COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78E
16e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 JUIN 2020
N° RG 17/06391 - N° Portalis DBV3-V-B7B-RZMO
AFFAIRE :
[B] [W]
Madame [P] [L] épouse [W]
C/
SARL [R] GESTION INVESTISSMENT - BGI représentée par son Gérant, Monsieur [V] [R] domicilié en cette qualité audit siège
SA COMMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Juillet 2017 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° RG : 15/08287
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Jean-Pierre TOFANI, avocat au barreau de VERSAILLES,
Me Elisa GUEILHERS de la SCP GUEILHERS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant après prorogation, dans l'affaire entre :
Monsieur [B] [W]
né le [Date naissance 4] 1946 à IDOUCHENE EL KORAIMA SAHEL (Maroc)
de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 8]
Madame [P] [L] épouse [W]
née en 1960 à SAHEL (Maroc)
de nationalité marocaine
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentant : Me Jean-pierre TOFANI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 529
APPELANTS
****************
SARL [R] GESTION INVESTISSMENT - BGI
N° Siret : 303 265 391 (RCS Versailles)
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par son gérant, Monsieur [V] [R] domicilié en cette qualité audit siège
SA COMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER
Le prêt initialement consenti par le CREDIT FONCIER DE FRANCE a été transféré à la COMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER avec les sûretés y attachées, en application des dispositions de l'article L 515-21 du Code Monétaire et Financier ; la gestion et le recouvrement du prêt continuent d'être assurés par le CREDIT FONCIER DE FRANCE en vertu des articles L 515.22 et 23 du Code Monétaire et Financier
N° Siret : 421 263 047 (RCS Paris)
[Adresse 1]
[Localité 6]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Elisa GUEILHERS de la SCP GUEILHERS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 129 - N° du dossier 3e appel
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Septembre 2019, Madame Marie-Christine MASSUET, conseiller faisant fonction de Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller faisant fonction de Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Delphine REYGROBELLET, Conseiller
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO
EXPOSE DU LITIGE
M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] étaient propriétaires de leur logement principal situé [Adresse 2] qu'ils avaient financé à l'aide d'un emprunt contracté auprès de la société Crédit foncier de France, aux droits de laquelle vient la société Compagnie de financement foncier.
Suivant commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 2 avril 2013, la société Compagnie de financement foncier (CFF) a engagé une procédure de saisie immobilière sur les biens et droits immobiliers appartenant aux époux [W].
Par jugement d'incident de vente et vente du 15 janvier 2014, le juge de l'exécution de [Localité 14] a rejeté l'incident soulevé par les époux [W], constaté l'enchère et dit qu'elle emportait adjudication moyennant le prix principal de 99.000 euros , pour le compte de la société [R] gestion investissement ' BGI, marchand de biens.
Les époux [W] ont formé appel de ce jugement. La cour d'appel de Versailles a, par arrêt du 19 novembre 2015, confirmé en toutes ses dispositions le jugement d'incident et de vente rendu par le juge de l'exécution de Versailles le 15 janvier 2014.
Le pourvoi de M. et Mme [W] à l'encontre de cet arrêt a été rejeté par décision de 'rejet non spécialement motivé' de la Cour de cassation du 22 juin 2017, la cour estimant que les moyens invoqué n'étaient pas de nature à entraîner la cassation.
M. et Mme [W] avaient dans l'intervalle attrait par acte d'huissier des 15 et 16 juin 2015, devant le tribunal de grande instance de Versailles statuant au fond, les sociétés Compagnie de financement financier et [R] gestion investissement-BGI aux fins de voir constater ou subsidiairement prononcer la nullité, subsidiairement la résolution de la vente prononcée par le jugement du 15 janvier 2014, à défaut pour l'adjudicataire d'avoir opéré le paiement du prix de l'adjudication dans les deux mois de la vente.
Par jugement contradictoire rendu le 4 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Versailles a :
déclaré recevable l'action de M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W],
débouté M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] de toutes leurs demandes, -ordonné la publication du présent jugement au service de la publicité foncière de Versailles I, portant sur les lots [Cadastre 13] et [Cadastre 5], situés à [Adresse 12] dans un ensemble cadastré section [Cadastre 9] lieudit [Localité 11] pour 14 ares 82 centiares, et section [Cadastre 10], lieudit [Localité 11] pour 37 ares 42 centiares, régi par un règlement de copropriété avec état descriptif de division reçu le 22 avril 1977 par Maître [G], notaire à Paris publié le 20 mai 1977 au 1er bureau des hypothèques de Versailles volume 1763 n°9, suivi d'un acte modificatif reçu le 8 janvier 2007 par Maître [F], notaire à Lyon, publié le 17 janvier 2007 au 1er bureau des hypothèques de Versailles, volume 2007 P n°311 appartenant à la société [R] gestion investissement ' BGI, société à responsabilité limitée au capital de 54.000 euros , inscrite au registre du commerce de Versailles sous le n°B 303 265 391, ayant son siège social [Adresse 3],
condamné M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] aux dépens qui pourront être directement recouvrés par Me Elisa Gueilhers, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
condamné M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] à payer à la société Compagnie de financement foncier la somme de 2.000 euros et à la société [R] gestion investissement ' BGI la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire du présent jugement,
rejeté le surplus des demandes.
Par déclaration en date du 23 août 2017, M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] ont relevé appel du jugement rendu le 4 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Versailles.
Aux termes de leurs conclusions transmises le 19 novembre 2018, auxquelles il et reporté pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions des parties, M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W], appelants , demandent à la cour :
d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
de constater, en application de l'article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution, subsidiairement prononcer, en application de l'article 1654 du code civil, 'la résolution du jugement' de vente rendu le 15 janvier 2014 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Versailles,
En tout état de cause,
débouter les sociétés [R] gestion investissement ' BGI et Compagnie de financement foncier de toutes leurs demandes ;
condamner la société [R] gestion investissement ' BGI à verser à M. et Mme [W], en application de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 5.000 euros pour leurs frais irrépétibles en première instance et une somme de 5.000 euros pour leurs frais irrépétibles en cause d'appel,
condamner la société [R] gestion investissement ' BGI aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Jean-Pierre Tofani, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs conclusions du 3 décembre 2018, auxquelles il et reporté pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions des parties les sociétés [R] gestion investissement-BGI et la Compagnie de financement foncier, intimées, prient la cour :
de confirmer le jugement rendu le 4 juillet 2017 en toutes ses dispositions,
de débouter purement et simplement les époux [W] de toutes leurs demandes ;
de condamner M. et Mme [W] à leur payer 'conjointement et solidairement' la somme de 5.000 euros chacun en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
de condamner M. et Mme [W] en tous les dépens, dont distraction au profit de Me Elisa Gueilhers, membre de la SCP d'avocats Gueilhers et associés, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 4 décembre 2018. L'audience de plaidoiries a été fixée au 25 septembre 2019.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La publication de l'assignation ayant été régularisée en première instance par M. et Mme [W] le 17 mai 2016, soit après la publication par la société [R] Gestion Investissement du jugement d'adjudication le 7 janvier 2016, la recevabilité de l'action des appelants n'est plus contestée.
Sur la demande en constatation de la résolution de la vente par adjudication
Ayant été déboutés de leur demande en nullité de l'adjudication, M. et Mme [W] se limitent à solliciter à ce jour la constatation de la résolution de plein droit de la vente forcée de l'immeuble leur ayant appartenu sis [Adresse 2], pour défaut de paiement du prix de l'adjudication, au visa des articles L. 322-12 et R. 322-56 du code des procédures civiles d'exécution.
Reprenant leur argumentation devant les premiers juges, ils estiment qu'il doit être constaté par la cour que la vente du 15 janvier 2014 est résolue de plein droit depuis le 29 mars 2014, soit à l'expiration du délai de deux mois donné à l'adjudicataire pour régler le prix d'adjudication.
Pour eux, la consignation opérée le 18 octobre 2016 est tardive et ne saurait régulariser la vente.
Aux termes de l'article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution, 'à défaut de versement du prix ou de sa consignation et du paiement des frais, la vente est résolue de plein droit.' L'article R. 322-56 du même code énonce quant à lui que 'le versement au séquestre ou la consignation... du prix auquel est tenu l'adjudicataire en application de l'article L. 322-12 est opéré dans un délai de deux mois à compter de la date d'adjudication définitive, à peine de réitération des enchères. Passé ce délai, le prix de vente est augmenté de plein droit des intérêts au taux légal jusqu'au versement complet du prix ou sa consignation.
Il résulte de la combinaison de ces deux textes qu'aucun délai de consignation n'est stipulé comme s'imposant à l'adjudicataire, les dispositions de l'article R. 322-56 du code des procédures civiles d'exécution se bornant à ouvrir la possibilité au créancier ou au débiteur de demander la réitération des enchères, et de saisir le juge de l'exécution de la procédure afférente. La résolution de plein droit ne peut être encourue dès l'expiration du délai de deux mois, dès lors que l'article R. 322-56, dans sa seconde phrase ainsi libellée : 'passé ce délai, le prix de vente est augmenté de plein droit des intérêts au taux légal jusqu'au versement complet du prix ou de sa consignation', ménage expressément l'éventualité d'un paiement au-delà du délai de deux mois et instaure pour un paiement tardif la sanction de la course des intérêts légaux sur le prix de vente jusqu'à son paiement complet.
Le non-respect par l'adjudicataire du délai de deux mois, - explicable ici au demeurant par les procédures de contestation engagées par les saisis - autorise seulement le débiteur saisi à poursuivre la réitération des enchères après obtention du greffe des saisies d'un certificat de non-paiement et envoi d'une sommation de payer le prix à l'adjudicataire.
Force est de constater que les appelants ne démontrent pas avoir engagé cette procédure spécifique.
Dès lors, la société adjudicataire rapportant la preuve de la consignation par elle du prix de la vente augmenté des intérêts ayant couru jusqu'au 18 octobre 2016, date de la consignation, près d'un an avant le prononcé du jugement entrepris, la régularisation permise par la loi étant intervenue dès le cours de la première instance devant le juge de l'exécution, doit être considérée comme ayant satisfait à son obligation de paiement.
La demande de résolution de plein droit de la vente ne peut qu'être rejetée.
A supposer que cette demande ait pu prospérer- si l'adjudicataire n'avait à ce jour toujours pas réglé le prix et les frais -, il n'est pas inutile de relever qu' un arrêt récent de la Cour de cassation (2ème civile, 23 février 2017, prv.16-13178 ) a rappelé et confirmé que le juge de l'exécution statuant en matière immobilière, est seul compétent pour constater la résolution de plein droit de la vente sur adjudication du fait de l'absence de consignation du prix.
Subsidiairement, M. et Mme [W] sollicitent la résolution de la vente selon le droit commun de la vente, en leur qualité juridique subsistante de vendeurs du bien objet de la saisie.
En l'espèce, c'est pertinemment que les premiers juges ont retenu que l'action en résolution selon le droit commun de la vente ne pouvait être engagée par le vendeur en la personne des débiteurs saisis, ceux-ci n'étant pas vendeurs engagés par une convention amiable avec l'adjudicataire, mais vendeurs contraints par une mesure d'exécution régie par des règles d'ordre public.
Seule demeurait pour les saisis la faculté de solliciter avant l'intervention du paiement du prix la constatation par le juge de l'exécution de la résolution de plein droit de la vente, ce qu'ils n'ont pas fait. Notamment, M. et Mme [W] ne sont pas fondés à invoquer en ce sens la mise en demeure qu'ils auraient formulée dans leurs écritures à une précédente procédure dont l'objet était distinct.
Le jugement entrepris est confirmé en toutes ses dispositions
Sur les demandes accessoires
Au vu des circonstances de la cause et de la situation économique respective des parties, il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux sociétés [R] Gestion Investissement et Compagnie de Financement foncier, la charge des frais irrépétibles de procédure qu'elles ont été contraintes d'exposer en défense à l'appel. La prétention du même chef des appelants est rejetée au vu de la solution du litige.
Succombant en leur recours, M. et Mme [W] supporteront les dépens d'appel comme de première instance.
PAR CES MOTIFS, LA COUR
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Déboute M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] de toutes leurs demandes ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile entre les parties ;
Condamne in solidum M. [B] [W] et Mme [P] [L] épouse [W] aux dépens, qui pourront être directement recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller faisant fonction de Président et par Monsieur Antione DEL BOCCIO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,