COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50A
3e chambre
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 01 OCTOBRE 2020
N° RG 19/06745
N° Portalis DBV3-V-B7D-TOZV
AFFAIRE :
[A], [Y] [J] épouse [N], es qualité de liquidateur amiable de la société ICAR
...
C/
[M] [Z] [T] [W]
...
Décision déférée à la cour :
Jugement 12 mars 2015
TGI Nanterre 2ème chambre
REQUETE INSCRIPTION FAUX
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Stéphanie CHANOIR
Me Helga ASSOUMOU
Me Stéphane CHOISEZ de la SELARL CHOISEZ & ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
1/ Madame [A], [Y] [J] épouse [N] ès qualités de liquidateur amiable de la société ICAR
née le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 13] (92)
de nationalité Française
[Adresse 9]
[Localité 14]
2/ SARL ICAR, réprésentée par son mandataire ad litem, Me [A] [J] épouse [N]
N° SIRET : 381 051 861
[Adresse 9]
[Localité 14]
Représentant : Me Stéphanie CHANOIR, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 143
Représentant : Me Cédric LECOMTE-SWETCHINE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R260
DEMANDERESSE A L'INSCRIPTION DE FAUX
****************
1/ Madame [M] [Z] [T] [W]
née le [Date naissance 5] 1984 à [Localité 16] (91)
de nationalité française
[Adresse 8]
[Localité 12]
2/ Monsieur [X] [G] [I], représenté par son représentant légal, Madame [M], [Z], [T] [W]
né le [Date naissance 2] 2008 à [Localité 17]
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 12]
en sa qualité d'ayant-droit de [E] [V] [I], décédé le [Date naissance 10] 2015 à [Localité 15] (91)
Représentant : Me Helga ASSOUMOU, Postulant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 369
Représentant : Me Joy TOURET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1478
DEFENDEURS A L'INSCRIPTION DE FAUX
3/ SARL SOCRIS IMMOBILIER
N° SIRET : 494 540 776
[Adresse 1]
[Localité 12]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Stéphane CHOISEZ de la SELARL CHOISEZ & ASSOCIES Société d'avocats, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2308
DEFENDERESSE A L'INSCRIPTION DE FAUX
4/ SARL ARCORE
N° SIRET : 389 702 390
[Adresse 6]
[Localité 13]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
DEFENDERESSE A L'INSCRIPTION DE FAUX
Le procureur général a visé la procédure le 26 novembre 2019
****************
Composition de la cour :
L'affaire était fixée à l'audience publique du 2 juillet 2020 pour être débattue devant la cour composée de :
Madame Marie-José BOU, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
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En application de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 portant, notamment, adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, il a été décidé par le président que la procédure susvisée se déroulerait sans audience.
Les parties en ont été avisées par le greffe le 3 juin 2020 et ces dernières ne s'y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.
Ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi.
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FAITS ET PROCÉDURE
Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, a interjeté appel le 11 février 2019 d'un jugement réputé contradictoire du 12 mars 2015, assorti de l'exécution provisoire, rendu dans un litige l'opposant notamment à [E] [I], Mme [W] et à l'agence immobilière la société Socris.
Le jugement a notamment prononcé la résiliation de la vente conclue le 18 décembre 2008 entre [E] [I] et Mme [W], d'une part, et la société Icar, d'autre part, du bien immobilier situé [Adresse 8]. Il a également condamné in solidum la société Icar et Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, à hauteur de 80% pour cette dernière à restituer à [E] [I] et Mme [W] la somme de 190 000 euros au titre du prix de vente et à payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts.
Mme [W] et son fils [O] [I], par elle représenté, ayant droit de [E] [I] décédé le [Date décès 11] 2015 ont formé un incident devant le conseiller de la mise en état afin qu'il déclare irrecevable l'appel interjeté par Mme [N].
Par ordonnance du 9 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a :
rejeté la demande d'annulation de l'acte de signification du jugement du 12 mars 2015 par acte d'huissier du 3 avril 2015, formée par Mme [N],
déclaré irrecevable l'appel interjeté par Mme [N], en sa qualité de liquidateur de la société Icar, le 11 février 2019 à l'encontre du jugement rendu le 12 mars 2015 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
condamné Mme [N], en sa qualité de liquidateur de la société Icar à payer à Mme [W] et à son fils, [O] [W], la somme de 2 000 euros et à la société Socris Immobilier la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné Mme [N], en sa qualité de liquidateur de la société Icar aux dépens de l'incident.
Par requête du 24 septembre 2019, Mme [N] ès qualités, a déféré cette décision devant la cour.
Par requête en inscription de faux déposée le 30 octobre 2019, Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, demande à la cour de :
constater que les mentions suivantes que Maître [L] [P] a portées sur l'acte de signification argué de faux : J'ai adressé à la dernière adresse connue de l'intéressé une copie du procès-verbal de recherche à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification, par lettre recommandée avec avis de réception au plus tard le premier jour ouvrable suivant l'établissement du présent acte' sont inexactes et constituent un faux, dépourvu de toute valeur juridique,
déclarer nul et de nul effet le procès-verbal de signification du 3 avril 2015 rédigé par Maître [L] [P] huissier de justice de la SCP Teboul Nivollet [P],
juger que nul ne peut, ni ne pourra s'en prévaloir,
statuer ce que de droit sur les dépens.
Aux termes de conclusions du 17 juin 2020, elle a maintenu ses demandes et y ajoutant, a demandé à la cour de juger qu'elle ne peut statuer sur 'le moyen tiré de la prétendue irrecevabilité de la prétendue exception de procédure' dans le cadre de cette action en inscription de faux, à titre subsidiaire, de juger que les dispositions de l'article 74 du code de procédure civile ne sont pas applicables à l'espèce et de débouter, en conséquence, les consorts [W] de leur moyen d'irrecevabilité.
Par conclusions du 5 février 2020, la société Socris Immobilier demande à la cour de rejeter la requête en inscription de faux du 30 octobre 2019 déposée par Mme [N] et de la condamner au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec recouvrement direct.
Aux termes de conclusions du 23 juin 2020, Mme [W] et son fils demandent à la cour de :
déclarer irrecevable la requête en inscription de faux,
juger abusive et dilatoire cette requête,
par conséquent, condamner Mme [N] à la somme de 105 000 euros à titre de dommages-intérêts,
la condamner à verser la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
la débouter de toutes ses demandes.
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
Le procureur général près cette cour a visé la procédure le 26 novembre 2019.
Les parties ont été destinataires de l'avis adressé en application de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 et ont déposé leurs dossiers.
MOTIFS
- Sur la recevabilité de la requête
Sous le titre 'l'irrecevabilité de l'inscription de faux', Mme [W] et son fils développent en réalité des arguments tendant au rejet de la requête en inscription de faux eu égard à son caractère mal fondé.
La requête sera donc déclaré recevable, aucun moyen n'étant invoqué au soutien de son irrecevabilité.
- Sur le bien fondé de la requête
Mme [N] soutient que la mention de l'huissier selon laquelle l'acte de signification du jugement à la société Icar du 3 avril 2015 aurait fait l'objet d'un envoi par lettre recommandé avec accusé de réception est fausse puisque l'accusé de réception n'est pas versé aux débats.
La requête en inscription de faux s'inscrit dans la suite de l'ordonnance d'incident du 9 septembre 2019, déférée à la cour, dans laquelle le conseiller de la mise en état a indiqué que la mention litigieuse faisait foi 'jusqu'à inscription de faux, en sorte que Mme [N] ne peut se contenter de les remettre en cause, étant ajouté qu'elle ne justifie pas du moindre grief lié à l'absence de communication du retour de l'avis de réception'.
Aux termes de l'article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ; le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification. Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité. Ces dispositions sont applicables à la signification d'un acte concernant une personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés.
C'est en application de ces dispositions que l'huissier, dans l'acte de signification du jugement, qu'il a établi le 3 avril 2015 à destination de la société Icar, après avoir indiqué que cette dernière n'avait plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social dans le RCS, que son liquidateur amiable ne résidait plus à l'adresse figurant dans le jugement, a écrit : 'j'ai adressé à la dernière adresse connue de l'intéressé, une copie du procès-verbal de recherches à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification, par lettre recommandée avec avis de réception au plus tard le premier jour ouvrable suivant l'établissement du présent acte'.
Mme [N] soutient donc que l'huissier a menti en faisant état de cette diligence qu'il n'aurait en réalité pas accomplie.
Il sera observé que l'inscription de faux se limitant à cette mention, les développements que consacre Mme [N] aux constatations visuelles qu'aurait dû faire l'huissier lorsqu'il s'est rendu à l'adresse connue de la société Icar n'ont pas de rapport avec l'objet de la présente instance.
Si l'avis de réception de la lettre recommandée adressée à la société Icar n'est effectivement pas produit aux débats, l'huissier ayant indiqué qu'il ne l'avait pas et n'avait pas d'obligation de l'annexer aux originaux des actes conservés au rang de ses minutes, Mme [W] et son fils communiquent le bordereau récapitulant les 17 lettres recommandées avec avis de réception que la SCP Tebouil Nivollet [P] a déposées pour expédition le 3 avril 2015 à la Poste. Or, sur ce bordereau figurent sous les numéros RA 11 et RA 12 les mentions suivantes : 'SARL ICAR, [Adresse 7]' et 'Madame [N] [A], [Adresse 3]'.
L'apposition du cachet de la Poste sur ce bordereau démontre qu'elle a bien reçu deux courriers recommandés avec accusés de réception destinés l'un à la société Icar, le second à Mme [N], à expédier aux adresses susmentionnées et interdit de considérer que ce document constitue une preuve que la SCP d'huissier se serait délivrée à elle-même.
Mme [N] ne saurait utilement soutenir qu'il n'est pas justifié du contenu du pli remis à la Poste le 3 avril 2015, alors qu'il est suffisamment démontré par la date figurant sur le bordereau tamponné par la Poste et par les mentions qui y figurent que c'est bien la signification du jugement querellé qui faisait l'objet de cet envoi.
Il apparaît donc que Mme [N] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que la mention querellée serait fausse.
En conséquence, elle sera déboutée de sa demande en inscription de faux.
- Sur les autres demandes
Mme [W] fait valoir que la requête en inscription de faux est manifestement abusive et dilatoire et que Mme [N] n'a jamais cessé les manoeuvres frauduleuses pour échapper à sa responsabilité. Elle sollicite une somme de 105 000 euros à titre de dommages-intérêts, correspondant au montant réclamé en première instance au titre de son préjudice moral et physique, lequel résulte de l'état d'insalubrité du bien immobilier en cause et de la durée de la procédure imposée par l'appel de Mme [N].
Mme [W] ne justifie pas que la présente procédure en inscription de faux lui a causé un préjudice distinct de celui résultant de l'obligation de se défendre en justice, préjudice qui sera réparé au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sa demande de dommages-intérêts sera donc rejetée.
Succombant en sa requête, Mme [N] sera condamnée aux dépens de l'instance et au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [W] et son fils d'une part, à la société Socris Immobilier d'autre part.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare recevable la requête en inscription de faux.
Déboute Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, de sa demande en inscription de faux.
Déboute Mme [W] de sa demande de dommages-intérêts.
Condamne Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, à payer à Mme [W] et à [O] [I], unis d'intérêt, la somme de 2 500 euros, et à la société Socris Immobilier la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Mme [N], en sa qualité de liquidateur amiable de la société Icar, aux dépens lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,