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16/02/2021 | FRANCE | N°19/02778

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 2e section, 16 février 2021, 19/02778


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51Z



1re chambre 2e section



ARRET N°



PAR DEFAUT



DU 16 FEVRIER 2021



N° RG 19/02778 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TEMS



AFFAIRE :



Etablissement CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS établissement public



C/

[L] [P]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Mars 2019 par le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE

N° chambre :

N° Sectio

n :

N° RG : 11-17-1278



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16/02/21

à :







Me Martine DUPUIS







Me Franck LAFON





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEIZE FEVRIER DEUX ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51Z

1re chambre 2e section

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 16 FEVRIER 2021

N° RG 19/02778 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TEMS

AFFAIRE :

Etablissement CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS établissement public

C/

[L] [P]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Mars 2019 par le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-17-1278

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16/02/21

à :

Me Martine DUPUIS

Me Franck LAFON

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Etablissement CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS établissement public à statut légal spécial, représentée par

ses représentants légaux, ou habilités à cet effet, domiciliés en cette qualité audit siège, et par sa mandataire FONCIA INSTITUTIONAL PROPERTY MANAGEMENT, société par actions simplifiée unipersonnelle au capital de 3 450 000 euros, dont le siège social est sis [Adresse 6], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 484 882 642, agissant poursuites et diligences de son repré

sentant légal y domicilié en cette qualité.

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1961618 - Représentant : Me BERTHELOT, avocat substituant Me Marie-lise ASSOUS LEGRAND, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1732

APPELANTE

****************

Monsieur [L] [P]

né le [Date naissance 5] 1977 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [R] [S] épouse [P]

née le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 12]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [U] [M] épouse [S]

née le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 10] (MAROC)

[Adresse 9]

[Adresse 9]

Monsieur [Y] [S]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 11]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

INTIMES ayant pour Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20190446 - Représentant : Me Julien COSTANTINI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0165

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Janvier 2021, Monsieur Philippe JAVELAS, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Catherine SPECHT

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé du 5 juin 2012, la Caisse des dépôts et consignations a donné à bail à M. [L] [P], Mme [R] [P], Mme [U] [S], M. [Y] [S] pour une durée de six ans renouvelable à compter du 2 juillet 2012, un logement et ses accessoires situés [Adresse 8], moyennant le paiement d'un loyer mensuel révisable initialement fixé à la somme de 2 720 euros, outre une provision sur charges mensuelle initialement fixée à la somme de 300 euros et le versement d'un dépôt de garantie d'un montant de 2 720 euros.

Les locataires ont restitué les lieux en date du 9 septembre 2015, date à laquelle les parties ont établi un état des lieux de sortie contradictoire.

Suivant courrier recommandé en date du 21 juin 2017, la Caisse des dépôts et consignations a mis en demeure M. et Mme [P] et M. et Mme [S] de lui régler la somme de 1 091,32 euros au titre des charges dues et impayées pour l'année 2014.

Le 2 novembre 2017, le président du tribunal d'instance de Courbevoie a rendu à l'encontre de M. et Mme [P] et M. et Mme [S] une ordonnance portant injonction de payer à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 1 031,32 euros à titre de solde restant dû en vertu du contrat de bail du 5 juin 2012, avec intérêts au taux légal à compter du 21 juin 2017, date du courrier de mise en demeure, outre la somme d'un euro au titre de la clause pénale, la somme de 5,50 euros au titre des frais accessoires et les dépens.

Suivant courrier recommandé du 21 décembre 2017, M. et Mme [P] et M. et Mme [S] ont formé opposition à cette ordonnance.

Suivant acte d'huissier de justice du 29 mars 2018, M. et Mme [P] ont fait citer la Caisse des dépôts et consignations à comparaître devant le tribunal d'instance de Courbevoie auquel ils demandent, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur payer la somme de 3 289,07 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble de jouissance subi,

- annuler les régularisations des charges dues pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015,

- enjoindre à la Caisse des dépôts et consignations de produire, pour ces années, des décomptes de charges conformes aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 et du décret du 26 août 1987 dans un délai de trois mois à compter de la signification de la décision,

- à défaut de production des décomptes conformes dans ce délai, condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur payer la somme de 14 316,67 euros en restitution des provisions sur charges et régularisations de charges indues,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre la charges des dépens de l'instance.

A l'audience, le tribunal d'instance de Courbevoie a ordonné d'office la jonction des instances.

Par jugement contradictoire du 7 mars 2019, le tribunal d'instance de Courbevoie a:

- dit M. et Mme [P] et M. et Mme [S] recevables en leur opposition qui met à néant l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 2 novembre 2017,

et statuant de nouveau par un jugement se substituant à l'ordonnance :

- constaté la prescription de l'action en indemnisation d'un trouble de jouissance subi du 2 avril 2013 au 3 octobre 2013 dérivant du contrat de bail du 5 juin 2012 portant sur un logement et ses accessoires situés [Adresse 8] formée par M. et Mme [P] et M. et Mme [S] à l'encontre de la Caisse des dépôts et consignations,

- constaté la prescription de l'action en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013 dérivant du même contrat de bail formée par M. et Mme [P] et M. et Mme [S] à l'encontre de la Caisse des dépôts et consignations,

- déclaré, en conséquence, irrecevables M. et Mme [P] et M. et Mme [S] en leur demande en indemnisation d'un trouble de jouissance subi du 2 avril 2013 au 3 octobre 2013 et en leur demande subséquente en dommages et intérêts pour résistance abusive,

- déclaré, en conséquence, irrecevables M. et Mme [P] et M. et Mme [S] en leur demande en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013,

- ordonné à la Caisse des dépôts et consignations de produire, dans le délai de quatre mois à compter de la signification de la décision, pour les années 2014 et 2015, des décomptes de charges conformes aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 et du décret du 26 août 1987 et présentés par catégorie de dépenses, isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble situé [Adresse 8] parmi les dépenses de l'ensemble immobilier, répartissant lesdites dépenses par cage d'escalier de l'immeuble, ne comportant, pour l'immeuble et la cage d'escalier considérés, que les dépenses afférentes à des prestations accessoires aux locaux loués par les locataires ou à des services dont ils ont bénéficié, tels que définis par la liste annexée au décret du 26 août 1987, à l'exclusion des dépenses de gardiennage non justifiées à ce jour,

- sursis à statuer sur l'ensemble des autres demandes principales et accessoires formées par les parties,

- renvoyé l'examen du surplus de l'affaire à l'audience du tribunal d'instance du 19 septembre 2019 à 9h30, cette mention valant convocation des parties,

- prononcé l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe en date du 15 avril 2019, la Caisse des dépôts et consignations, représentée par sa mandataire, la société Esset, a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 10 novembre 2020, la Caisse des dépôts et consignations, appelante, demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

- déclarer irrecevables M. et Mme [P] et M. et Mme [S] en leurs demandes, fins et conclusions, leur action étant prescrite,

- débouter en tout état de cause M. et Mme [P] et M. et Mme [S] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

y faisant droit :

- prendre acte qu'elle a tenté de trouver une solution amiable au litige, sans succès, M. et Mme [P] et M. et Mme [S] n'ayant pas réagi aux mises en demeure qui leur ont été adressées,

en conséquence :

- confirmer le jugement rendu le 7 mars 2019 par le tribunal d'instance de Courbevoie en ce qu'il a :

- constaté la prescription de l'action en indemnisation d'un trouble de jouissance prétendument subi du 2 avril au 3 octobre 2013 et pour résistance abusive, ce depuis le 26 mars 2017 à minuit,

- constaté la prescription de l'action en contestation de charges locatives pour les années 2012 et 2013 dérivant du contrat de bail conclu le 5 juin 2012, ce depuis respectivement les 26 mars 2017 à minuit et 7 août 2017 à minuit,

- déclaré en conséquence irrecevables M. et Mme [P] et M. et Mme [S] en leur demande en indemnisation d'un prétendu trouble de jouissance subi du 2 avril 2013 au 3 octobre 2013 dérivant du contrat de bail,

- déclaré en conséquence irrecevables M. et Mme [P] et M. et Mme [S] en leurs demandes en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013 dérivant du contrat de bail,

- infirmer le jugement rendu le 7 mars 2019 par le tribunal d'instance de Courbevoie pour le surplus, et statuant à nouveau :

- condamner solidairement M. et Mme [P] et M. et Mme [S] à lui payer, à titre provisionnel la somme de 1 504,86 euros, avec intérêt au taux légal à compter de la date de la première mise en demeure, outre celle de 150,49 euros au titre de la clause pénale,

- faisant application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, dire que les intérêts qui ont plus d'un an d'ancienneté seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal,

- condamner solidairement M. et Mme [P] et M. et Mme [S] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. et Mme [P] et M. et Mme [S] au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué [Localité 11]-[Localité 13] conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire, compte-tenu de la nature du litige.

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 1er décembre 2020, M. et Mme [P] et M. et Mme [S], intimés et appelants à titre incident, demandent à la cour de :

- infirmer ou réformer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- constaté la prescription de l'action en indemnisation d'un trouble de jouissance subi du 2 avril 2013 au 3 octobre 2013 dérivant du contrat de bail du 5 juin 2012 portant sur un logement et ses accessoires situés [Adresse 8] formée à l'encontre de la Caisse des dépôts et consignations,

- constaté la prescription de l'action en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013 dérivant du même contrat de bail formée à l'encontre de la Caisse des dépôts et consignations,

- déclaré, en conséquence, irrecevables en leur demande en indemnisation d'un trouble de jouissance subi du 2 avril 2013 au 3 octobre 2013 et en leur demande subséquente en dommages et intérêts pour résistance abusive,

- déclaré, en conséquence, irrecevables en leur demande en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013,

et statuant à nouveau :

- déclarer non prescrites, recevables et fondées leurs demandes en indemnisation du trouble de jouissance et en contestation des charges pour les années 2012 et 2013,

en conséquence :

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur verser la somme de 3 289,07 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur trouble de jouissance, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2013, date de mise en demeure, et jusqu'à complet paiement, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- annuler les régularisations de charges des années 2012 et 2013,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur payer la somme de 6 721,81 euros en restitution des provisions et régularisations indues de charges pour les années 2012 et 2013, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2018, date de l'assignation, et jusqu'à complet paiement, avec capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur verser la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2018, date de l'assignation, et jusqu'à complet paiement, avec capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- débouter la Caisse des dépôts et consignations de tous ses chefs de demandes, moyens, fins et conclusions,

- confirmer pour le surplus la décision entreprise,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations à leur verser une indemnité de 5 040 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse des dépôts et consignations aux entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Franck Lafon, FBL Avocats, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 décembre 2020.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la prescription des demandes reconventionnelles en indemnisation de leur préjudice de jouissance et en contestation de charges des époux [S] et [P] pour les années 2012 et 2013

L'appelante conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes de ses anciens locataires en indemnisation de leur préjudice de jouissance en contestation de charges, motif pris de ce que la prescription triennale introduite par la loi du 24 mars 2014, applicable en l'espèce, a commencé à courir le jour de l'entrée en vigueur de la loi, soit le 26 mars 2014, pour s'achever le 26 mars 2017 à minuit, et que les demandes reconventionnelles des intimés ont été introduites postérieurement, par assignation du 29 mars 2018.

Les époux [P] et [S] sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré leurs demandes reconventionnelles prescrites, en faisant valoir que le nouvel article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, substituant une prescription triennale à la prescription quinquennale qui existait antérieurement, ne peut s'appliquer, le litige portant sur un bail conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi et les actions tirées des baux en cours à la date d'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014 restent soumises à la prescription de cinq ans.

Sur ce

L'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, introduit par la loi Alur du 24 mars 2014, met fin à l'application du délai de prescription quinquennale de l'article 2224 du Code civil en matière de bail d'habitation, et instaure un délai de prescription de trois ans pour toutes actions dérivant d'un contrat de bail débutant à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.

Or, la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées. Dès lors, il importe peu que l'article 7-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 n'ait pas été énuméré par l'article 14 de cette loi comme immédiatement applicable à compter du jour de son entrée en vigueur.

Cette règle s'articule avec le principe de non-rétroactivité des lois posé par l'article 2 du Code civil qui fait obstacle à ce que la loi nouvelle s'applique aux situations juridiques anciennes pour en apprécier les conditions de création ou d'extinction ou pour en régir les effets passés.

Par suite, la prescription triennale applicable au bail consenti aux époux [P] doit être calculée dans les conditions fixées par l'article 2222 du Code civil, qui prévoit, qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Il s'ensuit que la prescription, qui a commencé à courir le 26 mars 2014, date d'entrée en application de la loi Alur, a été acquise le 27 mars 2017.

Par suite, c'est à bon droit que le premier juge a déclaré prescrites les demandes reconventionnelles en indemnisation de leur préjudice de jouissance et en contestation de charge introduites par les intimés le 29 mars 2018.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

II) Sur la demande en paiement de la Caisse des dépôts et consignation au titre des régularisations de charges des années 2014 et 2015 (1 504,86 euros)

La Caisse des dépôts et consignations expose à la cour que cette demande n'est pas prescrite, le point de départ de la prescription correspondant à la date de régularisation des charges, soit le 1er mai 2017, et que les époux [P] sont mal fondés à solliciter l'annulation des régularisations de charges et la restitution des provisions qu'ils ont acquittées, dès lors qu'elle s'est conformée en tous points aux exigences de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 en communiquant à ses locataires un décompte par nature de charges et en tenant à leur disposition les pièces justificatives pendant six mois à compter de l'envoi du décompte.

Elle souligne que le mode de répartition des charges est parfaitement équitable en ce qu'il prend en compte la surface habitable et en ce qu'il est conforme aux usages et adopté par la quasi-totalité des ensembles immobiliers du parc locatif.

La Caisse des dépôts et consignations demande, dans le corps de ses écritures, à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble. Elle expose que les charges n'étant pas réparties par bâtiment, il n'était pas possible de verser aux débats les charges afférentes au seul bâtiment occupé par les époux [P] et [S].

Les locataires intimés soutiennent que le bailleur ne peut refacturer aux locataires que les prestations et services dont ils bénéficient directement, que l'appartement occupé par les époux [P] se trouve au sein d'un ensemble immobilier composé de 32 immeubles dont la Caisse des dépôts et consignation est propriétaire, que la bailleresse ne peut faire masse de la totalité des dépenses récupérables des 32 immeubles et les répartir entre les locataires de l'ensemble immobilier au prorata des surfaces qu'ils occupent, chacun de ces immeubles ayant ses parties communes, escaliers et ascenseurs qui lui sont propres, le nombre d'ascenseur étant différent selon les immeubles, certains immeubles disposant d'espaces verts et/ ou de gardiens et d'autres non. Ils exposent que le système de répartition des charges adopté par la Caisse des dépôts et consignations aboutit a refactuer à des locataires des sommes qui ne correspondent ni à des prestations accessoires à la chose louée, puisqu'elles correspondent à un autre immeuble, ni à des services dont ils bénéficient.

Sur ce

La cour relève que le chef du jugement déféré ayant condamné la Caisse des dépôts et consignations à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble ne fait l'objet d'aucune prétention dans le dispositif des dernières conclusions de l'appelante, qui seul saisit la cour.

Par ailleurs, la demande en paiement du reliquat de charge au titre des années 2014 et 2015 a fait l'objet d'un sursis à statuer dans le jugement déféré à la cour. Aucune évocation n'étant possible dans le cas d'un jugement mixte (Cass.2eme civ.30 janvier 2003, n°00-15.914), la cour ne pourra que rejeter la demande en paiement de la Caisse et subséquemment pour les mêmes motifs, ses demandes en paiement au titre de la clause pénale et de capitalisation des intérêts.

III) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par les locataires intimés

La confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes reconventionnelles en indemnisation et en contestation de charges des intimés emporte rejet de cette demande.

IV) Sur les demandes accessoires

M. [L] [P], Mme [R] [P], Mme [U] [S], M. [Y] [S], qui succombent pour l'essentiel seront condamnés aux dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute M. [L] [P], Mme [R] [P], Mme [U] [S], M. [Y] [S] de leurs demandes ;

Déboute la Caisse des dépôts et consignations de ses demandes en paiement de la somme de 1504,86 euros avec intérêts au taux légal, de la somme de 150, 49 euros au titre de la clause pénale et de capitalisation des intérêts ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum M. [L] [P], Mme [R] [P], Mme [U] [S], M. [Y] [S] à payer à la Caisse des dépôts et consignations une indemnité de 1 000 euros ;

Condamne in solidum M. [L] [P], Mme [R] [P], Mme [U] [S], M. [Y] [S] aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de la société Lexavoue [Localité 11] [Localité 13], société d'avocats, qui en a fait la demande.

Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent arrêt exécutoire de plein droit.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Mme SPECHT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 19/02778
Date de la décision : 16/02/2021

Références :

Cour d'appel de Versailles 1B, arrêt n°19/02778 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-02-16;19.02778 ?
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