COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51B
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 AVRIL 2022
N° RG 20/06033 - N° Portalis DBV3-V-B7E-UF6C
AFFAIRE :
M. [H] [R]
...
C/
S.A.S. SOCIETE MENUISERIES QUICAILLERIES FERMETURES RENE [K]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Novembre 2020 par le TJ P de VERSAILLES
N° chambre : 3ème
N° RG : 18/08335
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 19/04/22
à :
Me Dan ZERHAT
Me Chantal DE CARFORT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [H] [R]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentant : Maître Dan ZERHAT de l'AARPI OHANA ZERHAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 - N° du dossier 20078118
Représentant : Maître Bénédicte DE GAUDRIC, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
S.A.S.U. INBOX.LOC
Ayant son siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Dan ZERHAT de l'AARPI OHANA ZERHAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 - N° du dossier 20078118
Représentant : Maître Bénédicte DE GAUDRIC, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
APPELANTS
****************
S.A.S. SOCIETE MENUISERIES RENE [K]
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Adresse 8]
[Localité 7]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 -
Représentant : Maître Frédéric BOULTE de l'ASSOCIATION P3B AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J122
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Mars 2022, Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous seing privé du 12 septembre 2012, Monsieur [F] [K] a donné à bail commercial en renouvellement à la société Menuiseries [F] [K], pour une durée de neuf ans, un ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 7] afin qu'elle y exploite une activité de négoce, de pose de menuiseries quincailleries ainsi que toute opération d'acquisition de vente et d'exploitation par bail à construction, bail commercial, bail précaire, bail dérogatoire ou autre.
M. [R] occupe une partie des locaux exploités par la société Menuiseries [F] [K].
Reprochant cette occupation, la société Menuiseries [F] [K] a fait assigner M. [R] devant le président de tribunal de grande instance de Versailles statuant en référé par acte du 4 novembre 2015 aux fins de le voir expulsé des lieux.
Par ordonnance du 26 février 2016, confirmée en appel par ordonnance du 2 février 2017, la société [F] [K] a été déboutée de ses demandes en raison de l'existence d'une contestation sérieuse.
La société Menuiseries [F] [K] a alors fait assigner M. [R] par acte d'huissier de justice délivré le 27 novembre 2018, devant le tribunal judiciaire de Versailles, aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef des lieux occupés sans droit ni titre sis [Adresse 3] à [Localité 7],
- sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 17 500 euros hors taxes et hors charges à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'à la libération des lieux.
Par jugement contradictoire du 26 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- déclaré irrecevable l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc,
- débouté M. [R] de sa revendication d'un bail soumis au statut des baux commerciaux,
- ordonné l'expulsion de M. [R] et de tout occupant de son chef des locaux qu'il occupe sans droit ni titre sis [Adresse 3] à [Localité 7],
- dit qu'à défaut de libération volontaire par M. [R] des locaux de la société Menuiseries [F] [K] dans le délai de 8 jours à compter de la signification du jugement, celle-ci pourrait procéder à son expulsion, ainsi qu'à celle de tout occupant de son chef des locaux avec le concours de la force publique et d'un serrurier en cas de besoin,
- rejeté la demande d'astreinte formée par la société Menuiseries [F] [K],
- ordonné qu'il soit procédé, aux frais de M. [R] à l'enlèvement de tous biens meubles pouvant se trouver dans les locaux A, B, C, D, E, H et H dépendant de l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 7],
- rejeté la demande de condamnation de M. [R] aux frais de l'état des lieux de sortie en présence d'un expert judiciaire,
- condamné M. [R] à payer à la société Menuiseries [F] [K] les indemnités d'occupation mensuelles suivantes :
- 12 600 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux A, B et C,
- 1 440 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux E,
- 4 860 euros TTC, à compter du 1er août 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux D,
- 2 462,40 euros TTC, à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux G et H,
- dit que les sommes versées par M. [R] les 23 juin 2015 (lire 2016) et 9 septembre 2016 viendraient en déduction des indemnités d'occupation dues,
- débouté la société Menuiseries [F] [K] de ses demandes de paiement au titre des charges,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [R],
- rejeté la demande de délais de M. [R],
- condamné M. [R] à payer à la société Menuiseries [F] [K] une somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné M. [R] aux dépens de l'instance,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration reçue au greffe le 3 décembre 2020, M. [R] et la société Inbox.Loc ont relevé appel de ce jugement. Aux termes de leurs conclusions signifiées le 5 juillet 2021, ils demandent à la cour de :
- les déclarer recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et moyens,
- rejeter l'ensemble des demandes de la société Menuiseries [F] [K], fins et moyens qu'elles comportent,
- juger irrecevables l'action et les demandes de la société Menuiseries [F] [K],
- juger nulle l'assignation,
- prononcer la nullité de l'assignation et du jugement du 26 novembre 2020,
- à défaut, infirmer partiellement le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
- juger que la société Menuiseries [F] [K], représentée par M. [K] ne pouvait ignorer les travaux effectués, l'installation de la société Inbox.Loc ainsi que l'existence de l'appartement de M. [R], le dirigeant de la société Menuiseries [F] [K] se rendant régulièrement sur les lieux compte tenus des liens d'amitiés qui l'unissaient à M. [R],
- juger que la société Inbox.Loc était recevable en son intervention volontaire, la prise à bail par M. [R] initialement avec la société AI2D ayant pour objet le stockage, et l'occupation des locaux commerciaux par la suite avait vocation à permettre à la société Inbox.Loc d'y exercer son activité, ce dont avait parfaitement connaissance M. [K], la demande d'expulsion formée par l'intimée ayant une incidence directe sur la société et son bon fonctionnement, les demandes se rattachent par un lien suffisant justifiant l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc,
- juger que depuis le 14 février 2013, les parties n'ont pas entendu appliquer le paiement d'un loyer en contrepartie de quoi M. [R] pour le compte de la société Inbox.Loc qui exploite les lieux a réhabilité les locaux,
- juger que M. [R] et/ou la société Inbox.Loc ont bénéficié de baux verbaux,
- juger que les appelants ont été laissés en possession, que les baux dérogatoires du 8 juin 2015 qui ont été adressés par la société Menuiseries [F] [K] ne faisaient pas état de la renonciation des appelants à bénéficier du statut des baux commerciaux,
- juger que les baux verbaux ont transmuté en baux commerciaux et relèvent d'un contrat soumis aux dispositions des articles 145 et suivants du code de commerce, d'une durée de 9 ans, ayant commencé à courir du :
- 15 février 2013 pour se terminer le 14 janvier 2022,
- à défaut du 1er octobre 2014 pour se terminer le 30 septembre 2023,
- à défaut du 8 juin 2015 pour se terminer le 8 juin 2024,
- à défaut du 29 octobre 2015 pour se terminer le 29 octobre 2024,
- à défaut,
- juger que la société Menuiseries [F] [K] les a laissés en possession des locaux commerciaux du 15 février 2013 au 8 juin 2015, du 2 février 2017 au 27 novembre 2018, de sorte que les baux verbaux ont transmuté en baux commerciaux et qu'ils ont commencé à courir du 15 février 2013 pour se terminer le 14 janvier 2022 et à défaut du 8 juin 2015 pour se terminer le 7 mai 2029,
- rejeter la demande d'expulsion à l'encontre tant de la société Inbox.Loc que de M. [R],
-y ajoutant :
- fixer le montant du loyer annuel HT à 20 000 euros soit 24 000 euros TTC payables mensuellement, soit 2 000 euros TTC à compter de la décision à intervenir,
- juger que les loyers du 1er octobre 2014 doivent être considérés comme réglés par compensation du coût des travaux effectués et réglés par les intimés à hauteur de 74 328 euros (2 000 euros x 12 x 6 = 144 000 euros), soit un solde restant de 69 672 euros - 4 800 euros soit 64 872 euros,
à défaut de compensation, et à titre reconventionnel :
- condamner la société Menuiseries [F] [K] à régler à la société Inbox.Loc et à défaut à M. [R] la somme de 74 328 euros,
- juger que M. [R], pourra s'acquitter de la somme de 139 200 euros (octobre 2014 à janvier 2021 : 144 000) déduction faite des chèques encaissés par la société Menuiseries [F] [K] (4 800 euros) en 24 mensualités égales à compter de la décision à intervenir, soit 4 384 euros mensuels suivant les dispositions des articles 1343-5 et suivants du code civil, en sus du loyer des années 2021 et suivantes,
à défaut :
- juger que la société Menuiseries [F] [K] ne justifie pas d'une location supérieure à 975 m2 ni de l'écart du prix du m2 entre son contrat avec le propriétaire et ceux de sous-locations objets de la présente procédure,
- juger que le montant du loyer annuel allégué dans le cadre de la procédure de référé d'un montant de 32 600 euros soit 1 630 euros mensuels est un aveu judiciaire de sorte que c'est ce loyer mensuel qui sera retenu,
- juger que le montant de l'indemnité d'occupation ou le loyer annuel de 210 000 euros (17 500 euros réclamés sur l'acte d'assignation x 12) ou de 168 000 euros (14 000 x 12) réclamés en septembre 2019, puis depuis février 2020 de 289 632 euros (24 136 x 12) ne sont pas justifiés,
- y ajoutant :
- fixer à la somme annuelle de 24 000 euros TTC l'indemnité d'occupation à compter du 1er octobre 2016, déduction de la somme de 4 800 euros de loyers payés,
- condamner la société Menuiseries [F] [K] à régler à la société Inbox.Loc venant aux droits de M. [R], et à défaut à M. [R], la somme de 74 328 euros,
- ordonner la compensation des sommes que pourraient se devoir les parties,
- à défaut :
- ordonner une expertise judiciaire,
- donner acte de ce que la société Inbox.Loc et M. [R], émettent toutes protestations et réserves et ajouter à la mission de l'expert nommé,
- ordonner une expertise judiciaire avec la mission de :
- fixer le prix locatif du m2 des locaux objets de la présente procédure,
- métrer les lieux loués,
- établir la liste des installations effectuées par la société Inbox.Loc,
- chiffrer le montant des travaux réalisés,
- chiffrer la plus-value de la valeur du bien immobilier bénéficiant à la société Menuiseries [F] [K] du fait des travaux réalisés,
- chiffrer le coût de la réinstallation de la société Inbox.Loc sur un autre site,
- chiffrer la valeur du fonds de commerce de la société Inbox.Loc,
- chiffrer une indemnité d'éviction,
- établir les éventuelles compensations financières,
- en tout état de cause, si la cour estime que la société Inbox.Loc est recevable à agir et qu'elle bénéficie de baux verbaux qui ont transmuté en baux commerciaux :
- juger que la société Menuiseries [F] [K] est irrecevable pour toute demande d'expulsion et/ou de condamnation au titre de loyers ou d'indemnité d'occupation à l'encontre de la société Inbox.Loc, une telle demande formée pour la première fois en cause d'appel constituant une demande nouvelle prohibée, l'intimée n'ayant formulé aucune demande de condamnation à son encontre en première instance à titre principal ou subsidiaire,
- juger que les charges ne sont pas dues faute d'avoir été transmises aux appelants, ni détaillées,
- condamner la société Menuiseries [F] [K] à leur payer à chacun la somme de 10 000 euros pour procédure abusive et mauvaise foi du bailleur qui avait accepté l'aménagement des locaux et de l'appartement de M. [R], pour ensuite expliquer qu'il n'aurait pas donné son accord,
- condamner la société Menuiseries [F] [K] à payer à la société Inbox.Loc et à M. [R], la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction est faite au profit de Maître Zerhat, avocat au barreau de Versailles.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 23 avril 2021, la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [F] [K] demande à la cour de :
- à titre principal :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
- jugé irrecevable l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc,
- débouté M. [R] de sa revendication d'un bail soumis au statut des baux commerciaux,
- ordonné l'expulsion de M. [R] et de tout occupant de son chef des locaux qu'il occupe sans droit ni titre sis [Adresse 4] à [Localité 7],
- dit qu'à défaut de libération volontaire par M. [R] de ces locaux dans le délai de 8 jours à compter de la signification du jugement, celle-ci pourrait procéder à son expulsion, ainsi qu'à celle de tout occupant de son chef, des locaux avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin était,
- ordonné qu'il soit procédé, aux frais de M. [R], à l'enlèvement de tous biens meubles pouvant se trouver dans les locaux A, B, C, D, E, H et H (lire G) dépendant de l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 7],
- condamné M. [R] à lui payer les indemnités d'occupation mensuelles suivantes :
- 12 600 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux A, B et C,
- 1 440 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux E,
- 4 860 euros TTC, à compter du 1er août 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux D,
- 2 462,40 euros TTC, à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux G et H.
- dit que les sommes versées par M. [R] les 23 juin 2015 et 9 septembre 2016 viendraient en déduction des indemnités d'occupation dues,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [R],
- rejeté la demande de délais de M. [R],
- condamné M. [R] à lui payer une somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné M. [R] aux dépens de l'instance,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
- rejeté la demande d'astreinte,
- rejeté la demande de condamnation de M. [R] au paiement de l'état des lieux de sortie,
- rejeté la demande de condamnation de M. [R] au paiement des charges,
Statuant à nouveau :
- condamner M. [R] à lui payer les indemnités d'occupation mensuelles suivantes :
- 12 600 euros TTC, à compter du 1er mars 2020 et ce, jusqu'à son départ effectif pour les locaux A, B et C,
- 1 440 euros TTC, à compter du 1er mars 2020 et ce, jusqu'à son départ effectif pour les locaux E,
- 4 860 euros TTC, à compter du 1er mars 2020 et ce, jusqu'à son départ effectif pour les locaux D,
- 2 462,40 euros TTC, à compter du 1er mars 2020 et ce, jusqu'à son départ effectif pour les locaux G et H,
- assortir l'expulsion de M. [R] d'une astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et celle de tous occupants de son chef, au premier rang desquels la société Inbox.Loc, et ce avec le concours de la force publique et à l'aide des moyens de transport en nombre suffisant et utile au déménagement des meubles stockés sur place,
- ordonner un état des lieux de sortie aux frais exclusifs de M. [R] et en présence de tout expert judiciaire que le tribunal de céans voudra bien désigner dont la mission sera d'évaluer les désordres nombreux dont s'est rendu coupable M. [R], de lister les réparations et travaux nécessaires à la remise en état des lieux, et en chiffrer le coût,
- condamner M. [R] au paiement des charges dues pour les locaux occupés dans les locaux concernés,
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement et constaterait l'existence d'un bail commercial liant les parties :
- constater que ledit bail a commencé à courir le :
- 1er octobre 2014 pour les locaux A, B, C et E,
- 1er août 2015 pour les locaux D,
- 1er novembre 2015 pour les locaux G et H,
- fixer le montant du loyer mensuel hors charges à la somme de :
- 14 400 euros TTC pour les locaux A, B et C,
- 1 600 euros TTC pour les locaux E,
- 5 400 euros TTC pour les locaux D,
- 2 736 euros TTC pour les locaux G et H,
- condamner M. [R] à lui payer un loyer mensuel de 14 400 euros TTC, hors charges, à compter du 1er octobre 2014, à parfaire au jour de son départ effectif, pour les locaux A, B et C,
- condamner M. [R] à lui payer un loyer mensuel de 1 600 euros TTC, hors charges, à compter du 1er octobre 2014, à parfaire au jour de son départ effectif à intervenir, pour les locaux D,
- condamner M. [R] à lui payer un loyer mensuel de 5 400 euros TTC, hors charges, à compter du 1er août 2015, à parfaire au jour de son départ effectif, pour les locaux E,
- condamner M. [R] à lui payer un loyer mensuel de 2 736 euros TTC, hors charges, à compter du 1er novembre 2015, à parfaire au jour de son départ effectif, pour les locaux G et H,
- à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour constaterait l'existence d'un bail commercial liant les parties mais se verrait dans l'impossibilité de statuer sur l'étendue des surfaces concernées et le montant du loyer :
- ordonner la désignation d'un expert avec mission de :
- entendre les parties en leurs dires et explications,
- visiter les locaux litigieux, les décrire, procéder à l'examen des faits allégués par les parties, étudier la valeur locative des locaux à la date d'occupation des lieux,
- s'attacher aux prix locatifs résultant des prix du marché, des loyers renouvelés amiablement dans les environs et aux références judiciaires,
- estimer le montant du loyer commercial dû par M. [R] au titre de l'occupation des locaux sis [Adresse 4] à [Localité 7], à compter du 1er octobre 2014,
- examiner et décrire les désordres causés par M. [R] tels qu'ils sont exposés dans les présentes conclusions et dans les pièces versées aux débats,
- déterminer la nature des travaux devant être entrepris afin de remédier de manière durable aux désordres constatés,
- évaluer ces travaux à l'aide de devis d'entreprise fournis par les parties,
- donner son avis sur les préjudices allégués et chiffrés par les parties,
- fournir tous les éléments techniques et de fait permettant à la juridiction compétente ultérieurement saisie de déterminer ultérieurement les responsabilités encourues,
- dire que l'expert qui sera saisi effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport au greffe du tribunal dans un délai de six mois à compter de l'avis de consignation,
- fixer la provision à verser à l'expert et ordonner sa consignation pour moitié à la charge de la société preneuse,
- dire et juger que, dans cette hypothèse, le loyer provisionnel de M. [R] pendant les opérations d'expertise sera fixé à la somme de 14 000 euros TTC hors charge par mois,
- en tout état de cause :
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de M. [R] et de la société Inbox.Loc,
- condamner M. [R] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,
- condamner in solidum M. [R] et la société Inbox.Loc à lui payer la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. [R] et la société Inbox.Loc aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître de Carfort, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 octobre 2021.
L'audience de plaidoiries, initialement fixée au 15 décembre 2021, a été reportée au 8 mars 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il sera rappelé qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures.
Dans le cas présent, M. [R] sollicite dans ses écritures de juger que le tribunal judiciaire n'avait pas pouvoir pour statuer sans distinction entre la partie habitation et la partie professionnelle, se déclarer incompétent au profit du juge des contentieux de la protection de Versailles pour la partie habitation et d'ordonner une expertise. Il ne sera pas statué sur ces demandes qui ne sont pas reprises dans le dispositif des écritures de M. [R].
Il sera également précisé que par ordonnance de référé du 27 mai 2021, le premier président de cette cour a fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré, sollicitée par M. [R], soulignant d'une part le montant des condamnations s'élevant à plus de 1,4 millions d'euros et d'autre part l'opacité de la situation financière de la société Menuiseries [F] [K].
Sur la recevabilité des conclusions signifiées le 22 octobre 2021
Aux termes des articles 802 et 907 du code de procédure civile, les conclusions déposées postérieurement à l'ordonnance de clôture sont irrecevables.
La société Menuiseries [F] [K] a signifié de nouvelles conclusions le 22 octobre 2021, postérieurement à l'ordonnance de clôture prononcée le 21 octobre 2021, portant sur la rectification de sa dénomination sociale, sans la moindre explication ni justification, sauf à communiquer un extrait Kbis pendant le cours du délibéré et sans solliciter la révocation de l'ordonnance de clôture.
Ces conclusions, signifiées postérieurement à l'ordonnance de clôture, sont irrecevables.
Sur l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc
M. [R] et la société Inbox.Loc font valoir que cette dernière est recevable à intervenir volontairement à la procédure et reprochent au premier juge d'avoir considéré que la société Inbox.Loc ne démontrait pas qu'elle serait venue aux droits et obligations de M. [R]. Ils font valoir qu'il n'y a pas à rechercher s'il y a eu novation mais seulement intérêt à agir et qu'en l'espèce la société Inbox.Loc a des prétentions qui se rattachent par un lien suffisant aux demandes de M. [R].
La société Menuiseries [F] [K] réplique qu'aucun intérêt à agir n'est démontré faute de lien démontré entre la société Inbox.Loc et l'objet du litige, en sorte que le jugement doit être confirmé.
Sur ce,
Aux termes des articles 66, 325 et 554 du code de procédure civile, constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires. L'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant. Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.
En la cause, la société Inbox.Loc qui prétend « venir aux droits de M. [R] » démontre un intérêt légitime et un lien suffisant avec les prétentions d'origine de M. [R] puisqu'elle dit agir pour éviter d'être expulsée du lieu qu'elle considère comme son lieu d'activité et qu'elle produit son extrait Kbis qui prouve que l'adresse de son établissement est l'adresse des locaux en litige et que M. [R] en est le gérant, étant souligné que pour la seule recevabilité de son intervention volontaire, la société Inbox.Loc n'a pas à démontrer que M. [R] aurait cédé des droits à la société Inbox.Loc et que celle-ci serait subrogée dans tous ses droits et obligations.
En conséquence, l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc est déclarée recevable et le jugement est infirmé sur ce point.
Sur la capacité et l'intérêt à agir de la société Menuiseries [F] [K]
En cause d'appel, M. [R] dénie tout intérêt et toute capacité à agir à la société [F] [K] au motif que cette dernière ne disposerait d'aucune créance à son égard.
La société Menuiseries [F] [K] ne conclut pas sur ce point.
Sur ce,
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
Aux termes de l'article 789 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2020, « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : (...) 6°Statuer sur les fins de non-recevoir ».
Ces dispositions s'appliquent au conseiller de la mise en état devant la cour d'appel par renvoi de l'article 907 du code de procédure civile, pour toutes les instances introduites à compter du 1er janvier 2020 et les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir devant la cour, à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.
M. [R] a introduit l'instance devant la cour par son appel du 3 décembre 2020, et la cour n'est pas compétente pour connaître de la fin de non-recevoir soulevée par ce dernier qui ne s'est pas révélée postérieurement au dessaisissement du conseiller de la mise en état.
Par suite, la fin de non-recevoir soulevée par l'appelant sera jugée irrecevable.
Sur l'existence d'un bail soumis au statut des baux commerciaux
M. [R] et la société Inbox.Loc reprochent au premier juge d'avoir considéré qu'il n'existait pas de bail soumis au statut des baux commerciaux les liant à la société Menuiseries [F] [K] alors même que :
- un premier bail dérogatoire a été conclu le 8 février 2011,
- un bail verbal dérogatoire a existé du 14 février 2013 au 8 juin 2015 pour 900 m2, qui est attesté par la réalisation de travaux venant compenser le prix du loyer,
- des baux dérogatoires ont été proposés par la société Menuiseries [F] [K],
- la société Menuiseries [F] [K] a laissé l'activité de M. [R] se poursuivre,
- des règlements ont été effectués.
La société Menuiseries [F] [K] réplique que :
- aucun bail dérogatoire n'est démontré par M. [R],
- elle s'est toujours opposée à son occupation de pur fait et n'a proposé des baux dérogatoires, qui n'ont reçu aucun accord ni aucun commencement d'exécution de la part de M. [R], que pour tenter de régulariser la situation, les quelques versements ne le démontrant pas plus que les travaux dont la facture semble douteuse,
- elle s'est toujours opposée à l'occupation frauduleuse de M. [R].
Sur ce,
Il est acquis que le statut protecteur des baux commerciaux, régi par les articles L.145-1 et suivants du code de commerce, s'applique aux baux écrits ou verbaux, portant sur un immeuble ou un local destiné à servir à l'exploitation d'un fonds de commerce.
Les articles L. 145-1 et suivants du code de commerce n'imposant aucune forme particulière, le bail commercial peut être conclu verbalement dès lors qu'il y a accord des parties sur les éléments essentiels du contrat, à savoir sur la chose louée et sur le prix.
L'article L.145-5 du code précité prévoit aussi que lors de l'entrée dans les lieux du preneur, les parties peuvent déroger conventionnellement aux dispositions du statut des baux commerciaux à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans et que si, à l'expiration de cette durée, le preneur est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux.
Il appartient ainsi à M. [R] et à la société Inbox.Loc qui se prévalent de l'existence de différents baux à leur profit au sein des locaux exploités par la société Menuiseries [F] [K] de démontrer leur existence.
L'existence d'un bail commercial verbal peut être prouvée par tous moyens mais ne saurait résulter de la simple occupation du bien sans que celui qui s'en prévaut ne rapporte la preuve de l'accomplissement des obligations et de l'exercice des droits découlant du prétendu bail, notamment celle de payer le prix du loyer convenu.
Il est constant, tel que cela ressort des pièces produites que :
- M. [R] occupe une partie des locaux loués par la société Menuiseries [F] [K] à M. [F] [K] depuis au moins octobre 2014, date à partir de laquelle est établi à son nom un contrat d'abonnement d'électricité à l'adresse des locaux litigieux,
- une activité de stockage pour les entreprises et les particuliers est exploitée dans les locaux litigieux,
- un appartement de 4 pièces a été aménagé à l'étage des locaux litigieux, M. [R] justifiant à cet égard acquitter une taxe d'habitation depuis 2017,
- M. [R] n'est pas entré illégalement dans les locaux, la société Menuiseries [F] [K] et son gérant M. [F] [K] ont toléré cette occupation, tout au moins jusqu'à l'assignation en référé que la société Menuiseries [K] a fait délivrer à M. [R] le 4 novembre 2015, sans que cette tolérance puisse être créatrice de droits,
- des travaux ont été effectués, ainsi que l'attestent les diverses photos produites aux débats par M. [R] et les procès-verbaux de constat des 25 juillet 2016 et 1er décembre 2020, sans que ne soit démontré un accord de la société Menuiseries [F] [K] sur la réalisation des travaux ni que soit démontrée leur teneur exacte, seule une facture d'électricité du 15 avril 2015 à l'ordre de M. [R] étant produite,
- les parties ne se sont jamais entendues ni sur le montant du loyer (proposé pour un montant mensuel de 9 000 euros TTC pour une surface de 900 m2 par la société Menuiseries [F] [K] dans le cadre des baux dérogatoires du 8 juin 2015, M. [R] proposant lui la somme de 24 000 euros TTC annuelle sans précision de surface dans un email du 29 octobre 2015) ni sur le périmètre de la chose louée,
- l'exploitation effective par la société Inbox.Loc des lieux litigieux n'est pas démontrée, l'extrait Kbis produit étant insuffisant à cet égard, et aucun autre élément n'est produit qui pourrait établir son activité, les seuls documents, parcellaires, produits concernent des contrats de gardiennage et de dépôt établis par la société Box A Box, qui ne revendique aucun bail.
Par ailleurs, M. [R] et la société Inbox.Loc soutiennent être titulaires d'un bail commercial, consécutivement à leur maintien dans les lieux au terme de différents baux dérogatoires consentis par la société Menuiseries [F] [K] :
- un bail dérogatoire du 8 février 2011,
- un bail dérogatoire verbal pour la période du 14 février 2013 au 8 juin 2015,
- deux baux dérogatoires du 8 juin 2015 pour des surfaces de 360 m2 et 540 m2,
- un bail dérogatoire du 2 mai 2017 pour une surface de 900 m2.
Il sera observé préalablement sur ce point que la société Inbox. Loc, au regard de l'extrait Kbis produit aux débats, n'ayant été créée que le 8 juin 2017, ne peut pas revendiquer être titulaire d'un quelconque bail verbal ou écrit avant cette date, outre qu'elle ne démontre aucune activité commerciale, ainsi que cela a déjà été dit.
S'agissant des différents baux invoqués par les appelants, il peut être relevé que :
- le bail dérogatoire du 8 février 2011, signé pour 23 mois et demi, entre la société Menuiseries [F] [K] et la société AI2D consenti à usage de hangar pour une superficie de 75m2 ne peut être considéré comme ayant ensuite été poursuivi et soumis au statut des baux commerciaux, puisque même si M. [R] indique (sans le justifier) être gérant de cette société AI2D, il ne démontre pas venir aux droits de cette dernière, et ne peut donc se voir reconnaître un bail soumis au statut des baux commerciaux à échéance de ce bail,
- l'existence du bail verbal revendiqué pour la période postérieure du 14 février 2013 au 8 juin 2015 n'est pas démontrée, faute de preuve d'un accord entre les parties intervenu sur la chose louée et sur le prix et faute de preuve du règlement des loyers qui auraient été convenus, étant observé à cet égard que si M. [R] fournit une facture de travaux d'électricité du 15 avril 2015 pour démontrer la réalisation de travaux dans le local de la société Menuiseries [F] [K], il ne démontre pas l'accord de cette dernière sur le règlement des loyers par compensation avec les travaux réalisés, de sorte que cet élément ne peut être pris en compte comme valant paiement des loyers dus,
- les baux dérogatoires proposés par la société Menuiseries [F] [K] à M. [R] pour des surfaces de 360 m2 et 540 m2 le 8 juin 2015 et pour une surface de 900 m2 le 1er mai 2017 n'ont pas été signés par les parties, faute de tout accord de M. [R] sur la surface et sur le prix proposé, en sorte que M. [R] ne peut s'en prévaloir comme titre, outre qu'il ne démontre pas avoir payé le loyer, les trois virements effectués (deux le 23 juin 2016 à hauteur de 833,33 euros, un le 9 novembre 2016 à hauteur de 1 666,66 euros) pour des montants ne correspondant pas au montant du loyer mensuel proposé dans le bail (9 000 euros TTC), que M. [R] qualifie lui-même d'« indemnité d'occupation » lorsqu'il effectue les virements, ne pouvant être pris en compte puisqu'ils revêtent un caractère équivoque.
Ainsi, M. [R] ne rapporte pas la preuve d'un échange de consentement avec la société Menuiseries [F] [K] sur les termes essentiels des baux commerciaux, baux dérogatoires ou bail verbal, pas plus qu'il ne rapporte la preuve qu'un tel accord aurait ensuite pu être repris d'une quelconque manière par la société Inbox.Loc ni même que celle-ci y exercerait une activité commerciale. Au surplus, la preuve de la contrepartie financière qui s'attache à l'occupation effective des lieux n'est pas établie, ni même l'accord des parties sur un prix de la chose louée.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il dit que M. [R] occupe sans droit ni titre les lieux et en ce qu'il ordonne son expulsion.
Il y a lieu également de confirmer le jugement en ce qu'il n'a pas assorti sa décision d'expulsion d'une astreinte, étant rappelé à cet égard que l'exécution provisoire ayant été arrêtée par le premier président de cette cour, c'est légitimement que M. [R] ne s'y est pas encore conformé et rien n'indique dès lors qu'il n'exécutera pas la décision.
Enfin, en l'absence de toute reconnaissance de l'existence d'un bail, la demande de voir prononcer la nullité de l'assignation faute de commandement visant la clause résolutoire délivré à M. [R] ne peut qu'être rejetée.
Sur l'indemnité d'occupation en contrepartie de la jouissance des locaux
M. [R] ne conteste pas devoir une indemnité d'occupation. Il reproche toutefois au premier juge de s'être considéré compétent et de ne pas avoir ordonné une expertise judiciaire, en fixant le montant sans tenir compte de la valeur réelle du bien ni de sa surface effective, retenant une surface d'au moins 2 342 m2 alors même que la société Menuiseries [F] [K] ne justifie pas de la surface occupée.
De son côté, la société Menuiseries [F] [K] soutient que l'occupation illicite de M. [K] depuis au moins 6 ans lui cause un préjudice important puisqu'elle est dans l'impossibilité de procéder à la location régulière des lieux et que la valeur locative a été justement appréciée par les premiers juges.
Sur ce,
Il est constant que M. [R] est sans droit ni titre et qu'il doit une indemnité d'occupation, à compter du 1er octobre 2014. La précarité de sa situation doit toutefois être prise en compte dans l'évaluation de l'indemnité d'occupation, n'ayant aucun droit à occuper les locaux, ni aucun droit au renouvellement ni aucun droit à la propriété commerciale, l'indemnité d'occupation ne pouvant correspondre à la stricte valeur locative de locaux commerciaux similaires.
Il est tout aussi constant que la société Menuiseries [F] [K], qui a la charge de la preuve sur ce point, ne justifie pas d'un périmètre d'occupation supérieur à 900 m2, puisqu'elle-même entérine cette surface au titre des baux dérogatoires proposés et que les quelques photos produites à ce titre sont insuffisantes à justifier une surface occupée supérieure.
Il sera par ailleurs observé que les parties en litige entretiennent nécessairement des rapports privilégiés, expliquant la tolérance du bailleur à l'occupation de M. [R] pendant un certain temps, sans adresser la moindre mise en demeure. Cette tolérance explique également l'assujettissement de M. [R] à une taxe d'habitation à compter de 2017 qui est nécessairement due à l'initiative du bailleur. En outre, la succession des baux dérogatoires proposés à M. [R] par la société Menuiseries [F] [K] a pu faire croire à ce dernier qu'une solution stable pourrait être trouvée et même l'inciter à poursuivre son exploitation.
La société Menuiseries [F] [K] a elle-même estimé variablement la valeur locative de ses locaux, proposant, dans le cadre des baux dérogatoires, la somme mensuelle de 9 000 euros TTC pour une surface de 900 m2 en 2015 puis la somme mensuelle de 6 000 euros TTC pour la même surface en 2017. Dans le cadre de ses conclusions d'appel de l'ordonnance de référé du 26 février 2016, elle estimait l'indemnité d'occupation mensuelle pour une surface de 1 400 m2 à la somme 1 630 euros. Elle sollicite maintenant la somme de mensuelle de 36 936 euros pour une occupation de 3 142 m2 qu'elle ne justifie pas.
Au regard de l'ensemble de ses éléments, sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise, il convient d'établir l'indemnité d'occupation mensuelle à la somme de 3 000 euros (50% de la somme proposée par la société Menuiseries [F] [K] en 2017 pour tenir compte de la précarité de la situation de M. [R] et à l'inverse pour tenir compte aussi du comportement de la société Menuiseries [F] [K] qui, proposant successivement des baux dérogatoires à M. [R], a pu lui laisser croire qu'elle entendait régulariser la situation) à compter du 1er octobre 2014, qui sera due jusqu'à la libération effective des lieux, soit la somme totale due au 1er avril 2022 de 273 000 euros, terme d'avril 2022 inclus. Le jugement est donc infirmé sur ce point.
Il convient de déduire les sommes déjà réglées par M. [R], soit la somme de 3 333,32 euros. Le jugement est confirmé sur ce point.
Par ailleurs, il n'y a pas lieu d'opérer la compensation des sommes dues avec les travaux réalisés par M. [R], faute de démonstration du moindre accord donné par le bailleur sur ceux-ci, pas plus qu'il n'y a lieu de condamner la société Menuiseries [F] [K] à les régler. Les demandes de M. [R] à ce titre sont rejetées.
S'agissant des charges réclamées, faute de tout titre et donc de stipulation sur la nature des charges et leur répartition et faute de tout accord démontré des parties sur ce point, il y a lieu de rejeter la demande de la société Menuiseries [F] [K] à ce titre et de confirmer la décision.
Enfin, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de voir établir un état des lieux par expert et aux frais de M. [R], qui ne repose sur aucun fondement juridique.
Sur la demande de dommages et intérêts de la société Menuiseries [F] [K]
La société Menuiseries [F] [K], qui sollicite des dommages et intérêts compte tenu du comportement de M. [R] qui n'a réglé aucun loyer, ne démontre toutefois pas un préjudice distinct de celui, déjà réparé, par l'allocation d'une indemnité d'occupation, en sorte que sa demande est rejetée.
Sur la demande de dommages et intérêts de M. [R]
Eu égard à la confirmation du jugement, et à son occupation sans droit ni titre, la demande de M. [R] à titre de dommages et intérêts est rejetée et le jugement confirmé en ce sens.
Sur la demande de délais de M. [R]
La demande de délais que M. [R], qui ne produit pas plus d'élément sur sa situation financière à hauteur de cour, est rejetée et le jugement également confirmé sur ce point.
Sur les dépens et les frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile
M. [R], qui succombe principalement, sera condamné aux dépens et à verser la somme de 1 500 euros à la société Menuiseries [F] [K] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Dit irrecevables les conclusions de la société Menuiseries [F] [K] signifiées le 22 octobre 2021,
Dit irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par M. [H] [R],
Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de la société Inbox.Loc et condamné M. [H] [R] à payer à la société Menuiseries [F] [K] les indemnités d'occupation mensuelles suivantes :
- 12 600 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux A, B et C,
- 1 440 euros TTC, à compter du 1er octobre 2014 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux E,
- 4 860 euros TTC, à compter du 1er août 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux D,
- 2 462,40 euros TTC, à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'au 28 février 2020 pour les locaux G et H,
Et statuant à nouveau,
Dit l'intervention de la société Inbox.Lox recevable,
Condamne M. [H] [R] à verser à la société Menuiseries [F] [K] une indemnité d'occupation mensuelle de 3 000 euros à compter du 1er octobre 2014, pour l'ensemble des locaux occupés, situés au [Adresse 3] à [Localité 7], indemnité due jusqu'à la libération effective des lieux,
Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [H] [R] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés par Maître de Carfort, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Condamne M. [H] [R] à payer à la société Menuiseries [F] [K] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,