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17/12/2020 | FRANCE | N°19/03625

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 17 décembre 2020, 19/03625


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E



5e Chambre











ARRET N°20/991



CONTRADICTOIRE



DU 17 DECEMBRE 2020



N° RG 19/03625



N° Portalis

DBV3-V-B7D-TPGV



AFFAIRE :



SAS RANDSTAD





C/



CAISSE PRIMAIRE

D' ASSURANCE MALADIE DES YVELINES









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance

de VERSAILLES

N° RG : 17/00798





Copies exécutoires délivrées à :



-Me Jeanne-marie DELAUNAY



-Me Mylène BARRERE





Copies certifiées conformes délivrées à :



-SAS RANDSTAD



-CAISSE PRIMAIRE

D' ASSURANCE MALADIE DES YVELINES







le :

RÉPUBLIQUE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E

5e Chambre

ARRET N°20/991

CONTRADICTOIRE

DU 17 DECEMBRE 2020

N° RG 19/03625

N° Portalis

DBV3-V-B7D-TPGV

AFFAIRE :

SAS RANDSTAD

C/

CAISSE PRIMAIRE

D' ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° RG : 17/00798

Copies exécutoires délivrées à :

-Me Jeanne-marie DELAUNAY

-Me Mylène BARRERE

Copies certifiées conformes délivrées à :

-SAS RANDSTAD

-CAISSE PRIMAIRE

D' ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS RANDSTAD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Jeanne-marie DELAUNAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 100

APPELANTE

****************

CAISSE PRIMAIRE D' ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Département Juridique

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS,

vestiaire : D2104

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Valentine BUCK, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,

Madame Valentine BUCK, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Clémence VICTORIA , greffier placé

EXPOSE DU LITIGE

M. [Y] [B] [V] a été embauché par la société Randstad  (ci-après la 'Société') le 2 novembre 2016 en qualité d'exploitant industriel monteur 165.

Le 25 novembre 2016, la Société a souscrit une déclaration d'accident du travail au bénéfice de M. [B] [V] auprès de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines (ci-après la 'Caisse' ou 'CPAM') dans les termes suivants :

'Date : 25/11/2016Heure 00/01

Activité de la victime lors de l'accident :M. [B] [V] vissait les tuyaux de climatisation entre eux à l'aide d'une visseuse.

Nature de l'accident : La vis et le boulon se sont bloqués, lui occasionnant une douleur au poignet droit

Siège des lésions : Poignet(s) DROIT(S)

Nature des lésions : Douleur(s)'

Le certificat médical initial établi le 25 novembre 2016 a fait état d'une 'entorse de la main droite' et a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 2 décembre 2016,qui a été prolongé jusqu'au 10 juillet 2017.

Le 2 décembre 2016, la Caisse a notifié à la Société la prise en charge de la lésion au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 23 mars 2017, la Société a saisi la commission de recours amiable (ci-après 'CRA') afin de contester l'imputabilité de l'intégralité des arrêts de travail de M. [B] [V].

Le 16 mai 2017, la Société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines afin de contester la décision implicite de rejet de la CRA.

Par jugement contradictoire en date du 16 septembre 2019 (RG n° 17/00798), le pôle social du tribunal de grande instance de Versailles (ci-après 'TGI') a :

- débouté la Société de sa demande d'expertise judiciaire ;

- déclaré opposable à la Société l'ensemble des arrêts délivrés à M. [B] [V] au titre de son accident survenu le 25 novembre 2016 ;

- condamné la Société aux éventuels dépens postérieurs au 1er janvier 2019.

Par déclaration reçue le 1er octobre 2019, la Société a interjeté appel.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 2 novembre 2020.

Par conclusions reprises à l'audience, la Société demande à la cour de :

- lui déclarer inopposables les arrêts de travail délivrés à M. [B] [V] et qui ne sont pas en relation directe et unique avec l'accident du travail du 25 novembre 2016 ;

A cette fin, avant dire droit,

- ordonner une expertise médicale judiciaire sur pièces et nommer un expert avec pour mission de :

- retracer l'évolution des lésions de M. [B] [V] ;

- dire si l'ensemble des lésions de M. [B] [V] sont en relation directe et unique avec son accident du travail du 25 novembre 2016 ;

- dire si l'évolution des lésions de M. [B] [V] est due à un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte, à un nouveau fait accidentel, ou un état séquellaire ;

- déterminer quels sont les arrêts de travail et lésions directement et uniquement imputables à l'accident du 25 novembre 2016 dont a été victime M. [B] [V] ;

- fixer la date de consolidation des lésions dont a souffert M. [B] [V] suite à son accident de travail en date du 25 novembre 2016 ;

- dire que l'expert convoquera les parties à une réunion contradictoire, afin de recueillir leurs éventuelles observations sur les documents médicaux ;

- dire que l'expert devra en outre communiquer aux parties un pré-rapport et solliciter de ces dernières la communication d'éventuels dires, préalablement à la rédaction du rapport définitif ;

- ordonner au service médical de la Caisse de communiquer l'ensemble des documents médicaux constituant le dossier de M. [B] [V] à l'expert qui sera désigné ;

- dire et juger que les frais d'expertise seront mis à la charge de la Caisse en application des dispositions du nouvel article L. 142-11 du code de la sécurité sociale.

Par conclusions reprises à l'audience, la Caisse demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le TGI en date du 16 septembre 2019 en toutes ses dispositions ;

- débouter la Société de l'intégralité de ses demandes.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Sur l'opposabilité des arrêts de travail

La Société s'interroge, compte-tenu de la bénignité de la lésion initiale consistant en une entorse de la main droite, sur la relation de causalité entre l'accident du travail initial et les arrêts de travail successivement octroyés à M. [B] [V] d'une durée totale de 228 jours. Elle s'appuie pour cela sur l'avis médico-légal du docteur [S] qui ne relève aucun caractère de gravité sur les différents certificats médicaux de prolongation.

La Caisse réplique que M. [B] [V] a bénéficié d'arrêts de travail et de soins continus indemnisés à compter de l'accident jusqu'à la date de guérison fixée au 10 juillet 2017, de sorte que l'ensemble des prescriptions évoquées doit être imputé à l'accident du travail.

En outre, elle fait valoir l'identité de siège des lésions, au poignet droit, et la nature des lésions, l''entorse', de sorte que la présomption d'imputabilité se trouve confortée dans son application.

En ce qui concerne la demande d'expertise, la Caisse considère que cette mesure n'a pas pour objet de pallier la carence de la Société, que l'avis médico-légal du docteur [S] n'apporte aucun élément médical probant et objectif pour justifier sa position et qu'il n'a pas pu procéder à l'examen clinique de la victime, contrairement au médecin traitant, ayant prescrit les arrêts de travail.

Sur ce

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose :

Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

La présomption d'imputabilité énoncée à l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale s'étend aux soins et arrêts de travail prescrits à la suite de l'accident délivrés sans interruption jusqu'à la date de consolidation.

Il appartient alors à la caisse primaire d'assurance maladie de rapporter la preuve de la continuité des symptômes et des soins et à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

En l'espèce, le litige porte sur la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe avec les lésions initiales provoquées par l'accident.

La Caisse produit le certificat médical initial établi par le docteur [X] du service des urgences du centre hospitalier de Meulan, le 25 novembre 2016 mentionnant une 'entorse de la main droite' et prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 2 décembre 2016 et des soins jusqu'au 9 décembre 2016. Elle produit ensuite tous les certificats médicaux de prolongation établis à partir du1er décembre 2016 par le médecin-traitant, le docteur [H], pour une 'entorse poignet droit' correspondant à cet égard au siège et à la lésion signalée dans la déclaration d'accident du travail et étant plus cohérent avec la définition de l'entorse qui est une lésion douloureuse d'une articulation.

La Caisse justifie donc d'une continuité des symptômes et des soins jusqu'au 10 juillet 2017, date du certificat médical final, et il revient à la Société d'apporter des éléments de preuve qu'ils ne sont pas imputables à l'accident survenu le 25 novembre 2016.

A cet égard, la Société a sollicité l'avis du docteur [K] [S] qui a examiné le 3 mai 2019 la déclaration d'accident du travail et les certificats médicaux.

Celui-ci s'est étonné que la totalité des certificats médicaux de prolongation se soient limités à retranscrire le libellé de l'entorse au poignet droit, sans référence à une quelconque thérapeutique, à des examens complémentaires ou des consultations spécialisées. 'De facto, il n'est pas fait état d'une évolution médicale défavorable ou de complication, en particulier ostéoligamentaire. De même, il n'est pas documenté de lésion anatomique, a fortiori traumatique'.

Il a indiqué que : 'l'évolution médicale attendue d'une telle pathologie, en l'absence d'état antérieur ou de complication, est une guérison à échéance de 4 à 6 semaines à l'issue d'un traitement médical simple et d'une courte période de repos (...) il n'y a aucun élément du dossier permettant de considérer la survenue de complications ou d'une évolution médicale défavorable (...) La retranscription successive de constatations médicales inchangées d'une consultation à l'autre permet de considérer que la lésion imputable était manifestement stabilisée bien avant le terme de l'arrêt de travail pris en compte par la caisse.

En ce sens, la date de consolidation retenue par le médecin conseil de la caisse, mettant un terme aux arrêts de travail relatifs à l'AT, est anormalement tardive et ne correspond pas effectivement au moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent, sinon définitif, tel qu'il est possible d'apprécier un éventuel taux d'incapacité permanente ou de prononcer une guérison.

Considérant l'absence de facteur de gravité du traumatisme initial, l'absence d'une continuité de soins formellement documentée, la date de consolidation retenue au titre de l'évolution médicale habituelle d'une blessure telle que celle présentée par Monsieur [B] [V] devait être raisonnablement retenue au 14/01/2017".

En effet, la Cour remarque qu'en l'absence d'éléments médicaux autres que les certificats médicaux de prolongation successifs et répétitifs, ne prescrivant aucun soin particulier, aucune recherche ni aucun bilan, ou encore aucun traitement chirurgical, la Caisse a pris en charge pendant 288 jours ces arrêts de travail sans jamais s'interroger sur leur durée excessive, au regard de la tâche confiée à M. [V] à l'aide de machines professionnelles, sur l'existence d'un état pathologique antérieur ou d'une cause totalement étrangère, ni sur sur une autre date de guérison ou de stabilisation.

Dans ces conditions, la cour considère que ne peuvent être déclarés opposables à la Société que les soins et arrêts de travail jusqu'à la date du 14 janvier 2017 préconisée par le docteur [S], soit une durée de prise en charge de 50 jours raisonnable au regard de la lésion décrite dans l'accident du travail, du travail physique confié à M. [B] [V] et de son âge, celui-ci étant né en 1966.

Le jugement entrepris sera réformé en ce sens, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale judiciaire, une telle mesure n'ayant pas pour but de pallier la carence des parties, ni d'enjoindre à la Caisse de communiquer l'entier dossier de M. [B] [V].

La cour fixera donc à la date du 14 janvier 2017 la limite de l'opposabilité de la prise en charge des arrêts de travail à la suite de l'accident survenu le 25 novembre 2016.

Sur les dépens  

La Caisse, qui succombe à l'instance, supportera les dépens éventuellement exposés depuis le 1er janvier 2019.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement rendu le 16 septembre 2019 (RG n° 17/00798) par le pôle social du tribunal de grande instance de Versailles en ce qu'il a déclaré opposable à la société Randstad la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines de prise en charge de l'ensemble des arrêts et soins consécutifs à l'accident de travail dont a été victime le 25 novembre 2016 M. [Y] [B] [V] ;

Statuant à nouveau,

Décide que sont inopposables à la société Randstad les arrêts de travail prescrits à M. [Y] [B] [V] à compter du 14 janvier 2017 ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines aux dépens ;

Déboute les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Morgane Baché, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03625
Date de la décision : 17/12/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°19/03625 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-17;19.03625 ?
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