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10/09/2020 | FRANCE | N°18/03822

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 10 septembre 2020, 18/03822


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



11e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 10 SEPTEMBRE 2020



N° RG 18/03822 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SUI7



AFFAIRE :



SARL TRANSPORTS BÂTIMENTS TRAVAUX PUBLICS





C/

[P] [O] [Y]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Juillet 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MONTMORENCY

N° Chambre :

N

Section : C

N° RG : 16/00721



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL LEJARD ZAÏRE SELTENE AVOCATS



Me Michael GABAY







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPTEMBRE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 SEPTEMBRE 2020

N° RG 18/03822 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SUI7

AFFAIRE :

SARL TRANSPORTS BÂTIMENTS TRAVAUX PUBLICS

C/

[P] [O] [Y]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Juillet 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MONTMORENCY

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 16/00721

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL LEJARD ZAÏRE SELTENE AVOCATS

Me Michael GABAY

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SARL TRANSPORTS BÂTIMENTS TRAVAUX PUBLICS

N° SIRET : 533 266 359

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Tiphaine SELTENE de la SELARL LEJARD ZAÏRE SELTENE AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 112

APPELANTE

****************

Monsieur [P] [O] [Y]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 5] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentant : Me Michael GABAY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC95

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Juin 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

Le 18 mars 2013, M. [P] [O] [Y] était embauché par la Sarl Transports Bâtiments Travaux Publics, ci-après dénommée TBTP, en qualité de conducteur d'engins par contrat à durée indéterminée. Le contrat de travail était régi par la convention des transports routiers et activités auxiliaires.

Le 20 novembre 2013, M. [P] [O] [Y] était victime d'un accident du travail.

A la suite de deux visites médicales des 1er avril et 19 avril 2016, le médecin du travail le déclarait inapte à son poste de conducteur d'engins, en précisant qu'il demeurait apte à un poste sans manutention de charges lourdes et sans travail de bras en hauteur, un poste de type administratif pouvant lui être proposé. Par lettre du 25 avril 2016, la société TBTP lui proposait un poste d'agent d'entretien à temps partiel, que ce dernier refusait.

Le 6 mai 2016, l'employeur le convoquait à un entretien préalable en vue de son licenciement. L'entretien avait lieu le 17 mai 2016. Le 21 mai 2016, il lui notifiait son licenciement pour inaptitude.

Le 18 juillet 2016, M. [P] [O] [Y] saisissait le conseil de prud'hommes de Montmorency en contestation de son licenciement.

Vu le jugement du 20 juillet 2018 rendu en formation départage par le conseil de prud'hommes de Montmorency qui a :

- dit que la rupture de la relation contractuelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la SARL Transports Bâtiments Travaux Publics ' TBTP à payer à M. [P] [O] [Y] la somme de 10 920,24 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- débouté M. [O] [Y] de sa demande formulée au titre du rappel d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;

- rappelé que les intérêts au taux légal courent à compter de la présente décision pour les sommes allouées ;

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'ancien article 1154 du code civil ;

- ordonné à la SARL TBTP de transmettre à M. [O] [Y] un bulletin de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes au présent jugement ;

- condamné la SARL TBTP à payer à M. [O] [Y] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SARL TBTP de sa demande formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL TBTP succombante aux dépens ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision sur le fondement des dispositions de l'article 515 euros du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif.

Vu la notification de ce jugement le 8 août 2018

Vu l'appel régulièrement interjeté par la Sarl TBTP le 6 septembre 2018.

Vu les conclusions de l'appelante, la Sarl TBTP, notifiées le 29 octobre 2018, soutenues à l'audience par son avocat, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Montmorency en date du 20 juillet 2018 en ce qu'il a :

- dit et jugé le licenciement de M. [O] [Y] sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société TBTP à lui verser la somme de 10 920,24 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- ordonné à la société TBTP à lui remettre des documents de fin de contrat conformes à la décision de première instance ;

- condamné la société TBTP à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a :

- considéré qu'il ne pouvait être reproché à l'employeur de ne pas avoir consulté les délégués du personnel ;

- considéré que M. [O] [Y] n'apportait pas la preuve de la connaissance par son employeur de son statut de travailleur handicapé ;

- débouté M. [O] [Y] de sa demande de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ;

- condamner M. [P] [O] [Y] à verser à la société TBTP la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner l'exécution provisoire totale sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile de la décision à intervenir ;

- condamner M. [O] [Y] aux entiers dépens de l'instance qui comprendront les frais d'exécution de la décision à intervenir.

Vu les écritures de l'intimée, M. [P] [O] [Y], notifiées le 7 janvier 2019, développées à l'audience par son avocat, auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé et par lesquelles il est demandé à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [P] [O] [Y] des demandes suivantes :

- juger nul ou à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [P] [O] [Y] en date du 21 mai 2016

- condamner la société TBTP à payer à M. [P] [O] [Y] les sommes suivantes :

- indemnité pour licenciement nul ou à titre subsidiaire ans cause réelle et sérieuse (article L.1226-15 ou L1235-3 du code du travail) : 21 840,48 euros

- rappel d'indemnité compensatrice de préavis : 1 820,04 euros

- congés payés afférents : 182 euros

- intérêts au taux légal à compter de la saisine

- capitalisation des intérêts art. 1154 du code civil

- article 700 du code de procédure civile en cause d'appel : 2 500 euros

- attestation Pôle emploi, certificat de travail et bulletin de paie conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 15 euros/jour et par document

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 26 juin 2020.

SUR CE,

M. [Y] estime que l'employeur aurait dû organiser l'élection de délégués du personnel, dès lors que le seuil d'effectif de 11 salariés a été atteint pendant 12 mois au cours des trois années précédentes. Il reproche donc à l'employeur de ne pas avoir consulté les délégués du personnel en violation des dispositions de l'article L 1226-10 du code du travail. Il estime par ailleurs que la Sarl TBTP a manqué à son obligation de reclassement, soulignant que la seule proposition qui lui a été faite était contraire aux restrictions émises par le médecin du travail dans le cadre de l'avis d'inaptitude.

Il fait valoir que l'indemnisation est due en application de l'article L 1226-15 du code du travail, le conseil des prud'hommes ne pouvait limiter l'indemnisation à six mois de salaire. Il réclame par ailleurs un rappel d'indemnité compensatrice de préavis au regard de son statut de travailleur handicapé.

La Sarl TBTP soutient avoir satisfait à son obligation de reclassement en proposant, en interne, un poste d'agent d'entretien à temps partiel, après consultation du médecin du travail et en sollicitant, en externe, différentes entreprises.

- Sur la consultation des délégués du personnel

Le caractère professionnel de l'inaptitude de M. [Y] n'est pas contesté par la Sarl TBTP.

L'article L1226-10 du code du travail dispose que : « Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise (').

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. »

Par ailleurs, aux termes de l'article L 2312-2 du code du travail, « la mise en place des délégués du personnel n'est obligatoire que si l'effectif d'au moins onze salariés est atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes ».

En l'espèce, l'effectif de la Sarl TBTP a atteint le seuil de onze salariés pendant douze mois non consécutifs entre le 1er octobre 2013 et le 29 février 2016. Comme l'ont pertinemment rappelé les premiers juges, le premier tour de l'élection des représentants du personnel doit être organisé dans les 90 jours de l'affichage par lequel l'employeur doit informer le personnel de l'organisation des élections. Dans ces conditions, le premier tour aurait dû intervenir au plus tard le 31 mai 2016. Or, M. [Y] a été licencié le 21 mai 2016, soit à une date à laquelle l'entreprise était dépourvue de délégués du personnel, de sorte qu'il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas les avoir consultés. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

- Sur la recherche de reclassement

Comme rappelé supra, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de M. [Y] à son poste de conducteur d'engin par avis définitif du 19 avril 2016. Il a néanmoins précisé que le salarié restait apte à un poste de type administratif, sans manutention de charges lourdes, sans travail avec les bras en hauteur.

Pour justifier avoir satisfait à son obligation de recherche de reclassement, la Sarl TBTP verse aux débats :

- cinq courriers qu'elle a adressés à des entreprises tierces exerçant dans le même domaine d'activité le 25 avril 2016, leur demandant d'évaluer leurs besoins en personnel afin de permettre le reclassement de M. [Y], ainsi que la réponse de trois entreprises précisant ne disposer d'aucun poste disponible ;

- le courrier du 25 avril 2016 par lequel l'employeur a communiqué au médecin du travail la proposition de reclassement du salarié en qualité d'agent d'entretien à temps partiel ;

- le courrier de réponse du médecin du travail du 26 avril 2016, par lequel ce dernier se contente de rappeler les préconisations émises lors de l'avis d'inaptitude du 19 avril 2016 ;

- le courrier du 25 avril 2016 par lequel l'employeur a soumis à M. [Y] sa proposition de reclassement en qualité d'agent d'entretien à temps partiel ;

- la réponse que M. [Y] lui a adressée le 3 mai 2016 l'informant de son refus de la proposition de reclassement.

Si, comme le souligne le salarié, la Sarl TBTP ne communique pas son registre d'entrée et de sortie du personnel, l'employeur précise néanmoins qu'il ne disposait, à la date du licenciement, que d'un seul poste administratif occupé par M. [U]. Or, M. [Y], qui ne pouvait ignorer la répartition de l'effectif limité à 12 personnes de cette petite entreprise, ne le conteste pas.

Dans ces conditions, il apparaît que l'employeur justifie avoir satisfait, de manière loyale et sérieuse, à son obligation de reclassement, de sorte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. [Y] sera débouté de sa demande indemnitaire.

- Sur le rappel d'indemnité de préavis

S'agissant du rappel d'indemnité de préavis, la demande du salarié ne peut prospérer, dès lors qu'il ne justifie pas avoir informé l'employeur de son statut de travailleur handicapé. Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de M. [Y].

En revanche, l'équité commande de débouter la Sarl TBTP de sa demande au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris, sauf en celles de ses dispositions relatives au rappel d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que le licenciement de M. [P] [O] [Y] repose sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [P] [O] [Y] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne [P] [O] [Y] aux dépens de première instance et d'appel ;

Déboute la Sarl TBTP de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme Sophie RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 18/03822
Date de la décision : 10/09/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°18/03822 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-10;18.03822 ?
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