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08/07/2020 | FRANCE | N°17/05141

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 08 juillet 2020, 17/05141


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



17e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 8 JUILLET 2020



N° RG 17/05141

N° Portalis DBV3-V-B7B-R5JF



AFFAIRE :



SNC Golf et tennis des [Adresse 7]





C/



[Y] [Z]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : E

N° RG : 16/00370
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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Audrey ALLAIN



Me Marc CHARTIER







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt s...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 8 JUILLET 2020

N° RG 17/05141

N° Portalis DBV3-V-B7B-R5JF

AFFAIRE :

SNC Golf et tennis des [Adresse 7]

C/

[Y] [Z]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : E

N° RG : 16/00370

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Audrey ALLAIN

Me Marc CHARTIER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SNC Golf et tennis des [Adresse 7]

N° SIRET : 487 709 792

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentant : Me Frédéric NAVARRO de l'AARPI ARAGO, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R090 et Me Audrey ALLAIN, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 344

APPELANTE

****************

Monsieur [Y] [Z]

né le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 6]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Marc CHARTIER, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0184

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été fixée à l'audience publique du 7 mai 2020 pour être débattue devant la cour composée de:

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

En application de l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 portant, notamment, adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, il a été décidé par le président que la procédure susvisée se déroulerait sans audience.

Les parties en ont été avisées par le greffe le 29 avril 2020 et ces dernières ne s'y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.

Ces même magistrats en ont délibéré conformément à la loi.

Greffière: Madame Dorothée MARCINEK,

Par jugement du 12 octobre 2017, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) a :

- débouté M. [Y] [Z] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail,

- dit le licenciement de M. [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la SNC Les [Adresse 7] à payer à M. [Z] les sommes suivantes :

. 1 434,93 euros à titre de rappel des salaires retenus pendant la mise à pied conservatoire, outre 143,49 euros de congés-payés afférents,

. 26 313,85 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 9 627,15 euros au titre de préavis outre 962,70 euros de congés-payés afférents,

. 962,70 euros au titre de la prime d'ancienneté sur préavis,

40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [Z] du surplus de ses demandes,

- ordonné la remise des documents sociaux (bulletins de salaire, solde de tout compte, attestation Pôle emploi) conformes au jugement,

- dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer une astreinte,

- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement au-delà des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail,

- dit qu'il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions de l'article 1153-1 du code civil qui fixent les règles de calcul de l'inté rêt légal,

- condamné la SNC Les [Adresse 7] aux entiers dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 1er novembre 2017, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] a interjeté appel de ce jugement.

Le président ayant décidé, conformément aux dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, de procéder selon la procédure sans audience, un avis a été adressé aux parties le 29 avril 2020. Les parties ne se sont pas opposées à cette procédure.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 29 mai 2020.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 19 janvier 2018, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] demande à la cour de :

- confirmer la décision des juges de première instance en ce qu'ils ont décidé que la demande de résiliation judiciaire de M. [Z] n'était pas fondée,

- infirmer la décision des juges de première instance en ce qu'ils ont décidé que le licenciement de M. [Z] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence, de dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [Z] est fondé,

- débouter M. [Z] de toutes ses demandes, fins et conclusions portant sur sa demande de résiliation judiciaire,

- débouter M. [Z] de ses autres demandes fins et conclusions,

- condamner M. [Z] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile,

- condamner M. [Z] aux dépens.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 19 juin 2019, M. [Z] demande à la cour de :

- dire l'appel de la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] mal fondé,

- dire son appel incident bien fondé,

- réformer partiellement le jugement rendu par le conseil de prud'hommes,

en conséquence, statuant à nouveau sur le litige (des chefs critiqués par les parties),

- dire que l'employeur a commis des manquements contractuels graves à son préjudice, en conséquence, dire que la demande de résiliation judiciaire dudit contrat de travail était bien fondée et déclarer, dès lors, que cela produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner de ce fait l'employeur au paiement des sommes suivantes :

. 77 017,20 euros à titre de dommages et intérêts à hauteur de 24 mois de salaires,

. 26 313,85 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 9 627,15 euros au titre du préavis (3 mois),

. 962,70 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 962,70 euros au titre de la prime d'ancienneté sur préavis,

subsidiairement, du chef du licenciement pour faute grave notifié le 19 février 2016,

- dire que ce licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et allouer ces mê mes sommes à ce titre, soit :

. 77 017,20 euros à titre de dommages et intérêts à hauteur de 24 mois de salaire,

. 26 313,85 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 9 627,15 euros au titre du préavis (3 mois),

. 962,70 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 962,70 euros au titre de la prime d'ancienneté sur préavis,

- condamner en outre l 'employeur au paiement des salaires retenus pendant la mise à pied conservatoire à compter du 8 février 2016, jusqu'au 20 février 2016, soit 1 434,93 euros outre 143,49 euros à titre de congés payés afférents,

- condamner l'employeur au paiement de 28 881,45 euros au titre de la clause d'exclusivité abusive subie (3 mois par année de présence, soit 3 209,05 euros x 3ans : 9 627,15 euros x 3),

- condamner l'employeur au paiement de 38 508,60 euros (12 mois) à titre de dommages et inté rêts pour avoir exécuté le contrat de mauvaise foi, pression morale et matérielle, non respect de la CCNG,

- condamner l'employeur au paiement de 21 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale, sur la période non prescrite de 5 ans,

- ordonner la délivrance de bulletins de paie conformes à la décision, le tout sous quinze jours à compter de la notification de la décision et, passé ce délai, sous astreinte de 150 euros par jour de retard,

- prononcer les intérêts légaux à compter de la requête pour les chefs de demande de nature contractuelle et à compter du prononcé du jugement du conseil de prud'hommes pour les chefs de demande de nature indemnitaire,

- condamner l'employeur au paiement de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (pour la procédure devant le conseil de prud'hommes et l'instance d'appel), aux dépens d'instances, frais, droits et débours éventuels d'exécution forcée.

LA COUR,

M. [Y] [Z] a été engagé par la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] en qualité de directeur de travaux, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 janvier 2001.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale du golf.

Au moment de la rupture de son contrat de travail M. [Z] percevait une rémunération brute mensuelle de 3 209,05 euros.

Par lettre du 3 février 2016, M. [Z] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 15 février 2016. Il a été mis à pied à compter du 8 février 2016.

Le 17 février 2016, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail et paiement de diverses sommes.

M. [Z] a été licencié pour faute grave par lettre du 19 février 2016 ainsi libellée :

" 1. Votre comportement agressif et déplacé à l'égard des autres salariés

Ainsi que nous l'avons évoqué lors de notre entretien, nous avons eu connaissance de votre attitude injurieuse et des pressions et incivilités que vous faisiez subir aux salariés qui travaillaient avec vous.

En effet, de nombreux courriers de salariés nous sont parvenus à compter du milieu du mois de janvier 2016 afin de nous alerter sur votre comportement particulièrement nocif et extrêmement inadapté à l'égard de vos collègues [...]

2. Votre dissimulation et Incitation à la dissimulation de faits fautifs à l'égard de la hiérarchie [...]

Il nous a été révélé, par un courrier datant de fin Janvier 2016, qu'une débroussailleuse thermique appartenant à la Société avait disparu mi-novembre 2015. [...]

Les différents témoignages nous ont révélé que vous auriez questionné l'ensemble des salariés du service technique afin de savoir si la machine disparue avait été utilisée à des fins personnelles.

Pourtant, en parallèle, vous avez décidé de cacher cet incident et n'avez jamais mentionné cette disparition auprès de la hiérarchie, qui doit pourtant être en mesure de connaître ce qui se déroule au sein de la Société.

[...]

Nous avons également été alertés par un salarié, courant du mois de janvier 2016, de la présence d'un produit phytosanitaire interdit "Insignio" dans le local phytosanitaire.[...]

Suite à cette alerte Monsieur [L], directeur de l'établissement, a effectué une visite en votre compagnie et celle d'un autre salarié dans le local phytosanitaire. Ce produit, qui est interdit, se trouvait effectivement dans le local.

Vous avez alors sollicité de la part des personnes présentes, parmi lesquelles le directeur de l'établissement, qu'elles passent sous silence cet incident.

[...]

Nous avons également découvert, suite à une visite d'entretien des tondeuses de la part du fournisseur intervenue courant du mois de janvier 2016, que l'une des tondeuses à green était défectueuse. Le rapport que nous avons reçu début février 2016 de la part du fournisseur établit que la défectuosité provient d'une modification manuelle des éléments de sécurité présents sur la machine. [...]

Il semblerait, ce que vous avez nié au cours de notre entretien, que vous ayez eu connaissance de cette défectuosité mais n'ayez pas alerté la direction à ce sujet.

[...]

3. Votre utilisation du matériel de la Société à des fins personnelles

[...]

A titre d'illustration, il apparaît que vous ayez pris l'initiative de prêter au golf de [Localité 8] un aérateur à lame sans en informer votre direction.

[...]

4. L'utilisation abusive de vos prérogatives à l'égard des salariés de votre équipe

[...]

Nous avons été informés, fin Janvier 2016, de la manière dont vous organisiez les plannings, et particulièrement de votre habitude consistant à effectuer en permanence des modifications ne permettant ainsi pas aux salariés de votre équipe de s'organiser dans un délai raisonnable.

Également, il apparaît que vous donniez délibérément des tâches aux salariés de votre équipe très peu de temps avant la fin de la journée de travail obligeant ceux-ci à prolonger leur journée de travail au-delà de l'horaire habituel. ».

SUR CE,

Sur la clause d'exclusivité :

M. [Z] demande de juger que la clause d'exclusivité était abusive car non conforme au droit commun (en ce qu'elle n'est pas indispensable à la protection d'un intérêt légitime de l'entreprise et non justifiée par un contexte professionnel précis ou la nature de ses fonctions) et subsidiairement à la CCNG (art. 4.2.1. dernière rubrique) et de condamner l'employeur au paiement de dommages et intérêts d'un montant de 28 881,45 euros correspondant à l'équivalent de trois mois de salaire par an sur trois ans.

Il explique son préjudice par le fait qu'il aurait souhaité intervenir au moins un jour par semaine en libéral à l'extérieur du golf, de façon à compléter sa rémunération ; que contractuellement, son contrat de travail pour 35 heures lui en laissait largement le temps ; que la clause d'exclusivité l'en a empêché.

Pour sa part, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] se fonde sur l'article L. 1221-1 du code du travail et estime que la validité d'une clause d'exclusivité est admise lorsque la protection des intérêts légitimes de l'entreprise est indispensable ; que les fonctions de M. [Z], qui était directeur de travaux, appelaient au respect de cette clause.

La société conteste par ailleurs le préjudice.

L'article L. 1221-1 du code du travail dispose que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. ».

Il ressort de ce texte, appliqué à une clause d'exclusivité qui par définition porte atteinte à la liberté du travail, qu'une telle clause n'est valable que si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Lorsque les conditions de validité de la clause d'exclusivité ne sont pas respectées, elle est nulle.

En l'espèce, la lettre d'engagement du 2 janvier 2001 (pièce 1 S) prévoit :

« EXCLUSIVITÉ

Vous vous engagez à consacrer votre activité exclusive au service de la société ou de ses filiales et vous vous interdisez donc, pendant la durée du présent engagement, l'exercice de toute autre activité professionnelle libérale ou salariée. Tout manquement à cette obligation constituerait de votre part une faute lourde engageant votre responsabilité personnelle. »

La SNC Golf et tennis des [Adresse 7] n'explique pas en quoi la clause d'exclusivité était indispensable à la protection légitime de ses intérêts et en quoi les fonctions de M. [Z] - directeur de travaux - étaient d'une nature telle qu'une activité de complément visant, comme il prétend qu'il l'aurait souhaité, l'entretien des jardins sous le statut d'auto entrepreneur lui aurait porté préjudice.

Il n'est donc pas établi que la clause d'exclusivité assortissant le contrat de travail de M. [Z] était bien justifiée par la nature des tâches confiées au salarié et proportionnée au but recherché.

A ce titre, la clause est nulle.

Ceci étant précisé, il importe de relever, comme le fait à juste titre l'employeur, que M. [Z] travaillait à temps plein ce qui réduit les possibilités pour le salarié d'exercer une activité professionnelle en dehors du travail qu'il effectuait pour la SNC Golf et tennis des [Adresse 7].

En outre, il apparaît que M. [Z] n'a jamais manifesté son intention de travailler en dehors de la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] et ne produit d'ailleurs aucun élément montrant qu'il aurait souhaité mener un projet entrepreneurial en ce sens.

En définitive, le préjudice qui résulte, pour M. [Z], de l'impossibilité dans laquelle il a été placé de travailler pour son propre compte, se réduit à la perte d'une chance qui, compte tenu des éléments de la cause, sera intégralement réparé par l'octroi d'une indemnité de 1 000 euros.

Infirmant le jugement, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] sera condamnée à payer à M. [Z] la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice, découlant pour lui, de l'existence d'une clause d'exclusivité nulle.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail :

M. [Z] demande la condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 38  508,60 euros (12 mois) à titre de dommages et intérêts pour avoir exécuté le contrat de mauvaise foi, pression morale et matérielle et non respect de la CCNG. Plus précisément, M. [Z] expose que l'employeur a exécuté de mauvaise foi le contrat de travail en raison :

. (1) de ce que l'employeur « stipule abusivement un salaire forfaitaire dans la paie, alors que le salarié n'a pas signé une convention de forfait au sens du droit commun ou de la CCNG » et alors qu'il devait accomplir 55 à 60 heures de travail par semaine qui n'étaient ni décomptées ni payées,

. (2) de ce que l'employeur « bloque la paie de M. [Z] depuis 2008 » alors que d'autres salariés ont vu leur rémunération évoluer de sorte qu'il est victime d'une « situation discriminatoire »,

. (3) de l'augmentation des tâches et sujétions techniques sans accroissement des moyens matériels et humains,

. (4) de ce que les règles de la CCNG sont régulièrement méconnues et que le salarié subit une pression morale au quotidien, caractéristique d'un harcèlement au travail,

. (5) de ce que les obligations de formation et d'adaptation sont méconnues.

En réplique, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] expose :

. sur le salaire forfaitaire : que M. [Z] était payé sur la base de 151,67 heures par mois et qu'il n'était nullement soumis à un forfait en jours,

. sur l'absence d'augmentation et la prétendue discrimination salariale : que M. [Z] a toujours bénéficié d'un salaire conforme au minimum légal et conventionnel,

. sur l'augmentation des tâches : que M. [Z] ne démontre pas la réalité de ce fait et que l'effectif a augmenté,

. sur la violation des règles de la convention collective : que la convention collective du golf n'a été appliquée à la société qu'après son changement d'activité en 2011 ; que le salarié ne démontre aucune carence.

Elle ne développe pas spécifiquement d'argumentation du chef de l'obligation de formation et d'adaptation.

(1) Il apparaît, sur les bulletins de paie de M. [Z] la mention « salaire forfaitaire ». Toutefois, à cette mention est associée le chiffre 151,67 qui correspond aux heures réalisées dans le mois sur la base d'un horaire hebdomadaire de 35 heures. D'ailleurs, à ne s'attacher - comme le fait du reste M. [Z] - qu'au libellé des rubriques de ses bulletins de paie, force est de constater qu'il est assujetti à un horaire de 35 heures. Ainsi, en dépit de la mention « salaire forfaitaire » figurant sur ses bulletins, M. [Z] n'était assujetti à aucun forfait. Il lui était loisible de demander le paiement des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées chaque semaine. Mais il ne forme pas de demande de rappel d'heures supplémentaires et ne fournit aucun tableau récapitulatif sur ce point de sorte que ses allégations se résument à des indications vagues et en tout cas non corroborées par des pièces permettant d'ouvrir un débat contradictoire sur la question.

(2) Le principe de l'égalité de traitement impose à l'employeur d'assurer une égalité de rémunération entre tous les salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. Il appartient d'abord au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une différence de traitement et il appartient ensuite à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence et dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.

M. [Z] compare sa situation à celle de Mme [T], laquelle était cadre (comme lui) et responsable de l'équipe d'accueil, coefficient 300 (puis groupe 6 de la CCNG, là encore comme lui). Plus précisément, il produit des bulletins de salaire de Mme [T] entre décembre 2006 et décembre 2013 (cf. pièce 6 du salarié) et expose que la salariée a bénéficié entre 2008 et 2009 d'une augmentation de 350 euros alors que son propre salaire est resté bloqué.

En bénéficiant, entre 2008 et 2009 d'une augmentation de 350 euros par mois, Mme [T] est passée d'un salaire de 2 090,90 euros mensuels à un salaire de 2 440,90 euros mensuels. Or en 2009, M. [Z] qui n'avait, certes, pas été augmenté comme l'avait été Mme [T], percevait tout de même une rémunération de 2 826,41 euros par mois c'est-à-dire une rémunération très supérieure à la salariée à laquelle il se compare.

Ainsi, les éléments soumis par M. [Z] ne permettent pas de faire présumer une différence de traitement en sa défaveur.

(3) Pour soutenir que le contrat a été exécuté de mauvaise foi « par augmentation des tâches et sujétions techniques, sans accroissement des moyens matériels et humains, mais plutôt par un déficit récurrent », M. [Z] s'appuie sur ses pièces 25 et 26.

La pièce n°25 correspond à la liste du personnel de la société en 2005. Il y apparaît que le service de M. [Z] (entretien des espaces verts) était composé de 11 salariés employés à temps plein. Sans être contesté, M. [Z] expose qu'à l'issue de son contrat et donc en février 2016, son équipe ne comprenait plus que 7 personnes dont 3 en formation. Il sera donc retenu que les effectifs de l'équipe de M. [Z] ont, comme il le soutient, diminué.

En pièce 26, M. [Z] produit un rapport d'activité de la société de l'année 2010. Il en ressort que la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] a mis en 'uvre un « programme bio d'entretien du golf » qui « nécessite aussi plus de travail pour l'équipe d'entretien avec plus d'interventions manuelles ce qui peut conduire à certains moments de forte poussée de la végétation à un état du terrain moins satisfaisant pour les joueurs (herbes dans les bunkers) ». Si, pour 2010, il apparaît que le programme en 'uvre par la société pour l'entretien de ses espaces verts « nécessitait plus de travail pour l'équipe d'entretien », la cour ignore cependant le nombre de personnes qui, en 2010, composait l'équipe d'entretien. Elle ignore aussi si le programme bio d'entretien s'est poursuivi après 2010 dans les mêmes conditions étant incidemment précisé que la en 'uvre du programme bio par M. [Z] est sujette à caution. En effet, en pièce 9, l'employeur produit le courrier en date du 19 janvier 2016 écrit par un salarié - M. [H] - dont il ressort manifestement que des produits incompatibles avec le programme bio étaient utilisés, à tel point que « le label Eve et golf écodurable pourrait nous être retiré ». Certes, le salarié explique la présence de ce produit (un fongicide) en indiquant qu'il pouvait être utilisé par d'autres golfs et que « dans ce contexte, M. [Z] a effectivement laissé en stock ce produit fongicide (') qui s'est finalement retrouvé dans les affaires personnelles de M. [R] (un salarié décédé fin 2014). M. [Z] a agi dans l'intérêt de l'entreprise pour ne pas rendre inutile l'acquisition antérieure de ce produit. Ce qui aurait été un acte fautif de la part de M. [Z], cela aurait été d'utiliser ce produit interdit sur le site de Jardy, mais certainement pas de le conserver dans le but d'aider un autre golf de la chaîne ». Toutefois, aucune des informations données par le salarié ne sont vérifiables par la cour et le seul élément qui reste objectivement vérifiable est celui de la présence d'un produit qui n'avait pas à être utilisé sur le golf.

M. [Z] affirme ensuite que la situation de sous effectif chronique le « conduisait à l'épuisement ». Il ne fournit cependant sur ce point aucun élément.

En définitive, les éléments fournis par M. [Z] ne sont pas susceptibles d'établir la mauvaise foi de la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] dans l'exécution du contrat de travail. Au surplus, il n'apparaît pas que M. [Z] ait alerté sa hiérarchie sur des difficultés qu'il aurait rencontrées dans l'exercice de sa mission du fait d'un manque d'effectif ou d'un accroissement de son travail.

(4) Sur le harcèlement au travail :

L'article L. 1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Sur le terrain de la preuve, il ressort de l'article L. 1154-1 que lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1 le salarié établit des éléments de fait qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il revient donc au salarié d'établir la matérialité de faits, à charge pour le juge d'apprécier si ces éléments, pris en leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Dans la négative, le harcèlement ne peut être reconnu. Dans l'affirmative, il revient à l'employeur de prouver que ces éléments ne constituent pas un harcèlement.

En l'espèce, M. [Z] expose :

. que son contrat de travail n'est pas conforme à la convention collective,

. que l'employeur n'organisait pas d'entretien annuel individuel,

. que l'employeur n'a pas cherché à l'aider à s'améliorer s'agissant de la formation,

. qu'il a dû assurer lui-même le nettoyage du local technique.

Comme le soutient le salarié, qui reproche d'abord à l'employeur une non conformité de son contrat de travail à la convention collective, l'article 4.2.1 de la convention collective nationale du golf du 13 juillet 1998 prévoit :

« 4.2.1 La forme du contrat de travail.

Le contrat de travail est un contrat écrit.

Le contrat de travail doit contenir les mentions suivantes :

- la date et l'heure d'embauche ;

- les coordonnées de l'URSSAF ou de la MSA de rattachement ;

- la convention collective de rattachement ;

- la qualité de l'employeur ;

- la nature du contrat ;

- la qualification du salarié et son groupe dans la grille de classification ;

- le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, notamment les avantages en nature et les modalités de cessation en fin de contrat ;

- les modalités de la période d'essai et du renouvellement éventuel ;

- le lieu de travail et les fonctions, notamment les contraintes de polyvalence et de mobilité ;

- les conditions et la durée de travail ;

- le principe d'attribution du repos hebdomadaire ;

- l'autorisation préalable de l'employeur pour le cumul éventuel avec une autre activité salariée, si l'employeur le souhaite.

Il est rappelé qu'une convention de stage n'est pas un contrat de travail et que les personnes liées avec l'entreprise par une telle convention de stage ne sont pas visées par la présente convention collective.  »

Même si c'est sans être contredite que la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] expose que cette convention collective ne lui est applicable que depuis 2011 et que le contrat de travail de M. [Z] a été signé en 2001, force est de constater que le contrat de travail de M. [Z] ne contient pas toutes les mentions imposées par l'article 4.2.1. susvisé.

M. [Z] reproche ensuite à l'employeur de ne pas avoir organisé d'entretien individuel pour l'évaluer et l'aider à améliorer le fonctionnement de l'équipe. Il en déduit qu'il n'était ni écouté ni évalué alors qu'en application de l'article L. 6315-1 (issu de la loi du 5 mars 2014), il devait bénéficier d'un entretien professionnel individuel tous les deux ans. Il reproche encore à son employeur, au visa des articles L. 6311-1 et L. 6321-1 mais également à celui des articles 9.4 et 9.5 de la convention collective, de ne pas avoir cherché à l'aider à s'améliorer.

De fait, il n'est pas discuté que M. [Z] n'a pas bénéficié d'entretien professionnel de façon régulière.

De même, le salarié n'a bénéficié, tout au long de la relation contractuelle (de 2001 à 2016 soit pendant près de 15 ans), d'aucune formation alors pourtant que le texte de l'article L. 6321-1 du code du travail (quelle qu'en soit la version tout au long de la période contractuelle) oblige l'employeur à assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail et à veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi ; alors encore que, selon la convention collective nationale du golf, « les parties reconnaissent l'importance de la formation professionnelle pour le secteur du golf » (article préliminaire du chapitre IX de la convention « Formation professionnelle ») et qu'en ses articles 9.4 et 9.5 la convention collective organise au sein de la profession, le financement de la formation ; alors enfin que, selon les articles 8.3 et 8.4 de la convention collective, les absences des salariés pour formation sont organisées et, plus spécialement, que l'article 8.4 prévoit que tous les salariés désireux de se former ont droit, sur leur demande, à un ou plusieurs congés d'une durée maximale de 12 jours par an.

Le salarié soutient enfin qu'il était tenu d'assurer lui-même l'entretien du local technique, ce qui est établi par la pièce 31 a) du salarié : attestation de M. [M] (salarié d'une société de nettoyage) qui témoigne ainsi : « J'ai connu M. [Z] qui m'a demandé de prêter la monobrosse et l'aspirateur à eau pour nettoyer l'algéco qui était dans un état de saleté. Il avait du mal à le faire nettoyer par son équipe (ils disaient que ce n'était pas à eux de le nettoyer). C'est pour ça que j'ai prêté le matériel de nettoyage pour que ça nettoie bien l'algéco (...) »

En raison de leur nature, ces faits, même pris dans leur ensemble, ne laissent pas présumer l'existence d'un harcèlement moral.

(5) Il a été vu, ci-avant, que M. [Z] n'avait bénéficié d'aucune formation. Néanmoins, il importe de relever que M. [Z] ne montre pas avoir manifesté le souhait de participer à telle ou telle formation qui lui aurait été refusée par l'employeur. Ainsi, la mauvaise foi alléguée de ce chef par le salarié n'est pas établie.

En synthèse de ce qui précède, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande indemnitaire du chef de la mauvaise foi dans l'exécution, par l'employeur, du contrat de travail. Il sera également confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande fondée sur une inégalité de traitement.

Sur la rupture du contrat de travail :

Sur la demande de résiliation :

Au soutien de sa demande de résiliation, M. [Z] invoque ce qu'il présente comme des manquements contractuels graves et consistant dans les éléments suivants :

. la clause d'exclusivité contraire au droit commun et à la convention collective maintenue par l'employeur alors que ce dernier a été condamné en 2014 par la cour d'appel de Versailles du chef de cette clause abusive,

. le fait que l'employeur stipule abusivement un « salaire forfaitaire » dans la paie, alors qu'il n'a pas signé de convention de forfait au sens du droit commun ou de la CCNG (art. 5.7.1.3),

. le fait que l'employeur bloque sa paie depuis 2008,

. le fait que le contrat est exécuté de mauvaise foi par augmentation des tâches et sujétions techniques, sans un accroissement des moyens matériels et humains, mais plutôt un déficit récurrent,

. le fait que les règles de la CCNG sont régulièrement méconnues et qu'il subisse une pression matérielle et morale, sans être aidé ni même écouté par son employeur.

Pour sa part, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] rappelle que la résiliation judiciaire ne se justifie que si les manquements rendent impossible la poursuite du contrat de travail ce qui suppose, pour les juges du fond, de rechercher si les manquements invoqués présentent une gravité suffisante ; qu'à cet égard, des faits anciens, ponctuels ou isolés et qui n'ont jamais été contestés par le salarié et n'ont pas empêché ce dernier de continuer à travailler, ne peuvent justifier une résiliation ; que tel est le cas en l'espèce.

L'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Lorsque le salarié demande la résiliation du contrat de travail, il doit apporter la démonstration de manquements de l'employeur à l'exécution de ses obligations contractuelles et que ces manquement présentent une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

Si les manquements sont établis et présentent un degré de gravité suffisant, la résiliation est alors prononcée aux torts de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou - si la résiliation est fondée sur des faits de harcèlement moral - d'un licenciement nul. La résiliation produit effet au jour où le juge la prononce si à cette date, le salarié est toujours au service de son employeur (et en cas d'arrêt confirmatif, à la date du jugement de première instance). Si en revanche le salarié a été licencié à la date du prononcé de la résiliation, alors c'est à la date d'envoi de la notification du licenciement qu'est fixée la prise d'effet de la résiliation judiciaire.

Si les manquements invoqués par le salarié ne sont pas établis ou ne présentent pas un caractère de gravité suffisant, alors le juge doit débouter le salarié de sa demande.

En l'espèce, les faits présentés par M. [Z] comme constituant selon lui des griefs susceptibles d'entraîner la résiliation de son contrat de travail ont tous été examinés plus haut dans les paragraphes consacrés à la clause d'exclusivité et à la demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail.

Il a été jugé que M. [Z] était éligible au bénéfice de dommages et intérêts au titre de la clause d'exclusivité. Il a encore été jugé que la mauvaise foi ou le harcèlement allégués par le salarié ne devaient pas être retenus, même s'il a été admis que c'est à raison que le salarié indiquait n'avoir pas fait l'objet d'entretiens et n'avoir pas bénéficié de formations.

En définitive, au rang des griefs présentés par le salarié, ne sont établis que celui relatif à la clause d'exclusivité, celui relatif au défaut d'organisation d'entretiens de carrière et celui relatif au défaut de formation.

La clause d'exclusivité est en vigueur depuis l'origine du contrat, en 2001, et il n'est pas inutile de relever que durant 15 ans, l'existence de cette clause n'a pas empêché la poursuite du contrat de travail. Elle n'a, à tout le moins dans l'esprit de M. [Z], empêché la poursuite du contrat de travail que le surlendemain de son entretien préalable au licenciement (date de la saisine du de prud'hommes), c'est-à-dire à époque où le salarié avait des raisons de penser que son contrat de travail allait prendre fin. Tout comme le manquement de l'employeur à organiser des entretiens avec le salarié et celui relatif au défaut de formation qui, soudainement, sont apparus au salarié comme suffisants pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Pourtant, cette situation durait depuis 2001. Il faut déduire de ces éléments que les manquements de l'employeur ne présentent en réalité nullement une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

C'est donc à raison que le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de ce chef de demande. Le jugement sera de ce chef confirmé.

Sur le licenciement :

M. [Z] conteste la réalité des griefs présentés contre lui tandis que la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] les estime établis et considère justifié le licenciement pour faute grave.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits personnellement imputables au salarié, qui doivent être d'une importance telle qu'ils rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Le licenciement pour faute grave implique néanmoins une réaction immédiate de l'employeur, la procédure de licenciement devant être engagée dans des délais restreints et le licenciement devant intervenir rapidement.

En cas de faute grave, il appartient à l'employeur d'établir les griefs qu'il reproche à son salarié.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe exclusivement à l'employeur et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier, au vu des éléments de preuve figurant au dossier, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail, et d'une gravité suffisante pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise, le doute devant bénéficier au salarié.

En l'espèce, M. [Z] a été licencié pour faute grave en raison de quatre griefs :

. un comportement agressif et déplacé à l'égard d'autres salariés,

. une dissimulation ou une incitation à la dissimulation de faits fautifs,

. une utilisation de matériels de la société à des fins personnelles,

. une utilisation abusive de ses prérogatives à l'égard des salariés de son équipe en ce qui concernait l'organisation des plannings.

L'employeur produit plusieurs éléments montrant qu'il a été alerté, courant janvier 2016, par des salariés du comportement de M. [Z] :

. pièce n°de l'employeur (courriel adressé par une salariée - Mme [W] - à la direction de la société le 31 janvier 2016) : « Je vous fais part (') d'une conversation que j'ai eue avec [I] [X]. Il semblerait que [Y] [Z] ne soit pas du tout respectueux envers les personnes de son équipe. En effet, [I] se plaint de la façon de parler de son supérieur envers lui. [Y] [Z] aurait un ton à la limite de l'agressif ; il lui parle comme une merde. J'ai demandé à [I] si c'est une situation fréquente, ce à quoi il m'a répondu que oui, que c'est presque constamment comme ça. De plus, [Y] [Z] donnerait des tâches à accomplir juste avant la fin de son service. [I] m'a dit qu'il en a parlé avec certains de ses collègues et qu'ils sont d'accord avec lui. (') [I] est épuisé par cette situation. J'ai ressenti dans son ton de la colère, de la saturation et un manque de reconnaissance concernant son travail (...) » ;

. pièce n°10 de l'employeur (courriel adressé par un salarié - M. [N], délégué du personnel - à la direction le 20 janvier 2016) : « Je fais suite à une discussion que j'ai eue avec M. [B] [D] ce jour. Il m'a informé que la débroussailleuse thermique de la société a été volée il y a environ 2 mois et demi, peu après la certification écovert. A l'époque, il en avait référé à son responsable hiérarchique, [Y] [Z] car celui-ci lui avait demandé une tâche qu'il n'a pu effectuer ne la trouvant pas sur site. De plus, il m'a dit que ce dernier l'avait insulté il y a 2-3 ans un jour de neige ou ils déblayaient les terrains de tennis ensemble. Il lui a dit « ferme ta gueule ». [B] n'avait rien dit à la direction ou aux délégués du personnel à l'époque, mais aujourd'hui, il garde encore la douleur de ces mots en lui. Il ne fait plus confiance à son responsable. » ;

. pièce n°6 de l'employeur (courriel du même M. [N] adressé à la société le 31 janvier 2016) : « Ce mail fait suite à une discussion que j'ai eue (') avec [I] [X] des services techniques. Il est venu en tant que délégué du personnel et souhaitait que je remonte la situation au niveau de la direction. Il m'a informé que son responsable [Y] [Z] a eu des paroles déplacées envers lui devant ses collègues de travail en le rabaissant. Il lui a reproché le non-entretien des locaux communs et de son casier en lui parlant d'une manière assez dure sur un ton agressif. Il s'est senti humilié du fait des reproches en public. (') Ce qui a le plus choqué M. [X], c'est le ton employé par son responsable et la présence d'autres collègues de travail.

Il m'a dit que ce n'était pas la première fois que son responsable lui parlait sur ce ton ».

Certains subordonnés de M. [Z] ont directement écrit à la direction pour se plaindre du comportement que ce dernier adoptait à leur endroit :

. Ainsi de M. [X] qui, le 30 janvier 2016, écrivait à son employeur pour indiquer : « le 24/01/16 : d'après M. [Z] je serais une personne irrespectueuse des locaux du service technique. Il m'a notamment été reproché de négliger le nettoyage des locaux communs et de mon atelier.

N'étant là que depuis 2 semaines, ne l'ayant vu que (''') que sur site je ne savais pas qu'il fallait que je fasse tout ça. J'ai (''') mal (''') le fait que cette remarque ait eu lieu devant l'ensemble de l'équipe technique ce jour. Je trouve que j'ai été humilié et rabaissé devant mes collègues. Le 30/01/16 il m'a été reproché d'être quelqu'un de (''') car je n'ai pas eu le temps de nettoyer mon (''') et il m'a dit devant M. [H] et M. [D] « je sais quel type de personne tu es » (...) ». Il témoignait aussi de « l'altercation entre M. [H] et M. [Z] (rabaissement et humiliation) » (pièce n°8 de l'employeur) ;

. Ainsi encore de M. [H] qui, le 19 janvier écrivait ceci à son employeur : « Suite au tour de nos locaux réalisé par M. [L] en présence de moi-même et de M. [Z], il a pu être constaté la présence de produits non autorisés dans notre local phytosanitaire. Sachant que nous sommes avertis qu'un audit surprise aura lieu cette année et que nous avons interdiction d'utiliser ce type de produit, le label Eve et golf écodurable pourrait nous être retiré. Lors de la découverte de ce produit, M. [Z] nous a demandé à moi et ainsi qu'à M. [L], de passer sous silence ce que nous avions vu. Le soir même, M. [Z] est venu récupérer le produit en question pour le mettre dans sa voiture. Par ailleurs, durant la visite, M. [Z] m'a pris à part à côté de l'accueil non loin de Mme [F] afin de me donner des consignes. Il m'a demandé de dire à M. [D] de se taire si jamais il était questionné quant à la disparition de la débroussailleuse par M. [L]. M. [Z] doit rencontrer M. [L] jeudi 21 janvier pour lui annoncer que malgré de nombreuses recherches, la débroussailleuse aurait été dérobée. ('). Je pense être victime d'intimidation venant de la part de M. [Z] qui souhaite me rendre complice d'actes que je n'ai pas commis. Je me demande même s'il ne cherche pas à me nuire lorsqu'il me dit que pour être greenkeeper, poste que j'occupe depuis juillet 2015, il faut avoir fait les écoles nécessaires. Je considère cela comme étant du harcèlement moral, me dévalorisant ainsi que mon travail. Ce comportement me touche vraiment beaucoup car cela me fait douter et remet en question mes compétences. » (pièce n°9 de l'employeur).

M. [P] également salarié de la société et ami de M. [H] (pièce n°7 de l'employeur) atteste en substance de ce que ce dernier souffrait de sa relation avec M. [Z] ; Au point que M. [H] s'en rendait malade et est allé consulter un psychologue, « ce qui l'a clairement sauvé ». Le témoin ajoute avoir réellement eu peur pour M. [H], le comportement de M. [Z] étant selon lui « inadmissible. Il a clairement profité des faiblesses de [A] pour en faire son jouet ».

A propos de M. [H], M [N] (délégué du personnel) indiquait par courriel à son employeur le 31 janvier 2016 : « [A] [H] est venu me trouver samedi 30 janvier 2016 car il se fait harceler par son responsable M. [Y] [Z] depuis plusieurs mois. Il m'a montré les SMS reçus sur son téléphone personnel en provenance de son responsable concernant le travail en dehors de ses horaires de travail notamment tard le soir ou dans la nuit, datant de 22h30 ou 1h du matin. Cela nuit à sa santé, le réveille en plein milieu de la nuit et l'empêche de dormir. Il arrive fatigué au travail. C'est également le cas pour des appels téléphoniques ou il appelle 5 fois de suite jusqu'à ce que [A] décroche. Il se fait disputer par téléphone mais aussi en visu sur son lieu de travail. Ce jour même, il s'est fait interpeller de manière agressive en présence de MM. [D] et [X]. Lui était reproché l'achat de matériel pour le parcours soit disant « ne servant à rien et étant là pour décorer » pourtant validé par le directeur. Il m'a dit que son responsable avait également rabaissé et crié sur MM. [D] et [X]. (') Il m'a avoué être à bout ne supportant plus ce que son responsable lui faisait subir chaque jour. Il ne prend plus plaisir à venir travailler, vient avec la boule au ventre et ne veut plus continuer ainsi (...) » (pièce n°11 de l'employeur).

Dans un autre courrier que M. [H] a adressé à son employeur le 30 janvier 2016, il indiquait : « Je souhaiterais vous faire part de plusieurs altercations dont j'ai été victime devant témoin le 30 janvier 2016 et de ses incidences sur l'équipe technique et sur moi-même. Tout d'abord, j'ai été pris à parti ce matin sur les coups de 7h30 par M. [Z] car je n'avais pas répondu au message qu'il m'a laissé la veille au soir à 22h20. Ces messages sur mon téléphone personnel sont une habitude chez lui et ce à des heures très tardives pouvant aller jusqu'à près d'une heure du matin. Il m'a également reproché de ne pas répondre au téléphone quand il m'appelle alors qu'il a bloqué le mien de sorte à ce que je ne puisse le joindre. (') Plus tard dans la journée, en présence de M. [D] et de M. [X], j'ai essuyé plusieurs critiques et remarques comme quoi je cherchais à le nuire, à lui prendre sa place.

Le ton qu'il a employé était très agressif. Il me reproche également d'avoir effectué des achats qui ne servent à rien ('). D'un autre côté, je ne peux pas réaliser certaines opérations car il fait partir du matériel dans d'autres golfs, sans me demander si j'en ai besoin et sans en parler ('). Il est vrai que je réalise certaines de ces tâches comme les plannings car il me faisait faire certaines semaines de sept jours consécutifs avec des jours de repos mis au hasard et des changements permanents. Je ne pouvais plus prendre de rendez-vous ou organiser mon temps personnel car je ne savais jamais d'une semaine sur l'autre quels étaient mes repos. ('). Tout cet ensemble me pousse

depuis trois mois à consulter un psychologue car je suis à bout. Je n'arrive plus à supporter, encaisser, ces humiliations permanentes, ce harcèlement, le fait d'être rabaissé continuellement devant l'équipe. Cela me fait perdre confiance en moi ('). » (pièce n°14 de l'employeur).

Telles sont les données qui ont été portées à la connaissance de l'employeur entre le 19 et le 31 janvier 2016.

M. [N], en sa qualité de délégué du personnel, entendait provoquer, le 2 février 2016, une réunion extraordinaire le mercredi 3 février « suite aux plaintes de plusieurs salariés envers un autre salarié » (pièce n°15 de l'employeur). Cette réunion a eu lieu le 3 février 2016 et il en a été dressé un compte rendu (pièce n°4 de l'employeur) concluant : « la direction prend bonne note de l'ensemble des éléments indiqués par les DP présents », étant précisé que les éléments en question sont pour une large part repris plus haut dans cet arrêt.

M. [Z] évoque ce qu'il considère comme une « cabale » montée contre lui « par un groupe de jeunes salariés de l'entreprise » ; il conclut au caractère dubitatif du courriel de Mme [W], au fait que M. [N] lui est hostile depuis plusieurs années, au fait que M. [X] surévalue les observations qu'il lui a adressées, au fait que MM. [P] et [H] arrivés récemment dans l'entreprise n'acceptaient pas leur subordination à son égard, au fait que c'est M. [H] qui confectionnait les plannings et au fait que l'attestation de M. [P] est purement subjective. M. [Z] produit par ailleurs plusieurs attestations montrant qu'il entretenait avec d'autres salariés des relations professionnelles très cordiales, sérieuses ou courtoises.

Toutefois, le caractère cordial des relations que M. [Z] entretenait avec d'autres salariés (fut-ce avec un délégué du personnel - [E] [K] - qui était présent à la réunion du 3 février 2016) n'empêche pas le fait qu'il a pu adopter une attitude plus discutable avec d'autres salariés, et en particulier avec M. [X] et [H].

Certes encore, M. [Z] met en avant son ancienneté et estime que s'il « avait été brutal, harceleur ou autre, cela se saurait de longue date » et que « c'est l'employeur qui n'a pas géré correctement la discipline dans l'entreprise, préférant donner crédit à des jérémiades complaisantes de salariés » qui lui étaient hostiles.

Néanmoins, ni la grande ancienneté de M. [Z] ni son passé disciplinaire sans tâche ne sont exclusifs d'un comportement harcelant de sa part. Par ailleurs, les éléments (courriels et lettres) qui ont été portés à la connaissance de l'employeur dans le courant du mois de janvier 2016 ne sont pas de simples « jérémiades » mais font état de faits précis et circonstanciés.

Au contraire, à la lueur des éléments produits, même si certains sont effectivement des témoignages indirects, il apparaît comme établi le fait que M. [Z] a bien adopté à l'égard de certains salariés, notamment M. [H], un comportement déplacé et agressif harcelant auquel il convenait de mettre un terme car il mettait manifestement sa santé en péril.

Sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs de la lettre de licenciement, celui-ci est suffisant et présente une importance telle qu'il rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Certes, M. [Z] expose que la procédure de médiation organisée à l'article L. 1152-6 du code du travail aurait dû être en 'uvre. Cependant, le texte, tel qu'il est rédigé (« une procédure de médiation peut être mise en 'uvre (') ») n'offre qu'une faculté à laquelle les parties sont libres de recourir ou non, étant précisé que le licenciement pour faute grave implique une réaction immédiate de l'employeur, la procédure de licenciement devant être engagée dans des délais restreints et le licenciement devant intervenir rapidement, ce qui a été le cas en l'occurrence.

Il s'ensuit que le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit le licenciement de M. [Z] sans cause réelle et sérieuse. Statuant à nouveau, il conviendra de dire le licenciement de M. [Z] pour faute grave justifié et de débouter le salarié de ses demandes relatives aux indemnités de rupture, à un rappel de salaire sur mise à pied et à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Succombant, fut-ce partiellement, la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] sera condamnée aux dépens.

Pour des raisons d'équité il convient de dire n'y avoir lieu de condamner la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] à payer à son adversaire une indemnité sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel.

En revanche, le jugement sera confirmé en ce qu'il condamne la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] à payer à M. [Z] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile pour les frais exposés en première instance.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] à payer à M. [Z] la somme de

1 000 euros en réparation du préjudice, découlant pour lui, d'une clause d'exclusivité,

DIT le licenciement de M. [Z] pour faute grave justifié,

DÉBOUTE en conséquence M. [Z] de ses demandes relatives à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à une indemnité de licenciement, à une indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, à la prime d'ancienneté sur préavis et à un rappel de salaire sur mise à pied,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

DIT n'y avoir lieu de condamner la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] à payer à M. [Z] une indemnité sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel,

CONDAMNE la SNC Golf et tennis des [Adresse 7] aux dépens.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et par Madame Dorothée MARCINEK, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

Dorothée Marcinek, Clotilde Maugendre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 17/05141
Date de la décision : 08/07/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 17, arrêt n°17/05141 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-07-08;17.05141 ?
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