COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 21 AVRIL 2022
N° RG 20/02315
N° Portalis DBV3-V-B7E-UDME
AFFAIRE :
[I] [B]
C/
CPAM DU VAL D'OISE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Septembre 2020 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PONTOISE
N° RG : 19/01034
Copies exécutoires délivrées à :
Me Yossey-bobor YOMO
Me Mylène BARRERE
Copies certifiées conformes délivrées à :
[I] [B]
CPAM DU VAL D'OISE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant fixé au 20 janvier 2022 puis prorogé au 21 avril 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :
Monsieur [I] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]
comparant en personne
assisté de Me Yossey-bobor YOMO, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : E1510 - N° du dossier AK2
APPELANT
****************
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAL D'OISE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2104
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Novembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvia LE FISCHER, Président,
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,
Le 22 janvier 2010, la société [5] a souscrit une déclaration d'accident du travail auprès de la caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise (la caisse), pour l'un de ses salariés, M. [I] [B], exerçant la fonction d'employé de réseaux, dans les termes suivants :
'Date : 21/01/2010Heure : 15H20
Circonstances détaillées de l'accident : est tombé dans les escaliers
Siège des lésions : genou'.
Le certificat médical initial établi le 22 janvier 2010 par le docteur [D] fait était d'un 'traumatisme rachi dorso-lombaire avec hypersthésie et paresthésie concernant le trajet L4 en cours d'exploration ; traumatisme du genou droit et cheville droite sans lésion osseuse révélée à la radiographie initiale'.
La caisse a pris en charge l'accident de M. [B] au titre de la législation sur les risques professionnels et a fixé la date de consolidation de ses lésions au 30 septembre 2010.
Par décision du 16 février 2011, la caisse a notifié à M. [B] un taux d'incapacité permanente partielle de 8% et lui a attribué une indemnité en capital de 3 301,76 euros.
M. [B] a contesté ce taux retenu devant le tribunal du contentieux de l'incapacité lequel, par jugement du 11 janvier 2012, a majoré ce taux à 11%.
Le 21 février 2014, M. [B] a adressé à la caisse un certificat médical d'aggravation de ses lésions, mentionnant une 'réévaluation de son taux d'incapacité permanente partielle sur les pathologies suivantes : lombosciatique par hernie discale. Gonalgie droite avec hyperlixité ligamentaire et douleur de la cheville sur rupture ligamentaire'.
Après avis de son service médical, la caisse a, par décision du 6 mai 2014, maintenu son taux d'incapacité permanente partielle à 11%.
M. [B] a contesté la décision de la caisse devant le tribunal du contentieux de l'incapacité, qui par jugement du 21 janvier 2015, a majoré le taux pour le porter à 14 % réparti ainsi qu'il suit :
- 5 % pour le rachis lombaire ;
- 3 %pour le genou droit ;
- 6 % pour la cheville droite.
Par notification du 11 mars 2015, la caisse a converti le capital versé à M. [B] à la suite de son accident du travail en rente payable trimestriellement pour un montant de 535,90 euros.
Le 8 septembre 2016, M. [B] a adressé à la caisse un certificat médical de rechute faisant état d'une 'lombosciatique L4 L5 - L5 S1".
La rechute a été prise en charge par la caisse au titre de la législation sur les risques professionnels, après jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Val d'Oise du 28 novembre 2018.
Le 8 juillet 2019, la caisse a notifié à M. [B] que la date de consolidation de son état de santé à la suite de la rechute a été fixée au 1er avril 2019 avec retour à l'état antérieur.
Le 26 juillet 2019, M. [B] a présenté un certificat d'aggravation et après avis du service médical, la caisse, a par décision du 5 août 2019, maintenu le taux d'incapacité permanente partielle à 14 %.
Les 7 août et 7 octobre 2019, M. [B] a saisi le tribunal de grande instance de Pontoise aux fins de contester le taux d'incapacité permanente partielle maintenu à 14 % par la caisse.
Par courrier reçu le 26 septembre 2019, M. [B] a contesté le taux d'incapacité permanente partielle devant la commission médicale de recours amiable.
Par jugement contradictoire en date du 18 septembre 2020 (RG n° 19/01034), le pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise a :
- ordonné la jonction des procédures enregistrées sous les numéros de RG 19/01034 et 19/01433, sous le numéro unique du répertoire général 19/01034 ;
- dit le recours de M. [B] recevable mais mal fondé ;
- l'en a débouté ;
- confirmé la décision de la caisse rendue le 5 août 2019 maintenant le taux d'incapacité permanente partielle de M. [B] à la suite de son accident du travail du 21 janvier 2010 à 14 % ;
- débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- condamné M. [B] aux dépens.
Par déclaration reçue le 19 octobre 2020, M. [B] a interjeté appel et les parties ont été convoquées à l'audience du 23 novembre 2021.
Par conclusions écrites et soutenues à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, M. [B] demande à la cour d'ordonner à la caisse de mettre en oeuvre une expertise technique, par application de l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale.
Par conclusions écrites et soutenues à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
- de condamner M. [B] aux entiers dépens.
Concernant les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la caisse sollicite l'octroi d'une somme de 1 500 euros. M. [B] ne forme aucune demande de ce chef.
MOTIFS
Sur le taux d'incapacité
M. [B] estime à 25 % le taux de son incapacité et sollicite la mise en place d'une expertise technique puisque, en application de l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale, les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade, en cas d'accident du travail, donne lieu à une procédure d'expertise médicale.
Il ajoute qu'il souffre de douleurs persistantes en permanence avec prise d'antidouleur et d'anti-inflammatoire, que des séances de kiné lui ont été prescrites, ce qui caractérise divers préjudices variés.
La caisse soutient qu'au regard de l'examen médical et des conclusions du médecin, le tribunal judiciaire de Pontoise a estimé que le taux de 14 % retenu correspondait à celui prévu par le barème et a ainsi confirmé ledit taux retenu, à juste titre.
La caisse soutient également que tant en première instance qu'en cause d'appel, M. [B] n'apporte aucun élément médical contemporain à la date de consolidation permettant de contredire utilement l'avis du médecin.
Sur ce
La cour relève, à titre préliminaire, que M. [B] a bien saisi la commission médicale de recours amiable par courrier reçu par cette commission le 26 septembre 2019 mais qu'aucune réponse n'a été apportée à la contestation du taux d'incapacité permanente partielle.
Aux termes du premier alinéa de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, 'le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.'
L'article R. 434-32 du même code dispose que :
'Au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.
Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.'
Le taux d'incapacité permanente partielle est fixé en fonction de l'état séquellaire au jour de la consolidation, fixée au 1er avril 2019 à la suite d'une rechute, la cour d'appel de céans ayant, par un arrêt de ce jour, déclaré irrecevable le recours de M. [B] en contestation de la date de consolidation.
Le certificat médical de rechute du 8 septembre 2016 fait état d'une 'lombosciatique L4-L5 L5-S1'.
Le barème indicatif d'invalidité relatif aux accidents de travail fait état :
- Concernant la cheville, en cas de limitation des mouvements de la cheville dans le sens antéro-postérieur : un taux de 5 %.
- Concernant le genou :
- d'un taux de 5 % si la flexion ne peut s'effectuer au-delà de 110 ° ;
- d'un taux de 15% si la flexion ne peut s'effectuer au-delà de 90 ° ;
- d'un taux de 25 % si la flexion ne peut s'effectuer au-delà de 45 °.
- Concernant les lésions au rachis : 'normalement la flexion à laquelle participent les vertèbres dorsales et surtout lombaires est d'environ 60°. L'hyperextension est d'environ 30°, et les inclinaisons latérales de 70°. Les rotations atteignent 30° de chaque côté'.
Le barème précise qu'en cas de persistance de douleurs notamment et gêne fonctionnelle (qu'il y ait ou non séquelles de fractures) :
- discrètes 5 à 15 %
- importantes 15 à 25 %
- très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques 25 à 40 %.
Un rapport médical d'évaluation du taux d'incapacité permanente a été établi le 21 janvier 2015 par le docteur [W] [G], désignée par le tribunal du contentieux de l'incapacité qui a adopté les conclusions de cette expertise dans son jugement du 21 janvier 2015, à la suite de la contestation par M. [B] de la fixation du taux d'incapacité permanente partielle d'une première rechute.
Le praticien a motivé et conclu de la façon suivante, après avoir examiné M. [B] :
'La marche sur les 3 plans est normale.
Examen du rachis lombaire : Lors de l'antéflexion du tronc la distance doigts-sol est à 10 cm. L'hyperextension s'effectue sur 20°. L'inclinaison est douloureuse à gauche et un peu limitée, L'inclinaison droite est complète. Il existe une discrète contracture para vertébrale qui cède lors du piétinement sur place. L'examen neurologique ne retrouve ni troubles sensitifs ni troubles moteurs. Les ROT sont présents et symétriques.
On retrouve lors de l'élévation du membre inférieur gauche à partir de 50° une douleur lombaire. A droite l'examen est négatif.
Examen du genou droit : il est froid, sec et la rotule est normalement mobile. Il n'existe pas de point douloureux et précis. La flexion atteint 120°, l'extension est normale. Il n'existe pas de mouvements anormaux.
Examen de la cheville droite : on ne retrouve pas d'oedème en regard des malléoles. La flexion plantaire et le redressement dorsal sont complets. La médio-tarsienne est normalement libre. La sous-astragalienne est libre et il existe une instabilité.
Les différentes mensurations effectuées au niveau du mollet, de la cheville, et de l'étrier ne retrouvent pas d'amyotrophie significative.
Au vu des éléments figurant dans le dossier médical et des données de l'examen clinique de ce jour, le taux d'IPP pourrait être se décomposer ainsi : (rachis lombaire : 5 %, Genou droit :3 %, Cheville droite : 6 %.)
Le total 14 %'.
Après réception du certificat médical de rechute du 8 septembre 2016, la caisse a confirmé le taux d'incapacité permanente de 14 % au regard des conclusions médicales de son médecin-conseil, lequel a conclu le 8 avril 2019, après examen de M. [B], rapporté par les juges de première instance :
'Un traumatisme initial, touchant le rachis avec hernie discale conflictuelle avec la racine L3 droite, contusion du genou droit sans lésion ménisco-ligamentaire et entorse de cheville droite avec ténosynovite des jambes postérieurs. Rechute accordée pour aggravation des lombalgies et secondairement chirurgie de hernie discale (niveau non précisé, mais probablement L5-S1).
A ce jour, comparativement à l'examen d'attribution d'IP de 2014, on constate : au niveau du rachis, une bonne souplesse, avec Schober passé de 12,5 à 13,5 cm, une DDS au niveau des genoux améliorée à 22 cm, et des manoeuvres de Lasègue négative à 90° des 2 côtés contre 50° à droite 80° à gauche au niveau du genou, la flexion est améliorée de 90° à 130°, avec talon-fesse réduit de 47 à 23 certificat médical au niveau de la cheville, une petite limitation de la dorsiflexion.
En conséquence il n'y a pas d'éléments cliniques témoignant d'une aggravation des séquelles de l'AT du 21/01/10'.
Le compte-rendu d'hospitalisation du 31 janvier 2017 pour prise en charge d'une hernie discale L5-S1 mentionne : 'Bonne amélioration de la symptomatologie radiculaire. Lombalgies bien soulagées par les antalgiques de palier 2. Pas de problème local' et conclut 'Cure chirurgicale d'une hernie discale L5-S1. Suites simples'.
Il s'en déduit que l'intervention chirurgicale a supprimé la hernie et que l'état de M. [B] est revenu à celui qu'il était avant l'apparition de la hernie discale.
Au regard de l'examen médical et des conclusions du médecin, le tribunal a, par des motifs que la cour adopte, repris le détail des séquelles de M. [B] pour le rachis, le genou et la cheville, a rappelé les conclusions du médecin conseil, les a comparées au barème indicatif d'invalidité relatif aux accidents de travail et estimé, à bon droit, que le taux de 14 % retenu correspondait à celui prévu au barème.
M. [B] produit un compte-rendu de consultation du 4 mars 2020, soit près de quatre ans après la rechute et un an après la consolidation, avec la mention en bas de page 'courrier non validé' avec l'indication d'un nom '[P] [E]' dont la qualité n'est pas connue, qui précise 'Suite à notre entretien du 18 décembre dernier, il a réalisé une imagerie par résonance magnétique lombaire qui met en évidence la persistance d'une protusion discale L5-S1 qui correspondrait davantage à la topographie de ses douleurs.
L'examen physique neurologique demeure inchangé, avec des douleurs lombaires basses irradiant glutéal gauche sans déficit moteur [...] Devant ces éléments, il me semble justifié de procéder à une reprise chirurgicale au stade actuel.'
L'IRM du 25 février 2020 conclut : 'Discopathie dégénérative étagée avec un pincement discal en L5-S1.
En L5-S1, il existe une saillie discale forale postéro médiane et paramédiane gauche légèrement migrée vers le bas sur près de 5mm venant au contact de la racine L5 gauche et rétrécissant également le foramen gauche.'
M. [B] sollicite une mesure d'expertise mais ne verse aux débats aucun élément médical contemporain à la date de consolidation de nature à contredire l'avis du médecin conseil.
Les pièces produites par M. [B] ne permettent pas de contredire l'appréciation du taux d'incapacité permanente partielle, pouvant manifester une évolution postérieure à la rechute.
Le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens
M. [B] qui succombe à l'instance, est condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu le 18 septembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise (RG n°19/01034) en toutes ses dispositions;
Y ajoutant,
Condamne M. [B] aux dépens d'appel;
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sylvia Le Fischer, Président, et par Madame Morgane Baché, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,