé à la caisse des congés payés du bâtiment ;

Considérant que l'AGS conclut au débouté en faisant valoir que M. [O] [K] ne justifie pas de la non prise en charge des congés payés par la caisse des congés payés du bâtiment ;

Considérant qu'en application des articles L.3141-30 et D 3141-12 du code du travail, dans les entreprises exerçant une ou plusieurs activités entrant dans le champ d'application des conventions nationales étendues du bâtiment et des travaux publics, le service des congés payés est assuré par des caisses constituées à cet effet ; que l'employeur doit obligatoirement s'affilier à une caisse ainsi que s'acquitter des cotisations et que cette caisse se substitue à lui pour le paiement des indemnités de congés payés ; que dans la mesure où l'employeur a satisfait à ces obligations à l'égard de la caisse, il est déchargé de toute obligation quant au paiement des indemnités de congés payés et le salarié n'a aucune possibilité d'action contre lui mais exclusivement contre la caisse ;

Qu'en l'espèce, s'il ressort des bulletins de salaire de M. [O] [K] établis par la société SDS qu'est mentionné sur ces documents le paiement de cotisations à la caisse des congés payés du bâtiment au titre des congés payés, l'AGS ne justifie pas du paiement effectif de ces cotisations à la caisse ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS une créance d'un montant de 4 394,98 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur de rappel de prime de vacances BTP :

Considérant en l'espèce que cette prime est mentionnée sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2017 établi par le liquidateur judiciaire ; que l'AGS ne conteste pas que cette prime n'a pas été effectivement payée ; qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande et de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS une créance d'un montant de 1 055,03 euros à ce titre ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur l'indemnité de licenciement :

Considérant que l'AGS soutient à ce titre que l'ancienneté ne peut être fixée au 21 mai 2014, comme mentionné dans le contrat de travail, mais seulement au 1er mars 2016, sans autre explication ;

Mais considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article 1134 du code civil, dans sa version applicable au litige : ' Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise' ;

Qu'en l'espèce, le contrat de travail, qui est la loi des parties, a prévu une reprise d'ancienneté au 21 mai 2014 ; que l'AGS ne soulève aucun moyen pour remettre en cause cette stipulation contractuelle ;

Qu'il y a donc lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire la créance d'indemnité de licenciement réclamée par M. [O] [K], calculée sur une telle ancienneté, d'un montant de 1 808,16 euros ; que le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point ;

Sur la garantie de l'AGS :

Considérant qu'il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Est qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

Sur la restitution de documents sociaux par M. [O] [K] au liquidateur judiciaire :

Considérant que le liquidateur judiciaire, défaillant en appel, ne forme ainsi aucune demande à ce titre devant la cour ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement et de débouter le liquidateur de cette demande ;

Sur les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris sur ce point et de condamner la SCP Canet, ès qualités, aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit que le contrat de travail conclu entre M. [J] [O] [K] et la société SDS est valide,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société SDS la créance de M. [J] [O] [K] aux sommes suivantes :

- 2 373,64 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er au 26 juillet 2017,

- 4 394,98 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 1 055,03 euros à titre de rappel de prime de vacances BTP,

- 1 808,16 euros à titre d'indemnité de licenciement,

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Est qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et déclare que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SCP Canet, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SDS, aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03754
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;19.03754 ?
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