La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2020 | FRANCE | N°19/06348

France | France, Cour d'appel de Versailles, 4e ch. expropriations, 13 octobre 2020, 19/06348


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 70H



4ème chambre expropriations



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 13 OCTOBRE 2020



N° RG 19/06348 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TN2D



AFFAIRE :



Société SIMON ET CIE

...



C/

Commune de [Localité 15]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juillet 2019 par le juge de l'expropriation de VERSAILLES



RG n° : 17/003



Expédi

tions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Eric BINETEAU



Me Jean-louis DESPRES





Mme[K][C] Commissaire du Gouvernement



+



Parties





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TREIZE OCTOBRE DEUX...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 70H

4ème chambre expropriations

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 13 OCTOBRE 2020

N° RG 19/06348 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TN2D

AFFAIRE :

Société SIMON ET CIE

...

C/

Commune de [Localité 15]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juillet 2019 par le juge de l'expropriation de VERSAILLES

RG n° : 17/003

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Eric BINETEAU

Me Jean-louis DESPRES

Mme[K][C] Commissaire du Gouvernement

+

Parties

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société SIMON ET CIE

Ayant son siège 18 avenue du 11 novembre

[Localité 13]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Société SOLOTRAT

Ayant son siège [Adresse 5]

[Localité 15]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Julien BORDERIEUX Substituant Maître Eric BINETEAU de la SELARL HORUS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R213

APPELANTES

****************

Commune de [Localité 15]

[Adresse 17]

[Adresse 17]

[Localité 15]

Représentant : Maître Jean-louis DESPRES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0540

INTIMEE

****************

Les fonctions du COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT étant exercées par Madame [K] [C], direction départementale des finances publiques.

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2020, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès BODARD-HERMANT, présidente, et Madame Marie-Pierre BAGNERIS, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente,

Madame Pascale CARIOU, Conseillère,

Madame Marie-Pierre BAGNERIS, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

FAITS ET PROCEDURE,

La SCI Simon et Cie était propriétaire, de la parcelle cadastrée section BI n°[Cadastre 11] située [Adresse 5], pour une contenance de 15 913 m².

Elle faisait l'objet d'un bail commercial, consenti le 12 août 2008 avec effet le 13 août 2008 pour une durée de 9 ans soit jusqu'au 12 août 2017, moyennant un loyer principal annuel de 120.000 euros HT, au profit de la société Solotrat qui a pour activité la réalisation de travaux de terrassement et de travaux préparatoires divers.

Cette parcelle est située sur l'emprise du projet « Sports en rives de Seine', déclaré d'utilité publique par arrêté préfectoral du 12 août 2014.

L'ordonnance d'expropriation nécessaire à la réalisation de ce projet a été rendue par le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Versailles le 20 février 2015.

A défaut d'accord entre les parties sur le montant des indemnités de dépossession et d'éviction devant revenir à l'une et l'autre des expropriées, celles-ci ont saisi ce juge le 23 mars 2017 en vue de leur fixation.

Par jugement du 17 juillet 2019, ce juge a fixé :

-l'indemnité de dépossession à la somme de 742 701 € indemnité de remploi comprise

-l'indemnité d'éviction à la somme de 228 815,60 €.

Il a en outre condamné la commune de Carrières-sur-Seine à payer aux expropriées une indemnité de procédure de 1.000 euros, laissé les dépens à sa charge et rejeté toute autre demande.

Les sociétés Simon & Cie et Solotrat, expropriées ont interjeté appel de ce jugement suivant déclaration du 16 août 2019 reçue au greffe le 19 août 2019.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 18 novembre 2019, notifiées à l'expropriant et au commissaire du gouvernement (AR signés le 20 novembre 2019), elles demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

-Condamner la commune de Carrières-sur-Seine à verser les indemnités suivantes :

o Au profit de la SCI Simon & Cie : 2.713.060 €, se décomposant comme suit :

*1.629.600€ au titre de l'indemnité principale,

*1.083.460€ au titre de l'indemnité accessoire.

o Au profit de la société Solotrat : 955.730 € se décomposant comme suit :

*838.680 € au titre de l'indemnité d'éviction,

*83.068 € au titre du remploi,

*33.982 € au titre des indemnités accessoires.

-Condamner la commune de Carrières-sur-Seine à leur verser une indemnité de procédure de 5.000 €.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 17 février 2020, notifiées aux expropriées et au commissaire du gouvernement (AR signés le 19 février 2020), la commune de Carrières-sur-Seine, expropriant intimé , demande à la cour de :

-Fixer l'indemnité à revenir à la propriétaire à la somme de 607 000 € à titre principal et en valeur occupée et 61 700 € au titre du remploi,

-Dire que les frais éventuels de dépollution du sous-sol seront à la charge de l'expropriée et déduits de son indemnité totale de dépossession,

-Confirmer le jugement quant à l'indemnité d'éviction allouée à la SAS SOLOTRAT

-Laisser les dépens à sa propre charge.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 20 février 2020, notifiées aux expropriées et à l'expropriant (AR signés le 24 février 2020), le commissaire du gouvernement de confirmer le jugement entrepris.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 4 mai 2020, notifiées à l'expropriant et au commissaire du gouvernement (AR signés le 20 mai 2020), les expropriées répondent à l'expropriant et au commissaire du gouvernement sans modifier leurs demandes initiales, et versent une pièce nouvelle (n° 9, règlement du PPRI).

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 31 août 2020, notifiées à l'expropriant et au commissaire du gouvernement (AR signés le 3 septembre 2020), les expropriées demandent à la cour, en versant deux pièces nouvelles 10 et 11 (renouvellement de bail corrigé et terme de comparaison) d'augmenter enccore l'indemnité de dépossession à 5.688.675 € se décomposant comme suit :

*indemnité principale : 4.334.250 €

*indemnité accessoire : 1.354.425 €,

sans modifier le surplus de leurs demandes initiales.

Par conclusions reçues au greffe de la cour le 4 septembre 2020, notifiées aux expropriées et au commissaire du gouvernement (AR signés le 8 septembre 2020) l'expropriant conclut à irrecevabilité du dernier mémoire des expropriées et maintient ses demandes initiales.

Par conclusions notifiées par RPVA le 7 septembre 2020, les expropriées répondent à l'expropriant quant à l'irrecevabilité soulevée et maintiennent leurs prétentions pour le surplus.

***

Les parties ont été convoquées à l'audience du 12 mai 2020 et à celle du 8 septembre 2020 à laquelle elle a été renvoyée en raison de la crise sanitaire liée à la Covid 19.

SUR CE LA COUR

1 - Sur la recevabilité des dernières conclusions des expropriées

Vu l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, selon lequel l'intimé à un appel incident dispose d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour conclure.

Force est de constater que ce délai était largement expiré lorsque les expropriées, après avoir répondu une première fois dans ce délai de trois mois à l'appel incident de l'expropriant qui leur a été notifié le 19 février 2020, par conclusions reçues au greffe le 4 mai 2020, ont répondu, pour la deuxième fois par conclusions reçues au greffe le 31 août 2020.

Or, ces conclusions reçues au greffe de la cour le 31 août 2020 contiennent une prétention nouvelle en ce qu'elles augmentent , notablement, l'indemnité de dépossession demandée et elles comportent deux pièces nouvelles n° 10 et 11.

Par ailleurs, l'article 954 du code de procédure civile notamment relatif aux conclusions recapitulatives est inapplicable à la procédure d'expropriation de sorte que les expropriées soutiennent à tort que leurs conclusions reçues le 31 août 2020 ne sont nullement concernées par les dispositions de l'article R. 311-26 susvisé, en ce qu'elles sont complémentaires et récapitulatives et en ce qu'elles sont produites eu égard à la nécessité de faire état d'éléments nouveaux de nature à éclairer la cour.

En conséquence, ces conclusions doivent être déclarées irrecevables, ainsi que les deux pièces nouvelles qu'elles comportent.

Les conclusions notifiées postérieurement le 7 septembre 2020, doivent l'être également, hormis en ce qu'elles répondent à l'exception d'irrecevabilité soulevée par l'expropriant.

2 - Sur la description du bien exproprié

Au vu des écritures et pièces des parties ainsi que du procès verbal de transport sur les lieux du 12 octobre 2018, il s'agit d'une parcelle de terrain bâti, cadastrée BI [Cadastre 11] d'une contenance de 15.913 m², classée en zone NL (accueil d'activités de loisirs de taille limitée sur une zone naturelle, non équipée, à protéger en raison de la qualité du site), sur emplacement réservé n° 13, du Plan Local d'Urbanisme (PLU) de la commune de [Localité 15], approuvé par délibération du conseil municipal le 10 février 2014.

Auparavant, soit du 13 octobre 2010 au 9 février 2014, elle était classée en zone ND (POS), après avoir été classée jusqu'au 12 octobre 2010 , en zone UI (terrain industriel).

Elle comporte différents locaux, d'une emprise au sol de 1.452 m² : deux ateliers (400 et 600 m²), un bâtiment à usage de bureaux (400 m²) et un local sanitaire (200 m²).

De par son zonage, cette parcelle ne peut servir de stockage du métal, les dépôts à l'air libre y étant interdits (article N 1 du PLU).

Par ailleurs, elle est concernée par le Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI) de la vallée de la Seine et de l'Oise approuvé par arrêté préfectoral du 30 juin 2007, qui en limite la constructibilité.

La commune de [Localité 15] est située dans une boucle de la Seine, à environ 10 kilomètres à l'Ouest de la [Localité 19], 7 kilomètres de [Localité 20] et 15 kilomètres de [Localité 23]. Elle jouxte les communes de [Localité 14] et [Localité 16].

3 - Sur l'indemnité de dépossession

3.1 - Sur la date de référence

Vu les articles L 322-1, L. 322-2, L. 322-3 et L. 322-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique,

Vu L. 562-4 du code de l'environnement,

Vu le PLU de la commune de [Localité 15] approuvé par délibération de son conseil municipal le 10 février 2014, qui classe le bien exproprié en zone NL (accueil d'activités de loisirs de taille limitée sur une zone naturelle non équipée à protéger en raison de la qualité du site), sur emplacement réservé n° 13,

Vu le PPRI de la vallée de la Seine et de l'Oise approuvé par arrêté préfectoral du 30 juin 2007, annexé à ce PLU,

Il résulte de ces dispositions que, s'agissant d'un bien situé en emplacement réservé, la date de référence doit être fixée au 10 février 2014, date d'approbation du PLU susvisé et que l'usage du bien exproprié doit être évalué, à cette date, en fonction du zonage NL de ce PLU, c'est-à-dire celui d'une parcelle naturelle à usage d'activités sportives et de loisirs de taille limitée dont la constructibilité est restreinte, les dépôts à l'air libre y étant notamment interdits, cette parcelle étant en outre concernée par diverses restrictions administratives et servitudes d'utilité publique résultant notamment du PPRI précité, qui limite sa constructibilité en raison de risques d'inondation l'exposant à des aléas forts (entre 1 et 2 m).

Cette date de référence n'est pas contestée par les expropriées.

Et c'est vainement qu'elles soutiennent au visa de l'article L.322-3 alinea 4 du code précité, relatif à la qualification de terrain à bâtir, que seul doit être retenu l'usage effectif du bien exproprié, soit en l'espèce celui en poursuite d'usage industriel et commercial antérieur au changement de zone intervenu le 10 février 2014, peu important les limitations à cet usage résultant du PLU.

En effet, les expropriées invoquent au soutien de cette thèse, la constructibilité résiduelle du terrain , qu'elles détaillent, en ce qu'elle resterait très importante (conclusions page 6-7, pièce 9) mais il est classé en majorité en zone rouge clair stricte du PPRI, ainsi qu'en zone verte et marron, qui bénéficient d'une constructibilité très limitée.

En outre, elles ne prétendent pas que le terrain est équipée des réseaux utiles, au sens de ce texte, alors que la zone N dans laquelle elle se situe n'est pas équipée, comme indiqué au point précédent et alors qu'en l'absence de viabilisation à la date de référence, le terrain ne peut être considéré comme un terrain à bâtir même si, à cette même date, le zonage ouvre des droits à construire.

En tout état de cause, un usage effectif ne peut être pris en compte que s'il n'est pas contraire aux règles d'urbanisme applicables, peu important l'absence d'engagement d'une procédure administrative pour violation de celles-ci. Or, le procès verbal de transport sur les lieux du 12 octobre 2018 mentionne la présence de grandes bennes sur un vaste terrain derrière l'atelier, alors qu'ainsi que le relève le commissaire du gouvernement (conclusions p.5), les dépôts à l'air libre sont prohibés par l'article N 1 du PLU.

Au demeurant, encore, l'expropriant dénonce la présence d'un rehaussement illégal pour lesquels les expropriées doivent au minimum justifier d'une déclaration préalable (article R421-23.f du code de l'urbanisme) sans que les expropriées n'établissent que les remblais assez hauts entourant tout le fond de la parcelle expropriée au vu procès verbal de transport sur les lieux, n'en n'exigent pas comme étant d'une hauteur inférieurs à 2 metres de haut et d'une superficie inférieure à 100 m².

Par ailleurs, les expropriées ne tirent aucune conséquence juridique de leur allégation selon laquelle le déclassement de la parcelle litigieuse en 2014, alors qu'il se situe dans le prolongement de sites urbanisés à vocation industrielle et d'habitat, a été fait en vue de limiter la valorisation possible de cette parcelle que la commune souhaitait déjà acquérir pour réaliser son projet.

A cet égard, l'expropriant fait valoir, sans être contredit, que le recours des expropriées contre le PLU approuvé le 10 février 2014, en ce qu'il classe le bien en cause en zone naturelle, a été rejeté par jugement du tribunal administratif de Versailles du 7 novembre 2016 (pièce 6).

En conclusion, l'usage industriel et commercial revendiqué ne saurait être pris en compte pour l'évaluation du bien exproprié qui le sera en fonction de celui prévu au PLU, soit celui d'une parcelle naturelle à usage d'activités sportives et de loisirs.

3.2 Sur la valeur vénale du terrain :

La méthode par comparaison n'est pas contestée par les expropriées qui n'en proposent pas d'autre et qui produisent six termes de comparaison en appel.

Le commissaire du gouvernement fait cependant justement valoir que les deux premiers sont dénués de pertinence s'agissant pour l'un (14 rue de [Localité 14], 40 €/m²) d'une vente intervenue dans le cadre du règlement d'une succession dont le prix n'est pas représentatif de la valeur du marché compte tenu de l'interférence de considérations familiales et pour l'autre (parcelles en zone UH [Cadastre 8] [Adresse 17]) de ventes d'appartement en VEFA.

Quant aux quatre autres termes de comparaison, ils ne sont pas situés à [Localité 15] mais à [Localité 14], sans précision quant aux caractéristiques des biens vendus, sur la période 2013-2016. Ils ne sont donc pas susceptibles de remettre en cause la valeur vénale de 10 € le m² retenue par le jugement entrepris et accepté par le commissaire du gouvernement comme par l'expropriant.

La cour adopte en conséquence cette valeur qui correspond à la valeur haute du marché de [Localité 15] en zone N ou NL, qui se situe entre 7 et 10,48 € le m² avec une prédominence des termes à 7 € le m², ainsi qu'en attestent les 7 termes de comparaison suivants de l'expropriant (conclusions p.7) et du commissaire du gouvernement (conclusions p. 10) :

*Vente du 29/12/2010 - Parcelles BI n° 62 / 63 et 65 - cession RFF -$gt; Commune ' Zone N.L. du P.L.U. - Prix : 19 180 € pour une surface totale : 7 238 m² soit 2,65 €/m²

*Vente du 13/12/2013 à la Commune - Parcelles BK n° [Cadastre 2] / [Cadastre 3] et [Cadastre 4] situées dans [Localité 18] face à la parcelle en cause , classement en zone N.L. du P.L.U. de [Localité 15] et zone verte et marron du P.P.R.I. - Prix : 8 526 € pour une surface totale de 1 218 m² soit 7 €/m²

*Cession amiable à la communauté d'agglomération du 15/02/2013 - Parcelles cadastrées section BV [Cadastre 12] et BV [Cadastre 7] pour une contenance totale de 1.475 m² - zone NAD du P.O.S. de l'époque c'est-à-dire zone d'urbanisation future avec absence de servitude. - Prix : 14 750 € soit 10 €/m².

*Mutation du 09/12/2011 sur [Localité 22]. Acquisition par la région IDF pour extension de la base de loisirs du Val de Seine - parcelle A [Cadastre 6], terrain en zone NI, emplacement réservé : 440 000 € pour 41 993 m² soit 10,48 € /m²,

*Mutation du 13/05/2011 sur [Localité 21] pour la réalisation d'équipements de loisirs - parcelle R [Cadastre 10], terrain en zone N : I92 000 € pour 25 260 m² soit 7,60 €/m²,

*Mutation du 13/12/2013 sur [Localité 15] - acquisition par la ville - parcelles BK [Cadastre 2]/[Cadastre 3]/[Cadastre 4], terrain en zone NL, PPRI zones matron et verte : 1 218 m² pour 8 526 € soit 7/ m²,

*Mutation du 25/06/20l5 sur [Localité 15] - acquisition par le département du Val d'Oise - parcelle BK [Cadastre 9], terrain en zone NL, PPRI zones marron et verte : 42 553 € pour 6 079 m² soit 7 €/m².

Enfin, vu l'article L. 321-1 code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, la demande de l'expropriant au titre des 'éventuels frais de dépollution' ne peut aboutir.

En définitive, le jugement entrepris retient à bon droit, pour le terrain non bâti, l'offre de l'expropriant à hauteur de 145 000 € arrondis [ (15913 - 1452=14461m²) x 10 €/m² =

144.610 € ].

3.3 Sur la valeur des bâtis :

Le jugement entrepris retient une valeur vénale totale de 529.274 € sur laquelle l'expropriant et le commissaire du gouvernement s'accordent.

Les expropriées contestent vainement cette valeur en retennant celle de 356.000€, plus faible, évaluée en référence à leur expertise amiable, sans plus de précision (pièce 3), qu'aucun terme de comparaison n'étaye (conclusions p.12).

3.4 Sur l'abattement pour occupation

L'expropriant est fondé à obtenir un abattement de cette valeur pour tenir compte de l'occupation du terrain, dès lors qu'il doit en indemniser la locataire, ce qui constitue un coût pour lui.

Etant observé :

-que l'expropriant ne justifie pas de circonstance de fait et de droit permettant de déterminer le taux à retenir, habituellement situé en matière de bail commercial, entre 20 et 40 % ,

-que le commissaire du gouvernement fait valoir que l'occupation n'est pas systématiquement synonyme de moins-value pour les terrains industriels et d'activités, en principe loués,

-et qu'il existe des liens familiaux entre les gérants des deux sociétés expropriées,

la cour retient la proposition de l'expert amiable de l'expropriant qui se situe à 10 % (pièce 7, p.25) soit 674.274 x 0,9 = 606.846,60 arrondis à 607.000 €,

***

L'indemnité de dépossession principale, en valeur occupée, s'élève donc à 607.000 € et le jugement entrepris sera infirmé en conséquence .

3.5 Sur les indemnités accessoires

Les modalités de calcul de l'indemnité de remploi n'étant pas contestées, l'indemnité de remploi s'élève à 61.200 € ( 20 % jusqu'à 5.000 € , 15 % de 5.000 à 15.000 € et 10 % au delà de 15.000 €).

Par ailleurs, la SCI Simon & Cie prétend au bénéfice d'une indemnité pour la perte des loyers qu'elle aurait perçus jusqu'à l'issue du bail, qu'elle dit avoir renouvelé le 12 août 2017 pour 9 ans.

A la date de l'ordonnance d'expropriation portant transfert de propriété soit le 20 février 2015, la SCI Simon & Cie n'était plus propriétaire du bien litigieux, elle ne pouvait donc plus renouveler le bail initial en 2017 et ne peut prétendre percevoir les loyers de ce bail prétendument renouvelé.

Quant aux loyers non perçus entre le 20 février 2015 et la date d'expiration du bail initial, soit le 12 août 2017, les expropriées bénéficient d'un droit à cette indemnité mais ne formulent aucune demande spécifique à ce sujet et ne produisent surtout aucun décompte détaillé à l'appui de la somme totale de 920.000€ sollicitée.

En cet état et compte tenu de la durée nécessaire à l'acquisition d'un nouveau bien équivalent et à sa mise en location dans la région, dont les expropriées qui ne formulent aucune observation ne prétendent pas qu'elle doit tenir compte de difficultés particulières, l'indemnité sera fixée à une durée moyenne de 9 mois de loyer annuel tel qu'admis ci-dessous, soit 132 264 x 9/12 = 99.198 €.

***

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il fixe l'indemnité de dépossession, indemnité de remploi comprise, à 742.001 €.

4 - Sur l'indemnité d'éviction

4.1 Sur l'indemnité principale

Les parties s'accordent sur la méthode dite du différentiel de loyer pour déterminer le montant du droit au bail et sur le montant du loyer réel annuel à prendre en compte, soit

132.264 € HT.

Elles s'opposent en revanche sur le montant du loyer théorique.

Les expropriées l'évaluent à 300.000 € compte tenu des caractéristiques du terrain correspondant en tous points aux besoins de la locataire et de son emplacement stratégique bénéficiant d'une desserte exceptionnelle ( A86 ; A14 ; A1 ; RN 13 ; D186 ; D392  ; D311 et D 321)

L'expropriant l'évalue, à l'instar du jugement entrepris, à 190.956 € soit 12 €/m² sur la base de l'étude de marché produite par le commissaire du gouvernement. Il fonde cette évaluation sur l'état vétuste et très dégradé des lieux dont la localisation n'est pas favorable, du fait de contraintes importantes , résultant en particulier du PPRI ( article 3 du Titre I de son règlement) qui a mis en évidence un risque fort d'inondation, ce qui signifie une constructibilité très limitée.

Les parties s'opposent donc aussi sur le coefficient multiplicateur du différentiel de loyer à retenir pour déterminer le montant du droit au bail, lequel dépend précisément de la situation du bien et varie de 2,5 à 8 selon la jurisprudence et la doctrine.

Le jugement entrepris dont la confirmation est requise de ce chef par l'expropriant et le commissaire du gouvernement retient un coefficient de 3 s'agissant de dépôts, ateliers et locaux industriels de [Localité 15], ce que contestent les expropriées qui revendiquent, au vu de l'argumentaire ci-dessus, un coefficiant minimum de 5.

Cependant, le sens de l'arrêt conduit à la confirmation du jugement entrepris tant sur le différentiel que sur le coefficient.

Il suffira d'ajouter ce qui suit.

Quant au loyer théorique allégué, les expropriées ne produisent pas de terme de comparaison pour en justifier en appel et le bail renouvelé sans droit par la SCI Simon & Cie en 2017 est dénué de toute force probante à cet égard.

Quant au coefficient, le commissaire du gouvernement fait justement valoir, sans observation des expropriées , que la valeur du droit au bail que ces dernières invoquent, soit 838.680 € (300.000 - 132.264 = 167.736 € x5) apparaît tout à fait excessive par rapport à celle obtenue par la méthode forfaitaire, généralement arbitrée par les juges à trois mois de loyers par année résiduelle du bail ou un an de loyer, méthode alternative qui aboutit à une valeur arrondie comprise entre 72.000 et 132.000 €.

En définitive, l'indemnité d'éviction principale s'élève, selon la méthode du différentiel de loyer, à la somme retenue par le jugement entrepris de 176.076 € [(190.956 - 13.264 = 58.692) x 3].

4.2 Sur l'indemnité de remploi

La méthode de calcul de cette indemnité n'étant pas contestée (5 % sur les premiers 23.000 € puis 10 % sur le surplus), le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il retient, sur la base de l'indemnité d'éviction retenue ci-dessus, la somme de 18.757,60 €.

La cour n'est pas saisie des chefs du surplus des indemnités accessoires qui ne sont pas contestées (indemnité pour trouble commercial, frais de double loyers et frais administratifs pour un montant total de 33.982 €).

***

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il retient une indemnité d'éviction principale de 176.076 € et une indemnité de remploi de 18.757,60 €.

5 - Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris a mis les dépens de première instance à la charge de l'expropriant conformément à l'article L. 312-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et fait une application équitable de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile et le sens de l'arrêt, chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel si bien qu'il n'y a pas lieu à indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de sa saisine,

Déclare irrecevables les conclusions de la SCI Simon & Cie et de la société Solotrat reçues au greffe de la cour le 31 août 2020 et les deux pièces nouvelles n° 10 et 11 qu'elles comportent ainsi que leurs conclusions signifiées par RPVA le 7 septembre 2020, sauf en ce qu'elles répondent à l'exception d'irrecevabilité soulevée par l'expropriant ;

Confirme le jugement entrepris des chefs de l'indemnité d'éviction, des dépens et de l'indemnité de procédure ainsi qu'en ce qu'il rejette la demande formée par la commune de Carrières-sur-Seine au titre 'des frais éventuels de dépollution du sous-sol ' ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe l'indemnité de dépossession des biens immobiliers situés [Adresse 5]) cadrastrés section B[Cadastre 1] N°[Cadastre 11], appartenant à la SCI Simon & Cie, comme suit :

*indemnité principale, en valeur occupée : 607.000 € ;

*indemnité pour perte de loyers : 99.198 € ;

*indemnité de remploi : 61.200 € ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel et rejette toute autre demande.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,La PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 4e ch. expropriations
Numéro d'arrêt : 19/06348
Date de la décision : 13/10/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 4E, arrêt n°19/06348 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-13;19.06348 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award